La Grande famine irlandaise (1845-52).

  • Auteur/autrice de la publication :
  • Post category:Histoire
  • Commentaires de la publication :0 commentaire
  • Temps de lecture :7 min de lecture

La grande famine irlandaise, ou localement la Grande Famine (en irlandais : An Gorta Mór ou An Drochshaol ; en anglais : The Blight, The Irish Potato Famine ou The Great Famine), est une famine majeure en Irlande entre 1845 et 1852.

Cette catastrophe fut en grande partie le résultat de cinquante années d’interactions désastreuses entre la politique économique impériale britannique, des méthodes agricoles inappropriées et l’apparition du mildiou sur l’île. À l’époque, le mildiou anéantit presque intégralement les cultures locales de pommes de terre, qui constituaient la nourriture de base de l’immense majorité de la population, la paysannerie irlandaise.


La révolte des catholiques irlandais en 1649 contre Oliver Cromwell entraîna une répression brutale et la mise en place des Lois pénales destinées à les discriminer. Parmi cette série de mesures, la loi sur le papisme instituait que les terres des catholiques, au lieu d’être transmises au fils aîné,  devaient être divisées entre tous les fils d’une même famille, ce qui entraîna un découpage des héritages, une baisse importante de la taille des exploitations agricoles et une vulnérabilité croissante de leurs exploitants.

Pour subsister, les Irlandais commencèrent à pratiquer principalement la culture de la pomme de terre – tubercule nourrissant et ne nécessitant que peu d’espace pour être cultivé. Par ailleurs, beaucoup de paysans n’étaient pas propriétaires de leurs terres et devaient payer un fermage à un landlord protestant et britannique. La plupart des terres (95 %) appartiennent à quelques milliers de familles, généralement protestantes.

Au début du XIXe siècle, la relative prospérité des campagnes avec un climat clément permettait à une parcelle de nourrir une famille de manière correcte et la population qui, en 1801, se situait entre quatre et cinq millions d’habitants, passa à neuf millions quarante ans plus tard. Dès lors, les parcelles se révélèrent trop petites pour nourrir une famille.

En 1845, provenant d’Europe continentale, le mildiou, un oomycète parasite appelé Phytophthora infestans, allié à l’humidité du climat, provoqua une forte chute, de l’ordre de 40 %, de la production de pommes de terre et entraîna une famine d’une grande ampleur, alors qu’un tiers de la  population dépendait exclusivement de la pomme de terre pour se nourrir. Le phénomène était suivi de près dans les milieux agricoles, jusqu’aux États-Unis, où en septembre 1845, le journal American Farmer s’intéressa à la maladie de la pomme de terre et à son évolution, en évoquant la possibilité qu’elle fût encore d’ampleur relative.

Contrairement à ce qui s’était passé pendant la famine de 1780, les ports irlandais restèrent ouverts en 1845-1846 sous la pression des négociants protestants et, en dépit de la famine, l’Irlande continua à exporter de la nourriture. Alors que dans des régions de l’île des familles entières mouraient de faim, des convois de nourriture appartenant aux landlords, escortés par l’armée, partaient vers l’Angleterre. Certains propriétaires expulsèrent leurs paysans, même s’ils étaient en mesure de payer leur loyer comme lors de l’incident de Ballinglass en mars 1846. Malgré tout, en 1845, la pénurie ne fut pas de plus grande ampleur que d’autres crises régionales précédentes qui n’étaient pas restées dans les mémoires. Ce fut  l’anéantissement de la récolte de pomme de terre de trois des quatre années qui suivirent qui entraîna une famine et des épidémies telles que les institutions de secours des indigents, qu’elles soient gouvernementales ou privées, se révélèrent incapables d’y faire face.

Plusieurs initiatives caritatives furent prises. Dès 1841, le pape exhorta les archevêques à lever des fonds à travers l’Europe et l’Amérique. Ce mouvement de solidarité catholique se traduisit par un grand nombre de dons dont le montant total resta difficile à évaluer. L’archevêque de Dublin, Paul Cullen, établit une estimation à 14 000 £ voire 15 000 £. En 1845, le sultan ottoman Abdülmecit Ier déclara son intention de verser 10 000 £ pour les paysans irlandais, mais la reine Victoria demanda que le sultan n’envoyât que 1 000 £, car elle-même avait donné seulement 2 000 £. Le sultan envoya donc 1 000 £ et trois navires remplis de nourriture, que les soldats britanniques tentèrent de bloquer.

Le nombre de victimes aurait pu être sensiblement moins élevé si les  responsables politiques britanniques avaient choisi d’intervenir. Pourtant, par négligence, indifférence, insensibilité, cynisme, ou mépris des pauvres clairement affiché, ils restèrent globalement passifs.[réf. nécessaire] Ceux s’étant prononcés en faveur d’une aide à l’Irlande ont rencontré l’hostilité d’une partie de l’opinion publique anglaise et aux partisans d’un libéralisme économique sans entrave.

S’il n’existe pas de décompte officiel du nombre de morts entre 1846 et 1851, diverses estimations récentes évaluent à un million le nombre total de victimes, particulièrement dans les comtés les plus pauvres. La Grande Famine eut d’ailleurs des conséquences importantes en matière foncière, en accentuant le phénomène de concentration des terres et d’augmentation de la taille moyenne des exploitations souhaitée par les landlords : entre 1841 et 1851, la part des tenures de moins de cinq acres passa de 35 à 20 %, quand celle des tenures de quinze acres et plus augmenta de 31 à 48 % des terres agricoles irlandaises.

La famine dura jusqu’en 1851 mais eut des répercussions sur une plus longue durée, en particulier sur la démographie. À propos des effets sur la population de l’île, aux morts de la famine, il fallut en effet ajouter près de deux millions de réfugiés, et autant d’émigrants, essentiellement à  destination des États-Unis, de la Grande-Bretagne, du Canada et de l’Australie. Si les émigrants venaient de toutes les régions d’Irlande, ils furent plus nombreux à venir des comtés et des classes sociales pauvres. L’émigration irlandaise de l’époque se caractérisa en outre par la plus grande part de femmes choisissant de partir, contrairement à ce que l’on peut constater généralement dans les autres pays. En tout, la population irlandaise baissa de près d’un quart en dix ans, passant de huit à environ six millions de personnes. L’émigration devint dès lors un phénomène structurel6 : elle se poursuivit jusqu’en 1911, date à laquelle la population irlandaise tomba à 4,4 millions de personnes, soit son niveau de 1800.

Sur le plan culturel, la famine fut aussi l’un des facteurs du déclin de la langue irlandaise, langue parlée par plus de 90 % des Irlandais avant 1845, dont la vitalité était le principal signe de résistance du peuple irlandais et que les Britanniques ne parvenaient pas à éradiquer, à moins de 20 % de la population en 1860. Un grand nombre des orphelins de la famine reçurent dans les orphelinats la langue anglaise en héritage. La langue gaélique ne se remit jamais de la grande famine de 1845-1851 et, aujourd’hui, seuls 2 % des Irlandais parlent la langue de leurs ancêtres dans la vie courante. Pour les émigrants, la langue fut majoritairement abandonnée avec le temps et les générations.

Source : Wikipédia.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.