Camille Claudel, sculptrice et artiste-peintre.

Camille Claudel née à Fère-en-Tardenois (Aisne) le 8 décembre 1864, et morte à Montdevergues (Montfavet – Vaucluse) le 19 octobre 1943, est une sculptrice et artiste peintre française.

Son art de la sculpture à la fois réaliste et expressionniste s’apparente à l’Art Nouveau par son utilisation savante des courbes et des méandres.

Collaboratrice du sculpteur Auguste Rodin, sœur du poète, écrivain, diplomate et académicien Paul Claudel, sa carrière est météorique, brisée par un internement psychiatrique forcé et une mort quasi anonyme. Un demi-siècle plus tard, un livre (Une femme, Camille Claudel d’Anne Delbée, 1982) puis un film (Camille Claudel, 1988) la font sortir de l’oubli pour le grand public.


Au plus tôt depuis son adolescence, Camille Claudel est passionnée par la sculpture et commence très jeune à travailler la glaise. Appuyée constamment par son père qui prend conseil auprès d’Alfred Boucher, Camille Claudel doit affronter la très forte opposition de sa mère qui aura toujours une violente aversion pour cet art qui passionne sa fille aînée.

De 1879 à 1881, les Claudel habitent à Wassy (Haute-Marne). Camille Claudel persuade sa famille d’emménager à Paris, à l’exception de son père retenu par ses obligations professionnelles, afin de perfectionner son art auprès des maîtres. Les trois enfants et leur mère habitent au no 135 bis boulevard du Montparnasse, de 1882 à 1886. Elle suit, tout d’abord, les cours de l’Académie Colarossi. En 1882, elle loue un atelier au no 117 rue Notre-Dame-des-Champs, où d’autres sculptrices viennent la rejoindre, la plupart anglaises, dont Jessie Lipscomb avec qui elle se lie d’une profonde amitié. Une photographie de William Elborne, mari de Jessie, prise en 1887, les montre travaillant ensemble dans leur atelier.

Oeuvre de Camille Claude, carte maximum, Paris, 8/04/2000.

En 1882, Camille Claudel étudie sous la direction du sculpteur Alfred Boucher. Celui-ci est à Paris pour mettre en place La Ruche, un phalanstère, une communauté d’artistes10. Mais, lauréat du prix du Salon, il doit partir pour Rome et s’installe à la Villa Médicis afin d’honorer des commandes (il n’a jamais gagné le prix de Rome, étant toujours arrivé second ; c’est seulement à l’aide de la fortune amassée grâce aux commandes de l’État — notamment La Piété Filiale — qu’il peut entreprendre ce voyage). Il demande à Auguste Rodin de le remplacer pour son cours de sculpture qu’il donne au groupe de jeunes filles. Ainsi Camille Claudel, après avoir rencontré Rodin en 1882, intègre l’année suivante l’atelier parisien du maître au dépôt des marbres de l’État, no 182 rue de l’Université.

En 1888, elle reçoit une mention honorable au Salon des artistes français puis une médaille de bronze à l’Exposition universelle de 1900.

Les premières œuvres que Camille Claudel montre à son maître Rodin « lui font forte impression », comme Vieille Hélène et Paul à 13 ans. Vers 1884, elle intègre son groupe de praticiens, et elle participe à plusieurs sculptures des œuvres de Rodin, comme l’imposant groupe statuaire Les Bourgeois de Calais dont la légende veut que Camille Claudel fut chargée des mains et Jessie Lipscomb des drapés. Très vite, la connivence puis la complicité artistique s’installent ; Camille Claudel, par son génie, l’originalité de son talent et sa farouche volonté, devient indispensable à Rodin ; tel qu’il le dit lui-même :

« Mademoiselle Claudel est devenue mon praticien le plus extraordinaire, je la consulte en toute chose. »

Et à ceux qui la critiquent, Rodin répondra :

« Je lui ai montré où trouver de l’or, mais l’or qu’elle trouve est bien à elle. »

Camille Claudel « exerce une certaine influence sur son maître », et elle lui inspira L’Éternelle idole, Le Baiser, sculpture à laquelle ils travaillèrent ensemble, et à la Porte de l’Enfer, œuvre inachevée d’Auguste Rodin dont Camille Claudel fut une des collaboratrices. Suivront également des œuvres comme La Danaïde, dont le praticien est Jean Escoula, ou Fugit Amor. Ils vivent leur passion amoureuse durant une dizaine d’années, mais Rodin, à leur rencontre, vit depuis plus de deux décennies avec sa compagne, son ancien modèle Rose Beuret, qu’il a rencontrée en 1864, année de naissance de Camille Claudel, qu’il ne voudra jamais quitter — et qu’il épousera à 76 ans, quelques mois avant sa mort, en 1917. Rodin prend alors pour maîtresse son élève et sculpteur Sophie Postolska de 1898 à 1905.

Rodin, « fasciné » par le visage de Camille Claudel, en réalise plusieurs portraits, comme Camille aux cheveux courts, Camille au bonnet ou Masque de Camille Claudel, ou en « reprend des traits dans des portraits allégoriques, comme L’Aurore ou La France », après la rupture des amants.

En 1899, Henrik Ibsen s’inspire de l’histoire d’amour de Rodin et de Camille Claudel dans “Quand nous nous réveillerons d’entre les morts”, pièce de théâtre considérée comme le testament du dramaturge norvégien par la réflexion qu’il fait sur la création et les artistes.

Camille Claudel a souvent envisagé le mariage avec Rodin, mais ce dernier disait : « Non !!! » préférant toujours Rose Beuret qu’il va d’ailleurs choisir par la suite et délaisser Camille Claudel.

L’Âge mûr, de 1899, est une sorte de double allégorie, et du temps et de la fin de leur passion. Elle représente en effet un homme mûr qui abandonne la jeunesse implorante, pour se tourner vers la vieillesse, voire la mort. Parallèlement, Camille Claudel peut alors figurer la jeunesse — elle est encore vingtenaire à leur rupture — et Rodin l’homme mûr, qui choisit de rester avec sa compagne Rose Beuret, qui figure alors la vieillesse. « L’Âge mûr correspond à un moment-clé de la carrière de Claudel : elle est alors dans la parfaite maîtrise de ses moyens, et connaît un début de reconnaissance officielle, qui toutefois n’aura jamais l’ampleur que l’artiste est en droit d’espérer. »

En 1893, la vieillesse était déjà représentée, dans la sculpture Clotho : « cette représentation terrible de la vieillesse et du temps reflète les tourments dont Claudel est alors la proie ; elle est aussi une allusion à Rose Beuret ». L’œuvre est exposée à la Société Nationale des Beaux-Arts, dans sa version en plâtre, et en 1899, dans sa version en marbre. Elle fait partie de la délégation de femmes françaises artistes présentées à l’Exposition universelle de 1893 à Chicago, regroupées dans le Woman’s Building.

Entre 1893 et 1905, Camille Claudel essaie de se libérer de l’influence du travail de Rodin, avec la série qu’elle nomme elle-même « croquis d’après nature », inspirée de la vie quotidienne et de l’art japonais, avec des sujets de petite taille et des matériaux différents ; les œuvres Les Causeuses en 1895, et La Vague en 1897, en font partie.

Rodin de son côté recommence à travailler sur le visage de Camille Claudel, dès 1895, où il reprend ses travaux des portraits des années 1880 de son ancienne maîtresse, pour la « sublimer » dans des sculptures où, comme évoqué supra, il en « reprend des traits dans des portraits allégoriques, comme L’Aurore ou La France ». Ces sculptures sont personnelles et peu exposées de son vivant — exceptée celle de La France.

En 1895, Antoine Bourdelle, alors praticien d’Auguste Rodin, réussit à vendre 2 500 francs un marbre de La petite Châtelaine. En 1897, les éditions Goupil publient un premier album de 129 gravures de Rodin, avec une préface d’Octave Mirbeau et un frontispice illustré d’un portrait de Rodin par Camille Claudel.

Camille Claudel rencontre en 1897 la comtesse Arthur de Maigret, qui la fait travailler, ce qui permet enfin à l’artiste d’être autonome, financièrement et psychologiquement, après l’emprise et les relations professionnelles ou artistiques de Rodin. La comtesse lui commande plusieurs œuvres, dont son portrait en marbre, un buste de son fils Christian, et un exemplaire en marbre de Persée et la Gorgone. Cependant, les deux femmes se brouillent en 1905, sans doute à cause de l’instabilité psychologique de Camille Claudel, qui perd de ce fait sa riche commanditaire.

Oeuvre de Camille Claudel, Nogent-sur-Seine, 13/04/2018.

Elle vit et travaille alors dans son nouvel atelier, à l’hôtel de Jassaud du no 19 quai de Bourbon, sur l’île Saint-Louis, de 1899 jusqu’à son internement en 1913 — ce que rappelle une plaque souvenir apposée sur cette maison. Elle travaille seule, et connaît des soucis financiers. Rodin, qu’elle appelle « la Fouine », tente en vain de l’aider avec le critique Gustave Geoffroy pour lui obtenir une commande publique. Il paye le loyer de son atelier en 1904.

Elle rencontre le marchand d’art Eugène Blot, qui devient rapidement son agent. Entre 1905 et 1908, il fait produire des tirages de bronze de plusieurs de ses sculptures, comme L’Implorante, organise trois expositions de ses œuvres, et tente d’obtenir des aides de l’État pour son artiste. “L’abandon” est reproduit dans un article de Gustave Kahn “L’art et le beau” dans les Études artistiques illustrées parmi les œuvres de Fix-Masseau.

Camille Claudel continue de produire, mais ne reçoit pas de commande de l’État, malgré le soutien d’Octave Mirbeau, qui admire sont talent et proclame, à trois reprises, son génie dans la grande presse. En effet, Camille Claudel défie la morale sexiste du monde de l’art de l’époque en sculptant des nus avec la même liberté que les hommes. Par ailleurs, elle professe des idées conservatrices, antidreyfusardes et antirépublicaines. Elle reçoit enfin une commande de l’État, lorsqu’elle sculpte le nu d’une femme seule et mourante, la Niobide blessée, achevée en 1907. L’État achète également un bronze de L’Abandon.

Plusieurs photographies la présentent les traits lourds et épaissis, dont l’une en 1905 signant le marbre de Vertumne et Pomone.

À partir de 1905, Camille Claudel connaît de profonds troubles, des obsessions et des idées paranoïaques. Elle est persuadée que Rodin est la cause de son insuccès. Elle a beaucoup moins d’inspiration, elle s’échine à sculpter et à polir le marbre d’œuvres qui sont plutôt des variations de ses anciennes sculptures. Elle ne reçoit plus personne dans son logement et atelier de l’Hôtel de Jassaud, où elle vit « recluse ». « Ma maison est transformée en forteresse : des chaînes, des mâchicoulis, des pièges à loup derrière toutes les portes témoignent du peu de confiance que j’ai dans l’humanité », écrit-elle. En 1909, Paul Claudel dans son Journal l’a décrite dans son atelier : « À Paris, Camille folle. Le papier des murs arraché à longs lambeaux, un seul fauteuil cassé et déchiré, horrible saleté. Elle, énorme et la figure souillée, parlant incessamment d’une voix monotone et métallique. »

En 1910, son atelier est inondé par la Grande Crue de la Seine.

En 1912, elle détruit ses œuvres. Camille Claudel écrit « avoir brisé tous ses modèles en plâtre, et brûlé tout ce qu’elle pouvait pour se venger de ses “ennemis” » dans son atelier. Les voisins se plaignent auprès de son frère et de sa famille : « Qu’est-ce que c’était ce personnage hagard et prudent, que l’on voyait sortir le matin pour recueillir les éléments de sa misérable nourriture ? »

Camille est internée à l’asile de Ville-Évrard (Seine-Saint-Denis) le 10 mars, et sa famille demande que soient restreintes ses visites et sa correspondance. Elle restera internée trente ans76, jusqu’à sa mort.

Elle écrit à son cousin Charles Thierry : « C’est bien la peine de tant travailler et d’avoir du talent pour avoir une récompense comme ça. Jamais un sou, torturée de toute façon, toute ma vie. Privée de tout ce qui fait le bonheur de vivre et encore finir ici. »

Pour son frère Paul Claudel, l’internement appartient à l’œuvre de sa sœur, comme il l’écrit en 1951 dans le Figaro Littéraire : « L’œuvre de ma sœur, ce qui lui donne un intérêt unique, c’est que toute entière, elle est l’histoire de sa vie ».

L’atelier du quai Bourbon de Camille Claudel est fermé par la famille. Ce qui demeurait du fonds d’atelier est détruit.

En 1914, la Première Guerre mondiale éclate et les hôpitaux sont réquisitionnés : après un bref séjour dans un hôpital d’Enghien, Camille est transférée, le 12 février 1915, à l’asile d’aliénés de Montdevergues, à Montfavet, dans le Vaucluse, où elle restera jusqu’à la fin de ses jours. Dans la détresse, elle ne sculpte plus et ne recevra jamais de visite de sa mère, qui meurt en 1929, ni de sa sœur. Seul son frère Paul viendra la voir à douze reprises durant ces trente années.

En 1919, son état semble s’améliorer, mais sa « mère refuse violemment dans les courriers adressés au directeur de Montdevergues » toute éventualité de sortie. Elle écrit de nombreuses lettres à son frère et à sa mère, dans lesquelles elle se plaint des conditions de son internement, et reçoit en retour de la nourriture et des affaires diverses.

Son amie sculptrice Jessie Lipscomb vient la voir deux fois avec son mari William Elborne, en mai 1924 et en décembre 1929. Une photographie de l’artiste assise sur une chaise, prise par Elborne durant leur dernière visite, est le seul témoignage visuel de ces années d’asile : elle a 65 ans.

Camille Claudel meurt à l’asile de Montfavet, le 19 octobre 1943 à 2 h du matin, d’un ictus apoplectique, vraisemblablement par suite de la malnutrition sévissant à l’hôpital, à l’âge de 78 ans. Deux mois avant la mort de Camille Claudel, le directeur de l’hôpital psychiatrique avait affirmé à Paul Claudel : « Mes fous meurent littéralement de faim : 800 sur 2 000. » En août 1942 il lui écrivait que l’état général de Camille Claudel « a marqué un fléchissement net depuis les restrictions qui touchent durement les psychopathes. Votre sœur […] en juillet, a dû être alitée pour œdème malléolaire en rapport avec une carence et le déséquilibre alimentaire ». Selon Max Lafont, entre 1940 et 1944, 40 000 malades mentaux meurent de faim dans les hôpitaux psychiatriques en France.

Camille Claudel est inhumée, quelques jours après sa mort, au cimetière de Montfavet, dans le carré des aliénés, accompagnée du seul personnel de l’hôpital ; ni sa famille ni son frère Paul ne s’y rendent. Ses restes seront plus tard transférés à l’ossuaire, n’ayant pas été réclamés par les descendants. Depuis 2008, un cénotaphe érigé à l’initiative de sa petite-nièce, Mme Reine-Marie Paris, « pour réparer l’oubli souhaité par la famille Claudel et son entourage », rappelle sa mémoire et sa présence dans le cimetière.

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Sources: Wikipédia, YouTube.

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