Alexandra Kollontaï, femme politique.

Alexandra Mikhaïlovna Kollontaï (en russe : Александра Михайловна Коллонтай ; nom de jeune fille, Domontovitch, en russe : Домонто́вич), née le 19 mars 1872 (31 mars dans le calendrier grégorien) à Saint-Pétersbourg et morte le 9 mars 1952 à Moscou, est une femme politique socialiste, communiste et militante féministe marxiste soviétique. Elle a été la première femme de l’histoire contemporaine à être nommée à la tête d’un ministère1 et à devenir ainsi membre à part entière du conseil du gouvernement (que l’on avait rebaptisé Conseil des commissaires du peuple dans la Russie révolutionnaire). Elle a également été l’une des premières diplomates femmes du xxe siècle (probablement la première à avoir été officiellement élevée au rang d’ambassadrice).


Alexandra Kollontaï adhère au marxisme et au POSDR en 1898. En 1903 se produit la scission entre bolcheviks et mencheviks : rejetant dans un premier temps l’organisation militarisée des bolcheviks, elle rejoint les mencheviks. Elle revient un temps en Russie pour participer à la révolution de 1905.

En 1908, elle est obligée de s’exiler en Allemagne et se rend ensuite dans toute l’Europe occidentale, faisant connaissance avec les plus importantes figures du socialisme international, comme Karl Kautsky, Clara Zetkin, Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht. En 1911, elle entame une relation d’amour avec un compagnon d’exil, Alexandre Chliapnikov. Ils formaient un couple atypique : elle était une intellectuelle menchevique, d’origine noble, treize ans plus âgée que son amant ; lui était un métallurgiste autodidacte venu de la province russe et un leader bolchevique d’une certaine importance. La liaison se termine en 1916, mais deviendra bientôt une amitié profonde fondée sur une correspondance générale d’idéaux politiques, qui se poursuivra jusqu’au commencement des années 1930, désormais en plein stalinisme.

En 1914, elle s’oppose à la Première Guerre mondiale, et pour cette raison rejoint les bolcheviks, en 1915. Elle déclarait ainsi en 1912 : « Le prolétariat russe, aux côtés de celui du monde entier, proteste contre toutes les guerres. C’est un fait bien connu que le prolétariat ne connaît aucune frontière nationale. Il ne reconnaît que deux “nations” dans le monde civilisé : les exploiteurs et les exploités. »

Elle se réfugie quelque temps en Europe du Nord puis aux États-Unis. Elle participe à la révolution de 1917 et devient commissaire du peuple à l’Assistance publique (qui correspond aux actuels ministères de la santé) dans le gouvernement des soviets, de novembre 1917 à mars 1918, ce qui fait d’elle la première femme du monde moderne à avoir participé à un gouvernement. Pendant la période révolutionnaire, elle épouse en secondes noces le marin bolchevique Pavel Dybenko, dix-sept ans plus jeune qu’elle, tout en conservant le nom de famille du premier mariage.

En 1919, elle crée le Jenotdel (département du parti chargé des affaires féminines) avec Inès Armand, ainsi que la revue La Communiste qui en est l’organe.

Alexandra Kollontaï est rapidement en désaccord avec la politique du parti bolchevik, d’abord avec l’étatisation de la production au lieu de la collectivisation, puis avec la réduction des libertés politiques, les conditions du traité de Brest-Litovsk et la répression contre les autres révolutionnaires. En 1918, elle fait partie de la tendance « communiste de gauche », qui publie la revue Kommunist. Elle se rallie en janvier 1921 à une fraction du parti, « l’Opposition ouvrière » conduite par Alexandre Chliapnikov et par Sergheï Medvedev, qui réclame plus de démocratie, l’autonomie des syndicats et le contrôle ouvrier sur la production industrielle. Toutefois, au cours du Xe Congrès du Parti communiste, qui a lieu en mars 1921, le droit de fraction est supprimé et l’Opposition ouvrière est dissoute. Les principaux représentants du courant ne cessent pourtant pas leur activité politique. Au mois de juillet, Alexandra Kollontaï prend la parole, au nom des autres, devant le 3e Congrès de l’Internationale Communiste (Komintern) et attaque durement la Nouvelle politique économique (NEP) soutenue par Lénine, accusée de démoraliser la classe ouvrière en galvanisant parallèlement les paysans et la petite bourgeoisie, et de conduire à la restauration du capitalisme. En février 1922, elle contresigne une lettre ouverte adressée à l’Internationale communiste par vingt-deux ex-représentants de la fraction, y compris Chliapnikov et Medvedev, et d’autres communistes d’extraction ouvrière, et cherche en vain à prendre la parole devant le Comité exécutif de l’Internationale pour en exposer la teneur. Au XIe Congrès du parti russe, qui se déroule entre mars et avril de la même année, Kollontaï, Chliapnikov, Medvedev et deux autres signataires de l’appel sont accusés de fractionnisme et menacés d’expulsion. Toutefois, le congrès décide de permettre aux trois de rester, à condition que la conduite fractionniste ne se répète pas à l’avenir, alors que les deux autres, Flor Anissimovitch Mitine (1882-1937) et Nikolaï  Vladimirovitch Kuznetsov (1884-1937), sont expulsés avec effet immédiat. Le discours que Kollontaï prononce devant le congrès pour se défendre sera probablement le dernier acte significatif de sa vie politique en tant qu’opposante.

Alexandra Kollontaï devient chargée d’affaires et peu après ministre plénipotentiaire de l’Union soviétique en Norvège en 1924 — elle y était attachée commerciale depuis 1922, mais ce n’était pas encore une légation à proprement parler —, ce qui revient à un exil de fait et lui interdit toute action dans la vie politique soviétique. Cela fait néanmoins d’elle l’une des premières femmes diplomates (les premières étant l’Arménienne Diana Abgar, la Hongroise Rosika Schwimmer et la Bulgare Nadejda Stanchova. Elle n’est pas formellement inquiétée, mais les journaux de l’époque l’attaquent avec virulence en mettant l’accent sur sa vie sentimentale sulfureuse, n’hésitant pas à la surnommer : « la scandaleuse » ou « l’immorale ». Alors qu’elle effectue un voyage aux États-Unis en qualité de représentante du Parti, les journaux soviétiques titrent : « La Kollontaïnette part pour l’étranger ; si ça pouvait être pour toujours ! » Cet éloignement lui permet cependant d’échapper aux purges staliniennes (et à la potence), qui frapperont notamment ses anciens camarades de l’Opposition ouvrière et son propre ex-mari, Pavel Dybenko, au cours des années 1930.

Elle marque son mandat en récupérant l’or que l’ancien chef du  gouvernement provisoire de la Russie Aleksandr Kerenski avait transféré en Finlande.

Après des missions diplomatiques saluées — en tant que ministre et « représentante commerciale » — au Mexique (1926-1927) et à nouveau en Norvège (1927-1930), Alexandra Kollontaï est envoyée en 1930 — encore en tant que « ministre plénipotentiaire » — en Suède, où elle demeure après le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, entre 1940 et en 1944. En 1936, elle rencontre à Stockholm Marcel Body, qu’elle avait connu à Paris avant 1914 et lui transmet l’annonce de contacts secrets entre Hitler et Staline, parce que ce dernier craint plus que tout une guerre avec le Reich, information qu’elle autorise Body à transmettre à Léon Blum, qui refusa d’y croire. En passant cette information, Alexandra Kollontaï prenait un risque énorme pour elle-même et sa famille. De retour à Moscou, elle est  longuement interrogée par le chef du NKVD, Iejov, sur ses relations avec Body mais écarte ses soupçons. Elle rencontre en juin 1940 le ministre de Belgique à Stockholm, le prince Réginald de Croÿ, et lui déclare : « L’intérêt évident des puissances européennes est de s’opposer à l’impérialisme allemand. Il est évident que le danger allemand est plus grand qu’on a cru ». Elle mène les négociations pour les deux armistices entre l’URSS et la Finlande, en 1940, après la Guerre d’Hiver, et en 1944. En 1943, lorsque la légation soviétique à Stockholm est élevée au rang d’ambassade, elle aussi est enfin officiellement promue ambassadrice. En aoû 1942, elle est victime d’un AVC qui la rend paralysée du côté gauche et aphasique pendant plusieurs mois ; elle ne se déplacera plus qu’en chaise roulante. En 1944, elle négocie également, avec le diplomate roumain Neagu Djuvara, les termes de l’armistice avec la Roumanie18. En 1945, doyenne du corps diplomatique, personnalité en vue de la capitale suédoise, elle donne une réception de départ où se rend le Tout-Stockholm. Des hommes et femmes politiques scandinaves, dont le président finlandais et ancien ambassadeur à Moscou, Juho Kusti Paasikivi, proposeront sa candidature pour le prix Nobel de la paix, en 1946 et 1947.

Les Grandes purges des années 1930 ayant particulièrement renouvelé l’appareil diplomatique soviétique (auxquelles elle échappe avec certains anciens bolcheviks comme l’ambassadeur à Londres Ivan Maïski), elle regrette, après la Seconde Guerre mondiale, l’équipe de Maxime Litvinov et sa pratique de la diplomatie : « Si, depuis la fin de la guerre, […] nous avions mené une politique extérieure plus souple, « raisonnable », sans les efforts acharnés et maladroits des « juristes » pour compliquer les questions, nous aurions pu freiner […] le processus d’hostilité et de réaction. L’objet de la diplomatie est précisément d’obtenir le maximum d’avantages pour son pays dans des circonstances défavorables. Depuis la fin 1945, notre diplomatie a suivi un autre chemin. L’ignorance de la psychologie des leaders des autres pays […] voilà ce qui a suscité des difficultés inutiles là où elles auraient pu être évitées ».

Comme ses collègues Litvinov et Maïski, elle échappa aux Purges grâce à ses succès diplomatiques, où elle sut montrer son savoir-faire : Staline jugeait nécessaire de garder ce type de personnalités pour atténuer des tensions trop vives avec les Occidentaux.

Elle a animé des séminaires sur l’histoire des relations internationales et celle de la politique extérieure soviétique à l’Institut de préparation des travailleurs diplomatiques et consulaires, créé par Maxime Litvinov en novembre 1934.

Alexandra Kollontaï renonce en mars 1945 à ses fonctions et termine sa vie à Moscou, où elle décède en 1952. Elle est enterrée au cimetière de Novodevitchi lors d’une cérémonie où est louée sa carrière de diplomate, occultant son rôle dans la révolution et le parti communiste.

Source : Wikipédia.

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