Le surgénérateur Phénix (Superphenix).

Superphénix (SPX) est un ancien réacteur nucléaire définitivement arrêté en 1997, situé dans l’ex-centrale nucléaire de Creys-Malville, en bordure du Rhône à 30 km en amont de la centrale nucléaire du Bugey. C’était à l’origine un prototype de réacteur à neutrons rapides à caloporteur sodium faisant suite aux réacteurs nucléaires expérimentaux Phénix et Rapsodie. En 1994, un décret transforme Superphénix en réacteur de recherche et de démonstration, mais ce décret est annulé en 1997 par le Conseil d’État1, malgré un projet économiquement viable, un facteur de charge de plus de 30 % en 1997 et un taux de disponibilité qui a atteint 95 % en 1996.

Le nom Superphénix provient de l’oiseau mythique Phénix qui renaît de ses cendres, comme le nouveau combustible nucléaire au plutonium provient des « cendres » du combustible usé.

Deux postulats ont mené les autorités françaises à la construction de Superphénix : l’anticipation d’une croissance soutenue des besoins énergétiques et les limites de l’extraction de l’uranium. Dans un tel scénario, seuls les réacteurs surgénérateurs (dont la filière à neutrons rapides) apparaissent durables.

La conception de Superphénix a été faite par le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) pour disposer d’une technologie française après l’abandon de la filière graphite-gaz. La construction de Superphénix implique la société industrielle française Novatome, active principalement dans le domaine des réacteurs à neutrons rapides, qui réunit d’anciens agents de Technicatome et de l’ex-Groupement Atomique Atlantique Alsacienne5, une entreprise issue de la filière française des réacteurs à l’Uranium naturel graphite gaz, abandonnée en 1969 au profit des réacteurs à eau pressurisée de conception américaine.

surgénérateur Phénix, essais de couleurs.

Le 13 mai 1974 est publié un décret autorisant la création de la société NERSA (Centrale nucléaire européenne à neutrons rapides SA) dont l’objet est la construction et l’exploitation de la centrale6. La NERSA est issue d’une collaboration internationale entre EDF (51 %), la société italienne Enel (33 %) et la société allemande Schneller Brüter Kernkraftwerksgesellschaft MBH ou SBK (16 %). À l’origine, un réacteur rapide refroidi au sodium devait être construit dans chaque pays partenaire : le surgénérateur de Kalkar en Allemagne et le Prova Elementi di Combustibile (PEC) ) à Brasimone en Italie. Ces deux projets allemand et italien seront abandonnés peu après la catastrophe nucléaire de Tchernobyl.

À l’automne 1974 est menée l’enquête publique pour la création de l’installation nucléaire de base de Superphénix (SPX). Le 23 octobre 1974, la presse régionale annonce au public ce projet. Le 2 mai 1975 à Bourgoin-Jallieu, deux associations écologistes (Mouvement Écologique Rhône-Alpes et Association de sauvegarde pour le site de Creys-Malville) saisissent en référé le tribunal pour interrompre les travaux déjà entrepris par EDF, invoquant la qualité de vie comme droit fondamental. Ce tribunal se déclare incompétent le 30 mai, déboutant les deux associations écologistes qui sont condamnées aux dépens.

En avril 1976, le Premier ministre français Jacques Chirac autorise la société NERSA à passer commande de Superphénix. La décision de la construction de Superphénix fut prise sans même passer par le canal de la Commission PEON, chargée d’orienter la production électrique d’origine nucléaire3. Valéry Giscard d’Estaing, Président de la république déclarant alors « qu’avec ce type de réacteur et ses réserves en uranium, la France disposera d’autant d’énergie que l’Arabie saoudite avec tout son pétrole. »

En 1977 sont signés le décret d’utilité publique (DUP) par le Premier ministre Raymond Barre et le décret d’autorisation de création (DAC) par le ministre de l’Industrie, René Monory.

En février 1997, alors que le surgénérateur était toujours à l’arrêt, le Conseil d’État annule le décret d’autorisation de redémarrage de Superphénix pris en 1994, au motif que la nouvelle mission confiée à Superphénix aurait justifié une nouvelle enquête publique.

Surgénérateur Phénix, carte maximum, Bagnols-sur-Cèze, 21/09/1974.

Le 19 juin 1997, Lionel Jospin, premier ministre de la République française, annonce : « Superphénix sera abandonné ». Le gouvernement ayant pris sa décision, un arrêté ministériel du 30 décembre 1998 a conduit à son arrêt définitif. Les raisons invoquées, influencées par la pression de l’opinion publique, était que le faible prix de l’uranium ne justifiait plus les investissements dans cette filière.

À l’arrivée au pouvoir de la gauche plurielle, les Verts ont réclamé l’arrêt et le démantèlement de Superphénix. La Commission de la production et des échanges de l’Assemblée nationale a constaté en avril 1997 que « l’arrêt immédiat du réacteur est, en tout état de cause, plus coûteux que la poursuite de l’activité même grevée d’un faible taux de disponibilité de l’infrastructure ». En outre, le rapport du Sénat conclut, sur bilan de la Cour des comptes, qu’« au total, compte tenu des hypothèses d’EDF, retarder l’arrêt de l’exploitation de la centrale jusqu’à la fin de la convention entre les partenaires dans NERSA, soit fin 2000, aurait probablement été globalement neutre sur le plan financier. »

En juillet 1997, à la suite de la décision de fermeture de Superphénix, les Européens contre Superphénix disparaissent et créent le Réseau Sortir du nucléaire.

Extraits du rapport du Sénat établi en 1998 :

« Le coût de construction et de fonctionnement de Superphénix a dépassé les estimations initiales. Dans son rapport de janvier 1997, la Cour des Comptes l’a évalué à 60 milliards de francs répartis entre les partenaires du consortium européen NERSA à concurrence de 51 % pour EDF, 33 % pour l’électricien italien Enel et 16 % pour le consortium SBK, qui regroupe les électriciens allemands RWE, néerlandais SEP et belge Electrabel. En réalité, compte tenu de la valeur de l’électricité fournie au réseau par le réacteur, les dépenses s’élèveraient, selon elle, à 40,5 milliards de francs. »

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Sources : Wikipédia, YouTube.