Hans Kelsen, juriste.

Hans Kelsen, né le 11 octobre 1881 à Prague sous l’Empire austro-hongrois et mort le 19 avril 1973 à Orinda en Californie, est un juriste austro-américain, fils d’une famille juive de Bohême et de Galicie. Théoricien du droit, il est l’auteur de la « Théorie pure du droit », œuvre phare de la discipline. Il est le fondateur du normativisme et du principe de la hiérarchie des normes.

Hans Kelsen appartient au mouvement du positivisme juridique, qui s’oppose au jusnaturalisme en prétendant décrire objectivement tout système juridique, sans faire appel à des valeurs morales extrinsèques au droit.

Il enseigna au Juridicum de Vienne entre 1911 et 1929. Contraint de fuir l’Autriche après l’Anschluss en raison de son ascendance juive, il s’exila aux États-Unis où il enseigna à la faculté de droit Boalt Hall de l’université de Californie à Berkeley.


Hans Kelsen est le fondateur de l’école normativiste et est à l’origine de la théorie dite de la pyramide des normes ou théorie pure du droit. Cette théorie, fondatrice de l’école positiviste qui s’oppose au jusnaturalisme, vise à expliquer de façon objective tout système juridique en fonction de l’ordonnancement des différentes normes et sources du droit, assurant ainsi une explication rationnelle et fonctionnelle au principe de hiérarchie des normes et du droit international public.

Kelse, carte maximum, Autriche.

Le principe fondamental de cette théorie s’appuie sur l’idée de conformité. Ainsi, la norme inférieure valide ne peut être contraire à la norme qui lui est immédiatement supérieure. Si tel est le cas, un contentieux pourra aboutir à l’« annulation » ou la « correction » de la norme inférieure contraire  invalide.

Cette considération théorique a permis d’expliquer et de favoriser l’émergence du contrôle de constitutionnalité dans les pays européens. Les États-Unis pratiquaient ce type de contrôle depuis le début du XIXe siècle.

Au sommet de la pyramide, l’auteur place une norme hypothétique  fondamentale, dite Grundnorm (le Grund désignant le fondement). Cette norme, de nature logico-transcendentale — Kelsen est en effet fortement influencé par le néokantisme —, est considérée comme une supposition nécessaire de l’esprit juridique, qui assure la cohérence de l’ordre juridique. Il ne s’agit pas d’une norme réelle, comme la Constitution : celle-là même devrait s’appuyer sur la Grundnorm imaginaire, placée au sommet de la pyramide.

Le caractère hypothétique de cette norme a fait dire à ses détracteurs, notamment Carl Schmitt, que l’auteur n’avait pas pu se détacher des postulats du droit naturel selon lesquels la légitimité du droit découle de la divinité ou de la Nature elle-même.

Une autre critique importante à la conception juridique normative de Kelsen est celle faite par Alexander Hold-Ferneck, qui tend à montrer que le positivisme juridique de Kelsen est un jusnaturalisme formalisé, sans substance et sans contenu. Pour essayer de répondre à ces critiques, Kelsen a procédé à d’importants remaniements de sa théorie, si bien que l’on distingue généralement deux temps dans son œuvre : avant l’exil américain et après ce dernier.

La majorité des commentateurs s’accorde toutefois aujourd’hui à penser que la critique qui ferait de Kelsen un jusnaturaliste qui s’ignore n’est pas fondée. La Grundnorm, en effet, n’est pas l’origine causale ou génétique de l’ordre juridique et politique comme l’a cru à tort Carl Schmitt. En tant que norme, elle appartient au monde du devoir-être et ne peut rien causer qui ressortit du monde des faits. La Grundnorm est un postulat, une norme hypothétique, supposée et non posée. Elle est un choix épistémologique qui nous permet de comprendre la juridicité de la Constitution et donc de l’ensemble de l’ordre juridique. En tant que norme supposée, celle-ci ne dispose d’aucun contenu, et la démarche kelsénienne se situe donc aux antipodes de la recherche jusnaturaliste des fondements du droit basée sur des normes morales. Cette critique repose sur une confusion entre le caractère obligatoire d’une norme et sa validité ; qualifier un ordre normatif de juridique ne revient pas à énoncer la norme morale : il faut se conformer aux normes qui composent cet ordre.

Selon Kelsen, le juge constitutionnel n’a pas pour vocation d’instaurer un gouvernement des juges, dans lequel sa censure de la loi lors du contrôle de constitutionnalité aurait des aspirations politiques. Au contraire, le juge n’est là que pour indiquer au législateur que, lorsqu’il y a incompatibilité avec la Constitution, il lui faut d’abord passer par une révision constitutionnelle avant de pouvoir faire passer sa loi.

Il en fut ainsi, par exemple, lorsque le Conseil constitutionnel français censura, le 13 août 1993, une disposition de la loi portant sur l’immigration, prise en application de la convention de Schengen, au motif qu’elle portait atteinte au principe à valeur constitutionnelle du droit d’asile (consacré par le préambule de 1946). La Constitution fut alors révisée le 25 novembre 1993 en intégrant un nouvel article 53-1 portant sur ce droit. L’expression « juge aiguilleur » vient de Louis Favoreu.

En France, cette théorie rencontre une limite — le juge constitutionnel se refuse à contrôler les lois référendaires, ce qui peut s’expliquer par le fait que, selon les termes mêmes de la Constitution, « La souveraineté nationale appartient au peuple » (art. 3 de la Constitution du 4 octobre 1958).  Contrôler l’expression directe de cette souveraineté via les lois référendaires reviendrait à violer objectivement les termes mêmes de la Constitution.

Kelsen a aussi réfléchi sur l’organisation politique et sur les relations internationales, en particulier sur la démocratie (cf. H. Kelsen, La Démocratie : sa nature, sa valeur). Il essaie de définir cette notion qui est loin de l’être en réalité. Pour cela, il revient sur le contrat social pour essayer de le dépasser et d’accéder à un régime qui serait le moins mauvais pour l’homme, un équilibre entre la liberté (valeur première) et l’égalité.

Il a collaboré à la rédaction de la constitution autrichienne de 1920.

Source : Wikipédia.

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