Sergueï Paradjanov, réalisateur de cinéma.

Sergueï Iossifovitch Paradjanov, né le 9 janvier 1924 à Tbilissi en République socialiste fédérative soviétique de Transcaucasie, mort le 20 juillet 1990 à Erevan en RSS d’Arménie, est un réalisateur soviétique.

Il fut controversé en Union soviétique (astreint en 1973 aux travaux forcés pendant quatre ans, puis incarcéré à différentes reprises jusqu’en 1982), mais très défendu et apprécié par les cinéphiles occidentaux. Un musée lui est consacré à Erevan, en Arménie, où il est considéré comme le grand cinéaste national.


Sans connaître le langue de ses ancêtres arméniens, ni leur pays, Paradjanov va graduellement s’éloigner de la grammaire soviétique pour élaborer une œuvre cinématographique en prise directe avec les traditions des régions où il tourne (Ukraine, Géorgie, Azerbaïdjan, Arménie). Artiste pluriethnique, musicien, plasticien, peintre, il doit en partie sa tournure d’esprit au fait que son père, Iossif Paradjanian, était antiquaire. Un contact précoce avec les objets d’art a façonné son imaginaire et son goût pour les collections. Il a inspiré sa pratique passionnée des collages, qui tiennent à la fois de l’art conceptuel et du folklore naïf ; des films compressés en quelque sorte, que Paradjanov bricolait lorsqu’il ne pouvait pas tourner (en prison notamment). Sa vie et son art étaient mêlés. Sa maison familiale de Tbilissi, ouverte aux hôtes de passage, était un grand capharnaüm où s’entassaient décors, costumes et objets d’art hétéroclites.

Paradjanov est issu de l’une des plus grandes écoles de cinéma du monde, le VGIK de Moscou, dans laquelle il entre en 1945 et où il étudie dans la classe d’Igor Savtchenko3. Un de ses professeurs est Alexandre Dovjenko.

En 1954, il réalise son premier long métrage Andriesh, adapté du conte d’Emilian Radu Bucov4. Paradjanov émigre ensuite à Kiev où il tourne plusieurs documentaires (Doumka, Les Mains d’or, Natalia Oujvy).

En 1964 et 1968, Paradjanov réalise deux des chefs-d’œuvre cinématographiques du XXe siècle : Les Chevaux de feu et Sayat-Nova.

En 1950, Paradjanov se marie avec Nigyar Kerimova, à Moscou. D’origine musulmane tatare, elle se convertit à la religion orthodoxe pour l’épouser. Elle sera plus tard assassinée par des parents qui ne lui ont pas pardonné cette conversion. Lorsqu’il s’installe à Kiev, il apprend l’ukrainien et se remarie avec Svetlana Ivanovna Cherbatiouk en 1956. Elle lui donnera un fils (Suren, 1958).

Les Chevaux de feu (Тіні забутих предків) est réalisé en 1964. C’est la version courte des Ombres des ancêtres oubliés. Tiré de l’œuvre de Mikhaïl Kotzioubinski, ce conte met en scène des bergers et bûcherons des Carpates ukrainiennes. Douze chapitres retracent la vie tragique d’Ivan, paysan accablé par le destin, mis au ban de sa communauté. En 1991, on attribue à Paradjanov le prix national Taras Chevtchenko pour ce film à titre posthume.

En 1968, il réalise Sayat Nova. Le film sera également censuré. Sayat Nova (La Couleur de la grenade), est inspiré de la vie d’un poète arménien mort en Géorgie. Au lieu d’un récit linéaire, le cinéaste, à la fois structuraliste et traditionaliste, opte pour une série de tableaux vivants représentant des moments clés de la vie du poète. Paradjanov déclare : « Il m’a semblé qu’une image statique, au cinéma, peut avoir une profondeur, telle une miniature, une plastique, une dynamique internes… »

« Immense mulquinier (ou tisserand) d’images, comme Sarkis Paradjanian (dit Sergueï Paradjanov) a été bateleur d’images. Son film allégorique, demeurera comme une vraie clef pour la compréhension de l’œuvre du troubadour. Tous deux parlent autrement, par figures, et c’est là, toute la force de leur création temporelle sur l’agora de leur temps et de tous les temps », selon les traducteurs français.

Ses films singuliers sont souvent influencés par la diversité ethnique de sa région natale, le Caucase, et mêlent réalité sociale, folklore, légendes et chamanisme. Ses premières œuvres, tournées en Ukraine (et inédites en France), sont assez proches du réalisme socialiste (comme Le Premier gars, amourettes champêtres dans un kolkhoze) jusqu’à la rupture des Chevaux de feu en 1965. Découvert dans les festivals internationaux avec ce film, Paradjanov sera pour l’Occident le premier symbole officiel de l’oppression des artistes soviétiques (Tarkovski en sera un autre).

Ce chef-d’œuvre est désavoué par les autorités de Moscou parce qu’il est tourné en dialecte houtsoul (des Carpates ukrainiennes) et non doublé en russe. C’est une des raisons pour lesquelles, certains historiens du cinéma le considéreront comme un exemple de cinéma ukrainien. Il est également désavoué par le cinéaste lui-même parce qu’on l’a raccourci contre son gré, mais aussi parce qu’il ne correspond pas au cinéma non narratif auquel il aspire.

Si cet artiste hors catégorie jouit alors d’une certaine notoriété, c’est moins pour son œuvre que pour son statut politique. En décembre 1973, les autorités soviétiques le condamnent à cinq ans de travaux forcés. Paradjanov fait la une des journaux lorsqu’il est incarcéré en Ukraine en 1974 pour « commerce illicite d’objets d’art, homosexualité et agression sur la personne d’un fils de dignitaire du régime », les médias, les comités se mobilisent (en France, Yves Saint Laurent, Françoise Sagan, et surtout Louis Aragon, montent au créneau). Le pouvoir reproche implicitement au cinéaste de promouvoir le nationalisme. À l’époque, il a déjà tourné l’essentiel de son œuvre : six longs métrages. Il est incarcéré pendant quatre ans.

Au sortir de sa détention, il réalise des collages et produit un grand nombre de dessins abstraits. Mais il sera à nouveau incarcéré. Ses divers séjours en prison s’achèvent en 1982. Il en revient malade (diabétique, cancéreux). Mais soutenu par plusieurs intellectuels géorgiens, il réussit à tourner deux films.

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Sources : Wikipédia, YouTube.

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