Jean-Alfred Fournier, médecin dermatologue

Jean-Alfred Fournier, né le 12 mars 1832 à Paris 2e et mort le 23 décembre 1914 à Paris 8e, est un médecin dermatologue français spécialisé en vénérologie, notamment de la neurosyphilis.

Partisan d’une théorie erronée, celle de « l’hérédosyphilis », il est aussi le dirigeant-fondateur de la lutte anti-vénérienne (contre la syphilis et autres infections sexuellement transmissibles), en suscitant de nombreux émules à l’étranger.

Son père est Vincent Fournier et sa mère Anaïs Élisa Dumas. Il fait ses études classiques à l’institution Jauffret de Paris.

Étudiant en médecine, il est externe en 1854, et interne en 1855 dans le service des vénériens à l’hôpital du Midi sous la direction de Philippe Ricord. Durant son externat, il fréquente la salle de dissection de l’école des beaux-arts de Paris et rencontre l’artiste Charles-Désiré Rambert.

Fournier se spécialise très tôt dans les maladies sexuellement transmissibles, notamment le chancre mou, la gonorrhée et la syphilis. En 1860, il est docteur en médecine et agrégé en 1863.

En 1867, il est médecin des hôpitaux, successivement attaché à l’Hôtel-Dieu de Paris puis à Lourcine (1868-1876) dont il devient médecin-chef, et enfin à l’hôpital Saint-Louis jusqu’en 1880.

il travaille avec Augustin Grisolle, dont il est le suppléant en 1867. En 1877, il est nommé professeur de clinique des maladies syphilitiques, et en 1879, une nouvelle chaire est créée pour lui à Saint-Louis : celle de clinique des maladies syphilitiques et cutanées où il enseigne jusqu’en 1900. Il est professeur honoraire en 1902.

Son fils est Edmond Fournier (1864-?), médecin, chevalier de la Légion d’honneur1 et qui publia des leçons de son père, en étant lui aussi auteur d’ouvrages sur la syphilis.

Jean-Alfred Fournier, épreuve d’artiste.

Alfred Fournier consacre l’étude de la syphilis comme une véritable branche de la médecine, avec l’officialisation des termes « syphiligraphie » et « syphiligraphe ». Léon Daudet le juge ainsi « courtois, fermé, d’aspect très simple, ç’a été le premier syphiligraphe de son temps et probablement de tous les temps » (Devant la douleur, 1915).

Sa principale contribution fut d’être le premier à identifier l’origine syphilitique du tabès (1876) et de la paralysie générale à partir de 1879, affections qu’il nomme « parasyphilis ». Ceci ne sera pleinement accepté qu’à partir de 1913, et regroupé plus tard sous le terme « neurosyphilis » . En 1883, il décrit aussi la syphilis congénitale (transmission de la mère infectée à son fœtus).

Cependant, il continue de défendre l’idée de la transmission héréditaire de la syphilis (dont celle par le père, la mère restant indemne mais « imprégnée », idée qui datait du XVIe siècle. Il élabore ainsi le concept erroné « d’hérédosyphilis ». Cette syphilis héréditaire tardive n’est décelable que sur des stigmates dystrophiques (lésions du pavillon de l’oreille, de la peau, de la bouche et des dents…) ou « signes de Fournier ». Il fait de cette syphilis héréditaire une cause de dégénérescence de l’espèce humaine, un danger physique et intellectuel.

Jean-Alfred Fournier, carte maximum du 4/02/1946.

Son Traité de la syphilis (1898-1901) en trois tomes a été considéré comme un « monument clinique définitif ».

Son plus grand succès international reste Syphilis et mariage (1880) avec deux éditions françaises et traductions en six langues1. Aux États-Unis, une traduction est faite en 1881 par Prince Albert Morrow, un jeune dermatologue américain alors en voyage d’études en Europe. En 1904, Morrow publiera lui-même un Social Diseases and Marriage (1904), une source d’inspiration des lois eugénistes américaines sur le mariage et les politiques d’immigration.

Fournier laisse son nom à la gangrène de Fournier, présentée en 1883, même si la maladie avait déjà été décrite en 1764 par un autre médecin du nom de Baurienne.

Fournier fait de l’hôpital Saint-Louis, un haut lieu de la médecine internationale, lorsque se tient en 1889, le premier congrès international de dermatologie et de syphiligraphie.

La syphilis, avec l’alcoolisme et la tuberculose, constituaient selon Fournier, « la triade des pestes contemporaines ». Il était aussi convaincu que l’onanisme était la principale cause de l’épilepsie.

En 1886, l’Académie de médecine adopte les conclusions de Fournier sur son programme de lutte contre la syphilis, dont il n’existe aucun traitement pour en contrecarrer l’évolution et les conséquences. Selon Fournier, la prophylaxie doit être l’œuvre des médecins eux-mêmes et non des pouvoirs publics. Ces médecins doivent être formés par un stage obligatoire de syphiligraphie.

Il préconise un ensemble de mesures administratives visant à surveiller la prostitution, et à contrôler médicalement l’armée et la marine. Il développe l’idée de dispensaires pour détecter les patients atteints de formes contagieuses, avant leur internement hospitalier.

Il est le dirigeant-fondateur en 1901, de la Société de prophylaxie sanitaire et morale, destinée à lutter contre le « péril vénérien » et bâtie sur les modèles de la lutte contre la tuberculose ou l’alcool. Cette société joue un rôle influent par les liens étroits entretenus avec la Préfecture de police de Paris et la hiérarchie militaire.

Plus qu’un groupe de pression, cette organisation développe une nouvelle attitude bourgeoise sur le sexe. Fournier distingue une « syphilis imméritée » celle des femmes mariées de la bourgeoisie, contaminées par leurs maris volages. Ce sont les femmes du peuple, et celles du « monde galant », qui sont à la source d’une hérédité morbide qui s’introduit dans la lignée des familles bourgeoises ; ces familles étant, selon Corbin, elles-mêmes suivies par des spécialistes parisiens qui se succèdent de père en fils.

Source : Wikipédia