Pie IX, pape.

Giovanni Maria Mastai Ferretti, né le 13 mai 1792 à Senigallia (États pontificaux) et mort le 7 février 1878 à Rome (Italie), est le 255e pape de l’Église catholique, élu le 16 juin 1846 sous le nom de Pie IX (en latin Pius IX). Son pontificat de 31 ans est le plus long de l’histoire de la papauté.

Aux prises avec la vague révolutionnaire qui bouleverse la politique européenne, Pie IX est partagé entre le statut de pasteur universel et celui de pape-roi d’un État indépendant. Résolument conservateur, il est l’auteur du Syllabus et de l’encyclique Quanta cura, qui condamnent toute forme de modernisme dans l’Église. Pie IX proclame le dogme de l’Immaculée Conception. Il convoque le premier concile œcuménique du Vatican, qui définit notamment l’infaillibilité pontificale, ce qui élargit encore la fracture entre l’Église catholique et les autres confessions chrétiennes. Le concile, ayant accompli son but principal, est suspendu sine die quand les troupes piémontaises envahissent Rome. Pie IX, dernier souverain des États pontificaux, se déclare alors « prisonnier du Vatican », situation qui va, dès lors, provoquer la Question romaine, qui ne trouvera sa solution qu’en 1929, avec la signature du traité du Latran entre l’État du Vatican, qui devient alors de droit international, et l’État italien.

Son procès en béatification est ouvert en 1907 par Pie X, ce qui ne va pas sans provoquer des controverses, la Question romaine étant encore d’actualité à cette époque. Sous les pontificats de Benoît XV et de Pie XI, le procès suit très prudemment son cours. Pie XII le fait activer en 1954 ; il aboutit enfin lorsque Jean Paul II le proclame solennellement bienheureux en 2000.

Il est commémoré le 7 février selon le Martyrologe romain.


Né le 13 mai 1792 à Senigallia, Giovanni Maria Mastai Ferretti est le fils du comte Girolamo Mastai Ferretti (1750-1833) et de la comtesse, née Caterina Solazzi (1764-1842), qui ont eu huit autres enfants. Il est le neuvième et dernier de sa fratrie.

Après avoir fréquenté le collège piariste de Volterra, il étudie la théologie et la philosophie à Rome. À cette époque, il est fiancé à une jeune aristocrate irlandaise, Miss Foster, qui est la fille de Vincent Foster, évêque dans l’Église d’Irlande. Dû à l’opposition de ses parents à cette union, Mastai Ferretti rompt les fiançailles et annule le mariage, qui se serait déroulé à l’église Saint-Louis-des-Français de Rome.

Il est ensuite refusé chez les gardes nobles à cause de sa santé (il est sujet à des crises d’épilepsie) et il poursuit ses études au séminaire romain afin d’entrer dans la prêtrise.

Ordonné prêtre en 1819, il est nommé directeur spirituel d’un célèbre orphelinat romain. En 1823, Pie VII l’envoie au Chili en tant qu’auditeur de Muzi, délégué apostolique. Rétrospectivement, il devient la première personne ayant exercé les fonctions de pape dans l’histoire à mettre les pieds sur le continent américain. En 1825, à son retour, il est nommé par Léon XII chanoine de Sainte-Marie de Via Lata et directeur de l’hôpital San Michele. En 1827, il est fait archevêque de Spolète. En 1832, il est transféré au diocèse d’Imola en prenant le titre personnel d’archevêque.

Le pape Grégoire XVI le crée cardinal in pectore lors du consistoire du 23 décembre 1839. Sa création est publiée le 14 décembre 1840. Il reçoit le chapeau de cardinal-prêtre du titre des Santi Marcellino e Pietro.

Le 16 juin 1846 s’ouvre le conclave suivant la mort de Grégoire XVI. Le cardinal Luigi Lambruschini, secrétaire d’État de Grégoire XVI, est le favori des conservateurs tandis que le cardinal Mastai Ferretti est le favori des libéraux. Le cardinal Lambruschini obtient la majorité des voix dès les premiers tours, mais ne parvient pas à recueillir les deux tiers des voix requis pour être élu pape.

Le cardinal von Gaisruck, archevêque de Milan, arrive trop tard pour remettre l’exclusive prononcée par l’empereur d’Autriche Ferdinand Ier, suivant la politique de Metternich, contre le cardinal Mastai Ferretti ; celui-ci, ayant recueilli les deux tiers des voix, accepte la tiare et prend alors le nom de « Pie IX », en hommage aux anciens papes Pie VI, Pie VII et Pie VIII. Il est alors âgé de 54 ans.

Pie IX bénéficie à la suite de son élection d’une grande popularité au sein de la population italienne : durant son épiscopat en Romagne, il n’a pu ignorer le besoin de réformes dont souffrait l’État pontifical et que le soulèvement de Rimini, en 1845, avait démontré.

Les premières années de son pontificat sont marquées par des mesures libérales qui s’opposent aux méthodes de Grégoire XVI et de son secrétaire d’État, le cardinal Lambruschini. Il choisit pour secrétaire d’État le cardinal Gizzi.

À la différence de Grégoire XVI, qui les considérait comme « les chemins du diable », Pie IX fait construire dans les États pontificaux un réseau ferré et télégraphique.

Il restaure l’éclairage public et accepte d’être photographié.

En 1847, il s’oppose à l’Autriche qui avait fait occuper la ville de Ferrare alors qu’elle n’avait le droit que d’avoir une garnison dans la citadelle. Pie IX devient l’espoir des patriotes italiens, sa popularité est alors immense : l’Unité italienne se ferait-elle autour de lui ?

Ce mouvement réformiste qu’il contribue à amorcer par ses choix personnels lui attire bientôt la sympathie des patriotes dans l’ensemble des États italiens (Toscane, Deux-Siciles, Piémont, Parme…) : certains d’entre eux n’hésitent pas à souhaiter la réalisation d’une fédération italienne, dont il prendrait la présidence.

Victor Hugo prononce à la Chambre des pairs le 13 janvier 1848 un éloge vibrant de Pie IX : « Cet homme qui tient dans ses mains les clefs de la pensée de tant d’hommes, il pouvait fermer les intelligences; il les a ouvertes. Il a posé l’idée d’émancipation et de liberté sur le plus haut sommet où l’homme puisse poser une lumière. […] ces principes de droit, d’égalité, de devoir réciproque qui il y a cinquante ans étaient un moment apparus au monde, toujours grands sans doute, mais farouches, formidables et terribles sous le bonnet rouge, |…] il vient de les montrer à l’univers rayonnants de mansuétude, doux et vénérables sous la tiare. […] Pie IX enseigne la route bonne et sûre aux rois, aux peuples, aux hommes d’État, aux philosophes, à tous ». Ce discours est cependant mal accueilli dans une chambre conservatrice inquiète de la remontée en puissance des idées républicaines.

Pie IX est à ce moment « le pape des droits de l’homme ».

Les événements vont en faire un bien différent « pape du Syllabus ».

Le 24 novembre 1848, Pie IX quitte de nuit le Quirinal dans la voiture à cheval du duc d’Harcourt, après l’attaque du palais par les partisans de Giuseppe Mazzini (Palma trouve la mort à cette occasion). Pie IX se réfugie dans la forteresse de Gaète, dans le royaume des Deux-Siciles. Il lance un appel aux puissances européennes pour retrouver son trône. Rome devient une république. L’Autriche, le roi Ferdinand II des Deux-Siciles et la France apportent leur soutien au pape.

C’est cependant la France qui est la plus active : elle envoie un corps expéditionnaire commandé par le général Oudinot, qui s’empare de Rome le 30 juin 1849 et en chasse définitivement les révolutionnaires en juillet.

D’abord hésitant, une vive protestation du vicaire apostolique de Mandchourie de passage en Europe, Emmanuel Verrolles décide enfin le pape à quitter Gaëte pour Rome. De retour à Rome le 12 avril 1850, Pie IX mène une politique de répression contre les idées républicaines. Un nouveau secrétaire d’État, le cardinal Giacomo Antonelli, est nommé, qui renoue avec la politique conservatrice de Grégoire XVI.

Rome reste l’objectif principal de la politique de Giuseppe Mazzini et de Giuseppe Garibaldi, qui organise diverses opérations militaires sans succès.

Pour s’opposer aux risques d’une annexion par le royaume de Sardaigne qui a fait main basse sur les principautés du Nord de l’Italie et la moitié des États pontificaux, les troupes françaises restent stationnées dans les États du pape et les zouaves pontificaux sont créés en 1860 avec la bénédiction du pape et du prélat franco-belge Xavier de Mérode. Ces derniers sont placés sous le commandement du général de Lamoricière, ancien de la colonisation d’Algérie et ancien ministre de la IIe République.

Jusqu’en 1870, le recrutement se fait auprès des volontaires de France, des Pays-Bas, de Belgique, d’Italie et du Québec.

La guerre franco-prussienne de 1870 entraîne le retrait des militaires français affectés à la protection du pape. En revanche, les volontaires français (officiers ou hommes de troupe) engagés dans le corps des Zouaves pontificaux restent sur place, commandés par le colonel de Charette.

En septembre 1870, la défaite de la France contre la Prusse, alliée de l’Italie, provoque l’invasion de ce qui reste des États pontificaux par une armée italienne de 70 000 hommes sous le commandement du général Raffaele Cadorna.

En face, les effectifs pontificaux ne dépassent pas 13 000 hommes dont 3 000 zouaves. Le général Hermann Kanzler, le commandant de l’armée pontificale, concentre ses efforts sur la défense de Rome. Le 20 septembre, l’artillerie italienne bombarde les fortifications romaines. Le pape demande à Kanzler de cesser le feu dès les premiers coups de canon au grand dépit des zouaves souhaitant se battre. Onze zouaves seulement sont tués lors des combats.

L’armement obsolète des armées pontificales, malgré la victoire de Mentana contre Garibaldi en 1867 (où pour la première fois le fusil Chassepot est utilisé), permettent aux troupes italiennes de s’emparer sans difficulté de Rome le 20 septembre 1870.

Le pape ordonne aux zouaves de n’opposer qu’une résistance symbolique. Le lendemain, le régiment des zouaves est licencié et les Français sont rapatriés à Toulon.

En sus du problème du territoire pontifical, Pie IX entend lutter contre les courants et idéologies anticatholiques. Par sa lettre Gravissimum supremi (1866) il donne un statut quasi officiel à la revue jésuite La Civiltà Cattolica. Il dénonce aussi le Kulturkampf allemand dans la ligne de Bismarck ainsi que les violences exercées par les Suisses contre le clergé catholique : une encyclique de 1873 condamne les violences suisses.

En 1874, le gouvernement autrichien rompt son concordat.

Cette époque est aussi celle d’une expansion missionnaire de l’Église dans le monde. Pie IX crée de nombreux diocèses aux États-Unis, rétablit malgré l’opposition des protestants la hiérarchie catholique en Angleterre (1850), en Hollande (1853), en Écosse. Il refonde le patriarcat latin de Jérusalem.

De nombreux concordats sont également signés par le Saint-Siège avec des États européens catholiques comme l’Espagne en 1851, l’Autriche en 1855 et le Portugal en 1857, ou d’Amérique du Sud comme le Costa Rica et le Guatemala en 1852, le Nicaragua en 1861, le Venezuela et l’Équateur en 1862.

L’encyclique Quanta cura, le 8 décembre 1864, condamne violemment les « hérésies et erreurs qui souillent l’Église et la Cité », comme le socialisme et le communisme, mais également le « délire » (selon l’expression de Grégoire XVI) de la liberté de conscience et de culte et autres « opinions déréglées » et « machinations criminelles d’hommes iniques » parmi lesquelles la séparation du temporel et du spirituel et l’école laïque.

Il précise que « là où la religion a été mise à l’écart de la société civile (…) la pure notion même de justice et du droit humain s’obscurcit et se perd, et la force matérielle prend la place de la véritable justice ». Il attaque également implicitement une certaine conception de la liberté de la presse, lorsque « les ennemis acharnés de notre religion, au moyen de livres empoisonnés, de brochures et de journaux répandus par toute la terre, trompent les peuples, mentent perfidement, et diffusent toutes sortes d’autres doctrines impies ».

Pie IX souligne que « non contents de mettre la religion à l’écart de la société, ils veulent même l’écarter de la vie privée des familles. En effet enseignant et professant l’erreur très funeste du communisme et du socialisme, ils affirment que la société domestique ou la famille emprunte au seul droit civil toute sa raison d’être. »

Après 31 ans de pontificat, Pie IX meurt au Vatican le 7 février 1878, d’une crise d’épilepsie, à l’âge de 85 ans.

Au cours du transfert de sa dépouille vers la basilique Saint-Laurent-hors-les-Murs, des laïcs extrémistes s’affrontent aux fidèles et veulent jeter son cercueil dans le Tibre en criant « Al fiume il Papa porco… ! » (« Au fleuve le pape porc !… »). Ce climat passionnel s’atténue au cours des années suivantes.

Le pape aurait pu être inhumé dans les grottes vaticanes, sous la basilique Saint-Pierre, mais ce fut sa volonté expresse de l’être en la basilique Saint-Laurent-hors-les-Murs, dans le territoire de son diocèse romain. Sa dépouille fut gardée un court délai au cimetière de Campo Verano, voisin de la basilique, le temps que l’on y aménage son tombeau. Celui-ci se trouve désormais dans la chapelle située en contrebas du chœur de la basilique Saint-Laurent-hors-les-Murs, dans un cercueil de verre, revêtu du complet habit papal de chœur (soutane blanche, rochet blanc, mozette pourpre bordée d’hermine, étole papale et camauro19).

Le 6 avril 2000, sur ordre de Jean-Paul II, il fut procédé par une équipe scientifique et ecclésiastique à l’ouverture du cercueil du pape Pie IX et à l’examen de sa dépouille mortelle dans le cadre de son procès en béatification.

Pie IX eut le plus long pontificat de l’histoire de la papauté : plus de 31 ans (de 1846 à 1878), devant celui de Jean-Paul II (1978-2005) et de Léon XIII (1878-1903).

Il est béatifié en même temps que le pape Jean XXIII le 3 septembre 2000 par Jean-Paul II, non sans que cette béatification ait entraîné des polémiques.

Source : Wikipédia.

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