Pablo Neruda, poète, écrivain, diplomate, penseur et homme politique.

Pablo Neruda, nom de plume de Ricardo Eliécer Neftalí Reyes-Basoalto, est un poète, écrivain, diplomate, homme politique et penseur chilien, né le 12 juillet 1904 à Parral (province de Linares, Chili), mort le 23 septembre 1973 à Santiago du Chili. Il est considéré comme l’un des quatre grands de la poésie chilienne avec Gabriela Mistral, Pablo de Rokha et Vicente Huidobro.

Mort officiellement d’un cancer douze jours après le coup d’État du 11 septembre 1973 au Chili, l’hypothèse d’un assassinat est de plus en plus évoquée dans les années 2010 par le gouvernement chilien et des experts.


Sa mère, Rosa Basoalto, institutrice, meurt deux mois après sa naissance. Son père, José del Carmen Reyes-Morales, un employé des chemins de fer chiliens, se remariera en 1906. Son premier apprentissage est la nature « Mon enfance, ce sont des souliers mouillés, des troncs cassés / tombés dans la jungle, enlacés par les lianes. C’est la découverte de la danse du vent dans les feuillages. »

De 1910 à 1920, il fréquente le lycée pour garçons de Temuco au Chili. À treize ans, il publie ses premiers poèmes et textes en prose.

À partir de 1921, il étudie le français et la littérature française à Santiago et la pédagogie. Il aurait choisi son nom de plume après la lecture des Les Contes de Mala Strana de l’écrivain et poète tchèque du XIXe siècle Jan Neruda (le patronyme Neruda signifie en tchèque « pas de la famille »). Une autre hypothèse est qu’il a pu choisir son pseudonyme d’après un personnage figurant dans un des romans de Conan Doyle, notamment Une étude en rouge (A Study in Scarlett) où apparaît le nom de Neruda (chapitre 4, « Je veux aller au concert de Hallé, cet après-midi, pour entendre Norman Neruda. »). Voulant devenir professeur de français, il se fait très rapidement une renommée avec ses publications et des récitals de poésie.

À dix-neuf ans, il publie son premier livre, Crépusculaire (Crepusculario). Suit, un an plus tard, Vingt poèmes d’amour et une chanson désespérée (Veinte poemas de amor y una canción desesperada).

En 1927, Neruda entre au service diplomatique. Il devient consul à Rangoun, puis successivement à Colombo, Batavia, Calcutta et Buenos Aires.

En décembre 1930, il épouse une Hollandaise, Maryka Hagenaar (qu’il renomme Maruca), avec qui il aura une fille : Malva Marina Reyes, née le 18 août 1934. L’enfant est hydrocéphale (sa tête est remplie d’eau). Pablo Neruda prend la décision de ne pas la reconnaître. Abandonnée aussi par sa mère, Malva Marina Reyes sera finalement adoptée par un couple néerlandais.

En 1932, il rentre au Chili et publie l’année suivante Résidence sur la terre (Residencia en la tierra).

À partir de 1935, il est consul en Espagne où il entretient des relations amicales avec Federico García Lorca2 qu’il avait connu à Buenos Aires et qui aura une influence déterminante sur sa vie et son œuvre, mais aussi avec Rafael Alberti et Jorge Guillén. Après le putsch de Franco du 18 juillet 1936 et l’assassinat de García Lorca, Neruda se fait l’avocat de la République espagnole. Il rédige J’explique certaines choses (sur la guerre d’Espagne) en 1937. Il est révoqué comme consul et publie L’Espagne au cœur (España en el corazón), dans lequel il franchit un pas décisif dans sa démarche. Son chant, « de sombre et solitaire, devient solidaire et agissant » (Jean-Paul Vidal). La même année, il fonde le Comité hispano-américain pour le soutien à l’Espagne et l’Alliance des intellectuels chiliens pour la défense de la culture. En 1939, mandaté par le président chilien Pedro Aguirre Cerda, il organise le départ de 2400 réfugiés espagnols à bord du cargo Winnipeg.

Il fait la connaissance de sa seconde épouse Delia del Carril.

Il fait des voyages au Mexique, à Cuba et au Pérou où il visite la forteresse inca de Machu Picchu qui lui inspirera en 1950 Hauteurs de Macchu-Picchu (Alturas de Macchu-Picchu).

Lors des élections parlementaires de mars 1945, il est élu sénateur et devient membre du parti communiste du Chili.

En 1946, Neruda dirige la campagne électorale de Gabriel González Videla qui, après son élection comme président, mène une politique de droite et s’oppose fortement aux communistes dans le contexte de la guerre froide. Le poète réagit par un discours au Sénat portant le célèbre titre d’Émile Zola : J’accuse…! Il échappe de justesse à son arrestation et se réfugie en Europe. Son exil le conduit en URSS, en Pologne, en Hongrie, en Italie. Il visitera également l’Inde et le Mexique. C’est là que paraît en 1950 son Chant général (Canto General). Écrite dans la clandestinité, l’œuvre est interdite au Chili.

En 1949, Neruda devient membre du Conseil mondial de la paix à Paris. En 1952, il publie Les Vers du capitaine (Los versos del capitán). L’année suivante, il reçoit le prix Staline pour la paix et, en 1955, en même temps que Pablo Picasso, le prix international de la paix. Il rencontre la femme de sa vie, Matilde Urrutia qui est l’inspiration d’un recueil de poèmes d’amour d’une fulgurante beauté La Centaine d’amour (Cien sonetos de amor). De retour au Chili en 1952, il publie en 1954 les Odes élémentaires (Odas elementales). En 1957, il devient président de l’Union des écrivains chiliens. L’année suivante il publie Vaguedivague (Extravagario). Cette même année, tout comme en 1964, il soutient pleinement la campagne électorale de Salvador Allende comme candidat à la présidence de la République. Il est à cette période l’une des cibles du Congrès pour la liberté de la culture, association culturelle anticommuniste fondée en 1950. En 1964, Neruda publie Mémorial de l’Île Noire (Memorial de Isla Negra), retour sur son passé et son rêve d’une humanité plus fraternelle. En 1965, il est nommé Doctor honoris causa de l’Université d’Oxford.

Sa seule pièce de théâtre, intitulée Splendeur et Mort de Joaquín Murrieta (Fulgor y muerte de Joaquín Murrieta), est créée en 1967.

En 1969, le parti communiste le désigne comme candidat à l’élection présidentielle, mais Neruda renonce en faveur d’Allende comme candidat unique de l’Unidad Popular. Après l’élection d’Allende, Neruda accepte le poste d’ambassadeur en France (1970-1972), où il rencontrera Míkis Theodorákis (qui mettra en musique son Canto general) et où il publie L’Épée en flammes (La espada encendida) et Les Pierres du ciel (Las piedras del cielo) : dans ces livres, sa méditation sur la solidarité nécessaire et le silence du monde atteint son expression la plus intense. C’est lors de ce poste d’ambassadeur en France que son cancer de la prostate est diagnostiqué à l’hôpital Cochin où il est admis.

Après Gabriela Mistral en 1945 et Miguel Ángel Asturias en 1967, Pablo Neruda devient le troisième écrivain d’Amérique latine à obtenir le prix Nobel de littérature le 21 octobre 1971. En 1972, il retourne au Chili et est triomphalement accueilli au stade de Santiago. Neruda rédige Incitación al Nixoncidio y elogio de la revolución, Incitation au nixoncide et éloge de la révolution.

Le coup d’État du 11 septembre 1973 au Chili renverse le président en exercice, Salvador Allende. La maison de Neruda à Santiago est saccagée et ses livres brûlés.

Le poète décède le 23 septembre 1973 à la clinique Santa María de Santiago, officiellement d’un cancer de la prostate (une « cachexie cancéreuse » selon son certificat de décès). L’inhumation de son corps, transporté depuis sa maison saccagée jusqu’au cimetière central de Santiago, devient, malgré la surveillance policière, la première manifestation publique de protestation contre la junte militaire dirigée par Augusto Pinochet. À la fin de la dictature, son corps est inhumé selon ses vœux aux côtés de sa compagne dans le jardin de sa maison à la Casa de Isla Negra.

Les causes de sa mort sont controversées, en lien avec son engagement politique et les évènements contemporains. Des témoignages convergents (dont celui de Manuel Araya, jeune militant désigné par le Parti communiste du Chili comme chauffeur, garde du corps et secrétaire de Neruda) soutiennent que Neruda a été assassiné par injection létale à la veille de son exil pour le Mexique, pour l’empêcher de témoigner des crimes du régime du général Pinochet. Le Parti communiste demande le 2 juin 2011 l’ouverture d’une enquête pour déterminer les conditions exactes de sa mort. L’exhumation des restes de Pablo Neruda est entreprise le 8 avril 2013 sous l’autorité du juge Mario Carroza, qui travaille à des enquêtes sur des morts suspectes, notamment celle de l’ancien président chilien Eduardo Frei Montalva. Eugenio Berríos, biochimiste chilien travaillant pour la DINA pendant le régime de Pinochet, est ainsi fortement suspecté de complicité d’assassinat en tant que concepteur de poisons sophistiqués. Mais le 8 novembre 2013, le groupe d’experts internationaux écarte l’hypothèse de l’empoisonnement chimique, sans que le dossier judiciaire soit refermé.

Deux ans plus tard néanmoins, le gouvernement chilien reconnaît encore la possibilité que Neruda ait pu être empoisonné. Une expertise internationale de 2017 conduit à rejeter définitivement la version d’une mort due au cancer, et envisage la possibilité, à défaut de poison chimique identifiable et à partir d’autres traces clairement identifiées dès mai 2015, qu’une bactérie développée en laboratoire ait pu être injectée intentionnellement au poète. « À partir de l’analyse des données, nous ne pouvons pas accepter le fait que le poète aurait été en danger de mort imminente lorsqu’il a été hospitalisé », a déclaré Aurelio Luna, expert en médecine légale de l’université de Murcie (Espagne) qui avait déjà participé à la présentation du rapport consécutif à l’exhumation de 2013.

Son engagement politique lui vaut également des controverses en lien avec son action : en août 1939, il affrète un cargo français, le Winnipeg, pour transporter des réfugiés espagnols de la France vers le Chili, mais on l’accusera d’avoir trié ses amis communistes au détriment des trotskistes et des anarchistes. La vérité était plus complexe : il devait aussi choisir en fonction des professions des passagers. De plus, il fera embarquer au dernier moment des centaines de réfugiés qui avaient appris le départ du bateau par le bouche à oreille. Il se verra reprocher d’avoir délivré un visa chilien à David Alfaro Siqueiros, organisateur de la première tentative d’assassinat de Trotski du 24 mai 1940.

Sur le plan de sa vie privée, la parution posthume en 1974 de son autobiographie intitulée J’avoue que j’ai vécu (Confieso que he vivido), suscite aussi la controverse : dans cet ouvrage, l’auteur raconte avoir violé une femme, alors qu’il était consul de Ceylan en 1929. Il raconte ainsi qu’après que cette femme intouchable a refusé ses avances, il a attrapé son poignet et l’a emmenée dans sa chambre, où ils ont eu une relation pendant laquelle cette femme est restée impassible telle une « statue », les yeux grands ouverts. Il considère dans ses mémoires qu’ « elle avait raison de le mépriser ».

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Sources : Wikipédia, YouTube.

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