Le palais de Chaillot

Le palais de Chaillot est situé sur la colline de Chaillot à Paris, dans le 16e arrondissement, place du Trocadéro-et-du-11-Novembre. Il est réalisé lors de l’exposition universelle de 1937 par les architectes et grands prix de Rome Léon Azéma, Jacques Carlu et Louis-Hippolyte Boileau, en lieu et place du palais du Trocadéro.

Le palais du Trocadéro sera finalement détruit, remplacé par le palais de Chaillot bâti pour l’exposition spécialisée de 1937, qui reprendra lui-même l’essentiel de l’ossature de l’ancien édifice, notamment les ailes et les verrières et la fondation des colonnade (seule la partie centrale du palais du Trocadéro laissera la place à une esplanade, ce qui implique de creuser sous terre pour enfouir le nouveau théâtre). Sont également conservées les « fermes métalliques curvilignes en tôle découpée de la charpente », visibles dans la galerie des moulages du musée bien que la structure générale devienne en béton armé, les piles porteuses étant doublées de pierres meulières, les murs étant édifiés en moellons de pierre, en parpaings de béton, en briques pleines ou creuses alors qu’ils sont ensuite recouverts de plaques de pierre de Bourgogne et de pierre reconstituée (à noter que derrière ces plaques se trouvent encore les murs de pierre de l’ancien palais du Trocadéro) ; les planchers sont constitués de dalles de béton armé alors que les menuiseries sont métalliques (elles ont été posées assemblées). Le nouveau projet est représentatif d’un style épuré et néoclassique dit « de l’entre-deux-guerres », contrastant avec l’ancien bâtiment, jugé trop éclectique, voire indéfinissable ; Azéma parle même d’un projet « néo-romain » bien qu’il ne faille pas y voir une résonance particulière à l’architecture totalitaire, ce type de bâtiment étant courant à cette période également aux États-Unis ou au Royaume-Uni.

Carte maximum, Palais de Chaillot, 21/09/1948.

Parmi les projets initiaux n’ayant pas été retenus, on compte celui d’Auguste Perret, qui entrait dans le cadre de son désir de créer un axe allant de la place Dauphine à la place d’Italie. Au Trocadéro, il propose de créer une « cité des musées », quatre grands édifices reliés par une colonnade d’environ 200 mètres, plusieurs terrasses permettant plus bas de rejoindre la Seine. La crise économique et la chute du gouvernement Daladier, partisan du projet, conduit dès lors à choisir une idée moins coûteuse, qui reprend pour partie la structure de l’ancien palais du Trocadéro.

Palais de Chaillot, bloc collectif (1948).

Les architectes Jacques Carlu, Louis-Hippolyte Boileau et Léon Azéma sont chargés du projet. On choisit d’« enchemiser » les ailes de l’ancien palais en les « doublant par une nouvelle galerie du côté Seine » mais de détruire la salle de spectacle et des deux tours pour les remplacer par une simple esplanade, dans l’« axe tour Eiffel-École militaire » alors qu’une « nouvelle salle de théâtre [est] aménagée sous ce parvis ». Le style du nouveau palais est « monumentaliste néo-classique ». La superficie du nouveau palais est portée à 41 000 m2, contre 17 000 auparavant ; la nouvelle esplanade est ouverte sur 125 mètres et large de 60 mètres. Pour contenter les architectes non retenus par le concours (bien que les noms aient déjà été précédemment choisis), certains se voient confier une partie des travaux : Édouard et Jean Niermans aménagent la nouvelle salle de spectacle, Louis Süe et Gustave-Louis Jaulmes décorant le foyer, le bar-fumoir et la galerie centrale du foyer et Roger-Henri Expert les fontaine. Des grèves syndicales ponctuent néanmoins la construction en 1936 et le palais ne sera pas achevé à temps, du moins pour les parties intérieures, le théâtre n’étant terminé qu’en 1939. La revue La Nature note, dans son numéro du second semestre de 1936 : « Un coup de mine dans les arcades du Trocadéro : construit pour durer des siècles, l’ancien palais aura été abattu au bout de cinquante-sept ans ». Contrairement à l’ancien, le nouveau palais offre une harmonie générale dans ses proportions.

Lors de l’exposition de 1937, les pavillons des puissances invitées sont installés dans les jardins. Celui de l’URSS, du côté de l’aile de Passy, comporte la statue L’Ouvrier et la Kolkhozienne de la sculptrice Vera Moukhina ; en face, celui de l’Allemagne du Troisième Reich est surmonté d’un « aigle doré juché sur [une] croix gammée », et a été conçu par Albert Speer. Dans la perspective du palais et de la tour Eiffel, située sur la place du Trocadéro, s’élève la Colonne de la paix, réalisée par Albert Laprade. Pour la première fois, l’électricité est utilisée de façon massive, créant ainsi une attraction nocturne appréciée sur la colline de Chaillot.

Le palais sert de cadre à la commémoration de la Révolution française de 1789 et de la Fête de la fédération de 1790, lors d’une fête de l’unité nationale, le 14 juillet 1939 ; le champ de Mars, où s’était déroulée cette manifestation 149 ans plus tôt, se situe de l’autre côté du pont d’Iéna. « Pavoisés aux couleurs de la France, le palais de Chaillot et le Champ-de-Mars servent de cadre aux cérémonies solennelles et aux réjouissances populaires qui accompagnent l’évènement. […] Pour marquer l’événement, la terrasse du [palais] est drapée et ornée d’une immense cocarde tricolore agrémentée, en son centre, du moulage de la Marseillaise de François Rude. Des faisceaux de licteurs de 15 mètres de haut pavoisés aux couleurs de la France sont également dressés sur le parvis ». Albert Lebrun, président de la République, prononce un discours à la foule, amassée autour de la fontaine, sous la pluie ; le journal Le Temps note que la France avait « donné au monde et à […] elle-même le spectacle d’une force militaire bien faite pour décourager l’esprit d’agression quels que puissent être l’enivrement et la présomption des agresseurs éventuels ». Quarante-cinq jours après débute la Seconde Guerre mondiale.

Le 23 juin 1940, après l’invasion allemande, le Führer Adolf Hitler et son entourage militaire parcourent l’esplanade du Trocadéro. Il prévoit dès lors d’en faire une copie à Berlin[réf. nécessaire] pour la future « Welthauptstadt Germania », projet qui sera finalement abandonné. Une cérémonie est organisée le 22 juin 1943, pour marquer l’opération Barbarossa (invasion allemande en URSS), deux ans plus tôt. Des musiques héroïques sont diffusées, puis un Appel aux morts de la L.V.F. ; des bannières de la LVF et de l’Allemagne nazie sont étendues sur le palais. Un canon antiaérien est installé par les troupes alliées le lendemain de la Libération de Paris dans le grand bassin de la fontaine du jardin du Trocadéro. Le 25 juillet 1945, les funérailles nationales de l’écrivain Paul Valéry y sont organisées : le « catafalque aux couleurs de la France » disposé sur l’esplanade reçoit les « honneurs militaires et le recueillement de la population ».

L’ONU, qui vient d’être créée en 1946, tient au palais de Chaillot deux sessions de son Assemblée générale, la 3e (septembre-décembre 1948) et la 6e (novembre 1951-février 1952), car presque toutes les institutions onusiennes n’avaient pas de sièges définitifs. Le palais bénéficiera à ce titre d’une exception d’extraterritorialité temporaire. Le 1er septembre 1948, le ministre français des Affaires étrangères Maurice Schumann remet symboliquement les clefs du palais au secrétaire général de l’ONU, Trygve Lie. L’Assemblée générale y adopte la Déclaration universelle des droits de l’homme le 10 décembre 1948 (une plaque commémorative rappelle cet évènement dans le théâtre). Des premiers préfabriqués sont édifiés dans les jardins par l’architecte Jacques Carlu, qui pendant son exil forcé aux États-Unis pendant la guerre avait acquis de maîtrise la conception de tels bâtiments. Pendant cette période, le fonctionnement du théâtre et du musée de Chaillot sont fortement perturbés.

En 1951, afin de recevoir la sixième assemblée générale, d’autres bâtiments provisoires préfabriqués situés de l’esplanade jusqu’à l’actuelle avenue des Nations-Unies et autour de la fontaine, sont construits en 135 jours, toujours sur les plans de Carlu mais plus ambitieux (25 000 mètres carrés avec charpente métallique et montage à sec ; ils resteront en place une dizaine d’années). Ce sera la dernière session de l’assemblée générale avant son transfert définitif à New York. Véritable centre international où se pressent 3000 fonctionnaires, diplomates et journalistes (Libération parle du « siège du gouvernement du monde »), le palais accueille également, entre le 28 avril 1952 et le 15 décembre 1959, le siège de l’OTAN, qui est ensuite déplacé au palais de l’OTAN (actuelle université Paris-Dauphine). Le 23 octobre 1954 a lieu au palais la signature du protocole d’adhésion de l’Allemagne de l’Ouest à l’OTAN ; à cette occasion est créée l’Union de l’Europe occidentale, installée dans une partie du bâtiment créée par Perret, en face de l’aile Paris. En 1960, les préfabriqués sont détruits.

Assemblée des Nations unies, palais de Chaillot, 1951.

Pour commémorer l’endroit, le président de la République française François Mitterrand renomme l’esplanade « parvis des droits de l’homme », le 30 mai 1985.

Un incendie survenu le 22 juillet 1997, à 22 heures, abîme les collections du musée des monuments français, tant par les flammes (notamment la charpente qui venait d’être rénovée) que par les jets d’eau utilisés par les pompiers.

Le Palais de Chaillot abrite plusieurs musées dont le musée de l’Homme, de la Marine dans son aile ouest, le Théâtre national de Chaillot, ainsi que la Cité de l’architecture et du patrimoine dans son aile est (Musée des monuments français, École de Chaillot et Institut français d’architecture). La restructuration de l’aile de Paris s’est accompagnée du déménagement définitif de la Cinémathèque française à Bercy logée dans le palais entre 1963 et 2005.

Source : Wikipédia