Charles Goujon et Constantin Rozanoff, pilotes d’essais.

Charles Goujon, né le 12 mars 1912 à Paris, dans le 9e arrondissement1, et mort en service aérien commandé le 21 mai 1957 au Bourget (Seine-Saint-Denis) est un aviateur français, pilote de guerre durant la Seconde Guerre mondiale, puis pilote d’essai après-guerre.

Le SO.30 fut retenu comme premier appareil expérimental de transport à réaction français1. Les deux moteurs Pratt & Whitney de 2 030 ch furent remplacés par deux Rolls-Royce Nene de 2 260 kgp sur le SO.30 « Nene ». qui fit son premier vol le 15 mars 1951 avec « Charlie » Goujon aux commandes, son équipage étant composé de André Pérard et Armand Raimbeau. Les essais permirent d’atteindre 700 km/h. Ce même « banc d’essai » volant fut remotorisé avec des SNECMA « Atar » et rebaptisé SO.30 « Atar ». Il vola en janvier 1953. Goujon était à nouveau aux commandes.

Depuis son entrée à la SNCASO, Daniel Rastel avait démissionné et Jacques Guignard l’avait remplacé comme chef pilote. Ce dernier fut arrêté pendant près de six mois pour raison de santé et Goujon assura l’intérim. Cela lui permet de voler enfin sur monoplace à réaction : il prend la place de Jacques Guignard à bord du SO.6000 Triton, le premier avion à réaction français, dessiné par Lucien Servanty.

Il effectue plusieurs vols, en configuration « composite » accroché sur le dos d’un avion-porteur, à bord de la maquette expérimentale SO.M-1. De retour, Jacques Guignard assure les vols libres après décrochement de l’avion-porteur.

Charles Goujon aborde une période intense de sa vie de pilote d’essai en janvier 1953, avec les essais de l’« Espadon »1. Le premier vol du SO.6020 « Espadon », effectué par Daniel Rastel, remontait au 12 novembre 1948. Jacques Guignard avait fait voler le SO.6025 au réacteur plus puissant, puis la version SO.6021, et pour finir le SO.6026, dont la puissance du réacteur était optimisée par un moteur-fusée.

En janvier 1953, Goujon effectue son premier vol sur SO.6021 Espadon, version dotée d’un réacteur Hispano-Suiza « Nene » mais ne comportant pas encore de moteur-fusée. Le 13 juin 1953, un an après Jacques Guignard, il pilote le SO.6025 doté d’un moteur-fusée SEPR et entre dans le « club » très fermé des « pilote-fusées ». Il partage avec Guigard la réalisation d’un programme enthousiasmant, d’où ne sont pas exclues les émotions fortes1. Un jour, lors, de l’essai d’un « Espadon » dans la région parisienne, il est victime d’une extinction de son réacteur, mais parvient à le rallumer en vol.

Il continue à partager avec Guignard les essais des « Espadon ». Le 15 décembre 1953, il effectue le premier vol horizontal à mach 1 jamais réalisé en France.

Jacques Guignard, qui a commencé les essais du SO.9000 Trident-01 le 2 mars 1953, se blesse gravement le 1er septembre 1953 en effectuant le premier vol du prototype n° 02. Charles Goujon se retrouve chef pilote par intérim. C’est à son tour de poursuivre les essais de l’intercepteur conçu par Lucien Servanty. Son premier vol sur le « Trident » a lieu le 16 janvier 1954.

Enfin, le 4 septembre 1954, en milieu d’après-midi sur la piste de Melun-Villaroche, Goujon allume pour la première fois le moteur-fusée pour un premier vol. Il atteint presque la vitesse de décollage, lorsqu’une lampe rouge s’allume, signalant une avarie. Après vérification, les pleins sont complétés et à 18 h Goujon fait une seconde tentative, réussie cette fois. Il monte à 53000 pieds (15900 mètres) puis, après l’extinction des fusées, carburant épuisé, redescend se poser sans encombre

« Charlie » Goujon se méfie toujours d’une panne de fusées au décollage. Il est sur ses gardes et il a raison. Il échappe de justesse à un accident semblable à celui de Guignard, le 26 octobre 1954. La panne se produisant au moment le plus critique, c’est-à-dire lorsque les roues quittent le sol, il franchit de justesse un bouquet d’arbres et revient se poser.

En compensation, Goujon a la joie de réaliser une « première » le 6 juillet 1955 : l’allumage en vol des trois chambres du moteur SEPR, délivrant une puissance équivalente à 50 000 ch. Tout se déroule parfaitement, et le « Trident » parvient à une altitude et une vitesse jamais atteintes en France. Leur carburant épuisé, les fusées s’éteignent et l’avion ne vole plus que sur les réacteurs « Viper », dont le « Trident » est équipé à présent.

Le 21 juillet 1955 à Melun-Villaroche, Charles Goujon effectue le premier vol du SO.9050 « Trident II », dans sa version proche du futur avion de série, un intercepteur1. Il bénéficiait de divers perfectionnements. Il était équipé de deux réacteurs Armstrong Siddeley Viper de 760 kgp et de la nouvelle version du moteur-fusée SEPR à deux chambres de 1 500 kgp unitaires, donc plus puissant.

La SNCASO prévoit de faire du « Trident II » l’avion vedette du Salon de l’aviation 19573. Charles Goujon et Jacques Guignard, rétabli, effectuèrent donc une préparation minutieuse du vol de présentation. La démonstration ne durera que cinq minutes mais doit être le clou du salon.

Le 21 mai 19573, Charles Goujon décolle pour une nouvelle répétition. Il pique pour un passage rapide, mais ne redresse pas, percute le sol et explose. Charles Goujon, retrouvé toujours sanglé sur son siège, n’a pas eu le temps de s’éjecter.

Il est inhumé à Sceaux dans les Hauts-de-Seine. Il totalisait 5 600 heures de vol.


Constantin Rozanoff, dit « Kostia » Rozanoff, né le 23 août 1905 à Varsovie (Empire russe) et mort le 3 avril 1954 à Melun-Villaroche en Seine-et-Marne, est un aviateur français, colonel puis pilote d’essai.

Goujon et Rozanoff, pilotes d’essais, carte maximum, Le Bourget, 13/06/1959.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, Kostia Rozanoff commande en second le groupe de chasse II/4 et remporte deux victoires lors de la bataille de France. Après le débarquement américain en Afrique du Nord, il prend le commandement du Groupe de Chasse II/5 La Fayette, puis le GC II/3. Il est un des premiers français à piloter un avion à réaction. En 1945, devenu colonel, il commande la base aérienne 118 Mont-de-Marsan.

Rozanoff quitte l’armée de l’air en 1946 et devient directeur d’essais chez Dassault. Il met au point les premiers chasseurs à réaction français, des séries Ouragan et Mystère. En février 1954, il est le premier pilote français à franchir le mur du son en vol horizontal sur un avion français, le Mystère IV B 01, mais se tue quelques semaines après aux commandes du même appareil.

Rozanoff entre alors immédiatement chez le constructeur privé Dassault comme directeur des essais en vol. À ce titre, il assurera la mise au point des premiers chasseurs à réaction français de grande série, l’Ouragan puis la série des Dassault Mystère. En 1953, aux commandes d’un Mystère IV B, il est le premier pilote français à franchir le mur du son en vol horizontal sur un avion de conception nationale, en avance sur l’industrie britannique et seulement quelques mois après le F-100 Super Sabre américain.

Kostia Rozanoff trouve la mort aux commandes de ce même Mystère IV B 01 le 3 avril 1954 au cours d’une démonstration devant un parterre d’officiels français et britanniques au centre d’essais en vol de Melun-Villaroche. Lors d’une tentative de passage du mur du son à 30 mètres d’altitude, une défaillance électrique sur la connexion de la profondeur provoque le piqué brutal de l’avion qui s’écrase en moins de deux secondes, sans laisser la moindre chance à son pilote.

Source : Wikipédia.