Adrien VI, Pape.

Adriaan Floriszoon Boeyens (Adrien Florensz), né à Utrecht le 2 mars 1459, mort à Rome le 14 septembre 1523, également connu comme « Adrien  d’Utrecht » ou « Adrien de Tortosa » quand il était au service de Charles de Gand (futur Charles Quint) en Espagne, fut le 218e pape de l’Église  catholique du 9 janvier 1522 au 14 septembre 1523 sous le nom d’Adrien VI (en latin Hadrianus VI, en italien Adriano VI), unique pape originaire des Pays-Bas (alors relevant du Saint-Empire romain germanique et donc considéré comme dernier pape allemand avant Benoît XVI), et dernier pape non italien avant l’élection de Jean-Paul II en 1978.


D’origine très modeste, Adrien perd son père, un menuisier d’origine  allemande, alors qu’il était encore très jeune. Il semble qu’il fut alors confié par sa mère à un groupe de Frères de la vie commune qui lui donnèrent une bonne formation de base, spirituelle (la Devotio moderna) et intellectuelle. À 17 ans, Adrien entre comme étudiant à l’université de Louvain.

Par vocation et compétence, Adrien est d’abord un théologien et professeur de théologie. Il passa la plus grande partie de sa vie à l’université de Louvain, d’abord comme étudiant et ensuite comme enseignant. Il parcourut toute l’échelle des honneurs académiques. De professeur, il devint recteur en 1493, doyen de l’église Saint Pierre en 1497, de nouveau recteur de l’université en 1501 et chancelier de l’université jusqu’en 1507. Il nous a laissé un commentaire du livre des Sentences de Pierre Lombard et des quodlibet sur des questions théologiques alors débattues. Comme théologien, il se montre solide, orthodoxe mais sans originalité. Adrien était déjà respecté comme homme de Dieu et homme d’études. Il fut également chanoine au chapitre d’Anderlecht.

En 1507, il est nommé précepteur de l’archiduc Charles d’Autriche, futur empereur Charles Quint, d’abord à Gand (où se trouvait la cour des Pays-Bas bourguignons) et ensuite en Espagne, où Charles-Quint, qui l’estime beaucoup, l’emmène comme principal conseiller lors de son accession sur le trône de Castille (1516). Adrien y est fait archevêque de Tortosa et  inquisiteur du royaume d’Espagne, et peu après, Charles-Quint lui obtient le titre de cardinal, avec siège à Utrecht (1517). Il ne semble pas cependant qu’Adrien soit jamais retourné dans sa ville natale. Jouissant de toute la confiance de l’empereur, Adrien était également vice-roi durant les absences de Charles-Quint. L’austère Flamand au caractère calme et réfléchi était détesté à la cour d’Espagne, en partie parce qu’il s’y était entouré d’hommes de son pays.

Le conclave chargé d’élire un successeur à Léon X était une fois de plus divisé en partis intransigeants. La solution fut trouvée en l’élection d’un quasi inconnu, absent du conclave : Adrien Florensz, cardinal d’Utrecht (9 janvier 1522). Un chroniqueur contemporain commenta l’élection ainsi : « Conformément à la décision de Dieu, les cardinaux, jusque-là désunis, ont élu contre leur propre gré Adrien de Tortose qui n’était pas présent au conclave. C’est un homme tout simple, qui ne s’est distingué jusqu’ici que par la crainte de Dieu ; à Louvain il ne vivait que de science ». Et encore : « À la nouvelle de son élection, il n’a donné aucun signe de joie, mais a soupiré profondément » Le soutien de l’empereur Charles-Quint contribua certainement à son élection.

Mais à Rome c’était la consternation. Adrien n’y était pas connu, mais, venant du nord de l’Europe c’était sans nul doute un « barbare », un ennemi, un homme de l’empereur. Le fait qu’il ne fût pas Italien fut très mal accepté et les cardinaux regrettèrent vite leur choix. Il surprit également en gardant son nom de baptême : il s’appellera Adrien VI.

Pour des raisons politiques diverses, consistant surtout à éviter les  invitations pressantes et intéressées des rois de France et d’Angleterre, Adrien mit six mois pour passer d’Espagne à Rome. Il marqua même immédiatement son indépendance vis-à-vis de son ancien élève : pas plus que les souverains de France et d’Angleterre il n’accepta de rencontrer Charles Quint avant de quitter l’Espagne. Le 23 août 1522, il débarque à Livourne, en route pour Rome.

Adrien VI, carte maximum, Belgique.

Son style de vie, simple, pieux et austère, impressionne d’abord le peuple romain. Il réduit le nombre de ses serviteurs à quatre (de 100 qu’avait son prédécesseur). Il évite les banquets et se contente d’un plat de viande à sa table. Il se lève la nuit pour réciter l’office divin et se relevait à l’aube pour célébrer la messe. Il interdit le port d’armes dans la ville et en expulse les femmes de mauvaise vie. Au lieu de poètes et de bouffons, il s’entoure de pauvres et de malades. L’édification augmente en même temps que l’inquiétude : il est un reproche vivant pour beaucoup.

Adrien, théologien classique, est cependant intransigeant sur les questions de doctrine. Luther doit être puni pour ses hérésies et interdit  d’enseignement (comme décidé à Worms en 1521). Par ailleurs il est le tout premier pape à reconnaître que les sources de l’hérésie et de l’attraction qu’elle suscite sont à trouver dans le désordre même de la curie romaine et le comportement déréglé de nombreux prélats de l’Église. Lors de son premier consistoire, cinq jours après son arrivée à Rome (1er septembre 1522), il est brutal dans son constat : il faut commencer la réforme par Rome même. Adrien s’attaque vigoureusement aux abus (simonie, cumul des bénéfices, etc.), mais il le fait à coups de décrets et ordonnances sans s’entourer suffisamment de soutiens efficaces. Il ne fait rien pour se concilier les sympathies. Même les cardinaux favorables à la réforme de la curie romaine se tournent contre lui : « Il manque d’égards pour le Sacré Collège ».

Adrien, de plus, ne possède en rien les manières élégantes si prisées à Rome. Il ne cherche d’ailleurs pas à être Romain. Il mésestime les chefs-d’œuvre présents dans son palais et commence à les distribuer en cadeaux. Il ne manifeste aucun intérêt pour les arts et la littérature (dont ses  prédécesseurs étaient les grands mécènes). Aux yeux de la noblesse romaine, des artistes et de l’intelligentsia en général, Adrien reste un « barbare inculte », un « buveur de bière ». Très rapidement, ce sera le déchaînement contre lui, d’autant plus qu’après avoir limogé les fonctionnaires corrompus de son administration, il s’entoure d’hommes nouveaux, étrangers à Rome et inexpérimentés, tel que Jan van Scorel, qu’il nomma conservateur des collections pontificales du Belvédère. Personnellement intègre, il interdit aux membres de sa famille de venir à Rome pour y chercher près de lui faveurs et bénéfices.

Politiquement, ce n’est pas un succès non plus. Ses tentatives faites pour unir les grandes nations chrétiennes d’Europe contre Soliman et les Turcs qui viennent de prendre Belgrade (1521) et menacent la Hongrie et Rhodes, n’aboutissent à rien. Adrien n’a pas l’étoffe d’un chef d’État : les erreurs diplomatiques sont nombreuses. Lorsque, après la chute de Rhodes en 1522, il tente d’imposer une trêve entre les nations chrétiennes (avec menace d’excommunication à la clé) pour faire face au péril turc, il provoque la colère de François Ier qui envahit la Lombardie, forçant Adrien à chercher une alliance qu’il ne désirait pas avec les autres souverains, à commencer par l’empereur Charles-Quint.

Sa grande dignité et son sens du devoir (il n’a pas souhaité être pape mais n’a pas songé non plus à refuser la charge) sont illustrés par son attitude lors de l’épidémie de peste qui se déclare à Rome un mois après son arrivée : alors que très rapidement cardinaux, ambassadeurs et tous ceux qui le pouvaient quittent la ville, Adrien VI refuse de les suivre. Cependant, vers la fin de sa vie, il lui arrivait d’exprimer un regret à un ami : « Comme on serait mieux si j’étais encore paisiblement à Louvain ! » et il mourut le 14 septembre 1523, dans l’indifférence, sinon l’hostilité, générale. Son pontificat est en général perçu comme une occasion manquée pour la réforme de l’Église. Sur son sarcophage se trouve cette inscription latine : « Proh dolor, quantum refert in quae tempora vel optimi cujusque virtus incidat » (« Quelle douleur de voir la vertu des meilleurs s’exercer en de telles conjonctures ! ») qui est peut-être une citation de Pline le Jeune.

Source : Wikipédia.

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