Ville d’Aix-les-bains (Savoie).

Les historiens s’accordent à dire qu’Aix est née de ses sources d’eau à l’époque romaine, sur les restes d’un habitat celtique. Les premières occupations du site ont été datées par Alain Canal du premier siècle avant notre ère, cependant rien ne permet d’attribuer ces vestiges à un habitat fixe. Il ne nous reste que les ruines d’établissements publics et l’on serait bien en peine d’établir une esquisse de « l’Aquae » antique. La situation administrative du lieu est connue par l’épigraphie, qui nous apprend qu’Aix était au Ier siècle de notre ère un « vicus », doté d’un conseil de « decemlecti » (conseil municipal de dix membres), faisant administrativement parti de la cité de Vienne. Quelques citoyens vivaient là avec, semble-t-il, des moyens assez importants pour offrir aux dieux un bois sacré, une vigne ou se faire construire un arc funéraire pour le cas de la famille des Campanii.

Les archéologues ont découvert au cours de fouilles un important complexe thermal, à proximité immédiate des sources. Sur une terrasse inférieure, à l’ouest, se trouvait l’arc de Campanus, probablement construit au Ier siècle et, plus en aval, une seconde terrasse portait le temple dit de « Diane », qui avait remplacé au IIe siècle un édifice circulaire plus ancien, probablement contemporain de l’arc. Des vestiges de nécropoles ont été dégagés au nord du temple. Le parc des Thermes ainsi que différents autres lieux éparpillés en ville,

renferment de nombreux vestiges très divers : restes de nécropoles, poteries, etc. Cependant, aucune pièce maîtresse qui aurait conduit à des fouilles archéologiques approfondies n’est présente. À défaut, rien ne nous permet de connaître le vicus gallo romain d’Aquae, ni dans son étendue, ni dans la disposition de son habitat. Où les « Romains » habitaient-ils ? Où se situaient leurs exploitations agricoles, les villages de leur personnel ; quelles étaient les activités du vicus ? Les seuls indices sont issus de la carte archéologique des vestiges dressée par les services archéologiques de la Drac, et l’archéologue Alain Canal. Celui-ci permet alors de conclure que « Paradoxalement, si Aix a livré de nombreux documents illustrant l’ancienneté du site et la qualité de l’urbanisme monumental dès le début de l’Empire, nous n’avons aucune connaissance précise sur l’ordonnance de cette bourgade ».

En guise de synthèse, l’histoire de la période peut se résumer à l’occupation du site du centre ville depuis le Ier siècle avant notre ère, puis par un aménagement progressif de la zone entre les Ier et IIe siècles. L’occupation semble s’être faite à partir de l’édification progressive du complexe thermal, autour duquel rayonnaient des édifices monumentaux présentés sur un système de terrasses, qui ont évolué plusieurs fois au cours de la période romaine. Si les sources chaudes furent à l’origine de l’emplacement choisi d’autres facteurs, comme la qualité du site, ont peut-être été déterminant.

La connaissance de l’histoire d’Aix déjà bien pauvre à l’époque romaine, s’obscurcit encore par suite du manque de sources concernant la fin de l’Empire romain et le haut Moyen Âge. Nous en sommes réduits à des conjectures en étudiant les destructions dues aux invasions barbares qui ont laissé des traces d’incendies sur les villas gallo-romaines des environs. Toujours est-il que les thermes romains d’Aix tombent en ruines à partir du Ve siècle et que la trace des aménagements urbains se perd.

Aix les bains, carte maximum, 17/07/1965.

Aix n’est de nouveau mentionné dans les sources qu’au IXe siècle, en 867, puis entre 985 et 1020, au travers de diplômes, de chartes et de donations. Dans ces dernières, le roi Rodolphe III de Bourgogne fait don de la villa sedes regalis d’Aix, qualifiée de siège royal, avec ses colons et ses esclaves à sa femme Ermengarde qui, à son tour, les transmet à l’évêché de Grenoble. Cette charte nous apprend qu’Aix est une bourgade, possédant une église et des domaines agricoles. L’évêque Hugues de Grenoble en fait ensuite don au monastère Saint-Martin de Miséréré, au début du XIIe siècle. Celui-ci érige l’église en prieuré cure, sous le vocable de Sainte Marie.

Le cartulaire de l’église-cathédrale de Grenoble, dit cartulaire de Saint Hugues, révèle, à la fin du XIIe siècle, l’existence de deux autres paroisses, celle de Saint-Simond avec son église et celle de Saint-Hippolyte avec aussi un petit prieuré. La géographie urbaine commence à s’éclaircir : il faut imaginer la petite bourgade, enserrée dans ses remparts, dont personne ne sait quand ils ont été construits. Le point central de la cité est le prieuré, à proximité de l’ancien temple romain. Ce centre pourrait être aussi le centre administratif puisqu’au moins depuis le XIIIe siècle, Aix est une seigneurie inféodée à la famille de Seyssel, qui y possède un château qui, même si nous ne savons pas le situer avec certitude, était probablement à l’emplacement du château actuel. Deux hameaux sont attestés, Saint-Hippolyte, à proximité immédiate de la ville mais hors les remparts, avec comme centre un petit prieuré et à son côté, actuellement sous la villa Chevalley, une maison forte, dite de Saint-Hippolyte-sur-Aix ou Saint-Paul (Saint-Pol), dépendant de la famille de Savoie que les dernières études datent du XIIIe siècle. Un second village d’importance apparaît, Saint Sigismond, doté lui aussi d’une église et d’un cimetière, érigé en paroisse, membre dépendant de Saint Hyppolite.

Les textes laissent supposer l’existence d’autres villages dont la trace n’est certifiée qu’à partir de 1561, lors du dénombrement général de la population pour la gabelle du sel. À cette époque, sur les 1 095 habitants d’Aix, 46 % logent dans le bourg ; Saint Simond compte 125 habitants, Puer 91, Choudy 87, Lafin 86, et le reste des hameaux, soit une dizaine, se partagent le reste (Marlioz ayant échappé aux sources). Cette géographie de l’habitat semble figée jusqu’à la fin du XIXe siècle. L’abbaye voisine d’Hautecombe possédait à Aix un assez grand domaine sur le haut de Saint Simond.

Au début du XVIe siècle, l’antique église Sainte-Marie est victime d’un incendie dévastateur. Pour la reconstruire les Aixois font appel à Claude de Seyssel, un membre de la famille seigneuriale de la ville, élevé à la dignité épiscopale. Il est en effet évêque d’Albi et, surtout, conseiller particulier du roi de France Louis XII. Il est aussi l’auteur d’un certain nombre de traités de droit. Grâce à son appui les De Seyssel font édifier une église collégiale, dotée d’un chapitre de douze chanoines, commandé par un doyen, dont la nomination revient au comte. Une église est édifiée sur la place, voisine du cimetière, et comporte un chœur de style gothique flamboyant. Si le chœur appartient à la collégiale, la nef elle, appartient aux paroissiens et présente un aspect plus sommaire. D’ailleurs la voûte, mal construite, s’écroule en 1644. Parmi les chapelles latérales, l’une est réservée aux De Seyssel d’Aix qui y enterrent leurs morts. La collégiale, devenue entièrement paroissiale après la Révolution, est démolie en 1909, après la construction de la nouvelle église. Cette église était connue pour abriter une relique de la vraie croix, que l’on venait vénérer d’assez loin. C’est aussi à la fin du Moyen Âge que le château seigneurial d’Aix est reconstruit. Le plafond de la grande salle du rez-de-chaussée est daté de 1400, quant à l’escalier d’honneur, il fut construit vers 1590.

Aix les bains, essais de couleurs.

Le 9 avril 1739, un gigantesque incendie se déclare au centre-ville et détruit 80 maisons, soit près de la moitié de la ville. Pour la reconstruction on fait appel aux subsides du roi, qui impose un plan d’alignement dont la réalisation est confiée à l’ingénieur Garella. Ce plan va plus loin qu’un simple plan de reconstruction puisqu’il prévoit un véritable alignement des rues, et impose certaines règles d’urbanisme comme la construction de maisons de deux étages sur rez-de-chaussée ; il interdit également les toits en chaume. Toutefois il est très limité dans son périmètre puisqu’il ne concerne que le quartier incendié, soit la rue principale (rue Albert-Ier), la place centrale (place Carnot) et la rue des Bains.

Au début du XVIIe siècle, les Aixois et le monde médical commencent à être sensibilisés à la valeur des sources d’eau chaude d’Aix, grâce aux célèbres écrits du médecin dauphinois Jean Baptiste Cabias, qui est suivi en ce domaine par d’autres médecins de renommée. En effet, depuis l’antiquité l’exploitation des sources d’eau chaude n’a jamais totalement oubliée. On se baignait à Aix au Moyen Âge et jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, soit dans la seule piscine romaine existant encore, à l’air libre, soit chez l’habitant où l’on se faisait apporter l’eau thermale par porteur. Le roi de France Henri IV passe pour avoir fortement apprécié son bain aixois, selon Jean Baptiste Cabias. En 1737, afin de protéger les eaux thermales des infiltrations d’eau du ruisseau qui traverse la ville, un important chantier est programmé par l’Intendance générale. Cela modifie la distribution urbaine du centre-ville, puisqu’il faut creuser un nouveau lit au ruisseau des moulins, à l’extérieur des remparts. Il faut aussi reconstruire les quatre moulins du marquis d’Aix, jusque-là en centre-ville, le long du nouveau canal (actuellement montée des moulins). C’est au duc de Chablais, fils du roi Victor Amédée III, qu’Aix doit sa renaissance, car c’est lui qui après avoir goûté au bienfait des sources et s’y être trouvé mal logé, suggère au roi la construction d’un établissement thermal. Par billet royal du 11 juin 1776 le roi Victor Amédée III charge le comte de Robiland de dresser les plans d’un établissement de bains. Celui-ci est construit de 1779 à 1783 sous la direction de l’ingénieur Capellini. Cette date marque aussi le début de la démolition de l’ancien centre ville car, à la suite de cette construction imposante, on commence à dégager les alentours des maisons pour créer une place. Ce premier établissement thermal devient un facteur important de développement.

Pendant toute cette période et jusqu’à la Révolution, la ville accueille un nombre à peu près stable d’environ 600 curistes l’an, dont une majorité de Français. Consécutivement la population augmente, comme de nombreuses villes à cette époque, avec environ 1 700 habitants en 1793. En 1783, pour agrémenter la vie des curistes, le conseil de la commune fait édifier une promenade publique paysagée : le Gigot, actuellement square A.-Boucher. Elle était alors bordée de marronniers et avait été dessinée par l’architecte Louis Lampro. Mise à part les jardins privés, c’est là la naissance du premier acte d’urbanisme concernant les espaces verts, qui donne un coup de pouce au développement de la ville de ce côté des remparts, le long de la route de Genève. En 1792 les troupes révolutionnaires françaises, sous le commandement de Montesquiou, entrent en Savoie. Le thermalisme marque alors le pas. Les thermes sont réquisitionnés par les armées de la République, qui y envoient les soldats blessés en convalescence. Mais c’est par ailleurs une occasion de faire connaître Aix au plus grand nombre. La Révolution aboutie, abolit les privilèges de la noblesse locale, et permet surtout à la ville de ne pas payer au seigneur marquis d’Aix l’importante somme d’argent qu’elle lui doit à la suite du rachat des droits seigneuriaux (la ville n’avait pas de charte de franchise). En outre la liberté du commerce instaurée donne un nouveau souffle à la création d’une économie basée sur l’exploitation des sources thermales, dès la paix retrouvée. On assiste alors au développement de pensions, d’hôtels, de cabarets et de restaurants entre autres. En revanche, la Révolution laisse ses marques sur les biens d’église : abandon de la collégiale, destruction du clocher et du mobilier d’église.

La ville se dota, de 1896 à 1908, du tramway d’Aix-les-Bains, dont on voit ici le cœur du réseau, à la jonction des rues de Genève et du Casino.

La gare du Revard à Aix était l’origine du Chemin de fer du Mont-Revard, qui reliait la ville au Mont Revard de 1882 à 1937, pour être remplacée par un téléphérique. C’est au bord du lac qu’il faut se déplacer pour trouver la nouveauté. Le petit môle portuaire de Puer, construit sous l’Ancien Régime (1720) devient un véritable port. D’abord fréquenté par les bateaux ravitaillant les troupes de l’Armée des Alpes, doté d’un magasin militaire, il est progressivement aménagé pour l’exportation de marchandises et notamment de la verroterie issue des ateliers installés au bord du lac. Désormais on l’appelle le Port de Puer. Le développement de ce quartier implique la mise en état de « l’avenue du Lac » et toute cette activité attire les premières constructions en alignement le long de cette voie fréquentée, hors du centre et des villages existants.

150 ans d’histoir à Aix les bains, prêt-à-poster.

Avec l’Empire, le thermalisme redevient important dans la cité thermale. C’est à cette période que des personnalités mondiales viennent à Aix-les-Bains comme la famille Bonaparte. Ainsi, les curistes arrivent en masse avec plus de 1 200 personnes recensées en 1808.

Au niveau de l’urbanisme, un plan d’embellissement des rues est adopté le 27 juillet de la même année. Il a pour objectif de « redresser les rues en fonction de l’établissement thermal ». Un itinéraire de délestage est même prévu et de nouveaux axes périphériques sont créés permettant à la ville de s’agrandir à ses extrémités.

En octobre 1816, le premier séjour d’Alphonse de Lamartine dans la cité thermale constitue l’un des éléments fondateurs du mouvement artistique le Romantisme. De retour à Aix-les-Bains l’année suivante, il noiera sa solitude en écrivant les premiers vers du poème Le Lac.

En 1860, grâce à l’annexion de la Savoie par la France, les difficultés douanières qui perturbent l’économie aixoise sont supprimées. En 1866, le château des marquis d’Aix est racheté ce qui permet d’y établir un hôtel de ville ; ainsi, le bâtiment prend une fonction administrative. La voie ferrée et la construction de la gare, actuellement gare d’Aix-les-Bains-Le Revard, en 1866, transforment d’une manière assez importante le paysage urbain aixois, en le séparant en deux zones bien délimitées. Une nouvelle voie est créée, l’actuelle avenue Charles-de-Gaulle.

Grâce aux nombreux aménagements établis par la municipalité, l’économie thermale progresse d’une manière fulgurante. Près de 8 000 curistes sont dénombrés en 1870, environ 14 000 en 1875 et 24 000 dix ans plus tard, en 1885. Le grand Port et les abords du lac deviennent des lieux hautement touristiques à la fin du XIXe siècle. Cet essor économique favorise la création de palace et d’hôtels prestigieux. Vers les années 1880, l’urbanisation avance sur les coteaux d’Aix-les-Bains au détriment des activités agricoles et viticoles.

En 1892 est inaugurée par Jules Roche, alors ministre du Commerce et de l’Industrie, la ligne nouvelle du petit train à crémaillère reliant Aix au plateau du Revard. Elle disposait de sept machines permettant de transporter jusqu’à 550 passagers. La ligne a été fermée au transport des voyageurs le 25 octobre 1935 mais a continué en 1936 pour le transport des marchandises et des matériaux utilisés pour la construction du nouveau téléphérique (présentant à l’époque la plus longue portée du Monde) capable de transporter avec deux cabines 40 personnes en dix minutes d’Aix à la station de montagne du Revard. Victime d’un grave incident mécanique en mai 1968 (qui fort heureusement n’aura causé aucun mort) et faute de moyens financiers, il cesse toute activité en 1969, supplanté par la route. Le Revard demeure néanmoins le deuxième site naturel le plus visité en Savoie

Durant la Première Guerre mondiale, l’activité économique et thermale de la cité s’éteint et conduit à une diversification des activités vers les années 1920. Une grande usine de constructions électriques est implantée sur Aix en 1921. Après la première guerre, la ville reprend vie et de nouveaux aménagements du territoire sont planifiés. Des logements et des quartiers se développent alors.

À la fin des années 1930, la ville se porte candidate pour organiser un « festival des démocraties contre les dictatures », qui deviendra le festival de la ville de Cannes.

Puis vient la Seconde Guerre mondiale avec les combats qui débutent dans les Alpes. L’armée italienne, commandée par Umberto de Savoie et le général Alfredo Guzzoni, formée par 22 divisions et 321 000 hommes se lancent sur les secteurs du Petit-Saint-Bernard et du Mont-Cenis. Face à eux, 185 000 hommes du général René Olry réussissent à résister. Dans la vallée, les Allemands passent le Rhône à Culoz et entrent dans Aix-les-Bains, Chambéry n’est pas encore tombée. La signature de l’armistice le 22 juin 1940 met fin aux combats. Mais un second armistice est signé avec l’Italie le 24 juin qui exige l’occupation de la Haute-Tarentaise et la démilitarisation de la frontière. Cette situation va devenir explosive sur tout le département.

Enfin, après les deux guerres, Aix s’oriente de nouveau vers le thermalisme. Elle devient même la première station thermale de France dans les années 1980 avec près de 60 000 curistes. L’aristocratie étant moins présente, la ville attire petit à petit une clientèle de masse et, en conséquence, la plupart des palaces et grands hôtels ferment leurs portes dans les années 1950 et 1960. La population augmente alors fortement et de nouveaux lotissements sont construits durant les Trente Glorieuses notamment.

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Sources : Wikipédia, YouTube.