Le safran.

Le safran est un produit agricole classé dans la famille des épices. Il est obtenu par la culture de Crocus sativus L. (Iridacée) et par prélèvement et déshydratation des trois stigmates rouges (extrémités distales des carpelles de la plante), dont la longueur varie généralement entre 2,5 à 3,2 cm.

Le style et les stigmates sont souvent utilisés en cuisine, comme assaisonnement ou comme agent colorant. Le safran, appelé parfois « or rouge », est l’épice la plus laborieuse à produire au monde et donc de haute valeur. Il est originaire de Crète, puis s’est répandu au Moyen-Orient. Il a été cultivé pour la première fois dans les provinces grecques, par la civilisation minoenne, il y a plus de 35 siècles.

Le safran est caractérisé par un goût amer et un parfum proche de l’iodoforme ou du foin, causé par la picrocrocine et le safranal. Il contient également un caroténoïde, la crocine, qui donne une couleur jaune-or aux plats contenant du safran. Ces caractéristiques font du safran un condiment fortement prisé pour de nombreuses spécialités culinaires dans le monde entier, notamment dans la cuisine persane. Le safran possède également des applications médicales.

Le mot « safran » est un emprunt au latin médiéval safranum, aussi ancêtre du portugais açafrão, de l’italien zafferano et de l’espagnol azafrán. Safranum est un emprunt à l’arabe zaʿfarān (زَعْفَرَان), « safran, crocus à safran », peut-être croisé avec aṣfar (أَصْفَر), « jaune ».

S’appuyant sur la présence de cultures de safran sur le plateau iranien, on suppose que le mot arabe zaʿfarān proviendrait d’un persan *zar-parân (زرپران), proprement « à plumes dorées », composé de zar (زر), « or » et par (پر), « plume ».


Le crocus domestique C. sativus L. est une plante  vivace à floraison automnale, inexistante à l’état sauvage. Il appartient à la section « Crocus », série « Crocus » du genre, dans laquelle série se trouvent 3 groupes de crocus à safran (9 espèces).

Selon les recherches botaniques, il serait originaire de Crète, et non d’Asie centrale, comme on le croyait autrefois. Le Crocus sativus résulterait d’une sélection intensive de Crocus cartwrightianus, un crocus à floraison automnale, originaire de l’est de la Méditerranée par les producteurs, qui désiraient de plus longs stigmates.

La relation phylogénétique entre Crocus sativus (un triploïde stérile) et Crocus cartwrightianus (diploïde) est évidente. Il n’est cependant pas formellement établi si d’autres espèces ont participé à d’anciennes hybridations qui ont abouti au Crocus sativus. L’analyse de l’ADN nucléaire de Crocus sativus confirme que Crocus cartwrightianus est l’ancêtre le plus vraisemblable du safran. D’autres espèces apparentées, notamment Crocus thomasii et Crocus pallasii, sont cependant aussi des ancêtres potentiels. Le safran a un pollen stérile, mais s’il est pollinisé par Crocus cartwrightianus ou Crocus thomasii, il produira des graines. Comme les fleurs du safran ne produisent pas de graines viables, la plante est dépendante de l’homme pour sa reproduction.

Les cormes du Crocus sativus sont de petits globules bruns, d’environ 4,5 cm de diamètre, enveloppés dans une natte dense de fibres parallèles. Les cormes, qui ne survivent qu’une saison, doivent être divisés manuellement et cassés, puis replantés. Ils fourniront ainsi jusqu’à dix caïeux, qui produiront de nouvelles plantes.

Après une période de repos en été, appelée estivation, cinq à onze fines feuilles vertes verticales, pouvant atteindre jusqu’à 40 cm de long, émergent du sol. En automne, des bourgeons pourpres apparaissent. C’est seulement en octobre, après que la plupart des autres plantes à fleurs ont relâché leurs graines, que Crocus sativus développe ses fleurs colorées, allant d’un léger lilas pastel à un mauve plus foncé et strié. Durant la floraison, le safran mesure un peu moins de 30 cm de haut. Dans chaque fleur, on trouve un style présentant trois fourches, chacune se terminant par un stigmate cramoisi de 25 à 30 mm de long.

La fleur ressemble beaucoup à une plante non apparentée, le colchique d’automne. Celui-ci, également violet, est une plante toxique qui contient un poison dangereux, la colchicine, un antimitotique utilisé dans le traitement de la goutte.

Crocus sativus prospère dans les climats semblables à celui des maquis méditerranéens ou du chaparral nord-américain, où les brises sèches et chaudes d’été soufflent au-dessus de terres semi-arides, voire arides. Néanmoins, la plante peut tolérer des hivers rigoureux, survivant sans problème dans des régions où la température hivernale descend couramment à −10 °C et les feuilles supportent de courtes périodes sous la neige. De même, s’il ne pousse pas dans un environnement humide, comme au Cachemire, où les précipitations atteignent 1 000 à 1 500 mm par an, le safran nécessite d’être irrigué. C’est particulièrement vrai en Grèce (500 mm par an) et en Espagne (400 mm par an).

La fréquence des précipitations est également un élément clé : des pluies printanières généreuses, suivies d’étés plutôt secs, sont idéales. De plus, les précipitations tout juste antérieures à la floraison augmentent les productions de safran ; néanmoins, les temps froids ou pluvieux durant la floraison favorisent les maladies, réduisant ainsi la production. Un climat constamment humide et chaud nuit également aux rendements.

Le safran pousse idéalement s’il est exposé directement à la lumière du Soleil, et s’accommode mal à l’ombre. Ainsi, les meilleurs rendements sont obtenus pour les plantations exposées face au Soleil (par exemple vers le sud dans l’hémisphère nord), maximisant l’exposition à la lumière. Dans l’hémisphère nord, la plantation a souvent lieu en juin, les cormes étant enterrés entre 7 et 15 cm de profondeur. La profondeur et l’espacement, en corrélation avec le climat, sont deux facteurs critiques ayant un impact sur le rendement des plantes.

Ainsi, les cormes plantés les plus profondément fournissent un safran de plus haute qualité, bien qu’ils produisent moins de bourgeons et de cormes fils. Sachant cela, les producteurs italiens ont déduit qu’une profondeur de 15 cm et un espacement de 2 à 3 cm entre les cormes favorisent le  rendement en stigmates, tandis que les profondeurs de 8 à 10 cm optimisent la production de fleurs et de cormes. Les producteurs grecs, marocains et espagnols ont adapté la profondeur et l’espacement des plantations en fonction de leur propre climat.

Le safran préfère les sols argilo-calcaires friables, lâches, à basse densité, bien arrosés et drainés, ainsi qu’une forte teneur en matière organique. Cependant, comme n’importe quel crocus de jardin, il s’accommode aussi des sols légèrement acides, supportant sans difficulté jusqu’à un pH de 61. On utilise traditionnellement des parterres surélevés pour favoriser un bon drainage. D’un point de vue historique, les sols étaient enrichis par l’application de près de 20 à 30 tonnes d’engrais organiques par hectare de terres. Après quoi, et sans ajout supplémentaire d’amendement, les cormes étaient plantés.

Après une période de dormance durant l’été, les cormes envoient leurs feuilles étroites et commencent à bourgeonner dès le début de l’automne. Mais c’est seulement au milieu de celui-ci que la plante commence à fleurir. La moisson des fleurs doit être très rapide : après leur floraison à l’aube, les fleurs fanent rapidement durant la journée En outre, le safran fleurit dans une étroite fenêtre d’une à deux semaines. Il faut approximativement 150 fleurs pour obtenir 1 g de safran sec. Pour produire 12 g de safran séché (72 g avant séchage), il faut près de 1 kg de fleurs. En moyenne, une fleur fraîchement coupée fournit 0,03 g de safran frais, ou 0,007 g de safran sec.

De nombreux ravageurs (mammifères, insectes, acariens, vers, et mollusques) et agents infectieux (champignons, bactéries, virus) sont susceptibles d’affecter le crocus à safran. Parmi les ravageurs, on trouve entre autres le campagnol, le sanglier, les taupins, la larve du hanneton, ainsi que les limaces et les escargots. Parmi les maladies fongiques, la pourriture grise (causée par les champignons du genre Botrytis), la fusariose vasculaire (Fusarium oxysporum), la moisissure verte (Penicillium), la pourriture des racines (Pythium), la pourriture violette (Rhizoctonia), la pourriture cotonneuse (Athelia), et la pourriture sèche (Stromatinia), sont les plus fréquentes1. Les parasites comme les nématodes, la rouille des feuilles et le pourrissement du corme peuvent également poser problème.

Mais les ennemis les plus redoutables pour le safran sont certainement les rongeurs. Les campagnols exploitent les galeries creusées par les taupes (qui ne nuisent pas à la culture) et dévorent les cormes. Une production entière peut être anéantie par ces rongeurs qui sont d’une voracité redoutable. Il est de plus difficile, voire inefficace, d’intervenir en curatif. Pour éviter toute attaque, il est important de planter la safranière loin du potager si celui-ci est affecté. De plus, il est utile de labourer autour de la parcelle car cela détruit les éventuelles galeries. Enfin, planter des bulbeuses répulsives autour de la safranière, telles que le narcisse, peut s’avérer utile pour freiner l’arrivée du ravageur.

Plusieurs cultivars du safran sont cultivés dans le monde. En Europe, au moins 3 souches existeraient, se distinguant sur la base de critères morphologiques. Les variétés espagnoles, incluant les noms commerciaux Spanish Superior et Creme, sont évaluées par des normes gouvernementales et présentent généralement une couleur, un arôme et un parfum plus doux. Les variétés italiennes sont plus puissantes, alors que les variétés les plus intenses sont originaires de Macédoine grecque, d’Iran ou d’Inde. Les Occidentaux doivent faire face à d’importants obstacles pour obtenir du safran indien, le pays ayant en effet interdit l’exportation des safrans de meilleure qualité. Hormis ces dernières, d’autres variétés commerciales sont disponibles, provenant de Nouvelle-Zélande, de France, de Suisse, d’Angleterre, des États-Unis, ou d’autres pays. Aux États-Unis, le Pennsylvania Dutch Saffron, connu pour ses notes terreuses, est vendu en petite quantité.

Les consommateurs considèrent certains cultivars comme de qualité « supérieure ». Le « safran de L’Aquila » (zafferano dell’Aquila) — présentant une concentration élevée en safranal et en crocine, une forme particulière, un arôme exceptionnellement piquant et une couleur intense — est cultivé exclusivement sur huit hectares de la vallée de Navelli dans la région italienne des Abruzzes, près de L’Aquila. Il a été introduit pour la première fois en Italie par un moine dominicain, Domenico Santucci, durant l’Inquisition espagnole. Mais, en Italie, la plus grande exploitation agricole dévolue au safran, par la quantité et la qualité, se trouve à San Gavino Monreale en Sardaigne. Le safran y est cultivé sur 40 hectares, représentant près de 60 % de la production italienne ; il contient également d’importantes concentrations en crocine,  en picrocrocine et en safranal. Les variétés Mongra ou Lacha du Cachemire (Crocus sativus ‘Cashmirianus’) sont de loin les plus difficiles à obtenir. Les sécheresses répétées, la rouille et les mauvaises récoltes au Cachemire, combinées avec une interdiction d’exportation imposée par l’Inde, contribuent à leur prix élevé. Le safran du Cachemire est reconnaissable par sa couleur marron-pourpre intense, parmi les plus foncées au monde, ce qui confère à cette variété un puissant parfum, arôme et pouvoir colorant. Enfin, des safrans au parfum subtil, le safran du Quercy cultivé depuis le XIIe siècle et celui de Mund en Suisse produit depuis le XIVe siècle dans cette région du canton du Valais.

Voir aussi cette vidéo :

Sources : Wikipédia, YouTube.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.