Yehuda Amichaï, poète.

Yehuda Amichaï (en hébreu : יהודה עמיחי), né Ludwig Pfeuffer le 3 mai 1924 à Wurtzbourg en Allemagne et mort le 22 septembre 2000 à Jérusalem, est un poète juif israélien de langue hébraïque. Il occupe une place importante dans la littérature israélienne de son siècle.


Issu d’une famille juive d’éleveurs de chevaux et de maquignons, lignée marchande toutefois attachée au monde paysan de la Franconie bavaroise, le jeune Ludwig émigre avec ses parents effrayés dès 1935 par les  persécutions nazies et gagne la Palestine mandataire en 1936. Il a douze ans lorsqu’il commence l’étude intensive de l’hébreu.

Le jeune élève, formé dans un milieu social prosaïque attaché aux valeurs et nourritures terrestres, reçoit plus qu’il ne prend en 1946 le nom hébraïque de Yehuda Amichaï. Le poète l’acceptera pleinement quelques années plus tard, en son sens littéral « Mon Peuple vit ».

À la suite de ses études, notamment littéraires et religieuses, le fils  d’immigrants s’engage d’abord dans la brigade juive de l’armée britannique pendant la Seconde Guerre mondiale puis, après l’affaiblissement du crédit politique et militaire anglais, rejoint le Palmach (le bras armé de la Haganah) durant la guerre d’indépendance de 1948 et fait partie de l’unité du Neguev. Il a ensuite effectué normalement ses périodes militaires comme n’importe quel citoyen israélien valide. Il est notamment engagé avec son unité de réservistes dans l’intervention conjointe entre France, Grande-Bretagne et Israël s’opposant à la nationalisation égyptienne du canal de Suez en 1956. Le succès militaire doit s’effacer devant la diplomatie des grandes puissances. Il a enfin participé en urgence à la guerre du Kippour en 1973.

Ce n’est pas l’étudiant, mais le soldat, dans ses interminables veilles militaires entre deux appels, qui découvre la poésie, précisément celle de Thomas Stearns Eliot à proximité du canal de Suez en 1948. Il comprend que la grandeur passée de la langue hébraïque, qu’il a étudié à l’école, doit devenir simplement par ce biais poétique la langue d’un peuple, et il  poursuivra à sa façon dans sa langue personnelle cette approche intimiste à la fois populaire et savante, initiée par la rencontre avec T.S Eliot. Ne peut-on pas être poète d’amour en temps de guerre ? Emmanuel Mosès, un de ses traducteurs en français, signale le contraste entre l’homme simple et prosaïque du quotidien qu’il a connu, si proche en un sens de ses parents restés allemands, et l’écrivain poète maître confirmé s’exerçant à l’art de la métaphore, pratiquant avec conscience l’alliance de la langue la plus quotidienne avec les références ou échos lointains portés par l’ancienne langue religieuse, littéraire ou savante, qu’il n’ignorait nullement.

Du point de vue de la forme poétique, l’influence anglo-saxonne de Dylan Thomas, W.H. Auden, ainsi que celle plus métaphysique de Rainer Maria Rilke et de ses élégies, est largement perceptible selon son traducteur en anglais Rober Alter.

Revenu à la vie civile, Amichai habitant le quartier de Yemin Moshe à Jérusalem a encore longtemps étudié la Bible, tant sous l’angle de l’histoire biblique que de son exégèse, ainsi que les divers pans de la littérature hébraïque. L’exégète a d’abord enseigné la littérature dans les lycées, puis dans les séminaires d’enseignants israéliens avant de revenir comme maître de conférence à l’université hébraïque de Jérusalem, son principal lieu de formation. Il profite de la large reconnaissance de sa poésie dans le monde anglo-saxon pour voyager, il sera reçu en résidence plus  tardivement à l’université de New York, à l’université de Californie à Berkeley, où il retrouve son traducteur anglais Robert Alter ou encore à l’université Yale, où la bibliothèque Beinecke abrite aujourd’hui les documents et archives légué par le poète. L’homme qui se définissait comme « un fanatique de la paix » et qui a travaillé avec des écrivains palestiniens est devenu un avocat du dialogue et de la réconciliation dans la région. Il est un des fondateurs du Mouvement La Paix maintenant.

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