Ville de Saint-Pierre (Réunion).

Dès 1671, la localité des ” Grands-Bois ” pays plat couvert d’arbre de haute futaie, situé à 4 kimomètres au Sud de Saint-Pierre, fut habitée par quelques pionniers venus de Madagascar, qui, débarqués à Saint-Paul, avaient émigré vers le Sud de l’île avec femmes et enfants pour échapper aux vexations et aux cruautés du gouverneur Jacques de La Heure.

Le vice-amiral Jacob de La Haye, au retour de son voyage en Indes, apprenant ce qui s’était passé pendant son absence, avait dépêché auprès de ces fugitifs Gilles Launay pour les engager à revenir à Saint-Paul.

Le territoire de Saint-Pierre, au début de la colonisation, faisait partie de l’arrondissement de Saint-Paul, vaste étendue de plus de 15 lieues, comprenant le repos de La leu dont il est déjà fait mention dès cette époque, Saint-Louis et la Rivière d’Abord.

Avant 1700, le Sud fut d’abord un « quartier réservé » interdit à la colonisation.

La colonisation et le peuplement de Saint-Pierre ainsi que de sa région sont liés à la culture du caféier et à la production de café destiné au marché français. Le café puis la canne firent d’elle une des régions les plus prospères de l’île. L’agriculture et l’industrie sucrière firent la fortune de Saint -Pierre comme celle de quelques grandes familles.

Les premières concessions sudistes sont accordées en 1719. La région saint-pierroise est déjà considérée comme à haut potentiel agricole. La population se regroupe autour de l’embouchure de la rivière d’Abord et de sa marine propice à l’exportation. Le chef directeur et gouverneur général du comptoir de la Compagnie dans l’île Bourbon Desforges Boucher s’accordant ainsi qu’à sa famille la première concession de l’étang du Gol le 5 mars 1719, dans le but d’y cultiver le café.

En 1730, les habitants du quartier de la Rivière d’Abord réclament une église pour leur service. Devant leur insistance, la construction d’une chapelle est décidée sur la rive gauche de la Ravine Blanche. Elle prend le nom de Saint-Pierre, l’un des prénoms du gouverneur de l’époque Pierre Benoît Dumas. Cette première église ouvre ses portes le 7 janvier 1732, date où l’abbé Carré célèbre solennellement le mariage de Louis de Montigny avec Gabrielle Cadet, c’est la naissance de la paroisse de Saint-Pierre.

Le 11 mars 1732, le gouverneur Dumas donne l’ordre à Choppy-Desgranges, commandant de dresser le plan de la ville qui formait un damier mais qui resta dans les cartons jusqu’en 1735, date de l’arrivée du gouverneur Mahé de Labourdonnais. A cette époque le quartier d’Abord était un vaste plateau boisé privé d’eau. Malgré ce manque d’eau et la sécheresse, les terres reconnues excellentes, furent concédées, et la partie basse couverte de caféiers. Quelques constructions s’élevèrent et certains bâtiments étaient percés de meurtrières pour parer aux attaques des forbans et des noirs marrons. Durant cette période, le quartier de Saint-Pierre dépend toujours de Saint-Paul, et souffre de cette contrainte.

En 1735, Labourdonnais visite la localité et fait naître tous les espoirs ; il pense, en effet qu’une ville doit être créée : il faut un commandant, avec le droit de rendre la justice, de faire la police, ainsi que des magasins pour recevoir les denrées. Mais les ordres de Labourdonnais reparti pour l’île de France, ne sont pas exécutés ; il s’en suit de sérieux troubles à la Rivière d’Abord en 1736, les habitants déclarèrent qu’ils ne fourniront plus rien à Saint-Paul.

Pour apaiser la population, Dejean, membre du Conseil supérieur reçoit l’ordre de dresser un plan de la future ville.

Le 16 avril 1736, Dejean, fait planter une grosse roche marqué d’une croix et d’un A, d’où il trace la rue du Commerce (rue Auguste Babet), le long de la rivière jusqu’à la borne B éloignée de 300 gaulettes (1 500 m) de la borne. Puis de A, en allant à la Ravine Blanche, il ouvre une ligne de 448 gaulettes (2 290 m) la rue du Four à Chaux qui s’arrête à 110 pieds de la Ravine Blanche. Des rues de 30 pieds de large (10m) sont ouvertes. Les rues parallèles à la rue du Four à Chaux sont distantes de 50 gaulettes (250m) et les rue parallèles à la rue du Commerce (Auguste Babet) de 25 gaulettes.

Le 8 septembre 1736, le Conseil d’administration de la Compagnie des Indes, composé de MM. Mahé de Labourdonnais, Villarnoy, Lémery Dumont, Dussard de la Salle, j. Brenier, d’Héguerty et L. Morel, décide l’établissement du quartier Saint-Pierre, comprenant Saint-Louis qui, par ce fait, se trouve aussi détaché de Saint-Paul.

D’après cette délibération, M. Pierre Dejean ( de Jean ) est nommé commandant des quartiers Saint-Pierre et Saint-Louis. Cette nomination était faite pour compenser la destitution qui l’avait frappé le 7 février 1736 en sa qualité de membre du Conseil supérieur de cette île. Quel était son crime ? Il avait enfreint les ordres des administrateurs de la Compagnie des Indes siégeant à Paris, défendant formellement aux membres du Conseil de se marier à une créole ; Dejean avait commis la faute impardonnable de céder aux charmes d’une gracieuse créole, et d’épouser la fille de M. Pierre Hibon.

Mais comme le dit la délibération, M Pierre de Jean est un parfait homme de bien et bon administrateur, le Conseil supérieur croit, quoique le révoquant, ne pouvoir se passer de lui pour assurer le service de la dite Compagnie.

Les pouvoirs d’un commandant de quartier étaient importants. Ses bureaux se composaient d’un commis unique pour les écritures, et de six noirs pour servir au magasin. Dejean resta commandant du quartier plus de vingt ans.

La même délibération qui crée le quartier Saint-Pierre décide la construction d’un magasin près de la Rivière d’Abord, (Hôtel de Ville actuel), d’un entrepôt au Repos Laleu, à moitié chemin entre Saint-Pierre et Saint-Paul, d’un parc pour cheveaux et boeufs affectés au transport des denrées ; elle organise un service de messagerie fait par 30 boeufs ou cheveaux, qui roulera depuis le magasin de la Rivière d’Abord jusqu’à Saint-Paul, avec escale au Repos Laleu, plus un service par chaloupes et pirogues pour transporter toutes les denrées. Une décision est prise aussi au sujet des chemins, l’ordre est donné de commencer le 1 octobre 1736, l’élargissement des sentiers ; l’on recommande à M. Meuron conducteur des travaux publics, de les faire le plus droit possible, dans les endroits les plus convenables, pour qu’ils puissent être d’un entretien moins coûteux.

En 1751, le site actuel de l’église de Saint-Pierre sera définitivement établi avec la donation de son terrain par Gabriel Dejean, sur le bord de la Rivière d’Abord.

Le 1er août 1790, est crée la commune de Saint-Pierre. Elle est vaste, allant de la Rivière Saint-Etienne à celle des Remparts. Saint-Pierre prospéra grâce à l’extension de la culture du café qui permit à la ville de se bâtir et apporta une certaine richesse aux habitants jusqu’à la moitié du XVIII ème siècle.

En 1818, trois Saint-Pierrois, Frappier de Montbenoît, Augustin Motais se concertent pour mettre au point un projet de dérivation des eaux de la Rivière Saint-Etienne vers Saint-Pierre par un canal situé aux alentours de la cote 100 ( Bois d’Olive/Ligne Paradis ).

La construction du Grand Canal va mobiliser les énergies pendant plusieurs années : cinq vannes principales, 93 prises d’eau encore en service en 1959, cinq aqueducs sont construits pour franchir les ravines…. Il sera ensuite prolongé jusqu’à Grand-Bois, avec la construction d’un siphon pour traverser la rivière d’Abord.

En 1825, le Canal Saint-Etienne, long de 17 kilomètres, apporte à la commune l’abondance d’eau qui lui manquait jusqu’alors pour son développement. Elle n’avait auparavant que la source de la Rivière d’Abord pour tout approvisionnement. Les canaux apportent l’eau jusqu’au centre ville de Saint-Pierre, elle va être utilisée pour les besoins domestiques, l’alimentation de la population, les fontaines publiques, le lavoir de Casabona, mais aussi pour l’irrigation des champs de canne à sucre , pour faire tourner et refroidir les moulins des usines sucrières , elle va même produire de l’électricité en faisant tourner la dynamo de la centrale de Saint-Pierre. Le canal ne fut définitivement terminé qu’en 1827, sous l’administration de M. Marin, maire de Saint-Pierre.

Patrimoine réunionnais, épreuve de luxe.

En 1826, la commune compte 30 229 habitants, soit rien que moins que le tiers de la population totale de l’île. Le plan le plus complet de la ville au milieu du 19ème siècle est celui de Louis Maillard (1857).

En 1838, De Ferrières, ingénieur colonial, propose la création d’un port de cabotage et le creusement d’un bassin de carénage; mais ce fut seulement avec le gouverneur Louis Henri Hubert Delisle que commença véritablement le travail.

En décembre 1853, M. Hubert Delisle, alors gouverneur de la Colonie, écrivait au ministère de la marine qu’il croyait possible de créer un port à Saint-Pierre. En février 1854, le Conseil municipal de Saint-Pierre votait une première allocation de 5 000 francs, et le 12 mars suivant, M. Hubert Delisle posait la première pierre de la jetée Ouest. Le 30 août de la même année, la jetée Est fut commencé, et quelques temps après, l’épi qui protège la petite darse.

Bien que dirigés par de bons ingénieurs, successivement, Bonnin, Maillard et Prozinski, les travaux avancèrent lentement entravés par des difficultés de toutes sortes.

Ces travaux consistaient en deux jetées enracinées sur les coraux à l’Est et à l’Ouest de l’entrée du bassin. La longueur de la jetée Ouest est de 293 mètres, celle de la jetée Est de 327 mètres ; l’épi a une longueur de 98 mètres, l’enceinte du bassin est de 245 mètres.

Les années s’annonçaient mauvaises pour la Colonie et, en 1867, le Conseil Général décida d’abandonner les travaux du port de Saint-Pierre. L’année suivante la commune les reprit, emprunta, s’endetta. Les travaux traînèrent longtemps encore ; les engins commandés n’arrivèrent qu’en 1882. Enfin en 1883 des bateaux de 150 tonneaux entrent dans le port et en octobre le vaisseau américain le Lyman, jaugeant 569 tonneaux mouille dans le bassin.

Le port se termine en 1886; la dette de la ville est énorme. Dès cette époque, le port de la Pointe des Galets est ouvert. Celui de Saint-Pierre restait difficile et la rade était mauvaise ; il donna pendant quelques années un certain essor à la ville mais sans que les profits soient en rapport avec les investissements. Le port fut abandonné, il s’ensabla et les coraux envahirent la passe ; il resta accessible aux petits bateaux, le trafic se faisant au large avec chalands et remorqueurs.

5 juillet 1882 : Arrêté autorisant la mise en exploitation de la ligne du chemin de fer comprise entre Saint-Benoît et Saint-Pierre. La ville de Saint-Pierre est réliée directement à la capitale Saint-Denis, une magnifique gare a été construite à proximité du port.

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Sources : Tourisme Réunion, YouTube.

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