Apollon, dieu du chant, de la musique, des arts et de la beauté masculine.

Apollon (en grec ancien Ἀπόλλων / Apóllôn, en latin Apollo) est le dieu grec des arts, du chant, de la musique, de la beauté masculine, de la poésie et de la lumière. Il est conducteur des neuf muses. Apollon est également le dieu des purifications et de la guérison, mais peut apporter la peste par son arc ; enfin, c’est l’un des principaux dieux capables de divination, consulté, entre autres, à Delphes, où ses oracles étaient rendus par la Pythie de Delphes. Il a aussi été honoré par les Romains, qui l’ont adopté très rapidement sans changer son nom. Dès le Ve siècle av. J.-C., ils l’adoptèrent pour ses pouvoirs guérisseurs et lui élevèrent des temples.

Il est fréquemment représenté avec son arc et ses flèches, ou encore avec une cithare, voire une lyre : on le qualifie alors de « citharède ». Il est également appelé « musagète » (« celui qui conduit les muses »). Le surnom de « Loxias », « l’Oblique », lui est attribué à cause de l’ambiguïté de ses oracles.

Apollon devient au Moyen Âge puis à l’époque moderne un dieu solaire, patron de la musique et des arts. Au xixe siècle, et en particulier dans La Naissance de la tragédie de Friedrich Nietzsche, il symbolise la raison, la clarté et l’ordre, considérés comme caractéristiques de l’« esprit grec », par opposition à la démesure et à l’enthousiasme dionysiaques. Ainsi, on a pu écrire de lui qu’il est « le plus grec de tous les dieux » et qu’« aucun autre dieu n’a joué un rôle comparable dans le développement du mode de vie grec ». Il reste l’un des dieux auquel l’on a élevé le plus de temples et consacré le plus de cultes.


La thèse d’une origine « asiatique » (c’est-à-dire anatolienne) d’Apollon et d’Artémis a été développée par des grands noms de l’hellénisme tels que Wilamowitz en 1903 ou M. P. Nilsson en 1925 avant d’être remise en cause plus récemment. Ces savants s’appuyaient sur différents éléments : le nom de Léto pourrait venir du lycien, un dialecte indo-européen parlé autrefois en Anatolie, et signifierait, sous la forme Lada, « femme » (étymologie aujourd’hui contestée). L’une des épiclèses d’Apollon, Apollon Lycien, conforte cette hypothèse. Cette épiclèse est cependant plus souvent interprétée à partir du nom du « loup » (Gernet, Jeanmaire…). L’arme

d’Apollon et de sa jumelle Artémis, l’arc, n’est pas grecque mais barbare (au sens grec : tous les peuples qui ne parlent pas le grec) ; il porte de plus, comme sa sœur, non pas des sandales, à l’instar des autres dieux, mais des bottines, type de chaussure considérée comme asiatique par les Anciens. En outre, il est, dans l’Iliade d’Homère, du côté des Troyens, peuple asiatique, et le rejet que subit Léto, que nulle terre grecque n’accepte, conforterait  l’idée d’un dieu étranger. Enfin, le premier texte mentionnant Apollon est un texte hittite et non pas mycénien9. Cette hypothèse anatolienne n’est plus retenue par la recherche moderne. Toutefois, Fritz Graf souligne les ressemblances entre l’Apollon grec et le dieu hittite Télipinu. En effet, ils sont tous les deux de jeunes dieux, fils du dieu des tempêtes et sont associés au maintien de l’ordre social. Cela suggère une influence anatolienne dans l’évolution du dieu grec.

Inversement comme l’ont fait remarquer de nombreux chercheurs, Apollon est paradoxalement peut-être le dieu le plus grec de tous et a une longue histoire en Grèce avant l’époque classique.

Il est aussi possible que ses origines remontent au peuple dorien du Péloponnèse, lequel honorait un dieu nommé Ἀπέλλων / Apéllôn, protecteur des troupeaux et des communautés humaines ; il semblerait que le terme vienne d’un mot dorien ἀπέλλα / apélla, signifiant « bergerie » ou « assemblée ». L’Apollon dorien serait une figure syncrétique de plusieurs divinités locales pré-grecques, de même que l’Apollon grec est la fusion de plusieurs modèles.

Lorsque son culte s’introduit en Grèce, il est déjà honoré par d’autres  peuples pré-hellènes, ce que l’Hymne homérique qui lui est destiné indique en signalant que les Crétois étaient ses premiers prêtres. Son premier lieu de culte est bien sûr Délos, capitale religieuse des Ioniens ; c’est sous Périclès, au Ve siècle av. J.-C., que l’île passe aux mains des Athéniens, qui confortent son caractère de sanctuaire inviolable en y faisant interdire toute naissance et toute mort. Le culte d’Apollon s’était entre-temps répandu partout dans le monde antique, de l’Asie Mineure (le sanctuaire de Didymes, près de Milet, en porte la trace flagrante : c’est l’un des plus grands temples jamais bâtis dans la zone méditerranéenne) à la Syrie, sans parler des innombrables temples qui lui sont dédiés en Grèce même. Selon Phanias, Gygès, roi de Lydie, fut le premier lui à lui consacrer des offrandes en or. Avant son règne, Apollon Pythien n’avait ni or, ni argent.

Au rebours de la thèse traditionnelle, Bernard Sergent, spécialiste de mythologie comparée, s’attache à montrer dans Le livre des dieux. Celtes et Grecs, II (Payot, 2004) l’identité d’Apollon et du dieu celtique Lug. Pour lui, le dieu n’est pas asiatique mais gréco-celtique, et par-delà, indo-européen. Il remonte au moins à la séparation des ancêtres des Celtes et des Grecs, au IVe millénaire av. J.-C., et il est arrivé « tout d’un bloc » en Grèce : ce n’est pas une divinité composite. Il possède des homologues en domaine  germanique (Wotan) ou indien (Varuna).

Apollon serait la « version divine du roi humain ». Les poèmes homériques lui donnent systématiquement l’épithète anax, qui remonte à la  désignation mycénienne du roi, wanax. Or le roi indo-européen est rattaché aux trois fonctions définies par Georges Dumézil, d’où la complexité d’Apollon : il remplit toutes les fonctions que puisse avoir un dieu. La définition de Lug donnée par C.-J. Guyonvarc’h et F. Le Roux peut aussi bien s’appliquer à lui : il est « tous les dieux résumés en un seul théonyme ».

B. Sergent compare une à une toutes les caractéristiques connues de Lug et d’Apollon et relève de nombreux points et de nombreux attributs communs. C’est surtout à Delphes que le caractère complexe du dieu se révèle, dans son rôle d’inspirateur de la Pythie et des hommes, qu’il révèle à soi.

Le rapprochement proposé par Bernard Sergent entre Lug et Apollon n’a pas été repris par d’autres spécialistes. Pierre Sauzeau lui reproche de négliger la proximité Apollon-Rudra « reconnue explicitement » et les liens avec Artémis. Les spécialistes actuels des études celtiques voient davantage en Lug un héritier du couple indo-européen des Dioscures, les Jumeaux divins, une des plus anciennes figures du panthéon indo-européen.

Dans Apollo the Wolf-god, Daniel E. Gershenson voit en Apollon un dieu d’origine indo-européenne, dont les attributs principaux seraient rassemblés dans l’expression Apollon dieu-loup. Cet auteur s’inscrit dans la lignée des travaux de Louis Gernet (Dolon le loup) et d’Henri Jeanmaire (Couroï et Courètes).

Par le terme de « loup », il faut entendre non pas le culte de l’animal en lui-même, mais de son symbolisme, lequel n’est autre que le vent considéré tant par ses vertus bénéfiques que destructrices. Les vents, comme Zéphyr le vent-loup, peuvent être favorables aux semences, mais sont aussi tenus pour issus des cavernes et cette origine souterraine les met en relation avec les Enfers. Le vent est ainsi le passage entre le chaos et le cosmos.

Ceci explique le rôle de la divinité comme tuteur des éphèbes, de jeunes guerriers qui accomplissent leur initiation d’adultes, sa fonction de protecteur du grain semé et enfin sa qualité de dieu de la prophétie qui révèle les mystères et initie les musiciens et les poètes. Le Lycée (Λύκειον / Lukeion), rendu célèbre par Aristote, est placé dans un gymnase jouxtant le temple d’Apollon Lykeios. Apollon Lykeios, le dieu-loup, serait le maître des passages, dieu qui transforme les forces chaotiques des confréries de loups-garous de l’adolescence vers l’âge adulte, qui dévoile par la prophétie ou la Pythie le monde caché vers le découvert et le manifeste.

Gershenson présente de nombreux témoignages dans le monde européen qui pourraient montrer que ce dieu-loup et dieu-vent remonte à une période antérieure à la séparation des peuples européens qui ont pénétré en Europe centrale et méridionale. Ses déductions sont en accord avec celles d’autres spécialistes, qui ont notamment souligné le lien d’Apollon avec les loups et son rôle joué dans les initiations. Apollon est particulièrement associé à Borée, le Vent du Nord.

Jean Haudry rejoint également les conclusions de Gershenson. Comme le dieu védique Rudra, Apollon est un dieu du vent et de la nature sauvage à l’origine : c’est en s’opposant à Dionysos qu’il a développé des caractères « civilisés ». Face à un Dionysos « feu sauvage », il est devenu, contrairement à sa nature première, dieu du foyer delphique. Au feu hivernal de Dionysos, il s’est opposé comme dieu estival et comme dieu solaire. Il s’est ainsi affirmé comme dieu de la sagesse face à la folie dionysiaque. Et si Dionysos, dieu subversif, a pu être considéré comme indésirable dans la société aristocratique, Apollon est devenu le dieu civique et national par excellence.

L’identification d’Apollon avec le soleil n’apparaît dans aucune source avant le Ve siècle av. J.-C. — à l’époque archaïque, ce sont Hélios ou Hypérion qui représentent le feu solaire ; la première mention attestée remonte à Euripide, dans un fragment de la tragédie perdue Phaéton. L’assimilation s’explique par l’épithète φοῖϐος / Phoibos, littéralement « le brillant », qui est associée à Apollon chez Homère. Elle rencontre un grand succès parmi les poètes, milieu où le nom d’« Apollon » est souvent employé, par métonymie, pour désigner le soleil, de même que « Déméter » pour le pain ou « Héphaïstos » pour le feu. On en trouve peu d’écho dans le culte d’Apollon.

Apollon Soleil tout comme Artémis Lune se sont éloignés de leur caractère primitif de dieux sauvages en rejoignant la sphère cosmique de la religion.

Dans l’Iliade, Apollon est décrit comme un dieu lunaire : son arc est d’argent, couleur liée à la nuit et à la lune. Ensuite, de multiples évolutions l’amèneront à devenir un dieu solaire (son épithète Phœbus, la lumière), son arc et ses flèches renvoient d’ailleurs aux rayons solaires. Toujours dans les poèmes homériques, il y est perçu comme un dieu-vengeur, menaçant, porteur de peste. Dans le chant I de l’Iliade, ses surnoms sont les suivants : toxophore, Seigneur archer, argyrotoxos, à l’arc d’argent, etc. Cette attitude vengeresse est accompagnée de traits de caractère belliqueux : Homère l’y décrit comme un dieu orgueilleux, emporté par ses sentiments et par la violence. Rappelons que les poèmes homériques (Iliade) écrits au IXe siècle av. J.-C. narrent une histoire antérieure de près de quatre siècles (Troie a été détruite dans les années 1280 av. J.-C.). Le dieu Apollon n’a pas encore subi les influences qui l’amèneront à devenir le dieu complexe qu’il est dans la Grèce classique.

Source : Wikipédia.

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