Albert Ier (Prince de Monaco).

Albert Ier, surnommé « le Prince savant » ou « le Prince navigateur », né le 13 novembre 1848 à Paris et mort le 26 juin 1922 dans la même ville, est prince souverain de la principauté de Monaco du 10 septembre 1889 jusqu’à sa mort. Ce prince aux multiples facettes, au cœur des sociabilités de la Belle époque, est une figure emblématique qui par son humanisme, son mécénat, son art de gouverner, sa curiosité scientifique et sa prise de conscience pionnière des enjeux environnementaux, a fortement contribué au  rayonnement de son pays.


Le 13 novembre 1848, naît à Paris, au 90 rue de l’Université (dans l’actuel 7e arrondissement), Albert Honoré Charles Grimaldi, fils du prince Charles III de Monaco et d’Antoinette-Ghislaine de Monaco, née comtesse de Mérode.

Le 15 ou le 16 juin 1854, sa mère achète le château de Marchais, en Picardie, à proximité de la Belgique, son pays natal. Le lieu est très important pour le jeune prince : le domaine est le petit paradis de son enfance où il peut satisfaire son goût pour l’exercice physique et sa curiosité pour la nature.

En 13 mai 1858, le jeune prince, âgé de 10 ans, pose symboliquement la première pierre du casino des Spélugues, à l’occasion de l’inauguration de l’Élysée-Alberti.

La formation du prince a d’abord été assurée par des précepteurs, notamment l’abbé Charles Theuret. Il étudie dans une institution à Auteuil puis au collège Stanislas de Paris. Après le décès de sa mère, la princesse Antoinette de Merode, il suit, de 1864 à 1865, les cours du petit séminaire de La Chapelle-Saint-Mesmin dirigé alors par Mgr Félix Dupanloup. En 1865, il commence sa formation d’officier de la Marine impériale française, à Lorient, puis il rentre dans la Marine royale espagnole, où il sert durant deux années à Cadix et aux Caraïbes ; il obtient le grade d’enseigne et de lieutenant de vaisseau. Deux ans plus tard, il prend part à la guerre franco-prussienne de 1870 comme lieutenant de vaisseau dans la marine de guerre française. Il est décoré de la Légion d’honneur.

Albert 1er, carte maximum, Monaco.

Par l’entremise de l’impératrice Eugénie (épouse de Napoléon III), il épouse en 1869, au château de Marchais, Lady Mary Victoria Douglas-Hamilton (des ducs d’Hamilton), petite-fille de la grande-duchesse de Bade  Stéphanie de Beauharnais et cousine de l’empereur Napoléon III. Cependant le mariage est un échec. Bien qu’enceinte de plusieurs mois, la princesse quitte Monaco pour le grand-duché de Bade, pays de sa famille maternelle. Elle donne naissance à son fils à Baden-Baden.

Le futur prince Louis, né le 12 juillet 1870, ne fait la connaissance de son père qu’en 1880. Le 3 janvier 1880 est prononcé l’annulation du mariage avec la princesse Mary Victoria par la Cour de Rome. Leur fils est reconnu comme légitime.

Le 10 septembre 1889, le prince Albert Ier accède au trône au décès de son père, le jour même, au château de Marchais. Il prend le deuil pour six mois à compter du lendemain.

Albert Ier se remarie civilement le 30 octobre 1889 avec Alice Heine,  duchesse douairière de Richelieu, à la légation de Monaco à Paris et à la mairie du 8e arrondissement. Le 31 octobre, le mariage religieux a lieu en la chapelle de la Nonciature. Le prince a rencontré Alice Heine dix ans auparavant, lors d’un séjour à Madère. Albert et Alice n’auront pas d’enfants.

Le 30 mai 1902, un jugement sépare officiellement les deux époux.

Le prince Albert Ier est contemporain de l’âge industriel marqué par l’essor des « sciences appliquées », et des « sciences pures ». Ces progrès suscitent l’espoir d’un monde plus juste. Dans ce contexte, le prince Albert Ier, qui fréquente de nombreux savants français et étrangers, participe de ce mouvement et développe une sociabilité favorisée par son condisciple du collège Stanislas, Paul Regnard, qui l’introduit auprès des savants du Muséum national d’histoire naturelle, de la Sorbonne et de la faculté de médecine. Il découvre les nouvelles théories de Charles Darwin ou Claude Bernard et y cherche la réponse aux questions fondamentales de l’origine de la vie. Cet idéal de mieux-être pour l’humanité ne l’empêche pas de conserver une distance et d’être conscient parfois des limites du progrès industriel, par ses atteintes possibles sur l’environnement et la biodiversité.

En janvier 1865, il visite la frégate cuirassée Normandie dans le port de Cherbourg. C’est l’éveil d’une vocation, il se passionne pour l’exploration océanographique dès les années 1870. En 1873, il achète en Angleterre une goélette, et change son nom de Pleiad en celui d’Hirondelle. Pendant dix ans, il entreprend à son bord des croisières en Méditerranée occidentale et dans l’Atlantique Nord, depuis les Canaries et les Açores, jusqu’en Irlande et à proximité de l’Islande. Il peut ainsi satisfaire son goût des voyages et devenir un navigateur toujours plus expérimenté, en attendant les futures campagnes scientifiques.

En 1884, il voit la présentation au Muséum d’histoire naturelle de Paris des résultats obtenus pendant les trois campagnes du Travailleur (1880-1882) et la campagne du Talisman (1883), lors desquelles des équipes scientifiques dirigées par Alphonse Milne-Edwards, professeur au Muséum de Paris, recueillent des organismes vivants et des données physico-chimiques et topographiques. La visite de cette exposition décide le prince Albert à entreprendre des recherches océanographiques. La vocation se réalise alors dans cette décennie 1880. Dès 1885, il organise de nombreuses campagnes scientifiques océanographiques et cartographiques, au cours desquelles il est accompagné par de nombreux spécialistes dans des navires construits et entièrement dédiés à cette recherche (l’Hirondelle I et II, la Princesse Alice I et II, équipés de laboratoires avec des tables anti-roulis). Il découvre à cette occasion de nouvelles espèces, dont le poisson de grande profondeur Grimuldichtys profondissimus, nommé ainsi en hommage aux Grimaldi.

Propriétaire et commandant de son navire, le prince ne souhaite pas être réduit au rôle de mécène ainsi que sa position le lui permettrait. Il n’accepte pas davantage d’être un yachtman pratiquant une « océanographie de loisir », à l’instar de la pratique d’autres souverains européens. Pendant toutes ses campagnes, c’est lui qui décide du lieu et du programme de recherche, même s’il ne prétend pas être omniscient. Le prince Albert Ier est  représentatif de l’apport scientifique des autodidactes avant la professionnalisation de la science après la Première Guerre mondiale.

Pour pratiquer cette science nouvelle qu’est l’océanographie, le navire est essentiel. Après l’Hirondelle, aménagée pour les travaux scientifiques, sur laquelle il accomplit ses premières campagnes de 1885 à 1889, il fait construire trois yachts, de plus en plus grands, puissants et rapides. En 1890-1891, les chantiers Green de Blackwall près de Londres construisent un trois-mâts goélette équipé d’une machine auxiliaire, long de 53 mètres, d’un déplacement de 650 tonnes, que le prince baptise en hommage à sa seconde épouse, la princesse Alice. Ensuite, la seconde Princesse-Alice est lancée en 1897 aux chantiers Laird de Birkenhead près de Liverpool, pour lui permettre de naviguer dès l’année suivante vers les régions polaires. Long de 73 mètres, ce deux-mâts a un déplacement de 1 400 tonnes ; sa machine permet d’atteindre une vitesse de 13 nœuds. Enfin, une seconde Hirondelle est construite en 1910-1911 aux Forges et chantiers de la Méditerranée à La Seyne. Équipée de deux hélices, d’une longueur de 82 mètres et d’un déplacement de 1 600 tonnes, elle peut naviguer à la vitesse de 15 nœuds grâce à la puissance de ses deux machines de 2 200 chevaux. Ce dernier bateau est plus équipé sur le plan technologique : éclairage électrique, chambres froides, distillateur d’eau de mer, tables à roulis et tables éclairantes, usage de la vapeur et de l’électricité pour les engins du bord, télégraphie sans fil.

À bord de chaque nouveau yacht, le personnel navigant contribue au succès des opérations. Sur l’Hirondelle, l’équipage comprend un maître  d’équipage, Jean-Auguste Le Grené, et une quinzaine de matelots, bretons pour la plupart. À bord de la Princesse-Alice, le prince est assisté par un commandant en second britannique Henry Charlwood Carr et trois maîtres d’équipage. La machine rend nécessaire le recrutement mécaniciens et de chauffeurs. Le personnel de service comprend maître d’hôtel, valets, lingères, cambusier, cuisiniers, pâtissier et boulanger. Sur la seconde Princesse-Alice, Carr est remplacé en 1907 par Georges d’Arodes. Charles Sauerwein puis Henri Bourée, officiers de marine français, sont  respectivement embarqués en 1902 et 1906. Un opérateur radio est embauché pour la TSF installée sur la seconde Hirondelle.

L’élément permanent de l’état-major scientifique est le principal collaborateur du prince, Jules de Guerne puis Jules Richard. Des savants français et étrangers, de un à quatre selon les années, sont invités à bord, parfois à plusieurs reprises. Leur spécialité varie, depuis l’océanographie physique (Julien Thoulet), la physique et la chimie (l’Écossais John Young Buchanan), le plancton (l’Allemand Karl Brandt), la physiologie (Paul Portier et Charles Richet), la biochimie (Gabriel Bertrand), la zoologie (Louis-Eugène Bouvier) jusqu’à la météorologie (l’Allemand Hugo Hergesell). Un médecin est responsable de la santé du bord.

Dès 1888, un artiste est embarqué à bord pour noter dès leur sortie de l’eau, la forme et les nuances des animaux et des végétaux avant qu’elles se modifient. Cette tâche est confiée à Marius Borrel, Jeanne Le Roux, Charles Boutet de Monvel, au comte italien Witold Lovatelli Colombo, à l’Écossais William Smith, et enfin et surtout, à partir de 1904, à Louis Tinayre, remarquable par la qualité de son travail et les liens personnels qu’il tissera avec le prince. Les plaques autochromes, mises au point par Louis Lumière, sont également utilisée à des fins scientifiques.

Les vingt-huit campagnes, organisées et dirigées par le prince Albert entre 1885 et 1915, se déroulent entre mai et octobre et durent de sept à quatorze semaines.

Elles sont organisées en stations, durant lesquelles se succèdent diverses opérations. La première consiste à déterminer la position géographique du navire ; les observations et les calculs pour connaître la latitude et la longitude sont effectués par le commandant en second. Ensuite un sondeur est descendu pour savoir à quelle profondeur se trouve le fond et déterminer la longueur de câble qui doit être filée pour la mise à l’eau des autres engins. Au total, 3 698 stations ont été exécutées sous la direction du prince.

Ces manœuvres permettent d’obtenir deux catégories de résultats ; d’une part, la récolte des organismes animaux ou végétaux de toutes tailles, fixés sur le fond ou mobiles ; d’autre part, la connaissance des caractéristiques du milieu où vivent ces organismes : température, salinité, déplacement des masses d’eau.

Trois des quatre croisières de l’Hirondelle ont pour objectif l’étude du mouvement des masses d’eaux superficielles dans l’Atlantique Nord. Près de 1 700 flotteurs sont mis à l’eau, dans les parages des Açores, le golfe de Gascogne, près de Terre-Neuve et sur le trajet de cette île jusqu’à Lorient. Le lieu et la date auxquels les flotteurs sont récupérés fournissent les éléments pour déterminer le trajet suivi et la vitesse de déplacement. La carte tracée à partir de ces données est un des éléments majeurs présentés dans le pavillon de Monaco à l’Exposition universelle de Paris de 1889. Le prince y a aussi rassemblé les animaux récoltés, les appareils utilisés ainsi que des maquettes et des photographies.

Sept campagnes sont accomplies à bord de la première Princesse-Alice, de 1891 à 1897, en Méditerranée et surtout dans l’Atlantique tempéré dans les parages des Açores, à proximité desquelles il est possible d’avoir accès à des profondeurs considérables. La seconde Princesse-Alice accomplit douze campagnes, de 1898 à 1910, dont quatre au Spitzberg. Il participe en effet à l’exploration du Svalbard, lors de quatre campagnes scientifiques, en 1898, 1899, 1906 et 1907. Il en rédige une cartographie très précise au début des années 1900. Certaines de ces cartes sont encore utilisées de nos jours, à défaut d’en avoir édité de plus récentes. La toponymie du Spitzberg est marquée par le passage du prince Albert Ier.

Cinq campagnes scientifiques sont accomplies sur la seconde Hirondelle, de 1911 à 1915. Au total, 3 698 stations océanographiques auront été effectuées.

Une fois la campagne terminée, un premier tri des animaux récoltés est fait ; les spécimens sont envoyés pour détermination et examen aux  spécialistes, français ou étrangers, du groupe zoologique correspondant. Les conclusions sont présentées es par des revues spécialisées et sont intégrées dans la communication que le prince Albert présente à l’Académie des sciences de Paris, après chaque campagne.

Une série spécifique est créée : Résultats des campagnes scientifiques accomplies sur son yacht par Albert Ier, prince souverain de Monaco. À partir de 1889, cent dix volumes sont publiés, imprimés à Monaco.

La contribution scientifique du prince a été notamment décisive dans trois domaines de l’océanographie : l’instrumentation, la cartographie et la propagation des connaissances.

Une instrumentation, diversifiée et adaptée aux opérations, conditionne la fiabilité et des prélèvements. Il ne cesse d’inventer ou d’améliorer des appareils : chalut de surface, flotteurs mis à l’eau par l’Hirondelle, filet à gouvernail, dynamomètre à ressort, sondeur à clef, nasses triédriques et hexagonales, machine à sonder.

Le prince manifeste également un vif intérêt pour la cartographie. Les campagnes dans l’Arctique (1898, 1899, 1906 et 1907) aboutissent à des progrès importants pour la cartographie du Svalbard. L’hydrographie et la topographie de la baie Red, située au nord du Spitzberg, sont précisées dans la carte issue des relevés du lieutenant de vaisseau Guissez. La topographie de la partie nord-ouest de l’île est établie par la mission norvégienne dirigée par Gunnar Isachsen.

La Carte générale bathymétrique des océans demeure la contribution majeure du prince dans ce domaine. Au printemps 1905, les vingt-quatre feuilles de la première édition sont imprimées.

La diffusion des connaissances océanographiques est une préoccupation constante du prince. Il veut faire connaître à un plus large public ses travaux. Il s’y emploie par les publications, la participation à de nombreuses expositions, et la présentation de communications aux académies et sociétés savantes françaises et étrangères, à des congrès nationaux et internationaux.

Sa décision d’édifier à Monaco un Musée océanographique est motivée par sa volonté de conserver, de faire connaître et étudier le produit de ses campagnes scientifiques ; il s’y ajoute le souci de sensibiliser les visiteurs à l’importance du rôle des océans dans les aspects les plus divers de la vie de la planète. Le 26 mai 1898 débutent les travaux du Musée océanographique, après adjudication des travaux. Le 25 avril de l’année suivante est posée la « première pierre » du musée océanographique : il s’agit davantage d’une cérémonie et d’une manifestation « médiatique » et diplomatique, l’une des premières tentatives faites par le prince Albert Ier pour un rapprochement entre la France et l’Allemagne. Entièrement consacré à la mer, le musée, avec laboratoires, collections de pièces rapportées de ses explorations, aquariums de faune et de flore des fonds sous-marin de la Méditerranée, librairie scientifique, archives, etc., est officiellement inauguré le 29 mars 1910. Ni le président français Armand Fallières, ni l’empereur Guillaume II, ne répondent à l’invitation, ce qui ne contribue pas à créer un événement politique. Le « Prince savant » déclare lors de l’inauguration : « Ici, messieurs, vous le voyez, la terre monégasque a fait surgir un temple fier et inviolable dédié à la divinité nouvelle qui règne sur les intelligences ». La création de son pendant l’Institut océanographique de Paris (rue Saint-Jacques, inauguré en 1911) est quant à elle destinée à assurer un enseignement, à la fois universitaire et populaire, des sciences de la mer.

Sa présence dans de nombreuses sociétés savantes contribue également à la diffusion et au rayonnement de ses travaux. Le 27 avril 1891, le prince Albert Ier est notamment élu correspondant de l’Académie des sciences de Paris, dans la section de géographie et navigation ; il sera par la suite élu associé étranger de la même Académie des sciences, remplaçant la place laissée vacante par le décès de Lord Kelvin.

En 1907, il est l’un des membres fondateurs de la Société des Amis du  Muséum national d’histoire naturelle. Il est membre et de la British Academy en 1909, dont il est décoré de la médaille d’or pour ses nombreuses contributions scientifiques. En 1912, il prononce un Discours à la Real Sociedad geografica de Madrid qui résume bien son ambition d’une internationale scientifique : « Et j’ai fondé l’Institut océanographique où les savants de toutes les nations peuvent travailler en réunissant leurs efforts. Les laboratoires avec le Musée sont à Monaco dans un palais digne de l’humanité intellectuelle ; le centre de diffusion nécessaire pour cette culture nouvelle est à Paris dans le monde universitaire ».

Enfin, son dernier voyage aux États-Unis, en 1921, est la consécration de ses travaux scientifiques. Le 23 avril, le prince reçoit, à New York, la médaille Cullum de la Société américaine de géographie. Le 25 avril au United States National Museum Auditorium de Washington, D.C., le prince Albert  prononce le Discours sur l’Océan (Speech on the ocean) devant l’Académie nationale des sciences : « J’ai fait entrer dans le domaine de  l’Océanographie l’étude des phénomènes observés dans la haute atmosphère qui plane au-dessus des océans. Il paraît évident que ces espaces reçoivent de la mer les principaux éléments de leur activité, quand on songe aux effets de l’évaporation immense et des vents qui brassent continuellement la surface des eaux ». Le 26 avril, la médaille Agassiz, décernée par l’Académie nationale des sciences, est remise solennellement au prince Albert Ier.

Sa curiosité historique le porte vers les origines de la vie et de l’humanité, par-delà l’océan. Ses premières investigations personnelles dans les sciences de l’homme se situent aux grottes des Baoussé Roussé, près du hameau italien de Grimaldi, à proximité de Monaco. En 1883, il devient membre de la Société d’anthropologie de Paris et entreprend des fouilles dans ces grottes. Il fait opérer plusieurs campagnes de fouilles  archéologiques dont, en particulier, celle des grottes de Grimaldi entre 1895 et 1904. Le 21 avril 1902, il fonde le musée d’Anthropologie préhistorique de Monaco. Par cette action, le prince témoigne de son souci de conservation des collections, souhaitant que les objets préhistoriques et archéologiques recueillis au cours de fouilles ne soient pas dispersés mais restent réunis dans un musée. Le premier directeur est le chanoine Léonce de Villeneuve ; le musée est situé sur le Rocher, dans l’ancien hôtel du Gouvernement, où se tient en 1906 la 13e session du Congrès international d’anthropologie et d’archéologie préhistoriques. Afin de pérenniser les études préhistoriques, Albert Ier fonde en 1910 à Paris l’Institut de paléontologie humaine. Il confie l’exploration des sites préhistoriques à des spécialistes, et finance la publication d’ouvrages dans lesquels sont reproduits les dessins et les gravures rupestres des cavernes espagnoles de Cantabrie relevés par l’abbé Henri Breuil et le prêtre allemand Hugo Obermaier, à qui l’on doit la découverte de la Vénus de Willendorf, installé en Espagne. Cet intérêt constant pour la préhistoire et l’anthropologie trouve son aboutissement avec la fondation à Paris en 1910 de l’Institut de paléontologie humaine (voir plus loin). Le paléontologue et géologue Marcellin Boule participe à sa création et en devient le directeur. L’abbé Breuil, qui n’a que 33 ans, sera nommé professeur en titre à la chaire d’« Ethnographie préhistorique ». Cette situation stable lui donnera les moyens de poursuivre et d’amplifier des recherches si bien commencées et c’est grâce au soutien et à la protection du prince Albert Ier qu’il deviendra un « pape de la préhistoire ».

Géographie : Les nombreux voyages et explorations permettent au prince de connaître et de décrire le monde dans ses comptes rendus et ses cartes. La géographie est donc au cœur de ses travaux. Il devient membre de la Société de géographie de Paris le 2 juin 1885.

Médecine : Le prince est conscient des applications médicales liées aux ressources de l’océan. La campagne scientifique de 1901 est  particulièrement fructueuse sur le plan médical ; elle se déroule à mi-distance des îles du Cap-Vert et de l’Équateur, position la plus méridionale atteinte par le Prince. Une station est effectuée jusqu’à 6 035 mètres, profondeur qui ne sera pas dépassée durant un demi-siècle ; elle permet de remonter un poisson et plusieurs invertébrés. Les travaux, commencés alors par deux physiologistes français, Charles Richet et Paul Portier, sur le venin de la physalie et poursuivis après la croisière à Paris, conduisent à la découverte du phénomène de l’anaphylaxie (une forme très brutale de réaction allergique). Cela vaudra à Charles Richet le prix Nobel de médecine en 1913.

En 1915, le prince Albert est élu associé étranger de l’Académie nationale de médecine de Paris. En 1922, l’Académie de Marine de Paris élit le prince Albert Ier membre associé.

Albert Ier accède au trône le 10 septembre 1889 après le décès de son père Charles III. Ses travaux scientifiques ne l’éloignent pas des nécessités du gouvernement et il s’attache à administrer au mieux son État, où il réside les premiers mois de l’année, dans un équilibre entre modernité et tradition.

De même, sa quête de justice et de vérité le mène à s’intéresser aux affaires extérieures et à s’engager dans de nombreuses causes.

Le 1er juin 1885, le prince Albert, alors à Paris, assiste aux funérailles nationales de Victor Hugo, mort le 22 mai 1885. La cérémonie  l’impressionne et la figure de l’écrivain peut guider ses engagements, il rend compte de cet événement le lendemain dans une lettre adressée à son père, Charles III.

Le rayonnement scientifique contribue aussi à la reconnaissance politique, en témoigne les nombreuses fondations à l’extérieur qui permettent de diffuser les résultats des travaux menés par le prince et ses équipes. En 1906, après des années de recherches et d’expéditions océanographiques, alors âgé de 58 ans, il crée la Fondation Albert Ier, connue sous le nom d’Institut océanographique, rue Saint-Jacques à Paris en France, reconnue d’utilité publique, afin que son œuvre scientifique soit poursuivie et fait don du Musée océanographique de Monaco à sa fondation. L’établissement est situé à côté de l’Institut de géographie. Cinq ans plus tard, le 23 janvier 1911, est inauguré l’Institut océanographique de Paris, rue Saint-Jacques, en présence d’Armand Fallières, président de la République française.

En 1910, il crée une seconde Fondation Albert Ier, à Paris, qui abrite l’Institut de paléontologie humaine reconnue d’utilité publique dont l’objet est « le progrès de la Science sur toutes les questions relatives à l’origine et à l’histoire de l’homme fossile ». Il s’agit du premier centre de recherche au monde entièrement consacré à l’étude de l’homme fossile, constituant une étape essentielle dans le processus d’institutionnalisation de cette discipline. Le 23 décembre 1920 a lieu l’inauguration de l’Institut de paléontologie humaine de Paris (qui a été créé en 1910, construction du bâtiment par Emmanuel Pontremoli et Constant Roux entre 1911 et 1914, rue René Panhard) en présence du président Alexandre Millerand, du ministre de l’Instruction publique André Honnorat et des plus hautes personnalités du monde universitaire.

Il s’agit des deux fondations les plus anciennes, après l’Institut Pasteur, créé en 1887.

Plusieurs édifices attestent encore de nos jours de l’œuvre du prince Albert Ier et perpétuent sa mémoire sur le territoire : sur le Rocher, le musée océanographique, le lycée, la statue de François Cogné (en 1951) dans les jardins Saint-Martin, ainsi que de nombreuses plaques dans des lieux emblématiques.

De même, le monument, réalisé par le sculpteur marseillais Constant Roux, intitulé La Science découvrant les richesses de l’Océan, réalisé à la demande des représentants des colonies étrangères résidant à Monaco, inauguré le 13 avril 1914 place du Palais à l’occasion des fêtes jubilaires pour le 25e anniversaire de l’avènement de son règne. Le groupe, de forme pyramidale, se compose de trois figures féminines : drapée dans un filet, l’Océanographie se campe fière et noble au sommet d’un rocher symbolisant Monaco, le profil du Prince sculpté en demi-relief au côté de l’allégorie le laisse supposer, tandis que deux Néréides nues remontent des abysses plusieurs spécimens de la faune marine.

La veille, le 12 avril, avait été dévoilée une maquette en taille réelle d’environ 9 m de hauteur, en plâtre granité, d’un monument que les Monégasques souhaitaient ériger en l’honneur du prince Albert Ier. La maquette se composait des éléments suivants : un piédestal carré portant, sur la face principale, une dédicace en latin ; au-dessus du piédestal, une colonne à cannelures et chapiteau corinthien portant à sa base, gravés sur des moulures, trois mots : « Constitution », « Hôpital », « Lycée » ; un globe terrestre en marbre blanc représentant la Mappemonde, les mers et les océans étant indiqués en mosaïque bleue surmontait le chapiteau du monument commémoratif offert par la population monégasque à cette occasion, par souscription, boulevard de la Condamine. Cette maquette, puisque le monument ne sera jamais réalisé du fait des circonstances économiques et de guerre, est restée en place jusqu’à sa dégradation et sa destruction du fait des travaux d’aménagement de la zone portuaire.

Albert Ier meurt en 1922 à Paris, à l’âge de 73 ans. Son fils Louis II lui succède. Les îles du Prince-de-Monaco (Kerguelen) ou le cap Albert-de-Monaco (Antarctique) sont nommés en hommage à son œuvre exploratrice scientifique.

En 1921 est créé le prix Albert-Ier, décerné chaque année par la fondation. Ce prix, décidé par l’Académie nationale de médecine, a pour mission de récompenser un travail qui a fait progresser dans le diagnostic ou le traitement de cancers.

Le 30 juillet 1922 est inaugurée l’avenue Albert-Ier à La Turbie, commune limitrophe de Monaco. En 1932, Paris donne son nom à l’avenue Albert-Ier-de-Monaco, située près du palais de Chaillot.

En 1948, le centenaire de sa naissance est célébré. En 1998, c’est le 150e anniversaire qui est fêté, grâce un important travail scientifique, notamment celui de l’historienne Jacqueline Carpine-Lancre, qui consacre de nombreux ouvrages et articles à l’œuvre du prince Albert Ier.

Son arrière-arrière-petit-fils, le prince Albert II, ambitionne de poursuivre l’œuvre de son aïeul avec sa fondation Prince-Albert-II-de-Monaco créée en 2006. Le 29 janvier 2019, il installe le Comité de commémoration Albert Ier-2022, chargé d’organiser et de coordonner les manifestations célébrant l’œuvre d’Albert Ier, à l’occasion du centenaire de sa disparition. De nombreux événements commémoratifs sont organisés en 2022 : plusieurs documentaires, dont celui de Yann-Antony Noghès, Un combat pour la paix ; des hommages dans différents lieux de mémoire, à Monaco et ailleurs ; un colloque international ; une ciné-conférence ; des actions menées par différentes institutions culturelles ; la publication du beau livre Les mondes d’un prince aux éditions de La Martinière ; et de nombreux expositions : au Fram Museum à Norvège (22 juin 2022-31 août 2022), bientôt à Lisbonne au musée de la Marine et pendant l’été 2022 à Monaco, à la gare SNCF, sur les grilles des jardins Saint-Martin et au quai Antoine-Ier avec l’exposition « Albert Ier et Louis Tinayre. Le prince et le peintre. Une amitié à la  découverte du monde », du 16 juillet 2022 au 11 septembre 2022.

Source : Wikipédia.

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