Ville de Tlemcen (Algérie).

Tlemcen (en arabe : تلمسان ; en berbère : ⵜⵉⵍⵉⵎⵙⴰⵏ, Tilimsan), est une commune de la wilaya de Tlemcen, dont elle est le chef-lieu. Elle est située au nord-ouest de l’Algérie, à 520 km à l’ouest d’Alger, à 140 km au sud-ouest d’Oran et, proche de la frontière du Maroc, à 76 km à l’est de la ville marocaine d’Oujda. La ville est érigée dans l’arrière-pays, est distante de 40 km de la mer Méditerranée.

Ancienne capitale du Maghreb central, la ville mêle influences berbère, arabe, hispano-mauresque, ottomane et occidentales3. De cette mosaïque d’influences, la ville tire le titre de capitale de l’art andalou en Algérie. Selon l’auteur Dominique Mataillet, divers titres sont attribués à la ville dont « la perle du Maghreb », « la Grenade africaine » et « la Médine de l’Occident ».

Le territoire de la commune de Tlemcen est situé au centre de sa wilaya. Elle est située à 141 km au sud-ouest d’Oran, à 547 km à l’ouest d’Alger, à 310 km au nord d’Aïn Sefra, à 91 km de Sidi Bel Abbès et 569 km de Béchar.


La proche région de Tlemcen a été habitée à l’époque néolithique. Les grottes situées dans la proximité et les artefacts découverts témoignent de la présence humaine dès l’époque préhistorique, ce dont témoigne la découverte en 1875 par Gustave-Marie Bleicher de haches polies dans les grottes de Boudghène. En 1941, M. Estaunié a mis au jour, à Bab El Qarmadin, un magnifique polissoir néolithique actuellement conservé au musée de la ville.

Il existe trois gisements préhistoriques importants dans la région : le lac Karar à 1 km au sud de Remchi, les abris sous roches de la Mouilah à 5 km au nord de Maghnia et le gisement dit « d’Ouzidan » à 2 km à l’est d’Aïn El Hout. Les abris de la Mouilah et de Boudghène présentaient les meilleures conditions d’habitat pour l’homme préhistorique qui s’y est fixé durablement.

À la fin du IIe siècle, au début de l’ère sévèrienne, un castrum romain est installé sur un piton rocheux qui domine la plaine de Chetouane. Son nom de Pomaria signifie « vergers » en latin, sans doute en référence à la plaine fertile qu’il domine. Ce camp, qui est créé en même temps qu’Altava et Numerus Syrorum, avait pour rôle de surveiller les confins de la Maurétanie. C’est l’acte de naissance d’une cité qui va jouer un rôle religieux puisqu’elle devient le siège d’un diocèse chrétien : l’évêque Victor, qui y officie, joue un rôle important au concile de Carthage de 412.

En 429, les Vandales, un peuple germanique venant d’Andalousie, débarquent à l’embouchure de la Moulouya et s’emparent de la Maurétanie, mais ils ne contrôlent que la côte ; une principauté berbère s’érige autour de Pomaria, qui prend alors le nom berbère d’Agadir. C’est une période caractérisée par l’apparition de principautés berbères dirigées par des seigneurs locaux, probablement par la tribu des Ifran. Elle dure 120 ans, jusqu’à ce que les Romains revenus d’Orient reprennent le pays.

Les seuls vestiges connus de cette époque sont des pierres tombales enchâssées dans la structure du minaret d’Agadir. Plusieurs épitaphes chrétiennes tardives (Ve et VI° siècles) ont été découverts. Plusieurs auteurs arabes médiévaux évoquent les constructions antiques de la ville.

Selon Ibn Khaldoun, la région est avant l’arrivée des Omeyyades le royaume des Zénètes, dont les Banou Ifren et les Maghraouas, des tribus qui mènent une vie pastorale et rurale. Le même auteur signale que les Maghraouas ont été les premiers Berbères à discuter avec le calife Othmân ibn Affân lors de l’avènement de l’islam ; Ouezmar Ibn Saclab fut leur premier ambassadeur auprès du calife qui le désigne pour gouverner les Zenètes. Toujours selon Ibn Khaldoun, à la suite d’Ibn al Raqiq, Tlemcen est conquise par Abou el Mohajir Dinar, successeur de Oqba. En souvenir de ce passage, une source porte encore le nom d’Aïn el Modjir à l’époque d’Ibn Khaldoun qui vécut un temps à la cour des souverains de Tlemcen au XIVe siècle.

En 765, dans la mouvances d’autres tribus berbères sur l’ensemble du Maghreb, les Banou Ifren s’insurgent en 765 et somment d’autres tribus de se convertir au kharidjisme. Ils proclament calife leur chef Abou Qurra qui constitue un royaume kharéjite sufrite à Tlemcen. Abou Qurra prend la tête d’une armé de 40 000 hommes et assiège Tobna où le général abbasside Omar Ibn Hafs est retranché avant de se mettre en campagne sur Kairouan. Il cerne cette ville mais échoue à la prendre. Abou Qurra et ses Beni Ifren regagnent Tlemcen. Il ne reste comme vestige de cette période que le nom d’une porte occidentale de la ville, appelée Bab Abu Qorra (aujourd’hui Qorrane) mais c’est à l’occasion de cet épisode historique que la cité entre dans l’histoire du Maghreb. Elle passa ensuite sous le pouvoir de la dynastie des Banou Khazar.

Abd al-Rahmân Ibn Rustom, kharidjite crée un État ibadite englobant l’Ifriqiya. En 760, il est attaqué et vaincu par le gouverneur d’Égypte. Il abandonne l’Ifriqiya aux armées arabes et se réfugie dans l’Ouest algérien où il fonde Tahert en 761 qui devient la capitale du royaume rostémide.

L’assise de l’imamat rostémide de Tahert repose sur les tribus berbères du Maghreb central acquises à la doctrine kharidjite et va s’étendre de Tlemcen à l’ouest aux monts du Hodna à l’est. Tlemcen et sa principauté suffrite deviennent une marche du Maghreb central rostémide, partageant une obédience kharéjite proche et opposée à l’orthodoxie de Kairouan.

La ville joue un rôle important lors de la conquête de la péninsule Ibérique puisque c’est dans cette ville que Tariq ibn Ziyad retient en otage les enfants du comte Julien.

À l’est, le nouveau pouvoir des chérif idrissides menace le domaine des Rostémides. Après avoir soumis le nord du Maghreb extrême, Idriss Ier franchit la Moulouya et pénètre au Maghreb central jusqu’à Tlemcen. Son intention est alors de conquérir la région orano-tlémcenienne jusqu’alors dans l’obédience kharidjite du Maghreb central. En 790, Idrîss Ier obtient de Mohammed Ibn Khazar, émir des Zénata, la possession de la cité et, après un séjour de quelques mois pendant lequel il pose les fondements de la mosquée-cathédrale, reprend la route du Maghreb el-Aksa (actuel Maroc). Sous les Idrissides, la ville se dote d’une enceinte défensive qui s’ouvre par cinq portes. Al-Bakri la décrit comme « une grande ville qui possède des bazars, des mosquées, des moulins et même une église fréquentée par les chrétiens. Elle est un point de réunion pour les marchands de tous les pays et n’a jamais cessé d’être la demeure des hommes savants dans la loi et la tradition… ».

Dans la marche orano-tlemcenienne le retour au kharidjisme est important et encouragé par les Rostémides, la conquête d’Idriss est éphémère. Idriss II lance une autre expédition vers 805 pour reprendre Tlemcen mais n’ose pas affronter les Rostémides et Tahert directement. Il conclut un accord avec les Aghlabides de Kairouan pour prendre l’État kharidjite en tenaille. Les Aghlabides lui reconnaissent en échange le droit moral d’occuper Tlemcen. La région est encore perdue par les Idrissides. À la mort d’Idriss II, son fils aine Mohamed concède à son frère Souleiman la charge de reprendre et de gouverner la région : cette entente est à la base de la création d’un royaume Soleïmanides compris entre Tlemcen et le Chélif et dont le but est de miner l’autorité morale des kharidjite au Maghreb central. Cependant cette politique centrée sur les chérif échoue : ces derniers au Maghreb central ou au Maghreb extrême se replient entourés de notables arabes dans les villes, et laissent graviter autour des centres de pouvoir des tribus berbères de facto indépendantes. Le pays orano-tlemcénien était contrôlé par les tribus zénatiennes, Maghrawa et Banu Ifran.

Les sources numismatiques concourent à apporter des nuances à l’interprétation énoncée par Ibn Abi Zar de l’ère mérinide, qui fait mention d’une période idrisside. Trois pièces de monnaie, n’appartenant pas à l’époque idrisside et datées respectivement de 796-797, 806-807 et 813-814, apportent la preuve que Tlemcen ne se trouvait pas sous la domination idrisside quelques années seulement après la prétendue conquête d’Idrīs Ier. Bien qu’Idrīs Ier ait peut-être visité Tlemcen, son autorité semble n’y avoir été que temporaire et de manière fugace, n’ayant pas laissé de traces dans le domaine numismatique.

Par la suite, Idris II prend possession de la ville en 814, mais il ne s’agit plus d’une conquête, mais plutôt d’une visite de caractère officiel. Avant cette visite, une pièce de monnaie portant le nom d’un individu nommé al-Layṯ témoigne à nouveau que la domination idrisside n’était pas pleinement reconnue. En revanche, après la venue d’Idrīs II, deux dirhams frappés respectivement aux années 822-823 et 827-828 sont émis en son nom à Tlemcen par Muḥammad b. Sulaymān.

Quant à l’inscription de la mosquée d’Aghadir, le récit s’appuie sur un témoignage oral datant du XIIe siècle, visant à renforcer la crédibilité du récit. Toutefois, il est à noter que ces deux mentions concernant la mosquée de Tlemcen sont introduites pour la première fois par Ibn Abi Zar et qu’aucune source antérieure à la période mérinide ne vient corroborer ces assertions, qui ont ensuite été reprises par des historiens ultérieurs.

Les Rostémides et les Soleïmanides assistent de fait au morcellement de leur territoire qui tombe aux mains de chefferies berbères. Une tribu en particulier, les Sanhadja Talkata, exerce une suprématie sur les autres tribus grâce à son nombre, son armée et la qualité de son chef : Menad père d’un certain Ziri, fondateur de la dynastie des Zirides.

En 931, l’allié des Fatimides, Moussa Ibn Abi el-Afia, marche sur Agadir et détrône le gouverneur idrisside, El-Hassen, fils d’Abu el-Aich. Les Fatimides règnent durant 24 ans, jusqu’en 955. Agadir est alors enlevée par les troupes omeyyades d’Abd al-Rahman III, calife de Cordoue. L’Ifrénide Yala Ibn Mohamed, maître du pays des Zenata, obtient du souverain le gouvernement de la cité, mais il est tué par Jawhar al-Siqilli, chef des Fatimides, ce qui provoque un conflit dans toute la région de Tlemcen. Les Maghraouas et les Banou Ifren s’unissent alors contre les Zirides, vassaux des Fatimides. Cette union des Zénètes leur permet de rester souverains dans l’Ouest du Maghreb.

Mais Ziri Ibn Attia, chef des Maghraouas, fait alliance avec les Zirides, ce qui provoque la réaction de Yeddou des Banou Ifren qui fait la guerre aux trois puissances du Maghreb : les Maghraouas, les Zirides et les Omeyyades. Yeddu est toutefois vaincu par Ziri Ibn Attia.

Selon Al-Nowaïri, la ville aurait été vidée de sa population sous le règne de Bologhine ibn Ziri, consécutivement à une attaque menée par les Zanāta. Ces derniers auraient déplacé les habitants de Tlemcen vers Achir, la capitale des Zirides. En commémoration de leur ancienne ville, les Zirides auraient par la suite construit une nouvelle ville qu’ils nommèrent Balinsan. Toutefois, même en prenant en considération ce récit, il est peu probable que Tlemcen ait été complètement vidée de sa population et que le site ait été totalement abandonné.

Les Banou Ifren sont attaqués par la coalition des Hammadides et des Hilaliens en 105838, qui l’emportent. Abu Soda des Banou Ifren de Tlemcen est le dernier commandant des troupes zénètes à tenir tête aux attaques de cette coalition38. Après sa défaite, presque tout le Maghreb passe sous contrôle des Hilaliens et du reste des Hammadides. Le pouvoir y est alors accaparé par les Banou Khazar des Maghraouas, notamment par Yala et ses descendants, la ville devient leur capitale.

En 1080, avec l’installation des Almoravides, le site de la ville est déplacé plus à l’ouest : c’est Tagrart qui devient, après Marrakech, la seconde capitale de l’Empire almoravide. La nouvelle ville annexe Agadir au cours de son expansion. La ville connaît une certaine dynamique urbanistique sous les Almoravides : c’est durant cette période qu’est érigée la Grande Mosquée fondée par Ali Ben Youssef.

En 1143 Tlemcen passe sous les Almohades, Abd al-Mumin l’entoura d’un solide rempart en 1145. Tagrart est habitée par les officiels, Agadir par le peuple. Tlemcen, en raison de son rôle stratégique, devient un chef-lieu de province. Les Almohades, qui y frappent leur monnaie, édifient des châteaux, de grandes maisons, des palais et de solides remparts, des foundouks et un port à Honaïne pour le commerce transafricain et méditerranéen. À cette époque, Tlemcen est un pôle commercial de premier plan et la capitale du Maghreb central.

En 1235, elle devient la capitale du Royaume zianide qui s’étendit au XIVe siècle, la position de la cité zianide rendait son séjour agréable et favorisait son activité commerciale. Bâtie à mi-hauteur d’une pente, au milieu des vergers, elle présentait tant de charmes qu’un écrivain arabe la comparait à « une jeune fiancée sur son lit nuptial ». Elle commandait le carrefour de plusieurs grandes voies, surtout de celles qui conduisaient des ports de Honaïne (à 36 km à l’est de Maghnia) et d’Oran au Tafilelt.

Le royaume berbère de Tlemcen est fondé par Yaghmoracen Ibn Zian, de la dynastie Zénète des Abdalwadides, pour un règne qui va durer près de cinquante ans (1236-1283). La grandeur de la ville médiévale est un fait indiscutable, du moins d’un point de vue urbanistique, comme l’attestent les textes et les monuments actuels.

Yaghmoracen Ibn Zian prend Tlemcen et fait construire une grande mosquée. Son règne est rapporté par Ibn Khaldoun, qui mentionne des anecdotes à son sujet. Ainsi, le roi qui est décrit comme magnanime se riait des généalogistes qui voulaient le faire descendre du prophète Mahomet, et devant ceux qui voulaient inscrire son nom sur un minaret qu’il avait fait élever à Tlemcen, il répondit dans la seule langue qu’il connaissait, le berbère : « Dieu sait » (Issen Rebbi).

En 1370, Ibn Khaldoun est venu se réfugier chez le sultan zianide de Tlemcen, Abou Hammou Moussa II, alors qu’une guerre éclate entre la cité et Fès. Il y assume les fonctions de grand vizir de la cour, l’un des plus hauts postes qui lui aient été attribués, et prend en charge une mission à Biskra, en vue de recruter des soldats parmi les tribus arabes des Dhawawidas. Son séjour à Tlemcen constitue ainsi une étape très importante dans sa vie. Durant ses différents passages à Tlemcen, il enseigne aussi dans la Médersa Al Khaldounia, située dans le quartier d’El Eubad à proximité de la mosquée d’Abou Madyane et considérée comme un joyau architectural.

À son apogée, au XVe siècle, cet État contrôlait un territoire allant de l’Atlas à l’actuelle Tunisie. Il attirait les savants et les artistes de toutes parts. La fonction culturelle de la capitale se matérialise aussitôt par l’érection de nombreux monuments, chefs-d’œuvre qui ont pendant longtemps caractérisé le royaume de Tlemcen. L’activité culturelle et scientifique se développa également grâce au mécénat de certains princes, notamment Abû Tâshfîn (1318-1337) et Abou Hammou Moussa II (1359-1389).

Cette ville était aussi un centre d’études musulmanes, qui comptait cinq médersas renommées. Les Tlemceniens admiraient Sidi Wahhab, qui fut le compagnon du prophète et qui, venu à la suite de Oqba avait été enterré dans la ville ; Sidi Daoudi, le grand saint du xe siècle et surtout Abou Madyane, le mystique andalou du XIIe siècle.

Pour la plupart, les habitants de Tlemcen s’adonnent à l’agriculture et à la fabrication des haïks en laine ; ils excellent dans la confection des vêtements fins… C’est ce qui a valu aux Tlemceniens la réputation dont ils jouissaient jadis et qu’ils ont encore à présent.

Le rayonnement de la capitale du Maghreb central trouve son fondement dans plusieurs aspects, avec une emphase particulière sur son bon fonctionnement économique. Les récits des voyageurs-géographes convergent vers la mise en évidence de la fécondité des terres environnantes de Tlemcen, caractérisée par l’abondance et la diversité de ses cultures, englobant notamment les céréales et les fruits. De surcroît, leur attention se porta sur les moulins, plus spécifiquement les moulins hydrauliques. De plus, les auteurs mentionnent également la présence de marchés prolifiques et animés, constitués en partie par une offre variée de produits.

Les produits de l’industrie tlemcenienne sont vendus sur les marchés les plus reculés de l’Orient et de l’Occident. Ajoutez à cela que Tlemcen est une pépinière de savants réputés pour leur enseignement remarquable, et de saints bien connus pour leur profonde piété. ». Les voyageurs citent les produits d’exportation qui sont à base de laine (habits, vêtements, etc.) dont Ibn Saïd note la qualité et la perfection qui « […] dépassent tous ceux du Maghreb » ou de cuir : brides, selles avec leurs accessoires. Al-Zuhri mentionne de confection de tapis de haute qualité.

À son apogée, Tlemcen comptait environ 100 000 habitants. Au cours du xve siècle, la population a considérablement diminué en raison des conflits constants entre les Zianides et les Mérinides. Selon Al-Wazzan, après la chute du pouvoir des Mérinides, la population était de 13 000 feux, comparée aux 16 000 feux de l’époque d’Abû Tâshfîn. Malgré cette diminution, la ville restait une étape majeure dans les échanges commerciaux entre l’Europe et le Soudan, assurant ainsi l’approvisionnement de ses habitants.

Au début du xvie siècle, Léon l’Africain insistait sur la loyauté renommée des commerçants de Tlemcen. Selon l’auteur, les habitants de Tlemcen étaient répartis en quatre classes distinctes : les artisans, les commerçants, les étudiants et les soldats. Par ailleurs, il mentionne que les Tlemceniens possédaient des résidences secondaires situées en dehors de la ville, qu’ils utilisaient pendant la saison estivale. Ces maisons étaient bien construites et contribuaient au confort des habitants. Léon l’Africain mentionne également la présence de grands hammams de qualité et de maisons bien édifiées à Tlemcen. De plus, il décrit la prospérité de l’artisanat et du commerce dans les divers quartiers de Tlemcen. L’auteur fait également référence aux fondouks de la ville, dont deux étaient spécifiquement destinées à l’hébergement des négociants génois et vénitiens. La société tlemcénienne était « polie, dévote et cultivée », d’après Georges Marçais.

Avec le XVIe siècle et l’effondrement de la dynastie zianide, la ville entre en décadence, passant des 100 000 habitants au moment de son apogée, à des chiffres variant selon les auteurs de 7 000 ou 8 000 habitants à plus de 10 000 habitants dans la période pré-coloniale (entre 12 000 et 14 000 au début du XIXe siècle.

En 1516, le souverain zianide Abou Abdallah Mohamed II meurt sans laisser de successeur, ce qui engendre des conflits dans la dynastie. Son oncle Abou Hammou Moussa III devient souverain, après avoir attaqué et mis en prison l’émir Abou Zeyane, frère aîné du défunt roi. Il s’allie aux Espagnols, ce qui provoque l’hostilité de la population qui appelle à son secours le fameux Arudj Barberousse. Accueilli en libérateur, il rétablit Abou Zeyane sur le trône. Abou Hammou Moussa prend alors la fuite et demande asile et vengeance aux Espagnols basés à Oran.

Ces derniers s’emparent de la Kalâa des Beni Rached et tuent Ishaq, un frère d’Aroudj. Ils attaquent ensuite Tlemcen sous le commandant de Dom Martin d’Argote, qui avait ramené avec lui les contingents musulmans restés fidèles à Abou Hammou Moussa. Pendant une courte durée, la ville passe sous la souveraineté du gouverneur espagnol d’Oran puis sous la domination d’Arudj Barberousse qui est fait prisonnier à Tlemcen en 1518 puis tué.

La cité devient ottomane en 1553, après que le dernier roi zianide, Moulay Hassan, se réfugie à Oran. Les Ottomans ne font pas de Tlemcen le siège d’un beylicat, les villes de Mazouna, Mascara et enfin Oran, reprise aux Espagnols au xviiie siècle, la remplaçant comme capitale de l’Ouest algérien2. Elle devient alors une ville parmi d’autres du Beylik de l’Ouest, dont la capitale ne sera jamais la cité zianide, mais bel et bien Alger. Tlemcen donne à la régence d’Alger et à l’Empire ottoman un beylerbey, en la personne de Youssef Pachaire.

Les Kouloughlis, à côté de la population autochtone de souche citadine dite Hadar, forment la majorité de la population. Ils ont leur propre divan et perçoivent l’impôt de zones délimitées qui constituent leur « État » personnel61. Tlemcen demeure un siège d’une grande activité artisanale et commerciale, la ville avait plus de 500 métiers à tisser, tous les métiers et tous les commerces sont répartis entre diverses places et rues.

Après la chute d’Alger en 1830 et le début de la conquête de l’Algérie par la France, le souverain chérifien souhaite s’emparer de la ville. Les Marocains se retirent finalement de la ville devant l’émir Abd el-Kader. Après l’expédition de Mascara en 1834, la ville est conquise en 1836 par le maréchal Bertrand Clauzel qui impose un impôt aux habitants.

Par le traité de la Tafna, la ville devient en 1837 l’une des capitales de l’État d’Abd el-Kader avant d’être définitivement occupée par les Français en 1842. Elle devient alors chef-lieu de la cinquième division militaire d’Oran et se voit dotée d’un sous-préfet en 1858.

Durant cette période, la ville est marquée par un exode de sa population qui préfère s’expatrier à l’étranger, notamment vers la Syrie, la Turquie et le Maroc, que de rester sous domination coloniale. Ainsi, une importante communauté s’implante à Fès et forme, avec des Algériens d’origines diverses, une communauté privilégiée, administrée par un naqib tlemcenien. L’activité commerciale de la ville décline alors au profit de la ville d’Oran.

D’après Kamel Kateb, à l’instar d’autres villes algériennes, Tlemcen a connu un déclin de sa population indigène, et ce n’est qu’en 1891 qu’elle a retrouvé son effectif de 183065. La population évolue sur toute la période de la colonisation de 5 000 habitants en 1842 à 73 000 habitants en 1954 et 82 500 habitants en 1960. Dans les années 1920, la population comprenait environ 30 000 musulmans, 6 000 juifs et 4 000 européens.

Cependant, la colonisation bouleverse moins la structure sociale de la ville qu’elle ne l’a fait dans la plupart des autres villes algériennes, la bourgeoisie locale ayant participé à l’évolution urbaine de cette période. La proportion des Européens est toujours restée relativement faible par rapport aux autres villes algériennes de même taille68. De toutes les villes de l’Ouest oranais, Tlemcen est celle qui a été la moins pénétrée par l’immigration espagnole ; la limite de cet exode ibérique du milieu du xixe siècle semble avoir été la région d’El Malah (Rio Salado), Sidi Bel Abbès et Béni Saf. Au début du XXe siècle, les premiers nadis se sont formés : le cercle kouloughli « jeunes Algériens » en 1910 et le cercle hadri « Nadi Islami » en 1912, les deux seront débordés à la génération suivante par le cercle « Nadi Sa’ada ».

La colonisation française a provoqué la disparation des deux tiers de la ville intra-muros ainsi que la destruction de certains monuments dans le cadre d’« aménagements.

Source : Wikipédia.

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