Ville de Belfort (Territoire-de-Belfort).

Belfort est une commune française située dans le nord-est de la région Bourgogne-Franche-Comté. Chef-lieu du Territoire de Belfort, la commune comptait 49 519 habitants en 2015. Elle est la principale commune et le cœur urbain d’une agglomération de 105 390 habitants.

Établie dans la trouée de Belfort, la cité est implantée sur une importante voie de communication où les premières activités humaines se manifestent dès la Préhistoire. Cet emplacement particulier joue un rôle important tout au long de son histoire, notamment au XIVe siècle, quand la cité est connue sous le nom de Bellumfortum. Cette situation stratégique au cœur de la trouée de Belfort a fait d’elle une place forte militaire et une cité de garnison aux frontières des mondes rhénan et rhodanien.

Historiquement, elle fait partie de la Haute-Alsace, subdivision de la province historique d’Alsace qui correspond aux actuels départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et du Territoire de Belfort ainsi que le territoire de Landau en Allemagne. La ville a toujours fait partie de l’espace linguistique francophone à l’instar des vallées welches d’Alsace. Après l’annexion de l’Alsace-Lorraine de 1871 à 1918 par l’Empire allemand, l’actuel Territoire de Belfort, alors dénommé « arrondissement subsistant du Haut-Rhin »Note 2, seule partie d’Alsace à n’avoir pas été annexée, demeure détaché puis accède au statut de département en 1922. Le décret du 2 juin 1960 portant sur l’harmonisation des circonscriptions administratives le rattache à la région Franche-Comté plutôt qu’à la région Alsace, décision confirmée en 1982 avec les lois sur la décentralisation qui donnent aux régions françaises le statut de collectivités territoriales.


L’histoire de la ville est une composante essentielle de l’histoire du Territoire de Belfort. Le site du territoire est occupé depuis le Paléolithique. Cependant aucune place notable ne sera visible avant le haut Moyen Âge. La ville a toujours été un point de contact entre le monde rhénan et le monde roman et le territoire qu’elle occupe porte, à juste titre, le nom de Porte de Bourgogne et Porte d’Alsace.

Dès la Préhistoire, le site de Belfort est occupé. Les premières traces d’activités humaines remontent au paléolithique, des éclats de silex datant de 150 000 ans, ont été mis au jour, ce qui correspond à l’époque de l’Homme de Néandertal. Quelques outils datant de Cro-magnon ont été retrouvés. Au mésolithique, la présence de l’Homme moderne est plus probant et les sites se diversifient. Au néolithique, 21 villages sont recensés à proximité de Belfort. Le site des grottes de Cravanche, commune quasi-enclavée dans Belfort, a été révélé en 1876. Il s’agit de l’un des sites locaux les plus remarquables d’où de nombreux objets et squelettes ont été extraits. Ils sont aujourd’hui exposés au Musée d’Histoire et d’Archéologie de Belfort.

Avant la conquête romaine en 58 av. J.-C., la partie est du Territoire de Belfort faisait partie de la Rauracie, le pays des Rauraques, dont le siège était Augusta-Rauracorum (Augst, près de Bâle) puis Bâle, tandis que la partie ouest, dont Belfort et d’autres localités, appartenaient à la Séquanie. En 58 av. J.-C., Arioviste et ses Germains, qui dominaient la région, ont été battus en un lieu que les historiens ne parviennent pas à situer, malgré la description qu’en fait Jules César dans ses Commentaires sur la guerre des Gaules. Ce pourrait être dans la plaine occupée par Belfort. Sous la domination romaine, la trouée de Belfort, lieu de passage entre le bassin du Rhône et la vallée du Rhin, est traversée par deux voies romaines importantes. La voie la plus au sud passe par Mandeure, Delle, Florimont en direction du Rhin, tandis que la plus au nord (Langres-Strasbourg) serpente au pied des Vosges. Des chemins secondaires quadrillent l’actuel Territoire de Belfort et l’un d’eux relie Mandeure, Bavilliers, Belfort, Offemont et rejoint la voie Langres-Strasbourg vers Rougemont-le-Château. Des villas romaines ont été construites à Offemont et à Bavilliers. Des mosaïques et poteries issues de la Villa de Bavilliers sont exposées au Musée d’Histoire et d’Archéologie de la ville.

Des grandes invasions au comté de Montbéliard[modifier | modifier le code]
Pendant la période des invasions barbares, de 250 à 500 environ, la région de Belfort voit s’installer de nombreux Germains de diverses origines comme le montre la toponymie : Francs, Vandales, Alamans, Burgondes. Ils se romanisent rapidement. Le sud de l’Alsace, espace frontière entre les royaumes burgonde et alaman, ne connut guère la tranquillité avant que Charlemagne ne restaure l’ordre qui avait disparu avec l’Empire romain.

Lors de la dissolution de l’Empire carolingien entériné par le traité de Verdun en 843, Lothaire Ier hérite de Belfort et gouverne la Francie médiane. Par le traité de Prüm en 855, la Francie médiane est à son tour dissoute et Belfort échoit cette fois-ci à Lothaire II en tant qu’extrémité sud de la Lotharingie. Le traité de Meerssen en 870 éclate la Lotharingie et l’Alsace dont fait alors partie Belfort qui passe sous l’autorité de Louis II de Germanie puis son fils Louis III de Germanie. Le partage suivant est décrété par le traité de Ribemont en 880 où Charles III le Gros obtient, en récompense de son soutien à son frère Louis III de Germanie contre les héritiers de Louis II de France, des droits sur des terres vosgiennes aux confins de l’Alsace dont Belfort et une partie de la dignité régalienne en Lotharingie. À la suite de la déchéance de Charles III le Gros, l’Alsace (dont Belfort) est intégrée au royaume de France jusqu’à ce qu’Henri l’Oiseleur, roi de Germanie, la reprenne en 923. En 1042, l’empereur germanique Conrad II le Salique fonde le comté de Montbéliard et le donne à son vassal Louis de Mousson et de Bar qui devient le premier comte de Montbéliard d’Altkirch et de Ferrette. À la mort de son fils Thierry Ier de Montbéliard en 1105, le comté revient à Thierry II et le comté de Ferrette et d’Altkirch à Frédéric Ier de Ferrette.

La première mention du château de Belfort a été faite dans le traité de Grandvillars, le 15 mai 1226. Le traité avait pour but de régler un conflit de territoire entre Richard III de Montfaucon et Frédéric Ier de Ferrette. Le château de Belfort est un relais du pouvoir des comtes de Montbéliard et devient progressivement un centre de gravité d’autres seigneuries environnantes, l’ensemble est alors nommé « Terre de Belfort ». En mai 1307, le petit-fils de Richard III, Renaud de Bourgogne, comte de Belfort affranchit la ville de toute corvée et tout servage. L’ensemble est consigné dans la charte de mai 1307. Les lettres d’affranchissement sont cher payées par les habitants du bourg : 1 000 livres estèvenantes, sachant qu’un cheval à l’époque en coûtait 6. Cependant cette franchise ne s’accorde qu’à un espace précis : le château, le bourg et la ville et aux seules personnes présentes lors de la remise de la charte et à ceux que les Belfortains accepteront dans leur communauté. Cela exclut les autres territoires de la « Terre de Belfort » et les paysans qui y sont rattachés. Elle prévoit également un conseil de neuf membres, le « Conseil des Neuf », à qui est confié le gouvernement et le pouvoir judiciaire. Cette « zone franche » nouvellement créée a une incidence sur le développement de la ville. Artisans, marchands ou hommes de tout corps de métier affluent et s’installent en ville. Bien que leurs origines soient incertaines, ils semblent venir de régions assez proches à l’exception du comté de Montbéliard, clause de la charte. La seule exception fut un affranchissement d’un couple par Alix, marquise de Bade en 1362. La grande épidémie de peste noire, qui frappe l’Europe de 1347 à 1349, touche également les campagnes environnantes, réduit d’un tiers le nombre de serfs environnants et accentue l’essor relatif de Belfort. En 1342, l’église de Saint-Denis est transformée en collégiale de 12 chanoines de 8 prêtres et 4 clercs. Ces douze lettrés donnent une réelle stature institutionnelle à la ville malgré sa petitesse.

La ville devient par la suite une possession autrichienne. Alix (marquise de Bade) qui a hérité du château après la mort de sa mère, Jeanne de Montbéliard en 1350, lègue son héritage en 1373 ou 1375 à son neveu Léopold III de Habsbourg qui devient alors seigneur de la ville. En pleine guerre de Cent Ans, Philippe III de Bourgogne dit Philippe le Bon, cherche une entrée dans le Nord Franche-Comté pour faire diversion et reprendre la Lorraine. Antoine de Vergy, alors maréchal de France, engage une attaque avec 4 000 soldats contre Belfort. L’armée met la ville à feu et à sang en juin-juillet 1431. La paix sera retrouvée pour deux ans grâce à la médiation des clercs de Bâle, alors ville de la chrétienté très active. Cependant les tensions restent vivaces avec les Bourguignons. En 1433, la ville subit plusieurs violentes attaques bourguignonnes. Cependant la ville se positionne dans un réseau de communication liée à l’Autriche et jouit aussi de la solidarité des seigneuries locales telles que celles de Thann, Delle, Masevaux, Altkirch et Ferrette à la suite de l’appel de Jean Fouquet de Soppe, bailli de la ville pour la maison d’Autriche. Des travaux de renforcement des défenses sont aussi engagés ce qu’il lui permet de résister aux attaques. La menace pèse toujours et pousse l’Autriche à fédérer ses quinze villes alsaciennes en unissant les bourgeois des villes et les chevaliers nobles. L’« Union des bonnes villes » est scellée le 20 août 1433 par la fondation de deux ordres : le Landschaft ou « Communauté de pays », et la Société de l’écu de Saint-Georges. Il s’agit d’une première volonté des gouvernés d’être associés à la vie politique les concernant. En 1435, la paix d’Arras est signée entre Charles VII du Saint-Empire et Philippe le Bon et minimisent provisoirement la menace bourguignonne. Les assemblées entre villes et chevalerie deviennent de plus en plus fréquentes. En 1436, le Landtag ou diète se réunit régulièrement et intégrera les prélats, le corps religieux. Entre 1439 et 1445, les Écorcheurs de Charles VII de France, conduits par le Dauphin de France, Louis XI, ravagent l’Alsace. La ville est occupée. Les Bourguignons (1424 à 1431), puis les confédérés suisses (1468) feront encore de nouvelles intrusions dans la Porte d’Alsace.

En 1469, les Habsbourg et le duché de Bourgogne concluent le traité de Saint-Omer qui mentionnent l’abandon des territoires de la Haute-Alsace (dont fait partie Belfort) et de la Forêt-Noire contre une certaine somme d’argent de la part des Bourguignons. Ce rattachement n’est que provisoire puisque la Haute-Alsace est rachetée, contre 76 000 florins, par les villes de la « ligue alémanique » (Berne, Bâle, Strasbourg, et Mulhouse) au duc de Bourgogne, Charles le Téméraire, à l’occasion de la signature du « traité de Basse-Union », le 4 avril 1474. Quelques mois plus tard, la guerre de Bourgogne éclate et précipite la fin du duché et de l’État de Bourgogne en 1477, confirmant ainsi la domination de la maison des Habsbourg sur Belfort et l’Alsace.

En 1525 éclate la guerre des Paysans en Allemagne qui s’étendra jusqu’aux marges du Saint Empire. À la suite des idées véhiculées par le réformateur de l’Église Martin Luther, les paysans se révoltent, le 16 avril, partout en Alsace, forcent et pillent les monastères. La bande de Chaux dirigée par Jean André est constituée de quelques milliers d’hommes. Elle se dirige vers Belfort pour rattacher les habitants à leur cause et pour rançonner les chanoines. Alors que les autres bandes dans le reste de l’Alsace sont réprimées, un accord entre Jean André et les Belfortains est conclu le 25 mai. Les pourparlers engagés par la suite entre paysans et nobles ne sont qu’une diversion de la noblesse pour apaiser la contestation. Jean André de Chaux, qui avait fui dans les Vosges, est arrêté, jugé et décapité en 1527. Ainsi au XVIe siècle, Belfort se retrouve à la frontière des mondes catholique et réformateur et voit défiler nombre de Huguenots cherchant refuge auprès des princes allemands acquis à la Réforme protestante ainsi que des mercenaires engagés dans les guerres de Religion. En 1552, Henri II soutient les princes allemands face à l’empereur Charles Quint et prend des positions en Lorraine, notamment Metz, Toul ou encore Verdun. L’Autriche décide alors d’asseoir son autorité sur Belfort, placée en position stratégique pour contrer le monarque français. Les Habsbourg installent alors Jean-Ulrich de Stadion et l’élèvent au titre de Grand Bailli en 1563 en rachetant le gage au seigneur de Morimont. La cité est donc directement administrée par l’Autriche. En 1619, l’archiduc Léopold V d’Autriche-Tyrol fait construire le couvent des Capucins.

Le maréchal de la Ferté s’emparant de Belfort en 1654 de Lucien Mélingue
Les tensions entre catholiques et protestants qui renaissent en Bohême plongent l’Europe dans la Guerre de Trente Ans. Les armées suédoises viennent prêter main-forte aux princes allemands protestants et pénètrent en Alsace pendant l’été 1632. Les villes alsaciennes sous autorité des Habsbourgs tombent une à une. Belfort capitule sans combattre le 5 janvier 1633. La ville est tantôt sous le contrôle suédois, tantôt français et tantôt du Saint Empire. En 1633, un chevalier lorrain libère Belfort au nom de l’Empire. En 1634, les Suédois siègent de nouveau devant Belfort, qui se rend après une longue résistance. À la suite de la défaite suédoise à Nördlingen, la Suède ne peut plus tenir ses positions en Haute-Alsace. Le Traité de Paris, signé le 1er novembre 1634, place les villes alsaciennes, sauf Belfort restant une possession autrichienne, sous la protection de la France. Louis II de Champagne, comte de la Suze, a été nommé par Richelieu gouverneur dans la ville voisine de Montbéliard. Rapidement il prend conscience de l’intérêt stratégique de Belfort ; il en fait le siège et s’en empare dans la nuit du 27 au 28 juin 1636E 21. Gaspard de Champagne, un de ses fils, devient comte de la Suze à la mort de son père en septembre 1636 et hérite de Belfort alors ruinée par la guerre. La population a été divisée par deux et ne dépasse pas les 500 habitants.

Devenu seigneur de Belfort, Gaspard de Champagne érige une fortification moderne, pour l’époque, permettant de protéger le Château par la construction d’un couronné composé de deux bastions, d’un demi bastion et d’une demi-lune. Cet ensemble est appelé par la suite « Couronné du Comte de la Suze ».Il fait réparer l’enceinte, rétablir l’exercice des foires et marchés et réparer les routes et les ponts. Il développe la métallurgie au sud de la ville historique dans le quartier nommé depuis le Fourneau.

En 1648, le Traité de Westphalie met fin aux hostilités. Belfort devient une ville française. En 1651, Gaspard de Champagne rejoint Condé et la Fronde. Finalement c’est le marquis Henri de La Ferté-Senneterre qui reprendra la ville le 23 février 1654 au nom du roi de France.

En décembre 1659, le roi offre Belfort au cardinal Mazarin, dont sa nièce Hortense Mancini hérite deux ans plus tard. La cité est alors pleinement intégrée au royaume de France, tandis que Montbéliard reste une enclave des ducs de Wurtemberg et le reste de la Franche-Comté, espagnol.

Louis XIV alors qu’il séjourne à Toulouse pour préparer son mariage avec l’infante d’Espagne en décembre 1659 signe une lettre de donation du comté de Ferrette et des seigneuries de Belfort, Thann, Altkirch et Issenheim : elle offre une partie essentielle des seigneuries alsaciennes du Sundgau, récemment prises aux Habsbourg, à son Premier ministre, le cardinal Mazarin, habile négociateur des traités de Westphalie. Peu avant sa mort le 9 mars 1661, le cardinal lègue cette principauté alsacienne à sa nièce Hortense Mancini le jour de son mariage le 1er mars, à la condition que son époux Charles-Armand, duc de la Meilleraye, marquis de la Porte, prenne désormais le patronyme de Mazarin et la dénomination noble de “duc de Mazarin”.

L’intendant de la province, Charles Colbert de Croissy, nommé par Mazarin, a déjà restructuré le legs du cardinal. En cinq voyages entre 1661 et 1672, le nouveau duc de Mazarin organise la gestion des biens et droits multiples, d’autant plus facilement que la Régence d’Ensisheim est placée désormais sous la tutelle souveraine des princes d’Alsace méridionale. Le duc Charles-Armand, dévot brouillé avec son épouse après 1667, vit solitaire dans ses terres bretonnes pendant plus de trente ans. Ensuite, les héritiers du couple qui vivent à la cour ou à Paris, délaissent leurs terres du Sundgau confiées à une multitudes d’intendants et de représentants, à l’exception de deux grands voyages inauguraux entre 1713 et 1789.

Quand Vauban découvre Belfort en juin 1675, il donne une description négative de la villotte de cent vingt deux maisons et du château qu’il découvre. Louis XIV l’a missionné pour établir une ceinture de fer sur les frontières du Royaume de France. La nécessité première de Vauban est d’agrandir la ville et de la fortifier pour empêcher des possibles incursions allemandes. Il revient par deux fois à Belfort en 1677 et en 1679 avec le ministre de Guerre Louvois pour organiser le pré carré. En juin 1686, la Ligue d’Augsbourg se crée pour contrer les aspirations annexionnistes du Roi de France. Le grand projet de fortification de Belfort devient une priorité et Vauban s’attèle à la tâche en accélérant les travaux en 1687. Les aménagements gigantesques entrepris, tels que la fortification de la ville en pentagone avec des tours bastionnées, la déviation du canal, dureront jusqu’en 1703.

Le visage de Belfort a totalement changé en quinze ans, la cité a doublé de taille et la population passe de 1 200 à 4 000 habitants. La garnison de plus de 2 500 hommes constitue la majeure partie de la population.

Mais la ville, siège d’une délégation permanente d’Alsace, s’affirme progressivement comme un important centre administratif.François Noblat occupe l’accaparante fonction de subdélégué de 1715 à 1752. Il laisse la charge à celui qui l’a secondé, son neveu François-Bernardin Noblat, en poste jusqu’en 1770.

Autrefois, la grande ville locale était Montbéliard, mais, après une brève conquête par l’armée de Louis XIV, elle est demeurée sous l’égide de sa principauté allemande d’origine. Elle se retrouve logiquement délaissée par l’administration royale et les grandes routes traversant la région vont se croiser au seuil stratégique de Belfort. De ce nouveau nœud routier partent les routes vers Paris, Remiremont, Colmar, mais aussi la ville-république de Mulhouse, Bâle et Porrentruy en Suisse, Montbéliard dans le duché de Wurtemberg.

Par ses prérogatives administratives, judiciaires et militaires, Belfort s’impose au milieu du XVIIIe siècle comme la capitale alsacienne du Sundgau. Ayant assuré la sécurité militaire, les autorités françaises construisent de nombreuses routes, ponts et digues pour contrer les inondations. La route entre Belfort et Lepuix est prolongée par les ingénieurs des Ponts et Chaussées du Roi entre 1753 et 1760 vers le Ballon d’Alsace.

Une des deux pépinières royales d’Alsace est implantée à Belfort, elle fournit des arbres d’alignement et des arbres fruitiers pour les vergers.

En 1719, certaines prérogatives de la charte de 1307 sont rétablies, notamment l’élection du « Conseil des Neuf », mais au lieu d’être renouvelés tous les ans, les conseillers sont élus à vie. Des protestations éclatent et conduisent à l’expulsion de deux conseillers hors de la ville. Ces enjeux politiques sont par la suite davantage des rivalités entre grandes familles de la ville, telles les Antonin, Viellard ou Migeon. Cette oligarchie bourgeoise est parfois plus riche que la noblesse environnante ce qui entraîne des conflits d’intérêts entre la représentation municipale du « Conseil des Neuf » et la représentation ducale, le prévôt François-Bernardin Noblat.

Par le jeu des héritages et descendances, le duché de Mazarin se retrouve en 1777 sous l’autorité de Louise d’Aumont, duchesse de Valentinois par son mariage avec Honoré Grimaldi, duc de Valentinois, prince héréditaire de Monaco. Leur train de vie les pousse à prélever davantage de taxes au comté de Belfort pour faire face à leur endettement. Cette tutelle est difficilement supportable par les Belfortains qui engagent des avocats pour se défendre.

Les procès durent jusqu’en 1788.

La donation au cardinal Mazarin, sur proposition d’un rapport soumis le 17 juillet 1791 à l’Assemblée nationale par le député de Saône-et-Loire Jean-Baptiste Geoffroy, est annulée le 25 juillet 1791, au moment des événements révolutionnaires au nom de la souveraineté nationale.

Les idées de la Révolution française gagnent Belfort. Un cercle de personnalités locales et régionales se crée avec Jean-Baptiste Kléber, son demi-frère Burger, les familles Parisot, Strolz, Antonin et Felemez. Kléber participe activement à la rédaction des cahiers de doléances du comté de Belfort. De ce fait, lui et le chanoine Lubert poussent Marc David Lavie à représenter le comté à l’Assemblée constituante en tant que député du Tiers état. La Grande Peur, qui s’est propagée en France lors de l’été 1789, n’atteint guère Belfort, car la ville n’était pas assez rurale pour connaître les émeutes paysannes et pas assez citadine pour générer un mouvement de sans-culottes important. Lors de la création des départements, le 26 février 1790, Belfort devient chef-lieu de district du Haut-Rhin. Le 21 octobre de la même année, l’affaire de Belfort éclate, scandale dû à quelques soldats du régiment de Lauzun et du Royal-Liégeois. Une quinzaine d’officiers royalistes tentent d’entrer dans l’hôtel de ville. Kléber disperse les trouble-fêtes.

Le contexte de guerre opposant la France révolutionnaire face aux puissances monarchiques européennes, dont l’Autriche, inquiète les Belfortains. Les troupes ennemies se massent à la frontière du Rhin. Des doutes se lèvent sur la neutralité affichée de Frédéric-Eugène, duc de Wurtemberg et prince de Montbéliard. Sous impulsion du conseil municipal, un détachement de troupes de la garnison et la garde nationale de Belfort, deux canons, rejoints par 150 hommes de la garde nationale d’Héricourt se réunissent. Plus de 5 000 hommes se massent devant Montbéliard qui se rend sans combattre, étonné d’une telle incursion, étant donné la position pacifique du prince. Cependant cette entreprise locale est désavouée par deux commissaires du Haut-Rhin. En effet cette agression pourrait avoir des conséquences diplomatiques lourdes, le duché de Wurtemberg pourrait rejoindre activement la coalition monarchique liée contre la France. Or la victoire française à Valmy le 20 septembre 1792 évite à Belfort d’être sanctionnée et permet aux idées de la Révolution de gagner les Montbéliardais.

Au début du Consulat en 1800, Belfort est une sous-préfecture du Haut-Rhin. La défaite de l’Empire napoléonien à Leipzig entraîne l’occupation de Belfort, due à sa position de voie de communication. Le 24 décembre 1813, l’armée bavaroise s’installe devant la cité, elle est rejointe par des Autrichiens, des Cosaques et des Hongrois. Le siège est le plus long et un des plus durs que la ville ait connus, 113 jours sans ravitaillement. Le commandant Jean Legrand qui défend la ville se rend le 12 avril 1814. La ville est alors occupée par les armées autrichiennes jusqu’en juin 1814. En mars 1815, Napoléon Ier s’échappe de l’île d’Elbe et reprend temporairement le pouvoir en France, la défense du Rhin est confiée au général Claude Jacques Lecourbe. Face aux armées autrichiennes, il résiste pendant 15 jours, du 27 juin au 8 juillet 1815. La défaite de Napoléon à Waterloo entraîne la cessation des hostilités à Belfort qui n’a subi que de faibles dégâts. La ville évite ainsi une nouvelle occupation.

En 1822, un complot, qui part de Belfort, vise à détrôner le roi Louis XVIII ; cette tentative avorte. Le général François Nicolas Benoît Haxo est chargé de fortifier les défenses de la frontière dont Belfort. Il réalise le camp retranché aux monts de la Justice et de la Miotte. Les travaux du fort de la Justice commencent en 1826 et ceux du fort de la Miotte en 1831 après la venue du roi Louis-Philippe Ier à Belfort. Haxo renforce également la citadelle en créant des enceintes supplémentaires élargissant de fait la place forte de la citéE 29. Il remplace l’ancienne caserne construite par Vauban par une nouvelle à l’épreuve des bombes. Ces aménagements font appel à une importante main d’œuvre pendant les vingt années que durent les travaux, entraînant une augmentation de population d’un millier d’âmes qui stimule le commerce. Ce nouvel essor décline lors de l’épidémie de choléra subie par la cité en 1832. La ville reste une sous-préfecture et le premier Journal hebdomadaire de la ville et de l’arrondissement de Belfort est publié en 1831E 30. Bien que ce journal soit apolitique, il reflète l’intérêt des Belfortains pour la vie politique. Les libéraux modérés dominent la ville et sont partisans de la monarchie constitutionnelle.

La IIIe République est proclamée deux jours après la défaite de l’empereur Napoléon III à Sedan le 2 septembre 1870. Le Colonel Pierre Philippe Denfert-Rochereau est alors nommé par le ministre de la Guerre Léon Gambetta, commandant de Belfort, le 17 octobre 1870. Les deux hommes croient en une possible victoire face à la Prusse et poussent la résistance à outrance. Les armées du général Udo von Tresckow encerclent la ville dès le 4 novembre et le 3 décembre tirent les premiers obus. Avec une garnison de 15 000 hommes Denfert-Rochereau doit résister à 40 000 Allemands. Au lieu de s’enfermer dans la place, il en dispute toutes les approches. Cette lente retraite vers le réduit prend 1mois. L’ennemi a mis en batterie 200 gros canons qui, pendant 83 jours consécutifs, tirent plus de 400 000 obus, soit 5 000 obus par jour. Mais la résistance ne fléchit pas. Le 28 janvier 1871, Paris capitule et la convention d’armistice est arrêtée entre Otto von Bismarck et Jules Favre, ministre des affaires étrangères du gouvernement de la Défense nationale.
Cependant Denfert-Rochereau poursuit la résistance malgré les morts, le manque de ravitaillement et les maladies, tel le typhus. Après 103 jours de siège, sur ordre formel du gouvernement, le colonel Denfert-Rochereau consent à quitter Belfort le 13 février 1871 avec sa troupe. Plus de 100 000 projectiles ont été lancés, laissant la ville dévastée. Avec le traité de Francfort négocié entre Otto von Bismarck, alors chancelier de l’empereur Guillaume Ier d’Allemagne et Adolphe Thiers, chef du pouvoir exécutif français (il devient président de la République française fin août 1871), le 10 mai 1871, la majeure partie de l’Alsace et une partie de la Lorraine sont annexées à l’Empire allemand. Belfort ayant été invaincue, Bismarck consent à ce que seul l’arrondissement de Belfort, situé alors dans le département du Haut-Rhin, reste français. On fait de Belfort le chef-lieu d’un territoire, minuscule, mais dont l’importance économique va devenir considérable. Un préfet est nommé dès le 14 mai, faisant du Territoire de Belfort un département de facto.

Les Prussiens quittent la ville le 2 août 1873 et, un an après, on entreprend la construction des forts du Système Séré de Rivières, dont le fort du Salbert, autour de la place fortifiée de Belfort. Ils seront achevés vers 1885. En 1875, Bartholdi s’attèle à la réalisation du Lion de Belfort qui symbolise la résistance de la ville pendant le siège de la ville en 1870-1871. Son œuvre sera achevée en 1879.

La ville connaît une hausse significative de sa population grâce à l’arrivée d’immigrés alsaciens dont la plupart suivent les activités économiques déplacées pour conserver leur accès au marché français, quelques-uns, plus rares, refusant l’annexion. Jusqu’en 1870, Belfort était moins peuplée que Thann ou Luxeuil. De 1870 à 1914, la population passe de 8 000 à 34 000 habitants. Les deux tiers des nouveaux venus sont originaires d’Alsace. Paul Lévy écrit : « À ce moment encore on y entendait des chefs d’usine interpeller leurs ouvriers dans le plus pur dialecte de Mulhouse, et, dans les rues, des yô [=ja] dont le circonflexe s’allongeait à n’en plus finir, et des jurons d’Alsace sonores comme des tambours, tandis que le Mülhauser Tagblatt arrivait tous les jours par ballots. Le lycée s’y recruta en partie parmi les enfants des communes allemandes du voisinage, qui venaient en foule y apprendre le français. ». En 1879, plusieurs sociétés industrielles alsaciennes installent à Belfort des établissements qui leur permettront de conserver l’accès au marché français dont la Société Alsacienne de Constructions Mécaniques (SACM), fabriquant des locomotives, moteurs et alternateurs qui deviendra ALS-THOM en 1929 puis ALSTHOM, et depuis 1998 Alstom, ainsi que l’entreprise DMC (Dollfus-Mieg et Compagnie) spécialisée dans l’industrie du textile. Cet important apport alsacien explique que les patronymes alsaciens soient aujourd’hui extrêmement communs à Belfort et dans les environs (par exemple, l’un des ex-présidents du Conseil général se nomme Yves Ackermann, l’un des ex-maires de Belfort, Étienne Butzbach, l’un des deux députés du département, Zumkeller…).

C’est durant la période 1904-1905 qu’Eugène Lux réalise le marché couvert de Fréry sur le modèle des Halles de Paris.

Avec la Première Guerre mondiale, Belfort connaît son quatrième siège en l’espace d’un siècle. La place, de nouveau fortifiée quelques décennies plus tôt, accueille à l’aube de la guerre les 35e et 42e régiments d’infanterie, rejoints par les 171e et 172e régiments d’infanterie, doublant les effectifs. Lorsque la guerre éclate, les Allemands violent la neutralité belge pour attaquer directement Paris. Ils voulaient éviter d’attaquer à la frontière alsacienne fortement protégée par le Séré de Rivières des places fortes de Verdun, Toul, Épinal et Belfort. De fait, les 35e et 42e régiments d’infanterie marchent vers Mulhouse qu’ils prennent par deux fois mais sont rapidement repoussés. Le front se stabilise au sud du Sundgau pour s’y enterrer jusqu’en 1918. Belfort se prépare dès le lendemain de la mobilisation à la guerre. Le général Frederic Thevenet (1851-1927) fait évacuer les populations les plus exposées, ainsi que les ressortissants étrangers et représentants d’entreprises suspectées de traiter avec l’ennemi. Un laisser-passer est instauré pour les Belfortains restant sur place. La ville sera une ville de ravitaillement, qui vivra pendant quatre ans au rythme des soldats, des blessés et des convois funéraires. L’Union sacrée jouera son plein dans la ville où toutes les synergies militaires et civiles sont activées pour résister. Les usines SACM auront produit cinq millions d’obus, fabriqués par deux équipes fémininesE 34. Bien que les combats aient lieu à 15 km, Belfort est régulièrement bombardée par l’aviation, nouvelle arme militaire, et un canon longue portée, le langer Max, situé à Zillisheim. La fin de la guerre le 11 novembre 1918 se traduira par une « fête nationale, […] même internationale, étant donné la présence des Américains ».

La commune a été décorée 6 janvier 1920 (remise le 20 juillet) de la croix de guerre 1914-1918.

Le rattachement de l’Alsace à la France pose de nouveau le problème du statut de Belfort : est-ce que la ville doit réintégrer le Haut-Rhin ? Administrativement, elle dépend depuis 1871 de Besançon pour les services de l’Éducation nationale et de Vesoul pour la Poste et les services fiscaux. De même les paroisses belfortaines ont été rattachées à l’archevêché de Besançon. De plus la législation applicable dans le Haut-Rhin, pour partie héritée de celle allemande, mais qui surtout n’a pas connu les évolutions du droit français depuis 1871 et notamment la Loi de séparation des Églises et de l’État, diffère de celle s’appliquant à Belfort. En outre, Belfort aurait été déclassée de préfecture à sous-préfecture. Enfin, les élus locaux se seraient sans doute peu satisfaits de perdre l’autonomie politique acquise, et que soient prises à Colmar les décisions les concernant. Pour ces raisons, le Territoire de Belfort devient, en mars 1922, le 90e département.

Le 3 mai 1936, le Front Populaire remporte les élections législatives et Léon Blum est nommé président du Conseil. La série de mesures sociales prises par les accords Matignon, signés dans la nuit du 7 au 8 juin de la même année connaissent un écho particulier à Belfort. Fortement industrialisée, la ville connaît d’importants mouvements de grève, notamment dans les usines Alsthom, à l’usine à gaz (centrale électrique), ce qui prive même la ville d’électricité, et à DMC. Ce mouvement s’est même étendu aux grands commerces comme les Galeries modernes, futures Galeries Lafayette et au magasin Monoprix. Les employés de l’usine à gaz obtiennent, à titre d’exemple, une troisième semaine de congés payés, alors que les accords de Matignon n’en prévoyaient que deux.

Après la défaite française, Belfort fait partie de la zone occupée et subit l’occupation allemande. Le secteur de la gare, nœud de communication ferroviaire, est régulièrement bombardé par l’aviation américaine engendrant des dégâts collatéraux, le quartier de la Pépinière sera presque entièrement détruit. Le ravitaillement est relativement assuré pendant l’occupation, cependant la stagnation du front en septembre 1944 complique la situation. À la fin du mois d’août, le gouvernement de Vichy se réfugie dans le Territoire, le maréchal Philippe Pétain s’installe à Morvillars et Pierre Laval, son premier ministre, à Belfort même. Les miliciens et collaborateurs, qui les accompagnent, commettent des exécutions sommaires et autres actes mafieux au mois de septembre. La Gestapo s’installe faubourg des Ancêtres, arrête, torture et exécute le résistant Henri Veit. Les Alliés sont stationnés depuis le 16 septembre sur la ligne de front Ronchamp-Pont-de-Roide-Vermondans.

Quatre convois de déportation ont quitté Belfort fin août 1944 vers l’Allemagne. Le 15 août 1944, les prisonniers politiques et alliés arrivés de l’ouest de la France par le convoi de Langeais et ceux du sud-ouest de la France sont internés au fort Hatry dans l’attente d’une déportation vers l’Allemagne. Ils resteront près de 15 jours enfermés dans la caserne avant d’être déportés en Allemagne par quatre convois :

le 26 août, 278 hommes sont déportés à Natzweiler puis Dachau42.
le 29 août, 702 hommes vers le KL Neuengamme43
le 1er septembre, 188 femmes sont déportées vers Ravensbrück44.
un autre convoi de plus de 400 prisonniers alliés (Américains, Anglais et Canadiens) est aussi acheminé pendant cette période vers l’Allemagne.
Entre le 24 août et le 29 août 1944, 241 prisonniers sont libérés par petits groupes dans la ville

le 5 septembre, 176 hommes sont déportés vers Buchenwald. Le 3 octobre, 60 détenus à la caserne Friedrich sont déportés vers Buchenwald. Le 17 novembre, un dernier transport de 89 hommes est dirigé vers Gaggenau, situé en Pays de Bade près de Rastatt au sud de Karlsruhe.
Afin d’éviter que les jeunes belfortains ne les rallient, ils sont réunis sous un prétexte au fort Hatry et raflés le 14 septembre 1944 pour être affectés au travail forcé dans les usines allemandes. Ils ne retourneront en France que peu avant la capitulation du Troisième Reich, le 8 mai 1945. La Première armée française dirigée par le général Jean de Lattre de Tassigny est obligée de maintenir le front en attendant la réfection des voies de communication pour permettre le ravitaillement des armées. À la suite du renoncement de Tassigny dans les Vosges le 17 octobre, le général décide de reprendre le plan initial en libérant en premier lieu Montbéliard. Cette ville sera libérée le 17 novembre à la suite d’un plan secret établi par de Lattre de Tassigny laissant la voie ouverte à la libération de Belfort. Cependant le fort du Salbert, au nord-ouest de la ville, bloque l’accès à la ville. Le 19 novembre, une attaque est entreprise contre le fort. Pendant la nuit, 1 500 hommes des Commandos d’Afrique, armées de mitraillettes et de grenades, infiltrent la forêt du Salbert, supprimant silencieusement sur leur passage les postes de garde allemands. Les fossés sont descendus à la corde, les remparts escaladés à l’aide d’échelles démontables. Après cinq heures de marche, la colonne surprend la garnison du fort et la maîtrise rapidement. Le 20 novembre, à l’aube, dévalant les pentes du Salbert, les commandos, bientôt suivis des chars, pénètrent dans Belfort. Après deux jours de combats de rues, Belfort est libérée, le 25 novembre 1944. Le Territoire sera totalement libéré trois jours plus tard.

La commune a été décorée, le 30 juin 1948, de la Croix de guerre 1939-1945 avec palme de bronze.

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Sources : Wikipédia, YouTube.

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