William Ewart Gladstone, homme d’état.

William Ewart Gladstone, 29 décembre 1809 à Liverpool – 19 mai 1898 à Hawarden (Flintshire) est un homme d’État britannique qui joua un rôle majeur dans son pays dans la seconde moitié du XIXe siècle.

Quatre fois chancelier de l’Échiquier et quatre fois Premier ministre (1868-1874, 1880-1885, 1886 et 1892-1894), il est notamment connu en tant que défenseur des couches populaires et des catholiques irlandais de l’Angleterre victorienne. D’abord conservateur, ensuite libéral, il a introduit plusieurs réformes. Pourtant, il a échoué avec la loi qui devait garantir le pouvoir autonome de l’Irlande. La Première Guerre des Boers (1880-1881) se déroula sous l’un de ses mandats.

William Ewart Gladstone était un adversaire de longue date de Benjamin Disraeli. Par leur opposition politique, ils ont cependant conjointement œuvré à faire du Royaume-Uni une démocratie parlementaire accomplie, fondée sur l’alternance politique.


À son retour, il est élu en 1832 député conservateur (tory) pour Newark. Inscrit au barreau, il n’y plaide pas et s’en fait d’ailleurs radier. D’abord conservateur intransigeant, il est proche de la faction des Tories qui s’oppose à la fois à l’abolition de l’esclavage et aux première lois sociales. Il se prononce également contre toute concession à l’Église catholique d’Irlande car il juge « hérétique » l’égalité des cultes. Il est lié au Trésor sous le premier ministère de Robert Peel puis, en 1835, secrétaire d’État à la guerre et aux colonies. Amorçant un virage plus libéral, il soutient l’abrogation des corn laws en 1846, celle-ci menant à la scission du camp conservateur. Gladstone est alors partisan de la politique de Peel et cesse d’adhérer au parti conservateur. En 1859, les partisans de Peel s’unirent avec les whigs et les radicaux pour former le parti libéral qui domine la vie politique britannique pendant une bonne partie de la période qui va  jusqu’en 1915.

En 1852, soutenu par une coalition de whigs et de peelites, Lord Aberdeen fut nommé Premier ministre et désigna Gladstone en tant que chancelier de l’Échiquier. Dans le cadre de ses nouvelles fonctions, Gladstone était à même de s’illustrer là où ses prédécesseurs à ce poste, le whig Charles Wood et le tory Benjamin Disraeli, avaient en grande partie échoué. Son premier budget de 1853 poursuivit les efforts entamés par Peel onze ans auparavant en matière de réduction des droits de douane : ces derniers furent en effet supprimés sur 123 produits et fortement diminués pour 133 autres. L’impôt sur le revenu était arrivé à expiration mais Gladstone proposa de le renouveler pour une durée de sept ans afin de financer les baisses tarifaires.

Gladstone souhaitait maintenir un équilibre entre la fiscalité directe et indirecte et abolir l’impôt sur le revenu, tout en sachant que la suppression de cet impôt supposait de couper drastiquement dans les dépenses gouvernementales. Considérant que plus nombreuses seraient les personnes concernées par cet impôt, plus forte serait la pression de l’opinion publique pour réclamer son abolition, il augmenta le nombre de contribuables assujettis à l’impôt sur le revenu en abaissant le seuil minimal imposable de 150 à 100 £. Le montant en question constituait, selon Gladstone, « la ligne de démarcation… entre la partie éduquée et la partie laborieuse de la communauté », de sorte que les personnes imposables étaient aussi celles qui disposaient du droit de vote, et donc de la capacité de se prononcer en faveur d’une réduction des dépenses gouvernementales.

En 1859, cependant, lorsque Palmerston succéda au second et bref  gouvernement de Derby, Gladstone accepta de redevenir chancelier de l’Échiquier.

Gladstone hérita d’un déficit de près de 5 000 000 £ et d’un impôt sur le revenu dont le montant s’élevait désormais à cinq pence. Toujours hostile à l’emprunt, Gladstone était d’avis qu’« en temps de paix, rien d’autre qu’une nécessité impérieuse ne devrait nous inciter à emprunter » et il rehaussa l’impôt sur le revenu à 9 pence. Traditionnellement, la collecte d’un impôt ne pouvait être effectuée qu’aux deux tiers au cours d’un même exercice financier, mais Gladstone taxa ces quatre pence supplémentaires à un taux de 8 pence au cours du premier semestre 1859 afin d’obtenir les recettes escomptées en une seule année. Il ressuscita en outre la « ligne de  démarcation » qui, mise en place en 1853, avait été abolie en 1858 ; les revenus les plus faibles furent imposés à hauteur de 6 pence et demi au lieu de 9 pence, sauf au cours du premier semestre où les plus bas revenus payèrent 8 pence d’impôt et les plus riches 13 pence.

Le 12 septembre 1859, le député radical Richard Cobden rendit visite à Gladstone, qui nota dans son journal : « … poursuite de la conversation avec Mr. Cobden à propos des droits de douane et des relations avec la France. Nous sommes étroitement et chaleureusement d’accord ». Cobden fut envoyé comme représentant du Royaume-Uni aux négociations avec le Français Michel Chevalier pour un traité de libre-échange entre les deux pays. Gladstone écrivit à Cobden que « le grand objectif [est] la signification morale et politique de l’acte, et son fruit probable et souhaité en unissant les deux pays par l’intérêt et l’affection. Ni vous ni moi n’attachons pour l’instant une valeur superlative à ce traité au nom de l’extension du commerce britannique. […] Ce que je regarde, c’est le bien social, le bénéfice pour les relations des deux pays, et l’effet sur la paix de l’Europe ».

Le budget de 1860 fut présenté aux Communes par Gladstone le 10 février, en même temps que le traité Cobden-Chevalier qui allégeait fortement les droits de douane entre le Royaume-Uni et la France. Ce budget « marqua l’adoption définitive du principe du libre-échange, selon lequel l’imposition devrait être perçue uniquement à des fins fiscales, et que tout droit protecteur, différentiel ou discriminatoire… devrait être banni ». Alors que les taxes sur les produits importés étaient au nombre de 419 au début de l’année 1859, le budget de 1860 réduisit ce nombre à 48, dont 15 procuraient la majorité des recettes. Pour financer cette baisse de la fiscalité indirecte, l’impôt sur le revenu fut maintenu et porté à 10 pence pour les revenus supérieurs à 150 £ et à 7 pence pour les revenus supérieurs à 100 £.

Tout au long de son mandat de chancelier, Gladstone abaissa régulièrement l’impôt sur le revenu qui fut ramené à neuf pence en 1861, sept pence en 1863, cinq pence en 1864 et quatre pence en 1865. Gladstone était outré par ce qu’il considérait comme le gaspillage des fonds publics par le gouvernement et il exposa clairement son intention de laisser l’argent « fructifier dans les poches du peuple » en maintenant les taux d’imposition à un niveau très faible grâce à « la paix et la réduction des dépenses ». En 1859, il écrivit à son frère, qui était membre de l’Association pour la réforme financière à Liverpool : « L’économie est le premier et grand article (l’économie telle que je la conçois) de mon credo financier. La controverse entre la taxation directe et indirecte occupe une place mineure, bien qu’importante ».

Durant son activité de Premier ministre, l’Église anglicane perdit une part importante de ses privilèges en Irlande, le Ballot Act (1872) qui introduisait le vote secret est promulgué et le Royaume-Uni se tint en retrait lors de la guerre franco-prussienne. Après son échec électoral de 1874, Gladstone démissionna de son poste de leader du Parti libéral ; néanmoins, il revint en 1876 à l’occasion d’une campagne d’opposition aux atrocités commises en Bulgarie par la Turquie. Il dénonce alors la turcophilie supposée du cabinet britannique, décrivant les Ottomans comme « le plus grand spécimen anti-humain de l’humanité ». Gladstone se fait, contre Disraeli, le chantre d’une « diplomatie morale » qui connaîtra une importante postérité au XXe siècle.

La campagne du Midlothian (près d’Édimbourg) de 1879-1880 doit beaucoup à Gladstone. Elle est considérée parfois comme l’acte de naissance des techniques de campagnes politiques modernes. Bien qu’il ne fût pas le dirigeant officiel du parti libéral lorsque celui-ci gagna les élections générales de 1880, il fut néanmoins nommé à nouveau Premier ministre. Lors de son second ministère, son cabinet dut faire face à des crises en Égypte (qui placèrent le pays sous la domination britannique après la guerre de 1882, et qui culminèrent avec la mort du général Charles Gordon en 1885) en Irlande, où le gouvernement fit passer des mesures répressives et à la naissance d’un syndicalisme combatif. Ce gouvernement fut à l’origine de la troisième réforme du droit de vote en 1884. À cette occasion des  parlementaires proposèrent d’ajouter un amendement accordant le droit de vote aux femmes. En effet, depuis 1866 et la présentation par John Stuart Mill d’une importante pétition pour le droit de vote des femmes, ce sujet était un point important du débat politique. Gladstone refusa cependant l’addition de cet amendement et pour expliquer sa décision usa d’une métaphore : « la cargaison que ce vaisseau transporte est à notre avis suffisante pour que le transport soit sûr ».

Lord Salisbury battit le gouvernement de Gladstone lors des élections qui s’ensuivirent et forma un gouvernement conservateur en 1885 mais les élections suivantes, tenues quelques mois après, virent la victoire des libéraux. À nouveau aux affaires au début de l’année 1886, Gladstone voulait faire voter une loi en faveur d’une large autonomie de l’Irlande car il pensait que c’était le seul moyen de résoudre le problème posé par les troubles de plus en plus aigus touchant l’Irlande. Cependant, cette loi fut rejetée par la Chambre des communes en juillet et Salisbury revint à Downing Street pour demander de nouvelles élections qu’il gagna. En 1892, Gladstone forma son dernier gouvernement à l’âge de 82 ans. La loi d’autonomie fut à nouveau présentée et rejetée par les lords en 1893, ce qui mit fin au projet de Gladstone. Le parti libéral se rapprochait de la gauche et adoptait des mesures en faveur de l’État providence tout en contenant son aile  impérialiste. Du fait de son opposition à l’augmentation des dépenses navales militaires, Gladstone démissionna en mars 1894 et son secrétaire aux Affaires étrangères, Lord Rosebery, lui succéda. Il quitta le Parlement en 1895 et mourut trois ans plus tard à l’âge de 88 ans.

Source : Wikipédia.

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