Le lin.

Le lin cultivé (Linum usitatissimum) est une espèce de plantes dicotylédones de la famille des Linaceae, originaire d’Eurasie. C’est une plante herbacée annuelle, largement cultivée pour ses fibres textiles et ses graines oléagineuses.

Le lin a commencé à être cultivé dans le Croissant fertile. Les restes de graines de lin trouvés dans les villages agricoles du Néolithique sont d’abord de petites tailles, comme celles du lin sauvage, Linum bienne, puis les graines remontant à 10 500 ans sont plus grosses, jusqu’à devenir aussi grosses que celles du lin cultivé actuel, à partir de 8 600 ans BP. De plus, des données morphologiques, génétiques et moléculaires suggèrent aussi que L. bienne, le lin bisannuel, est l’ancêtre sauvage de L. usitatissimum. La culture du lin suivra les voies de diffusion de l’agriculture néolithique depuis le noyau du Croissant fertile vers l’Europe et la vallée du Nil.

Le lin fut, historiquement, une des premières espèces cultivées en Asie du Sud-Ouest, avec l’amidonnier, l’orge, la lentille et le pois.

Lin carte maximum, Tunisie.

Ce lin cultivé (Linum usitatissimum L.), très différent de ses ancêtres, est une espèce annuelle, avec des capsules indéhiscentes pour permettre la récolte des graines, des graines plus grosses et plus riches en matières grasses ou bien de longues tiges à proportion élevée de longues fibres. Suivant les critères de sélection, elle comprend des variétés dont la production principale est la fibre et d’autres la graine.


Linum usitatissimum L. se présente généralement sous l’aspect d’une tige unique (ou légèrement ramifiée à la base) pouvant atteindre une hauteur voisine de 1 mètre6 pour un diamètre au collet de l’ordre de 2 mm.

Sur cette tige se répartissent 80 à 100 feuilles simples, lancéolées, sessiles, possédant trois nervures. La disposition de celles-ci est spiralée ; elle forme 3 hélices à partir de la troisième feuille, les deux premières ayant une disposition opposée alterne par rapport aux cotylédons. Pour trouver deux feuilles successives sur une même génératrice, il convient de faire trois tours de tige et de compter 8 insertions foliaires. L’intervalle qui les sépare correspond à la distance interfoliaire. Elle détermine la longueur maximale des fibres élémentaires.

Le lin possède une racine pivotante pouvant descendre à plus de 1 mètre de profondeur dans les terres profondes et émettant de nombreuses radicelles.

L’inflorescence en forme de cyme porte de nombreuses fleurs dont la couleur varie d’un bleu pur jusqu’à un blanc plus ou moins rosé, selon les variétés. La floraison étagée peut durer jusqu’à 15 jours. Les fleurs comptent 5 pétales obovés, de 5−10 mm et ont une durée de vie brève (une journée). Le pollen demeure viable pendant 5 à 7 heures seulement, depuis la déhiscence des anthères jusqu’à celles des pétales. La reproduction se fait principalement par autopollinisation, quoique les fleurs peuvent occasionnellement être visitées par des insectes, assurant ainsi une pollinisation croisée.

Chaque fleur donne un fruit : une capsule, ovoïde, de 6-10 sur 5−10 mm, à cinq loges contenant chacune deux graines et séparées par une fausse cloison plus ou moins ciliée. Ces capsules présentent une légère pointe au sommet. À maturité, les capsules sont plus ou moins déhiscentes selon les variétés.

Les graines sont lisses, plates, oblongues, petites et légères (entre 4 et 7 grammes les mille grains) et de couleur brune à maturité. Elles se terminent par un bec légèrement recourbé.

La graine de lin est riche en huile ; celle-ci représente 35 à 50 % de sa masse sèche. L’acide linolénique (oméga 3) peut représenter 55 à 75 % des acides gras qui composent cette huile.

La distinction variétale se fait essentiellement par les caractères des fleurs et des capsules (couleur des pétales, des étamines et des styles, moucheture des sépales, ciliation des cloisons des capsules, etc.).

Linum usitatissimum L. possède 15 paires de petits chromosomes (2n = 30). Le génome du lin a été décrypté et publié en 2012.

Le lin cultivé, L. usitatissimum, est étroitement apparenté au lin sauvage, Linum bienne Mill. (=syn. L. angustifolium Huds.) avec lequel il est totalement interfertile. Des données morphologiques, génétiques et moléculaires suggèrent que Linum bienne, le lin bisannuel, est l’ancêtre sauvage de L. usitatissimum. Les principaux changements sous l’effet de la domestication sont l’apparition de capsules indéhiscentes, de graines plus grosses et plus riches en huile, ou bien de longues tiges à proportion élevée de longues fibres. On distingue ainsi deux morphotypes de lin cultivé, désignés comme le type à huile et le type à fibre.

Les études archéologiques n’ont pas permis de déterminer les motivations initiales de la culture du lin, l’huile de ses graines ou les fibres de ses tiges. Par contre, les études génétiques suggèrent que le lin cultivé a une origine monophylétique. Autrement dit, le lin cultivé a probablement évolué après un simple événement de domestication. Les données génétiques établissent que celui-ci s’est fait en vue d’obtenir des graines plus grosses et plus riches en lipides, caractéristiques de la variété oléagineuse plutôt que de la variété textile2. C’est pourquoi les chercheurs se sont intéressés au locus sad2 qui est associé à la composition lipidique des graines de lin cultivé et de lin sauvage. L’analyse phylogénétique de ce locus sur 43 accessions de lin bisannuel sauvage et de 70 de lin cultivé a permis d’établir une histoire plus complexe de la domestication. L’accroissement du contenu huileux de la première domestication (sans indéhiscence des capsules) a été suivie de la sélection d’autres caractères de la domestication comme la perte de la dispersion des semences et la production de fibres.

Le lin est historiquement l’une des premières espèces cultivées. Toutefois, les plus anciennes fibres au monde sont des fibres de lin torsadées et teintées, trouvées dans la grotte de Dzudzuana en Géorgie remontant à 36 000 ans, soit bien avant le début de l’agriculture au Néolithique. Les populations Mésolithiques de cette époque ont réalisé l’importance du lin sauvage, probablement le Linum bienne Mill., pour obtenir des fibres textiles.

Les plus anciens restes de graines de lin trouvés dans les sites archéologiques en Asie du Sud-Ouest viennent de Mureybet (sur la rive gauche de l’Euphrate, en Syrie), remontant à 11 800−11 300 ans. Des graines de lin ont été aussi trouvées dans de nombreux villages agricoles du Néolithique acéramique B qui sont apparus dans le Croissant fertile, il y a 10 500 ans. Les graines sont encore petites (comme celles du L. bienne) mais elles sont presque toujours associées avec les blés et orge cultivés. Une indication de domestication ancienne du lin vient des restes de graines retrouvés à Tell Ramad (au sud-ouest de Damas, en Syrie). La taille de ces graines, compte tenu de la réduction due à la carbonisation, les situe dans la taille de L. usitatissimum. On a donc une indication de domestication dans des conditions pluviales remontant 8 600 ans. Un peu plus tard, dans le bassin mésopotamien, la taille des graines de lin de Tell Sabz (Iran, il y a 8 350−7 750 ans) ou à Arpachiya (Mossoul, Irak, il y a 7 750−7 250 ans) est encore supérieure. Ces grosses graines indiquent une domestication avancée, et établissent que le lin faisait partie du système irrigué d’agriculture à graines qui s’est développé dans cette région.

Selon Zohary et al. (2012), la culture du lin suivra les voies de diffusion de l’agriculture néolithique depuis le noyau du Croissant fertile vers l’Europe et la vallée du Nil.

En Égypte, le lin a été retrouvé dans les sites agricoles néolithiques les plus anciens de la vallée du Nil, datant au VIIIe millénaire BP, au Fayoum12 et à Mérindé. Au Fayoum, des silos à grains enterrés contenaient en tout 3,4 kg de grains de l’époque Néolithique dont des graines de lin.

À partir du début de l’époque dynastique, le lin apparaît comme une des principales plantes à graines fondatrices de l’Égypte (avec le blé-amidonnier, l’orge, les lentilles, et les pois). L’usage du lin a commencé à se développer : sa production, attestée il y a plus de 6 000 ans, servait à confectionner vêtements, tissus funéraires, voiles de bateaux, cordages ou filets. Les graines étaient consommées pour leurs qualités nutritives. Le rouissage, le filage et le tissage du lin sont splendidement illustrés dans les peintures tombales de Beni Hassan (XIIe dynastie).

La culture du lin a ensuite essaimé de proche en proche au cours de l’époque néolithique, jusqu’à l’Europe. Des graines de lin ont été découvertes dans plusieurs sites de la première moitié du Néolithique ancien (VIIIe millénaire BP) dans le Bassin méditerranéen et le Sud de l’Europe: Knossos (Crète), quelques sites en Thessalie (Grèce), La Marmotta (Italie) et jusqu’à Mohelnice (Moravie).

Les graines et le textile de lin les plus anciens trouvés en France remontent au VIe millénaire BP, dans la Station III de Clairvaux. Puis à l’Âge du Bronze récent (2 905−2 869 BP), des graines et des capsules ont été trouvées à Grésine. Les Gaulois auraient cultivé le lin dans la vallée de la Lys bien avant la conquête des Gaules par Jules César15. Au Ier siècle, l’encyclopédiste Pline indique que « les Gaules dans leur ensemble tissent des voiles, même nos ennemis au-delà du Rhin le font déjà, et leurs femmes ne connaissent pas de plus belle étoffe ». Il cite des lieux de production de toile de lin réputé pour leur blancheur ou leur finesse, dans la vallée du Pô en Italie, en Hispanie ou en Germanie. Ou bien certaines régions réputées pour leurs filets de pêche ou de chasse, en lin. Il décrit les techniques de rouissage, filage et tissage. L’usage médicinal des graines de lin était aussi connu.

La culture du lin a été encouragée par Charlemagne – il fait partie des plantes dont la culture est recommandée dans les domaines royaux dans le capitulaire De Villis (fin du VIIIe ou début du IXe siècle) – et c’est à partir du xie siècle que son utilisation s’est généralisée. Au XIe siècle, la Tapisserie de Bayeux, une broderie sur toile de lin de 68 m de long, est l’exemple le plus célèbre de la présence du lin à cette époque.

En ce temps là, le lin était considéré comme une plante magique associée à la magie blanche. Au xiiie siècle, l’école de médecine de Salerne indique que « rôties, les graines de lin sont diurétiques et apéritives ».

Au xiiie siècle, sa culture s’est développée dans les Flandres, la Bretagne et l’Anjou18. Entre le XVIe siècle et le début du XXe siècle, se met en place un commerce de semences de lin entre la Livonie (territoire des États baltes actuels) et la Bretagne19. Le commerce intense de ces graines était soumis à de sévères contrôles de qualité chez les producteurs et les utilisateurs.

C’est au xviie siècle que l’utilisation du lin a atteint son apogée. Il entrait alors dans la fabrication des toiles fines de Cambrai, des toiles dites « Bretagne superfine », des dentelles comme celles du point d’Alençon, des blouses, des chemises, des mouchoirs. Les surfaces cultivées ont atteint 300 000 ha, avec un rendement de 600 kg de fibres par hectare. Louis XIV, par l’abolition de l’édit de Nantes, entraîne l’exil de nombreux huguenots qui ont emporté avec eux leur savoir-faire de la liniculture en Irlande (avec son berceau Lisburn), en Suisse ou aux Pays-Bas. L’importation de grands volumes de coton a vu cette fibre remplacer progressivement le lin au cours du xviie siècle (à la fin de ce siècle, 18 % des fibres textiles étaient en lin, 78 % en laine).

Au début du XIXe siècle, c’est Philippe de Girard qui, avec son invention de la machine à filer le lin, a permis au nord de la France de devenir l’un des premiers centres de filatures industrielles d’Europe, comme avec la batiste originaire de Cambrai.

Au xixe siècle, la filature et le tissage sont entrés dans l’ère de l’industrialisation. En France, les petits lots produits dans les fermes ne convenaient plus aux industriels et les surfaces de lin ont chuté à 100 000 hectares. Ce déclin a été accentué par l’utilisation intensive du coton. La production française n’était plus que de 20 000 ha avant 1945.

Après la Seconde Guerre mondiale, l’arrivée en France d’agriculteurs belges a relancé la culture du lin et les surfaces cultivées ont atteint 50 000 ha. Les décennies suivantes ont vu l’apparition de la mécanisation agricole et de la création variétale ainsi que le perfectionnement du teillage.

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Sources : Wikipédia, YouTube.

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