Ville d’Ohrid (Macédoine du nord).

Ohrid (en macédonien : Охрид, est une commune et une ville du sud-ouest de la Macédoine du Nord, située sur le lac d’Ohrid. La commune comptait 51 428 habitants en 2021 et couvre 389,93 km2. La ville en elle-même comptait 38 818 habitants, le reste de la population étant réparti dans les villages alentour. Grâce à ses richesses tant naturelles qu’historiques et artistiques, Ohrid est la capitale touristique du pays. Ses plages sur le lac ainsi que son port de plaisance en font aussi la principale station balnéaire macédonienne. Ohrid possède par ailleurs le deuxième aéroport international du pays, l’aéroport Saint-Paul-l’Apôtre d’Ohrid.

La ville d’Ohrid est née pendant l’Antiquité : elle s’appelait alors Lychnidos et possédait un théâtre antique et une acropole. Après les invasions slaves du début du Moyen Âge, la ville devient au ixe siècle un grand centre religieux et culturel. Saint Clément d’Ohrid y fonde alors un grand monastère et participe à l’établissement de l’alphabet cyrillique et de la culture macédonienne. Un siècle plus tard, Samuel Ier fait d’Ohrid la capitale de son empire.

Conquise par les Ottomans, Ohrid connaît un certain déclin avant de devenir au XIXe siècle un foyer de développement du nationalisme macédonien. Au XXe siècle, la ville redevient le siège de l’Église orthodoxe macédonienne autocéphale, qui avait été supprimée par les Turcs au XVIIIe siècle. Le développement du tourisme ainsi que la prise de conscience de ses richesses naturelles et historiques ont conduit en 1979 à l’inscription de la ville et de son lac au patrimoine mondial de l’Unesco. Le massif voisin de Galičica est quant à lui protégé par un parc national depuis 1958.


Des vestiges de maisons, tombes et céramiques permettent d’établir une présence au Néolithique dans quelques villages autour de la ville d’Ohrid. Près de celui de Gorentsi, situé à 9 kilomètres de la ville, des fouilles ont permis de mettre au jour des nécropoles de l’Âge du fer, de la culture de Hallstatt. La région est alors habitée par le peuple des Enhéliens.

À partir du règne de Philippe II en Macédoine, l’artisanat local suit de plus en plus l’art gréco-macédonien. C’est à cette période qu’apparaît la ville antique de Lychnidos. Elle est à l’époque romaine une étape importante sur la via Egnatia, voie terrestre qui relie les rives de l’Adriatique et celles de la mer Égée. La ville reste toutefois dans l’aire d’influence hellénistique. Sous la République romaine, de nombreux monuments sont construits dans la ville et, pendant l’Antiquité tardive, elle est mentionnée comme centre épiscopal. La première mention date du conclave de Serdica, qui s’est déroulé en 343 ; Dionysus de Lychnidos, évêque de la ville, est un des signataires.

Lychnidos disparaît lors d’un tremblement de terre en 526, des sources historiques rappellent que plusieurs centaines d’habitants sont alors tués. La ville n’est ensuite jamais plus mentionnée.

À partir du début du VIe siècle, les Slaves traversent le Danube et s’installent dans les Balkans, qui font alors partie de l’Empire byzantin. La région d’Ohrid est colonisée par la tribu des Berzites au VIIe siècle. Les Berzites s’allient à d’autres tribus comme les Draguvites et les Sagudates sous la domination du chef Hatczon. Les Berzites s’installent également dans les régions de Vélès, Kavadarci, Prilep, Bitola et Debar, villes du sud-ouest de l’actuelle Macédoine du Nord. Les écrivains byzantins appellent ce territoire la « Sclavinia ».

À partir du VIIe siècle, une culture macédonienne slave émerge, elle supplante la culture byzantine au Xe siècle. Le pouvoir de l’empereur se fait également beaucoup plus faible à cette époque.

En 886, saint Clément, un moine slave disciple des saints Cyrille et Méthode s’installe dans la ville. Il est suivi sept ans plus tard par saint Naum, autre élève de Cyrille et Méthode. Ils y fondent chacun un monastère ainsi que la première université slave au monde. Leur œuvre est considérable, puisqu’ils réforment le glagolithique, qui devient l’alphabet cyrillique, et font du vieux-slave la langue liturgique des Slaves. Clément est par ailleurs fait premier évêque d’Ohrid. Sous Clément et Naum, l’université d’Ohrid forme 3 500 prêtres et professeurs ; après leur mort, elle décline mais continue d’exister jusqu’en 1767.

En 969, un conflit oppose l’Empire byzantin à la Rus’ de Kiev. Les Bulgares, qui forment un empire indépendant, luttent aux côtés des Kiéviens. La mort de Pierre Ier de Bulgarie pendant la guerre entraîne la révolte des Macédoniens contre l’autorité byzantine. Ohrid est le centre de la rébellion et, lorsque le prince Samuel Ier de Bulgarie réussit à constituer un État bulgare avec la Macédoine, il choisit la ville comme capitale. Cet État couvre, en plus de la Macédoine, le territoire des actuelles Bulgarie, Serbie, Grèce, Albanie et Croatie. Thessalonique reste néanmoins sous contrôle byzantin. La ville d’Ohrid s’agrandit rapidement, se dote d’une forteresse et elle devient le siège du Patriarcat d’Ohrid, créé par Samuel Ier.

En 1015, cependant, l’empereur byzantin Basile II prend le contrôle d’Ohrid, qui retombe aux mains du bulgare Ivan Vladislav, neveu de Samuel. Ce dernier est assassiné en 1018 et en 1073, un écrit présente Ohrid comme une ville en ruines. Ce serait Basile II, inquiet du risque de rébellion des Macédoniens, qui aurait fait détruire les lieux stratégiques de la ville. L’empereur, qui supprime le patriarcat autocéphale, maintient néanmoins un archevêché à Ohrid, ce qui permet à la ville de maintenir un rôle spirituel en Macédoine.

En 1081, l’empire byzantin déclare la guerre aux Normands, qui envahissent les Balkans. Ils restent à Ohrid jusqu’en 1085. À partir de ce moment, l’insoumission des Macédoniens face aux Byzantins reprend de l’ampleur et le bogomilisme, mouvement chrétien considéré comme hérétique, s’implante largement dans la région.

L’arrivée de la Quatrième croisade à Constantinople en 1204 précipite l’empire byzantin dans la ruine. Il se divise en divers États, comme l’Empire de Nicée ou le Despotat d’Épire et Ohrid se retrouve dans le royaume de Thessalonique, un des États latins d’Orient mis en place par les Croisés. Peu de temps après, en 1219, le patriarche de Nicée créa un archiépiscopat serbe autocéphale, qui se pose comme le concurrent de celui d’Ohrid. Ce dernier perd plusieurs éparchies, qu’il ne récupère qu’en 1272.

La ville d’Ohrid est ensuite conquise par le roi de Serbie Stefan Uroš IV Dušan en 1334. Ce souverain se fait par ailleurs couronner empereur des Serbes et des Grecs en 1346 à Skopje, qui devient la capitale de son empire.

À la fin du XIVe siècle, les Serbes sont remplacés dans la région par les Turcs, conduits par le sultan Bayezid Ier. La date exacte du passage d’Ohrid aux Turcs ne peut être précisément déterminée ; une inscription dans une église proche donne 1408 tandis les écrits turcs affirment 1395.

L’arrivée des Turcs et l’islamisation des habitants a un impact important sur la ville, qui change de visage. les premiers monuments turcs sont construits dès le début du XVe siècle et le monastère Saint-Pantaleimon d’Ohrid est converti en mosquée, tout comme la cathédrale Sainte-Sophie d’Ohrid au XVIe siècle.

D’après le recensement effectué par les Turcs en 1582, la commune d’Ohrid couvrait alors 88 villages et comptait 13 592 habitants, ce qui traduit une densité de population élevée. La majorité des habitants étaient probablement des Macédoniens slaves et devaient cohabiter avec des minorités valaques et albanaises. Le grand voyageur et écrivain du XVIIe siècle Evliya Çelebi recense à Ohrid 17 lieux de culte musulman, sept écoles primaires, 77 bains et trois cantines publiques. La ville devait compter en plus 150 magasins, trois tavernes, trois auberges et sept cafés.

Au XVIIIe siècle, les Grecs phanariotes sont au pouvoir à Istanbul et ils exercent des pressions pour faire disparaître les Églises slaves au profit de l’Église orthodoxe grecque. Le Patriarcat de Peć, en Serbie, est aboli en 1766 et l’archevêché d’Ohrid disparaît en 1767.

À partir de la première moitié du XIXe siècle, la ville d’Ohrid est le témoin du développement rapide du nationalisme macédonien. Les frères Miladinov, poètes et compilateurs de contes populaires, originaires de la ville voisine de Strouga, font d’Ohrid un centre de diffusion des idées nationalistes. Ils sont suivis par d’autres intellectuels, comme Grigor Parlitchev ou Kuzman Chapkarev, qui y publient plusieurs ouvrages dans leur langue natale, le macédonien16. Au départ, les influences grecque et bulgare étaient grandes à Ohrid, car les autorités grecques et bulgares poursuivaient des politiques d’assimilation culturelle auprès des Macédoniens afin de pouvoir mieux revendiquer la région. Les nationalistes macédoniens s’appuyèrent d’abord sur la langue et les traditions grecques pour propager leurs idées, mais pendant la seconde moitié du XIXe siècle, des écoles purement macédoniennes ouvrent et la population se met à rejeter les propagandes étrangères.

Au même moment, les Balkans deviennent une des régions les plus convoitées d’Europe. Les rébellions contre les Turcs étaient fréquentes en Bosnie-Herzégovine, en Bulgarie et en Macédoine ; la Grèce déclare son indépendance en 1821. En 1878, une guerre oppose une coalition formée par la Russie, la Serbie et le Monténégro à l’Empire ottoman, qui est finalement vaincu et doit accepter l’autonomie de la Bulgarie. Des nationalistes d’Ohrid profitent du conflit pour former un groupe terroriste et attaquer l’occupant turc. Une fois la guerre achevée, les membres de ce groupe sont sévèrement punis et toute révolte écrasée.

En 1903, avec l’apparition de l’Organisation révolutionnaire intérieure macédonienne (VMRO), fondée à Thessalonique, la lutte pour l’indépendance se fait plus dure et un gigantesque soulèvement bouleverse la région en 1903. L’insurrection d’Ilinden est particulièrement violente dans la région d’Ohrid, où 31 batailles ont lieu, opposant 2 091 rebelles à 45 898 soldats turcs. 118 Macédoniens et 374 soldats moururent ; sur les 75 villages insurgés, 32 furent incendiés et 10 furent partiellement brûlés. 13 000 personnes se retrouvèrent sans domicile.

En 1913, la Turquie doit finalement céder la Macédoine, qui est partagée entre la Grèce, la Bulgarie et la Serbie. Ohrid devient théoriquement serbe, mais les Bulgares envahissent la Macédoine serbe et les combats entre les deux pays se poursuivent pendant la Première Guerre mondiale18, la France a participé à la libération de la ville au côté des Alliés par l’intermédiare de l’Armée française d’Orient.

Le conflit et le partage de la Macédoine sont défavorables pour Ohrid. En 1923, elle comptait encore 12 000 habitants ; un an plus tard, il n’y en avait plus que 10 000. Le sectionnement de la région, qui était déjà économiquement peu développée, entre trois États différents, explique la fuite des Macédoniens d’Ohrid vers d’autres villes plus propices à leurs activités. À l’issue de la guerre, Ohrid demeure en Serbie, qui forme avec d’autres territoires cédés par l’empire d’Autriche-Hongrie, le royaume des Serbes, Croates et Slovènes, qui devient le royaume de Yougoslavie en 1929.

Les Communistes, présents à Ohrid depuis 1908, propagent largement leurs idées à partir de 1920, alors que la ville s’industrialise. Le parti fut néanmoins interdit dès 1921 par le pouvoir yougoslave.

Les idées communistes n’ont pas pour autant disparu et pendant la Seconde Guerre mondiale, alors qu’Ohrid est occupée par les Bulgares puis par les Allemands, des sympathisants socialistes accroissent leur crédit auprès des habitants en luttant efficacement contre l’envahisseur. Ce sont les Résistants communistes de la 48e division de la Libération populaire qui libèrent eux-mêmes la ville le 15 octobre 1944.

Après la Libération, Ohrid fait partie de la république socialiste de Macédoine, première reconnaissance officielle de l’existence du peuple macédonien slave. Dans le même sens, des conseils tenus à partir de 1943 permettent le rétablissement en 1967 d’une Église orthodoxe macédonienne autocéphale, dont le siège est à Ohrid.

Pendant la seconde moitié du XXe siècle, la ville devient un grand centre touristique, grâce à ses richesses culturelles et naturelles. La parc national de Galičica est créé en 1958 et la région est classée au Patrimoine mondial de l’humanité en 1979 sous l’intitulé Patrimoine naturel et culturel de la région d’Ohrid1. Lors du conflit de 2001 en Macédoine, la ville est le siège des négociations entre les chefs rebelles albanais et le gouvernement, qui aboutissent le 13 août 2001 à la signature des accords d’Ohrid.

Source : Wikipédia.

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