Louis Jouvet, comédien et metteur en scène.

Louis Jouvet, né le 24 décembre 1887 à Crozon (Finistère) et mort le 17 août 19512 à Paris 9e, est un comédien, metteur en scène et directeur de théâtre.

Jules Eugène Louis Jouvet, orphelin de père à quatorze ans, part vivre avec sa mère chez son oncle, qui est apothicaire à Rethel dans les Ardennes. Influencé par sa famille, il s’inscrit à la faculté de pharmacie de Toulouse. À partir de 1904, il entame des études de pharmacie à la faculté de Paris, mais passe tout son temps libre dans les théâtres amateurs de l’époque : dans la troupe de Léon Noël, puis celle du Théâtre d’Action d’Art de 1908 à 1910 (il part alors en province jouer devant des auditoires populaires), ensuite celle du Théâtre des Arts, puis à l’Odéon, et au Châtelet. En parallèle, il se présente au concours d’entrée du Conservatoire d’Art dramatique de Paris, où il sera recalé plusieurs fois.

En 1912, son diplôme de pharmacien en poche, Louis Jouvet se marie le 26 septembre avec Else Collin (1886-1967), avec laquelle il aura trois enfants : Anne-Marie en 1914, Jean-Paul en 1917 et Lisa en 1924. À cette époque il court les cachets et fera ainsi une courte apparition dans un film aux côtés de Harry Baur.

Louis Jouvert, carte maximum, Crozon, 13/06/1981.

En 1913, il est engagé avec son ami Charles Dullin par Jacques Copeau, alors directeur du Théâtre du Vieux-Colombier. C’est un véritable tournant dans sa carrière : il y est régisseur, décorateur, assistant et enfin comédien.

En 1914, la Première Guerre mondiale éclate, Louis Jouvet est mobilisé comme ambulancier, puis comme médecin auxiliaire. Démobilisé en 1917, il retrouve la troupe du Vieux-Colombier.

En novembre 1917, la troupe du Vieux-Colombier s’installe à New York, au Garrick Theatre, pour deux saisons. Le succès obtenu n’est pas à la hauteur des attentes ; les relations entre Jouvet et Copeau se dégradent.

En 1920, c’est le retour à Paris : le Vieux-Colombier rouvre ses portes.

En 1922, Jouvet rompt avec Jacques Copeau. Engagé par Jacques Hébertot, qui dirige alors le théâtre des Champs-Élysées et la Comédie des Champs-Élysées, en qualité de directeur technique de ces deux salles, il participe à la scénographie du troisième théâtre, le Studio des Champs-Élysées, et se voit confier des mises en scène, en alternance avec Georges Pitoëff. L’année suivante, en décembre 1923, il remporte son premier grand succès avec Knock ou le Triomphe de la médecine de Jules Romains, qu’il jouera 1 500 fois.

À la fin de 1924, plusieurs comédiens venus du Théâtre du Vieux-Colombier le rejoignent. Jacques Hébertot s’éloigne. Louis Jouvet devient directeur de la Comédie des Champs-Élysées, où il demeurera jusqu’en 1934.

Louis Jouvet, épreuve d’artiste signée.

En 1928, il rencontre Jean Giraudoux, dont il crée plusieurs pièces. Pendant deux années il dirige le théâtre Pigalle ou il y présente avec succès Donogoo Tonka de Jules Romains le 8 octobre 1930, puis en 1931 Judith de Jean Giraudoux. À partir de 1934, il dirige le théâtre de l’Athénée, où il donne la première de La guerre de Troie n’aura pas lieu (1935) et celle d’Ondine (1939).

Gaston Baty, Charles Dullin, Georges Pitoëff et Jouvet fondent le 6 juillet 1927 une association d’entraide, le « Cartel des Quatre », qui durera jusqu’en 1940. Leur objectif est de faire en sorte que le théâtre crée une poésie qui lui soit propre, et de jouer des auteurs contemporains.

On lui propose la direction de la Comédie-Française, qu’il refuse, car il est trop occupé par celle de son propre théâtre. À l’Athénée, il triomphe avec des pièces de Molière et de Giraudoux, et d’autres œuvres du répertoire classique.

Louis Jouvet, essais de couleurs.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, il effectua une tournée en Amérique latine à la suite de l’occupation allemande. Entre 1941 et 1945, il se produit à Buenos Aires (Argentine), où son cousin, l’acteur Maurice Jouvet est installé. Il y représente Ondine, de son ami Jean Giraudoux, pièce qu’il a créée deux ans auparavant à Paris. Il emmène la pièce en tournée à Montevideo et à Rio de Janeiro. Il crée dans cette ville L’Annonce faite à Marie de Paul Claudel en 1942, dans laquelle joue l’actrice belge Madeleine Ozeray (1908-1989), comédienne de sa troupe devenue sa compagne.

À la Libération en 1945, il rentre en France pour diriger La Folle de Chaillot avec Marguerite Moreno (1871-1948) en hommage à Jean Giraudoux, décédé l’année précédente.

Au cinéma, il joue dans trente-deux films, dont plusieurs chefs-d’œuvre passés à la postérité : Quai des Orfèvres de Henri-Georges Clouzot, où il trouve, pour beaucoup, l’un de ses meilleurs rôles ; Hôtel du Nord, aux côtés d’Arletty, célèbre pour son fameux Atmosphère, atmosphère, et Drôle de drame, dans lequel il donne à Michel Simon la réplique devenue célèbre : Moi, j’ai dit : « Bizarre, bizarre » ? Comme c’est étrange… […] Moi, j’ai dit : « Bizarre ? », comme c’est bizarre.. Knock ou Le triomphe de la médecine est porté à l’écran par l’acteur lui-même (avec Roger Goupillières) en 1933 ; Jouvet interprète à nouveau le personnage dans la version de Guy Lefranc en 1951, peu avant sa mort. Il joue dans deux films réalisés par Jean Renoir : Les bas-fonds en 1936, avec Jean Gabin, et La Marseillaise en 1937. Dans L’Alibi, sous la direction de Pierre Chenal, il rencontre pour un face-à-face Erich von Stroheim. Dans Copie conforme, il incarne le chef d’une bande de voleurs qui engage son sosie pour se faire innocenter. Aux côtés de Suzy Delair, Jouvet y tient un double rôle. En 1948, il joue l’inspecteur Carrel, qui enquête sur la mort du truand Vidauban, également son sosie, dans Entre onze heures et minuit de Henri Decoin. Son ami et dialoguiste favori Henri Jeanson met en scène Lady Paname et reforme le duo Jouvet-Delair.

Jouvet aimait le théâtre plus que le cinéma. « Au théâtre on joue, au cinéma on a joué », disait-il. Cela ne l’empêchera pas de jouer, au cinéma, des adaptations théâtrales saluées par la critique et très appréciées du public : Volpone, avec Harry Baur et Charles Dullin, et les deux versions de Knock. Fidèle en amitié, il acceptait spontanément de jouer dans un film dont Jeanson avait signé les dialogues, ou encore exigeait un rôle pour ses amis dans les films où il figurait lui-même (cas de Charles Dullin dans Volpone et Quai des Orfèvres). Sa passion du théâtre l’a poussé à jouer dans Entrée des artistes de Marc Allégret, où il tient son propre rôle de professeur de théâtre du Conservatoire et qui est presque un reportage sur l’art de Jouvet ; La Fin du jour de Julien Duvivier, où il incarne un acteur de théâtre complètement habité par ses personnages et qui, confondant réalité et fiction, sombre dans la folie ; enfin Miquette et sa mère, où Clouzot lui a confié le rôle du pittoresque Monchablon, grand premier rôle en tous genres et directeur d’une troupe de théâtre ambulant.

Le 7 février 1951, c’est lui qui lit la prière de Willette à la messe du mercredi des Cendres, célébrée en l’église Saint-Germain-l’Auxerrois en présence du nonce apostolique monseigneur Roncalli (le futur pape Jean XXIII), du cardinal Maurice Feltin, et d’une foule d’artistes. Cette messe, et sa prière s’adressent à ceux qui vont mourir dans l’année. Sa disparition six mois plus tard marquera les esprits au point que l’année suivante, elle fut dite par trois récitants.

Il aide également les nouvelles figures du théâtre et de la décentralisation théâtrale, Maurice Sarrazin, André Barsacq, Jean-Louis Barrault et Jean Vilar notamment, et met en scène, au Théâtre Antoine à Paris, Le Diable et le Bon Dieu, pièce écrite par Jean-Paul Sartre en 1951. Le soir de la première, il est à Toulouse, où il prodigue ses conseils au jeune directeur du nouveau Centre Dramatique, M. Sarrazin.

Malade du cœur, il meurt d’un infarctus le 17 août 1951, survenu dans son théâtre au 7 rue Boudreau, alors qu’il dirige une répétition de la pièce La Puissance et la Gloire, d’après Graham Greene8. Il repose au cimetière de Montmartre à Paris.

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Sources : Wikipédia, YouTube.