Jacques Bingen, héros de la résistance.

Issu d’une famille juive d’origine italienne, Jacques Bingen (1908-1944), après des études à l’École des Mines et à l’École des Sciences politiques de Paris, préside en 1929 la section française à l’Exposition universelle de Barcelone, puis fait son service dans l’artillerie comme élève officier de réserve en 1930-1931. Beau-frère d’André Citroën, il devient, après la mort de ce dernier en 1935, directeur de la Société anonyme de gérance et d’armement, tout en occupant les fonctions de secrétaire du Comité central des armateurs.

Mobilisé en 1939 comme officier de liaison auprès de la 51e division écossaise, il est blessé en juin 1940 à Saint-Valéry-en-Caux, mais échappe à l’ennemi et après bien des péripéties, parvient à rallier Casablanca par bateau. Le 2 juillet il est à Gibraltar et le 18, à Liverpool. Il se présente au général de Gaulle le 23 juillet 1940 et sa compétence pour les affaires maritimes le conduit tout naturellement à être choisi pour diriger les services de la Marine marchande de la France libre à Londres, créés officiellement le 12 août 1940.

À ce poste, il travaille à l’application aux navires de commerce français des accords De Gaulle-Churchill et tente de mettre sur pied en Angleterre une administration des gens de mer.

En août 1942, le voilà au Bureau central de renseignements et d’action (BCRA), comme adjoint du capitaine Louis Vallon, chef de la section non militaire (N/M). En liaison permanente avec Jean Moulin, il organise aussi des réunions techniques avec les chefs de mouvements et réseaux lorsque ceux-ci se rendent à Londres.

Au début de 1943, Jacques Bingen prend la tête de la section N/M, au moment où l’essor des mouvements de Résistance et leur difficile unification augmente considérablement la tâche du BCRA. En février, il rencontre pour la première fois Jean Moulin en personne à Londres et, après l’arrestation de ce dernier, se porte volontaire pour servir en France occupée. Un avion Lysander le dépose en août 1943 en Île-de-France, muni d’un ordre de mission le nommant délégué du Comité français de la Libération nationale (CFLN) en zone sud.

Délégué général pour la Résistance de décembre 1943 à avril 1944, il s’occupe de créer ou de réorganiser divers organismes, tels que le Comité des actions immédiates, le Comité des œuvres sociales de la Résistance (COSOR) ou le Comité d’action contre la déportation (CAD). Son action contribue également à la fusion en février 1944 de l’Armée secrète (AS), de l’Organisation de Résistance de l’Armée (ORA), des Francs-Tireurs et Partisans (FTP) et de multiples groupes isolés, qui constituent alors les Forces françaises de l’Intérieur (FFI).

Jacques Bingen, carte maximum, Paris, 19/04/1958.

Après son remplacement par Alexandre Parodi comme délégué général du CFLN, Jacques Bingen reprend ses activités de délégué pour la zone sud, malgré les menaces qu’il sent peser sur lui. Trahi par un agent double de l’Abwehr , il est arrêté le 12 mai 1944 en gare de Clermont-Ferrand et tente en vain de s’évader, avant d’avaler une capsule de cyanure. Son corps ne sera jamais retrouvé.

Jacquyes Bingen, essais de couleurs.

Le 14 avril 1944, il avait laissé une lettre depuis largement citée et commentée, dont quelques-uns des passages méritent d’être cités, évocation émouvante de ce qu’il nomme sa« vision heureuse de cette paradisiaque période d’enfer »  :« J’écris ce soir ces quelques pages parce que, pour la première fois, je me sens réellement menacé et qu’en tous cas, les semaines à venir vont apporter sans doute au pays tout entier, et certainement à nous, une grande, sanglante et, je l’espère, merveilleuse aventure.(…) Je désire, sur le plan moral, que ma mère, ma sœur, mes neveux, ma nièce (…), ainsi que mes amis les plus chers, hommes et femmes, sachent bien combien j’ai été prodigieusement heureux durant ces derniers huit mois. Il n’y a pas un homme sur mille qui pendant huit jours de sa vie ait connu le bonheur inouï, le sentiment de plénitude que j’ai éprouvé en permanence depuis huit mois. Aucune souffrance ne pourra jamais retirer l’acquis de la joie de vivre que je viens d’éprouver si longtemps. Il faut que mes amis (…) le sachent, afin qu’au regret qu’ils pourraient éprouver de ma disparition, ils opposent dans leur souvenir la connaissance pour la plupart d’entre eux imparfaite, mais que je proclame ici, du bonheur que j’ai connu. ».

Jacques Bingen a été nommé compagnon de la Libération par décret du 10 janvier 1945, à compter du 31 mars 1944.

Source : Wikipédia.