Théodore Géricault, peintre, sculpteur, dessinateur et lithographe.

Théodore Géricault, né le 26 septembre 1791 à Rouen et mort le 26 janvier 1824 à Paris, est un peintre, sculpteur, dessinateur et lithographe français.

Incarnation de l’artiste romantique, il a eu une vie courte et tourmentée, qui a donné naissance à de nombreux mythes. Son œuvre la plus célèbre est Le Radeau de La Méduse (1818-1819). Il est également connu pour sa passion pour les chevaux, à l’écurie ou en action sur les champs de bataille napoléoniens, outre ses peintures à l’huile, Géricault réalise des lithographies, des sculptures, rares mais remarquables, et des centaines de dessins.

Théodore Géricault étudie en 1810 dans l’atelier du peintre Carle Vernet, spécialiste de scènes de chasse. Il y fait la connaissance de son fils, Horace Vernet. Il étudie ensuite avec Pierre-Narcisse Guérin, avant de s’inscrire, le 5 février 1811, à l’École des Beaux-Arts de Paris. Géricault pratique alors assidûment la copie au musée Napoléon (le Louvre), où il copie les tableaux, rassemblés alors par Napoléon Ier, qu’ils soient Italiens, comme le La Mise au tombeau et l’Assomption d’après Titien, Français d’après Jean Jouvenet, Eustache Le Sueur, Rigaud, Prud’hon, ou Flamands La Peste de Milan d’après Jacob van Oost, Portrait d’après Rembrandt, Van Dyck ou Rubens.

Il alterne les études, des Académies de nus masculins, où l’influence de Michel-Ange se remarque avec de nombreux portraits de chevaux aux écuries, dont celui de Tamerlan, le cheval de l’empereur. Ses camarades d’atelier notent son goût pour les textures épaisses et riches et le surnomment : « le Cuisinier de Rubens ». Guérin voit en lui « l’étoffe de trois ou quatre peintres ». En mai 1812, Vivant Denon, le directeur du musée Napoléon, exclut Géricault pour inconduite. Géricault loue une arrière-boutique sur le boulevard Montmartre et peint Officier de chasseurs à cheval de la garde impériale chargeant (Portrait équestre du lieutenant Dieudonné) en cinq semaines, d’un jet, qu’il présente au Salon. Dans cette toile aux couleurs sombres et vibrantes, on voit toute la virtuosité du jeune peintre, notamment dans le choix de la position héroïque et du dessin du cheval. La toile est accrochée à côté du Portrait de Murat du Baron Gros. Le peintre Jacques-Louis David, en découvrant l’œuvre de Géricault, aurait dit : « D’où cela sort-il ? Je ne reconnais pas cette touche ! ». Géricault reçoit la médaille d’or du Salon à 21 ans. Célèbre désormais, il s’installe au 23 de la rue des Martyrs, non loin de Carle et Horace Vernet. Il peint de nombreuses scènes militaires. Il est entouré de nombreux peintres et amis, Delacroix, Léon Cogniet, Ary Scheffer, son élève Louis-Alexis Jamar8, et de Dedreux-Dorcy.

Deux ans plus tard, Géricault présente Cuirassier blessé quittant le feu (1814, musée du Louvre) qui forme un contraste saisissant avec la toile de 1812. Elle représente un officier sur une pente avec son cheval, s’éloignant de la bataille. Son regard, tourné vers la tuerie qu’il vient de quitter, traduit le désarroi, la défaite. Une autre toile présente un cuirassier à terre désarçonné. Dramatiques et monumentaux, ces deux portraits suscitent un intérêt distant lors du Salon de 1814, dans un Paris occupé par les Alliés.

Géricault, carte maximum, Rouen 9/11/1962.

En 1819, un nouveau Salon s’ouvre au Louvre. Géricault veut réaliser une œuvre immense, spectaculaire. Cherchant son inspiration dans les journaux, il y découvre l’« affaire de la Méduse », catastrophe maritime peu glorieuse que la monarchie restaurée avait tenté d’étouffer. Le fait-divers que le peintre évoque par sa toile est celui du naufrage d’une frégate, la Méduse, le 2 juillet 1816, au large des côtes du Sénégal. Le moment culminant choisi par Géricault dans cette dérive qui dura treize jours, est celui où une partie des naufragés survivants sur un radeau, voient au loin le navire qui vient les sauver, le brick Argus. Géricault peint cet instant dramatique, où les hommes encore valides, qui ont pratiqué le cannibalisme pour survivre, se lèvent pour faire signe au navire, qui point, à peine visible, à l’horizon.

Le peintre a trouvé son inspiration. Soucieux d’ancrer son œuvre dans la réalité, il prend connaissance du récit de deux survivants : Alexandre Corréard, l’ingénieur géographe de la Méduse, et Henri Savigny, le chirurgien du bord. Il fait construire une maquette grandeur nature du radeau dans son atelier et demande à sept rescapés de la dérive du radeau de venir poser pour lui. Il va jusqu’à exposer dans son atelier des restes humains. Grâce à l’entremise d’un ami médecin à l’ancien hôpital Beaujon, proche de son atelier, Géricault peut obtenir des bras et des pieds amputés afin de les étudier. De même, il dessine plusieurs fois une tête coupée, obtenue à Bicêtre, où se trouvait une institution tout à la fois hospice, prison et asile d’aliénés. Selon Charles Clément, son biographe, une puanteur étouffante régnait parfois dans son atelier de la rue du Faubourg-du-Roule. Géricault travaille avec acharnement, pendant une année entière, à une œuvre de cinq mètres sur sept qui est, selon l’expression de Michel Schneider, « une leçon d’architecture autant qu’une leçon d’anatomie ».

Le Radeau de La Méduse est présenté au musée du Louvre en 1819. Lors de l’accrochage, le tableau est placé beaucoup trop haut, à côté d’autres œuvres immenses.

La toile est reçue difficilement par la critique qui feint l’incompréhension : “L’auteur n’a pas cru devoir indiquer la nation ni la condition de ses personnages. Sont-ils grecs ou romains ? Sont-ils turcs ou français ? Sous quel ciel naviguent-ils ? À quelle époque de l’histoire ancienne ou moderne se rapporte cette horrible catastrophe ?” ou encore ” ce cadre immense et ces dimensions colossales qui semblent réservés pour la représentation des événements d’un intérêt général, tels qu’une fête nationale, d’une grande victoire, le couronnement d’un souverain ou un de ces traits de dévouement sublimes qui honorent la religion, le patriotisme ou l’humanité.”. En effet, le sujet (l’anthropophagie) est connu de tous, et n’est pas considéré comme un crime par le Code Civil de 1810 ; elle a été régulièrement pratiquée par les soldats affamés des armées du Premier Empire, en Espagne, en Andalousie, au Portugal, pendant la retraite de Russie.

D’avril 1820 à novembre 1821, il voyage en Angleterre et découvre à la fois les grands paysagistes anglais, dont Constable et Turner, et les courses de chevaux ; d’où derechef toute une nouvelle série d’œuvres inspirée par « la plus grande conquête de l’homme » dont notamment le Derby d’Epsom (musée du Louvre). Le thème du cheval est un sujet central de son œuvre au début et surtout à la fin de sa vie. Il copie en particulier les œuvres de George Stubbs et de Ward, et réalise de nombreuses lithographies de chevaux et de scènes de rues de la vie londonienne.

Géricault, épreuve d’artiste.

Géricault peint depuis son apprentissage chez Guérin, des chevaux à l’écurie, sur des champs de bataille, au travail, qu’ils soient de traits ou de halages, cob ou selles français, dans plus d’une centaine de scènes de genre, et pour lesquels il réalise même une série de gravures et de tableaux suivant la nationalité flamande, anglaise ou française du maréchal ferrant. Pour Théophile Gautier, le cheval permet à Géricault d’exprimer “les plus hautes aspirations de l’esprit”. Pour Bruno Chenique, le cheval dans l’art de Géricault, “c’est surtout l’âme de l’homme, ses instinct, sa douceur, sa violence, ses pulsions sexuelles et mortifères”, il “est le miroir de la psyché avec la complicité duquel peut se vivre des passions insensées”.

En décembre 1821, le peintre revient à Paris, après être tombé malade en Angleterre. Il ne se débarrasse pas de son état. Son ami médecin-chef de la Salpêtrière et pionnier en études psychiatriques Étienne-Jean Georget, lui propose de peindre les portraits de dix malades mentaux. De cette série, nous restent cinq toiles dont le monomane du Vol.

On associe souvent à cette série le Vendéen, portrait d’un saisissant réalisme d’un homme traumatisé par la Guerre civile de Vendée, mais qui est sans doute plus ancien.

En 1822, il a une relation suivie avec une certaine « Madame Trouillard », à qui il confie être malade. Bien qu’épuisé, Géricault continue de vivre « comme s’il était dans la plénitude de ses forces alors que les ravages d’une maladie dont le ferment était depuis plusieurs années dans son sang réapparurent ».

Il tombe plusieurs fois de cheval, et se brise le dos en août 1823 en tombant rue des Martyrs, à Paris. Il est alité, paralysé. Les médecins diagnostiquent une phtisie de la colonne vertébrale.

Il meurt, le 26 janvier 1824, après une longue agonie due officiellement à cette chute de cheval mais plus probablement à une maladie vénérienne, ce qui fit dire au philosophe et critique d’art Élie Faure que « Géricault est mort d’avoir trop fait l’amour ».

Dans son Journal, Eugène Delacroix décrit ainsi Géricault qu’il a connu : « Il a gaspillé sa jeunesse ; il était extrême en tout ; il n’aimait à monter que des chevaux entiers, et choisissait les plus fougueux. Je l’ai vu plusieurs fois au moment où il montait en selle ; il ne pouvait presque le faire que par surprise ; à peine en selle, il était emporté par sa monture. Un jour que je dînais avec lui et son père, il nous quitte avant le dessert pour aller au bois de Boulogne. Il part comme un éclair, n’ayant pas le temps de se retourner pour nous dire bonsoir, et moi de me remettre à ta table avec le bon vieillard. Au bout de dix minutes nous entendons un grand bruit : il revenait au galop ; il lui manquait une des basques de son habit ; son cheval l’avait serré, je ne sais où, et lui avait fait perdre cet accompagnement nécessaire. Un accident de ce genre fut la cause déterminante de sa mort. Depuis, plusieurs années déjà, les accidents, suite de la fougue qu’il portait en amour comme en tout, avaient horriblement compromis sa santé ; il ne se privait pas pour cela tout à fait du plaisir de monter à cheval. Un jour dans une promenade à Montmartre, son cheval s’emporte et le jette à terre. (…) Cet accident lui causa une déviation dans l’une des vertèbres. »

Puis lors de sa dernière visite à Géricault, le mardi 30 décembre 1823, Delacroix écrit : « Il y a quelques jours, j’ai été le soir chez Géricault. Quelle triste soirée. Il est mourant ; sa maigreur est affreuse. Ses cuisses sont grosses comme mes bras. Sa tête est celle d’un vieillard mourant. Je fais des vœux bien sincères pour qu’il vive, mais je n’espère plus. Quel affreux changement. Je me souviens que je suis revenu tout enthousiasmé de sa peinture : surtout une étude de tête de carabinier. S’en souvenir. C’est un jalon. Les belles études. Quelle fermeté. Quelle supériorité. Et mourir à côté de cela, qu’on a fait toute la vigueur et la fougue de la jeunesse, quand on ne peut se retourner sur son lit d’un pouce sans le secours d’autrui ! »

Géricault est enterré au cimetière du Père-Lachaise à Paris dans le caveau des Isabey en 1824, puis, après la mort de son père, déplacé dans le tombeau familial avec celui-ci en 1828.

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Sources : Wikipédia, YouTube.