La cité antique d’Aphrodisias (Turquie).

Aphrodisias (en grec Ἀφροδισιάς) est une cité antique de Carie, en Asie mineure. Le site archéologique est situé près du village de Geyre, en Turquie, à environ 230 km d’Izmir (traditionnellement appelée Smyrne).

Aphrodisias doit son nom à Aphrodite, la déesse grecque de l’Amour qui avait, dans le sanctuaire de la ville, son unique statue de culte : l’Aphrodite d’Aphrodisias.

L’antique Aphrodisias ne fut redécouverte par les archéologues qu’au XXe siècle. À partir de 1961, Kenan Erim, un archéologue turc formé aux États-Unis, décida de consacrer sa vie à la résurrection de la ville. Lorsque les premiers experts arrivèrent, le site était recouvert par un village. Ils ont retrouvé quelques fragments de statues et des sarcophages encastrés dans les murs des maisons ou servant d’enclos pour les chèvres.


Selon l’historien byzantin Stephanus, la ville fut fondée par les Lélèges. Son nom changea successivement en Lelegonopolis, Megalopolis et Ninoe pour finalement prendre le nom d’Aphrodisias au IIIe siècle avant notre ère.

La majeure partie de la cité fut détruite par un tremblement de terre suivi d’une inondation au IVe siècle.

Le christianisme mit fin au culte d’Aphrodite et la ville fut rebaptisée Stavrapolis (« Cité de la Croix »). Le temple fut transformé en église.

Lors des fouilles de 1904, Paul Gaudin a découvert des figurines féminines assises, des tessons préhelléniques et des lampes datant des VIIe et VIe siècles avant notre ère attestent l’existence d’un culte religieux voué probablement à la déesse de l’Amour et de la Guerre, Nina-Ishtar. Néanmoins aucune trace d’un sanctuaire n’a été retrouvée.

À cette époque, Aphrodisias portait le nom de « Ninoé », en lien avec Ninos, roi assyro-babylonien, fondateur de Ninive, mais également avec la déesse Ishtar10. Aux Ve et IVe siècles avant notre ère, ce culte de la déesse mésopotamienne s’est maintenu et développé. Au IIIe siècle, à la suite de l’influence hellénique, Nina-Ishtar devient Aphrodite et la ville prend le nom d’Aphrodisias. Ce changement n’est pas seulement caractérisé par la modification du nom mais également par la construction d’un temple. Il y a peu de traces du culte, excepté les déesses en pierre assises du vie siècle et des représentations d’Aphrodite sous forme de lion sur des pièces de monnaie de la période impériale romaine.

Bien que le culte se soit maintenu jusqu’à l’âge du fer, il faut attendre la période hellénistique pour qu’un temple soit construit, aux alentours des IIIe et IIe siècles avant notre ère. Il n’en reste que les fondations. Néanmoins, cet édifice reste un sujet délicat et son existence est remise en cause. Selon Joyce Reynolds, il n’en reste aucune trace car il aurait été remplacé par le temple romain, soit parce que l’empereur Claude souhaitait un monument plus grandiose, soit parce que détruit à la suite d’une profanation par l’armée de Labienus.

D’après Dinu Theodorescu, cette construction aurait servi de base au temple romain.

Les fouilles ont mis au jour des structures en mosaïque et des pièces de monnaie qui peuvent servir de terminus post quem et assurer l’existence du temple à partir du milieu du IIIe siècle ou du IIe siècle avant notre ère. Cette datation est également confirmée par le sol et les faux décors en marbre, semblables aux murs peints du premier style de Pompéi (vers 15016).

Au IIe siècle, Pausanias le Périégète relate dans son ouvrage la présence d’une source d’eau salée, probablement à l’origine du centre religieux, comme dans le cas de l’Érechthéion d’Athènes. Ce point d’eau est à mettre en lien avec l’image hellénistique de la déesse, souveraine de la terre, des cieux et de la mer, symbolisant sous de diverses formes la vie et la fertilité.

Afin de montrer le lien existant entre la ville d’Aphrodisias et la dynastie Julio-Claudienne, un temple pseudodiptère a été construit durant la seconde moitié du Ier siècle avant notre ère (probablement durant le second triumvirat) par C. Julius Zoilos au nord de la ville.

L’édification de ce bâtiment aurait fait partie du développement urbain des Julio-claudiens.

Cependant, des études stratigraphiques ont démontré que la colonnade et la cella n’étaient pas contemporaines. En effet, la première phase de construction se déroule au Ier siècle avant notre ère. Entreprise par C. Julius Zoilos, elle consiste en un temple en marbre distyle in antis ou tétrastyle prostyle, d’un prodomos et d’une cella dont les murs sont en pierres locales non équarries. Par la suite, au Ier siècle, l’empereur Claude entoure l’édifice d’une colonnade ionique, formant un temple pseudodiptère octostyle et pycnostyle. Il est composé de 8 X 13 colonnes hautes de 9,28 m dont les chapiteaux correspondent aux canons de Vitruve.

Cette colonnade est constituée de différents éléments : l’épistyle de l’entablement est rehaussé d’un kymation ionique, superposé d’une plate-bande, et d’un cavet orné de palmettes, ouvertes et fermées. La frise, surhaussée du geison décoré d’une rangée de denticules divisées par un plan incliné et d’un larmier simple, est décorée d’Eros et des figures féminines portant des guirlandes. La corniche est surmontée par le sima dont les rares fragments n’ont pas été identifiés.

L’ensemble du temple, recouvert de tuiles plates en marbre, est sur un stylobate à trois degrés, dont la fondation est constituée de pierres frustes liées par du mortier.

Au IIe siècle, l’empereur Hadrien ferme le parvis dallé par un téménos corinthien sur les côtés nord, sud et ouest. Celui-ci est clos par un mur à moellons taillés et couvert d’un placage. À l’est, ce péribole, restauré en 1990, débouche sur le cardo maximus en passant par le tétrapylon.

Au Ve siècle, sous le règne de Léon Ier, le temple est transformé en basilique paléochrétienne dédiée à saint Michel. L’orientation est-ouest du temple a permis cette transformation (les églises étant orientées face à l’ouest). Les colonnes des petits côtés (est et ouest) ont été démontées et replacées dans le prolongement des colonnades nord et sud, créant ainsi la nef de l’édifice. Les pierres de la cella sont réutilisées dans le mur d’enceinte.

Cependant, le temple n’a pas été totalement démonté : le toichobate, les orthostates et deux assises de parpaing autour des chevets sont maintenus. Cette technique de parpaing est utilisée dans les grands appareils quadrangulaires. Il est donc probable que le temple romain ait été construit en opus quadratum. Le nouvel édifice, plus large que le temple païen, mesure 60 m X 28 m. Il est constitué de trois travées, d’un narthex et d’une abside.

Cette reconversion est le témoin de la montée en puissance du christianisme en Asie Mineure. Par la suite, l’édifice ne subit plus de transformations importantes, hormis à l’époque byzantine où les murs sont peints de représentations du christ et des saints. La basilique reste en activité jusqu’au XXIIe siècle où elle est détruite à la suite des invasions des Turcs.

À la suite de toutes ces transformations, il subsiste peu de décorations et d’éléments architectoniques du temple romain. Hormis les architraves réutilisées dans la basilique, la majeure partie des composantes de l’entablement a disparu. Les chercheurs n’ont trouvé que peu d’inscriptions. La plus importante, sur le linteau de la porte, est un hommage à C. J. Zoilos, « prêtre d’Aphrodite », « sauveur et bienfaiteur de son pays natal ». Présent à Aphrodisias entre 44 et 39 avant notre ère. Les autres épigraphes sont souvent vouées à Auguste ou en remerciement aux fidèles et aux prêtres, participants à la construction du temple.

Le Sebasteion ou Augusteum est un complexe religieux qui se trouve dans le secteur sud-est de la ville d’Aphrodisias, non loin de l’agora. Il est composé d’un propylon, d’un temple, d’une voie processionnelle et de deux portiques. Le complexe fut mis au jour en 1979 par le professeur Erim K. et l’Université de New York sous les habitations expropriées de Geyre après avoir réalisé un sondage. Il est fouillé périodiquement entre 1979 et 1981.

Entièrement construit en marbre blanc et gris provenant des carrières avoisinantes, il est dédié à l’empereur Auguste divinisé. D’ailleurs, le complexe doit son nom à cet empereur : Sebastos en grec et Augustus en latin. Au Ier siècle, l’Asie mineure est dévastée par les guerres civiles romaines. L’empereur Auguste va apporter la paix à Aphrodisias et en sera honoré. Il est considéré comme un dieu sauveur. Le Sébastéion est également dédié à la dynastie Julio-claudienne et à Aphrodite. En effet, la déesse serait la mère de cette lignée impériale. De longues dédicaces sur les architraves des bâtiments attestent du culte impérial et de la divinité.

Le Sébastéion est construit entre 20 et 60 Selon des inscriptions, la première phase de construction s’est déroulée sous le règne de l’empereur Tibère. Après un tremblement de terre, la construction reprend dans un deuxième temps, majoritairement, sous le règne de Claude jusqu’à la première partie du règne de Néron. Le complexe a été financé par deux familles distinctes de notables d’Aphrodisias. D’une part, la première a financé le propylon et le portique sud, d’autre part, la deuxième a financé le temple et le portique nord. Cette dernière serait apparentée à un certain Diogène, célèbre bienfaiteur local. Le Sébasteion est donc un projet commun, mais il y a une séparation des contributions.

Le complexe du Sébastéion est orienté est-ouest et est composé de deux portiques parallèles longs de 80 mètres, face à face à une distance de 14 mètres. La voie processionnelle pavée les sépare. Les portiques sont des façades d’une hauteur de 12 mètres et sont divisés en trois étages de demi-colonnes superposées. Les portiques en façade rappellent des fronts de scène. À chaque étage, un ordre différent avec des demi-colonnes de hauteur décroissante. Le premier étage est d’ordre dorique, le deuxième est ionique et le troisième est corinthien. Nous pouvons trouver une ressemblance avec les fora impériaux de Rome mais les portiques du Sébasteion sont plus élaborés.

Le premier niveau des portiques est constitué exclusivement de portes et de fenêtres. Les deux étages supérieurs sont composés de panneaux et de reliefs de marbre dans chaque entrecolonnement. À l’origine, ils étaient au nombre de 190. Il y a des scènes mythologiques (relief d’Achille et de Penthésilée), des reliefs d’empereurs (Auguste recevant les bienfaits de la terre et la commande des mers), les différents empereurs de la dynastie Julio-claudienne couronnant des trophées et subjuguant des barbares, ainsi que des représentations symboliques et des allégories. Les décors des portiques nous éclairent sur le décor architectural impérial en vigueur au ier siècle. Au cours des fouilles ont été retrouvés 75 % des reliefs pour le portique sud et seulement 10 % pour le portique nord.

Le temple du Sébastéion est situé à l’est, à l’extrémité des portiques et domine tout l’ensemble du complexe. Il s’agit d’un édifice prostyle d’ordre corinthien dressé sur un haut podium. Il est de type impérial romain. En effet, dans la cella se trouvaient de grandes statues de culte d’Aphrodite, d’Auguste, de Tibère et de Livie. Une large plate-forme devant le temple aurait probablement servi à faire des sacrifices. Une volée de marches est ajoutée à celle-ci plus tard à l’époque byzantine. Aujourd’hui, il n’en reste presque rien.

Le propylon est une porte monumentale située à l’ouest du Sébastéion. Elle relie les deux portiques et donne accès à la rue nord-sud qui mène à l’agora. Cet édifice a une façade ajourée et ornée. En effet, le propylon comporte deux étages et des niches garnies avec des statues impériales. Par exemple, au centre, il y avait les statues d’Énée et d’Aphrodite. La structure possède plusieurs édicules.

Entre 356 et 360, un séisme a lieu à Aphrodisias et affecte la nappe d’eau et les canalisations. Le temple et le propylon subissent des dommages. Des aménagements sont donc mis en œuvre. Une nouvelle canalisation est installée pour la protection des eaux venant de l’est et des montagnes avoisinantes. Des tuyaux de drainage et des canaux d’eau sont installés autour du temple et le long de la voie processionnelle. Le propylon est, quant à lui, équipé de tuyaux en terre cuite. Le niveau du sol est abaissé pour que l’eau puisse s’écouler vers l’ouest et le propylon. Les marches du propylon, descendant vers la rue, sont supprimées et le niveau de la rue est rehaussé. Plusieurs statues appartenant au propylon ont été mutilées et réutilisées pour ce rehaussement.

Dans le courant des VIe et VIIe siècles, le sort du Sébastéion est incertain. L’édifice aurait été désaffecté ou il aurait servi temporairement de place de marché. Quoi qu’il en soit, le temple a certainement dû être démantelé. Au début du VIIe siècle, sous le règne de l’empereur Héraclius, un autre séisme, plus dévastateur que le précédent, ravage Aphrodisias. Le Sébastéion s’effondre. Des éléments architecturaux sont déplacés et incorporés dans le mur d’enceinte et dans la fortification autour de l’acropole qui devient une citadelle. Des fragments du portiques nord sont réutilisés pour la fermeture arrière du site et des parties des portiques se retrouvent dans le bâtiment de scène du théâtre.

Des fouilles et des restaurations ont lieu sur le temple du Sébastéion lors de la campagne de 1961 dirigée par Kenan Erim. Aujourd’hui, une grande partie des objets, comme des reliefs et des éléments architecturaux retrouvés lors des fouilles du complexe du Sébasteion, est exposée au Musée archéologique d’Aphrodisias.

Source : Wikipédia.

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