Ville de Metz (Moselle).

Metz est une commune française située dans le département de la Moselle, en Lorraine. Préfecture de département, elle fait partie, depuis le 1er janvier 2016, de la région administrative Grand Est, dont elle accueille les assemblées plénières. Metz et ses alentours, qui faisaient partie des Trois-Évêchés de 1552 à 1790, se trouvaient enclavés entre la Lorraine ducale et le duché de Bar jusqu’en 1766. Par ailleurs, la ville a été de 1974 à 2015 le chef-lieu de la région de Lorraine.

Ville bimillénaire, l’oppidum celte des Médiomatriques, connu sous le nom latin de Divodurum Mediomatricorum, puis comme Mettis, devient la capitale du royaume franc d’Austrasie. Ville commerçante de l’Empire carolingien, Metz est le siège d’un puissant évêché, et une cité commerçante et bancaire d’importance du Saint-Empire romain germanique. Convoitée par le royaume de France, Metz devient une place forte française au XVIe siècle, avant d’être provisoirement annexée par l’Empire allemand à la fin XIXe siècle (Alsace-Moselle).

La ville présente une importante diversité architecturale, de l’antiquité au XXe siècle, riche d’un fort héritage médiéval et classique, d’influence française, mais aussi germanique, notamment dans le quartier impérial, aménagé lors de l’annexion de l’Alsace-Lorraine, représentatif de l’architecture wilhelmienne.

Au dernier recensement de 2017, Metz comptait 116 429 habitants, ce qui en fait la commune la plus peuplée de Lorraine et la troisième du Grand Est, après Strasbourg et Reims. Son unité urbaine compte environ 290 000 habitants et son aire urbaine 391 187 habitants en 2016, faisant d’elle la deuxième aire urbaine de Lorraine et la troisième du Grand Est après celles de Strasbourg et Nancy. Ses habitants sont appelés les Messins.

S’affirmant comme cité de la communication et des technologies de l’information et de la communication avec sa technopole et son label « Ville Internet » de 2000 à 2015, l’antique cité marchande et militaire s’est voulue « ville jardin » égrenant son paysage urbain et architectural au fil de l’eau et des parcs, à travers une politique pionnière en France en matière d’écologie urbaine.

En 2010, l’ouverture du centre Pompidou-Metz symbolise la modernisation de la ville et de son image, amorcée au début des années 2000. Ainsi, Metz cherche à s’ériger comme plateforme pour l’art moderne et contemporain par des nouvelles politiques culturelles urbaines. La ville sollicite également un classement à l’Unesco pour son patrimoine ancien représenté par la cathédrale Saint-Étienne, l’une des plus importantes cathédrales gothiques de France, et son quartier impérial.


En 1882, un biface datant de 200 000 ans av. J.-C. a été découvert dans une sablière de Montigny-lès-Metz. Les hommes vivant à cette période étaient des chasseurs-cueilleurs, vivant selon le mode de vie non sédentaire propre aux nomades et dont les déplacements étaient liés en partie à leur approvisionnement en nourriture.

Les Hauts-de-Sainte-Croix ont livré quelques tessons du IVe millénaire av. J.-C., mais l’occupation attestée du site ne commence qu’au Ier siècle av. J.-C. avec la présence de fonds de cabane et des emplacements de maisons de bois et de torchis ainsi qu’une nécropole à urnes cinéraires.

Le nom du peuple des Médiomatriques, une tribu celtique qui allait donner son nom à Metz, apparaît dans un récit du général romain Jules César. Cette tribu s’est fixée certainement au IIIe siècle av. J.-C. sur un territoire allant de l’Argonne aux Vosges mosellanes. De l’Argonne et sous la vallée de la Seille, le territoire était occupé par les Leuques fondateurs de Toul. L’espace au-delà des Vosges avait été abandonné aux Triboques. Les Médiomatriques édifièrent leur principal oppidum, c’est-à-dire leur capitale, au confluent de la Moselle et de la Seille sur la colline de Sainte-Croix. Cet oppidum était notamment un centre économique groupant des ateliers d’artisans travaillant les métaux et la terre cuite. Une assemblée de type oligarchique, composée des chefs des principales familles, détenait le pouvoir. L’organisation sociale, hiérarchisée, reposait sur trois classes : les chevaliers ou nobles, la plèbe et les esclaves.

C’est en 58 av. J.-C. que les Romains occupèrent la ville et en en reconnaissant la position stratégique la transformèrent de cité agricole à cité administrative et militaire. Au lendemain de la conquête romaine, Metz, désigné par les Romains par le qualificatif Divodurum Mediomatricorum (« oppidum des Médiomatriques ») est intégré à la Gaule belgique dont la capitale est Durocortorum (Reims). L’importance de la ville était grande ; en 27, elle faisait partie des soixante capitales gauloises. Il faut pourtant attendre le début du IIe siècle pour voir apparaître le nom Divodurum mentionné pour la première fois par Tacite dans son premier livre des Histoires. Selon cet auteur, l’armée du Rhin de Vitellius, marchant en 69 contre l’Italie et contre l’empereur Othon, serait passé à Divodorum, où il aurait répandu la terreur en faisant exterminer 4 000 hommes « par rage et sans savoir pourquoi ». De telle sorte qu’ensuite, à l’approche de ses colonnes, les cités tout entières accouraient avec leur magistrats et des prières.

La cité occupe initialement tout l’emplacement du Haut-de-Sainte-Croix et croît rapidement vers le sud pour atteindre au début du Ier siècle l’Esplanade et le Sablon. Le plan de la ville reproduit celui classique de la ville romaine. Le forum, lieu de rencontre indispensable à la vie publique de l’agglomération, devait se trouver entre la place Saint-Jacques et la place de la Cathédrale. Les fouilles archéologiques récentes ont révélé une agglomération de bâtiments en bois et torchis, établie selon le quadrillage propre aux villes romaines avec cardo (actuelle rues Serpenoise, Ladoucette, Taison) et decumanus (actuelle Fournirue), dont la surface avait quadruplé depuis la fin de l’indépendance.

Lors de la construction du parking souterrain du centre Pompidou-Metz, une fouille a été conduite à proximité immédiate de l’amphithéâtre de Metz permettant la mise au jour de nombreux vestiges datant du Ier siècle.

La longue période de la paix et l’intégration à l’Empire romain en fait une ville étape prospère. Elle devient le foyer le plus important de la civilisation gallo-romaine en Lorraine. Metz est un important carrefour routier où convergent les voies de Lyon, Reims, Trèves, Mayence et Strasbourg — préfigurant en quelque sorte les autoroutes actuelles (A4-A31). Le tracé des routes obéit à des impératifs stratégiques : assurer la défense à l’arrière du Rhin.

Rome privilégie les relations Sud-Nord, qui se traduit par la voie de Lyon à Trèves. Après avoir atteint la Moselle à Toul, elle traversait le territoire des Médiomatriques à Scarpone (actuellement Dieulouard), suivait la rive droite de la Moselle et atteignait Metz au Sablon. Puis elle empruntait la rue Scarponaise (devenue rue Serpenoise), la rue Ladoucette, et la rue Taison pour atteindre l’ancien oppidum qu’elle quittait par la rue des Trinitaires et la rue Marchant en dévers.

La deuxième chaussée stratégique, reliant Reims à Strasbourg, atteignait Metz par le bas de Montigny, traversait la ville par les actuelles en Fournirue — cette apposition « en » est précisément à Metz l’héritage de la toponymie romaine des rues — et rue Mazelle, puis dépassait la côte de Queuleu vers Delme, Sarrebourg et Saverne dans la direction du Rhin.

À Divodurum, comme dans l’ensemble de la Gaule, la civilisation gallo-romaine atteint un sommet : la population estimée entre 15 000 et 20 000 habitants à son apogée, chiffre considérable pour l’époque où la plupart des villes connues en dehors de la région n’ont guère plus de 7 000 habitants. On y distingue les habitants de condition libre — citoyens romains venus d’Italie et non-citoyens parmi lesquels les propriétaires terriens, les membres des professions libérales — les affranchis et les esclaves.

Une partie de la population habite des constructions en pierre et de grands édifices voient le jour qui utilisent la pierre de Jaumont et surtout la pierre de Norroy. Parmi les plus prestigieux, l’amphithéâtre, construit certainement à la fin du ier siècle à l’emplacement de l’actuelle gare de marchandises, disposait de 25 000 places. Il était le plus grand des Gaules et l’un des plus grands du monde romain. Est aussi avérée, la présence d’un petit amphithéâtre (postérieur au grand et probablement bâti avec une partie de ses pierres), situé au bord de la Moselle, entre les rues de la Paix, Saint-Louis et Sainte-Marie actuelles, et dont on arrive encore à repérer le tracé d’après la forme et la disposition des constructions l’ayant recouvert.

L’aqueduc de Gorze à Metz long de 22 km traversant la Moselle et dont on voit les arches à Jouy-aux-Arches alimentait la ville en eau. Les vestiges de plusieurs thermes — dont l’un sur le site de l’actuel musée — ont été trouvés. Par ailleurs, une vaste nécropole s’étend au sud de la ville de part et d’autre de la voie vers Lyon. Les nombreuses stèles funéraires exposées au musée gallo-romain de Metz ainsi que de nombreux vestiges mis au jour lors de fouilles, montrent que la vie économique était déjà très active à cette époque. De nombreux métiers relevant de l’artisanat sont exercés ; notamment ceux du cuir, du textile, du travail des os de cervidés et de porcs. Le travail de l’argile est en plein essor et la terre cuite fournit tous les récipients d’usage courant. Lors des fouilles opérées à Saint-Pierre-aux-Nonnains, on a retrouvé le four d’un potier nommé Casicos.

Le travail du fer débouche sur la fabrication de l’outillage courant. La cervoise, ancêtre de la bière, est fabriquée à partir d’épeautre. Le commerce est actif. La corporation des nautes de la Moselle est spécialisée dans le transport fluvial de produits lourds, et notamment les matériaux de construction. On connaît l’existence d’un marchand de sayons — une des grandes spécialités textiles des Médiomatriques — qui était en liaison commerciale avec l’Italie du Nord. Le commerce messin est aussi en lien avec la Seille et ses vallées salines de l’actuel Saulnois. La vallée de la Seille riche en argile permet également la production de grandes quantités d’ustensiles en céramique sigillée, dont le musée de la Cour d’Or conserve une grande collection.

Au Sablon, accompagnant l’amphithéâtre, et son faubourg, se développe une nécropole. Sur l’acropole de Metz, actuelle place de la maternité Sainte-Croix, on prie les divinités religieuses anciennes (Épona, cavalière celtique et déesses-mères de la terre) et gréco-romaines (Jupiter, Mars, Mercure…) mais aussi comme partout de plus en plus les divinités d’orient (comme Isis l’égyptienne), sans oublier les cultes ancestraux de l’époque celte (avec Icovellauna). Une autre de ces religions d’orient se développe de plus en plus : le christianisme.

En 212, l’édit de Caracalla accorda la citoyenneté romaine à tous les Médiomatriques de condition libre. Les plus fortunés parmi les habitants de condition libre participent à la gestion municipale sous le qualificatif de magistrat. Les anciens magistrats forment l’ordre des décurions ou Sénat municipal. Nous ne savons rien des décurions messins.

L’ancienne abbatiale Saint-Pierre-aux-Nonnains., édifice romain de plan basilical remanié au cours des siècles. À partir de 245, les périodes de paix sont entrecoupées d’épisodes violents et de destructions. La ville est envahie et détruite une première fois en 253 par les Alamans. Dans ce climat de moindre sécurité, la ville s’entoure alors d’une enceinte de 3,5 mètres d’épaisseur percée de plusieurs portes où sont remployés des éléments d’architecture et des stèles des monuments romains. Le Sablon sera sacrifié et laissé en dehors, la ville ainsi forclose représente un rectangle d’environ 1 200 m sur 600 m ; sa superficie est rapportée à 70 hectares Ces troubles et les premières invasions entraînent certainement un ralentissement des activités artisanales.

Une production nouvelle, la vigne, fait son apparition à partir de 283, date de l’autorisation accordée par l’empereur Probus. Ce vignoble se propage rapidement dans les alentours de la ville où apparaît également le mirabellier.

De la fin du iiie siècle ou du début du ive siècle date la construction de l’édifice connu sous le nom de basilique de Saint-Pierre-aux-Nonnains qui deviendra plus tard l’église de l’abbaye. Certains y voient une basilique civile, d’autres la palestre d’un ensemble thermal voisin.

En 297, la cité des Médiomatriques est intégrée dans la Belgique première et perd son territoire à l’ouest avec l’émergence de la cité de Verdun. Par contre, Metz bénéficie de la proximité de Trèves promue au rang de capitale de l’Empire. L’axe de communication Rhin-Rhône permet une diffusion plus rapide que dans le reste de la Gaule des nouvelles idées religieuses. L’Église de Metz est l’une des plus anciennes avec celles de Reims et de Trèves. La diffusion du christianisme arrive à Metz à la fin du iiie siècle, vers 280, avec le premier évêque, Clément. Prudent, l’évêque s’installe dans les vestiges de l’amphithéâtre. Il établit un sanctuaire, l’église Saint-Pierre-aux-Arènes, dans la fosse du grand amphithéâtre désaffecté. Ses traces ont été retrouvées par les fouilles allemandes de 1902, lors de la construction de la gare. Il faudra attendre les édits de tolérance de 311 et 313 pour que le christianisme sorte de la clandestinité et de la confidentialité.

Au IVe siècle, le nom Divodurum Mediomatricorum n’est plus d’usage, on rencontre la forme dérivée et simplifiée de Médiomatrix, laquelle finira par aboutir au nom de Mettis, rencontré pour la première fois vers 400 et duquel est issu le nom de Metz.

Au Ve siècle, alors que les troupes d’Attila franchissent le Rhin et déferlent sur la Gaule, Livier revient prendre la tête de l’armée messine vers l’an 450. Les Huns tentèrent un premier siège de la ville puis s’en allèrent ravager les villes de Toul, Dieuze et Scarpone. Lorsqu’ils revinrent attaquer la ville le 7 avril 451, les défenseurs étaient largement inférieurs en nombre et la ville fut largement incendiée, pillée et sa population fut décimée. Seul subsista l’oratoire dédié à saint Étienne et situé à l’endroit de la cathédrale actuelle.

Défaits peu de temps après, les Huns repassent le Rhin et laissent le champ libre aux Francs. L’oratoire de Saint-Étienne est dans les grâces divines et devient alors fort populaire. On parle de miracle. Il accueille le siège de l’évêque et devient en quelque sorte la première cathédrale de Metz, à l’intérieur même de celle-ci.

L’Église prend une place importante au cœur de la ville : les édifices religieux se multiplient, de nombreuses nécropoles et lieux de cultes foisonnent à l’extérieur des remparts de Metz, et notamment au Sablon, surnommé alors quartier des Basiliques. En tant que capitale austrasienne, la ville messine avait vu en son sein la montée en puissance des pouvoirs religieux (vingt paroisses, soixante-sept églises, huit abbayes bénédictines intra-muros pour une population aux alentours de trente mille habitants à cette époque) et du pouvoir spirituel auquel allait bientôt être rattaché un pouvoir bien plus temporel, avec la disparition des comtes héréditaires notamment, vers le Xe siècle : l’épiscopat messin s’étant enrichi, il possédait des terres à l’envi, qui rapportaient à la ville des richesses incomparables. L’évêque Chrodegang fonde l’abbaye de Gorze à vingt kilomètres au sud de Metz qui devient un important foyer du chant messin — nommé à l’époque CANTILENA METENSIS78. Mais les nombreux ennemis et envieux sont le revers de la médaille. Elle s’en protégeait par d’épais remparts.

C’est à Metz que naît la dynastie des Carolingiens, inaugurée par Pépin le Bref en 751, descendant de deux familles de l’aristocratie austrasienne : celles d’Arnoul, évêque de Metz (les Arnulfiens) et de Pépin de Landen, maire du palais (les Pépinides). La ville cesse d’être capitale, tout en restant un des grands centres intellectuels des Gaules. Elle reçoit périodiquement la cour carolingienne alors que son abbaye Saint-Arnould devient la nécropole des Carolingiens et abrite les dépouilles des sœurs et de la première femme de Charlemagne, ainsi que celle de l’empereur Louis le Pieux. Charlemagne eut de constantes préoccupations pour Metz, dont il favorisa tout particulièrement l’Église et donna une impulsion nouvelle à sa célèbre école.

Une décision prise en 775 par Charlemagne et connue sous le qualificatif de « grand diplôme » est à l’origine du pouvoir temporel de l’évêque de Metz et devait déboucher sur la constitution d’un État indépendant. L’évêque bénéficie désormais de l’immunité pour tous ses biens. Ses possessions territoriales sont soustraites à l’action des juges royaux qui ne pouvaient y pénétrer. L’évêque et ses sujets échappent à la justice royale et aux impôts. Mais ces droits enlevés au gouvernement royal sont accordés à l’évêque qui a juridiction sur son clergé et sur ses sujets et perçoit les impôts.

Cette immunité s’étend à toutes les possessions de l’église de Metz, situées soit dans le pays messin, soit dans les pays voisins. Du ve siècle au vie siècle, elle a posé les bases de son futur État en incorporant les donations de toutes les premières églises situées dans les bourgades le long de la voie Metz-Strasbourg. Sous l’évêque Drogon, ces possessions débordent les limites du diocèse et se rencontrent en Alsace, dans la région de Liège et jusqu’en Aquitaine.

Réorganisée par Charlemagne, l’école de Metz atteint la célébrité sous l’épiscopat de son fils naturel Drogon. On y enseignait le latin, un peu de sciences, le catéchisme et aussi les arts mineurs. Quelques-uns de ses élèves laissèrent leur nom à la postérité : Amalaire, Aldric. Cette école possédait en outre une remarquable école de chant grégorien, sans doute la première de l’empire. Le pape lui-même y aurait envoyé des maîtres experts et sa réputation fut telle que pendant un certain temps, le chant grégorien fut appelé chant messin.

Cette école de Metz consacra également une partie de son activité à la copie de manuscrits, d’où le développement d’un remarquable foyer artistique d’où sortirent les plus habiles miniaturistes du temps, qui décorèrent et ornèrent les superbes ouvrages du ixe siècle. Le chef-d’œuvre en a été le sacramentaire de Drogon, qui se trouve aujourd’hui à la bibliothèque nationale. Tout y mérite l’admiration : la calligraphie, les miniatures, les plaques d’ivoire sculptées servant de couverture.

En démembrant l’Empire carolingien par le traité de Verdun en 843, les petits-fils de Charlemagne ouvrirent cette bien longue querelle qui allait durer jusqu’au xxe siècle. L’Austrasie revient à Lothaire Ier. Metz devient la capitale du royaume de Francie médiane et certains conciles s’y tiennent. En 855 par le traité de Prüm, son cadet Lothaire II en reçoit la partie nord qu’il appellera Lotharingie. En 925, Metz, enjeu de cette lutte, passe sous la coupe des rois de Germanie.

En 959, après le partage de la Lotharingie par l’évêque Brunon de Cologne, la Haute-Lotharingie devient le duché de Lorraine. Metz et son territoire deviennent indépendants et sont intégrés au Saint-Empire romain germanique, siège d’un évêché disposant du pouvoir temporel.

La cité épiscopale s’approprie peu à peu les droits d’une « ville libre » du Saint-Empire romain germanique. La bourgeoisie s’enrichissant, elle fait de Metz au XIIIe siècle une république oligarchique, gouvernée par un collège d’échevins à la tête duquel le maître-échevin est élu pour un an. Comme à Nuremberg, les institutions de cette république sont l’apanage d’un cercle de familles riches, ici regroupées à travers six « paraiges ». À la différence de Mayence, Strasbourg ou Bâle, Metz conserve un patriciat suffisamment puissant pour tenir tête aux nouvelles corporations d’artisans du XIVe siècle. Les XIIIe et XIVe siècles constituent l’une des périodes les plus prospères dans l’histoire de Metz, qui compte alors près de 30 000 habitants soit la plus grande concentration urbaine de Lorraine. Ses foires sont très fréquentées et sa monnaie, la première de la région jusqu’en 1300, est acceptée dans toute l’Europe. On reste étonné de la facilité avec laquelle les bourgeois messins ouvrent leurs coffres aux grands personnages de l’époque, empereurs, ducs, évêques ou comtes. Ainsi, Édouard Ier de Bar emprunte sans problème en 1315 la coquette somme de 19 000 livres tournois et 112 sols d’or à Dame Poince, épouse de Nicolas de la Court.

Les changeurs de Metz, dont la corporation était organisée par les évêques depuis le XIIe siècle, prêtent eux aussi aux marchands, comme aux princes, voire à l’empereur. L’un d’eux, Charles IV, y promulgue le 25 décembre 1356, la fameuse « Bulle d’or », réglant définitivement les élections impériales du Saint-Empire romain germanique. Cette richesse attise les convoitises et entraîne la cité messine dans des conflits récurrents avec ses voisins. Dans cette lutte d’influences, tous les prétextes sont valables, y compris les plus insignifiants.

La peste apparaît à Metz et dans le Pays messin en 1423 ; trois ans plus tard, le bilan est de 16 000 morts.

Après la guerre des Quatre Seigneurs opposant Jean Ier de Bohême, Baudouin de Luxembourg, Édouard Ier de Bar et Ferry IV de Lorraine à la cité messine (1324), Metz est de nouveau assiégée au cours de la guerre de la Hottée de pommes par Charles II de Lorraine, René d’Anjou et Bernard Ier de Bade en 1428, sans succès.

En 1438, une nouvelle épidémie de peste fait 20 000 victimes.

En 1444, lors du siège de Metz, Charles VII et son beau-frère René d’Anjou assiègent de nouveau la ville, réussissant cette fois à rançonner les citadins. Le petit-fils de René d’Anjou, Nicolas de Lorraine tentera lui aussi d’assiéger Metz en 1473, mais avec beaucoup moins de succès. La prospérité de la République messine décline à partir de la fin du XVe siècle. Les épidémies, la guerre sans fin que lui font les ducs de Lorraine, et le climat d’insécurité qui règne encore à cette époque, comme en témoigne le siège de la cité par Sickingen, en 1518, en sont en partie responsables. C’est dans ce climat d’insécurité durable que fut signé le 13 janvier 1533, un « traité d’amitié, union, alliance et confédération », entre le duc Antoine de Lorraine et la cité messine, traité ratifié en avril de la même année, par le cardinal Jean III de Lorraine.

Metz est une des dix premières villes de France où se développent l’imprimerie et la typographie. Les premiers imprimeurs connus sont Jean Colini et Gérard de Villeneuve en 148285. Sur le plan religieux, la proximité de la Suisse et l’appartenance au Saint-Empire romain germanique favorisent l’adoption de la Réforme dès les années 1520. La ville devient un important foyer protestant, qui ne disparaîtra qu’après la révocation de l’édit de Nantes.

En 1552, le roi de France Henri II s’empare des Trois-Évêchés Metz, Toul et Verdun. Après l’entrée des troupes d’Anne de Montmorency dans la ville grâce à la complicité de certains paraiges, Henri II fait son entrée solennelle à Metz le 18 avril 1552. Il promet à la ville de conserver ses droits et usages locaux. Charles Quint, voulant reprendre ces villes du Saint-Empire, organise le siège de Metz. La ville, défendue par le duc François de Guise, reste aux mains des troupes françaises. Le siège est levé en janvier 1553. Si l’empereur garde officiellement sa souveraineté sur la cité, Metz reçoit une garnison française permanente et se voit dotée d’une nouvelle citadelle dès 156188. Dans les Trois-Évêchés, réunis ainsi par un artifice diplomatique au royaume de France, s’installe alors un régime original, celui de la protection, où les anciens pouvoirs des villes issues du Saint-Empire romain germanique sont peu à peu absorbés par les organismes mis en place par l’administration royale. Malgré les prières répétées des Messins à la Diète d’Empire, la question des Trois-Évêchés ne sera plus à l’ordre du jour des assemblées impériales à partir de 1582. Cette annexion de facto sera ratifiée de jure par le traités de Westphalie, en 1648. Metz devient une place forte du royaume de France, tandis qu’elle continue de se développer.

Henri IV séjournera dans la ville du 15 au 21 mars 1603 dans le but d’apaiser la révolte de ses habitants qui s’étaient mutinés contre Roger de Comminges sieur de Saubole que le duc d’Épernon leur avait imposé comme gouverneur.

Sur le plan religieux, les juifs, dont la présence est attestée du IXe au XIIe siècle, sont de nouveau autorisés à s’installer à Metz en 1565. La communauté prospérera tout au long des XVIIe siècle et XVIIIe siècle, pour atteindre 2 400 personnes en 1842. Après la révocation de l’édit de Nantes, les huguenots messins fuient en Hollande et en Allemagne, pour échapper aux dragonnades de Louis XIV. L’émigration messine des huguenots vers Berlin, qui cause un réel préjudice à l’économie locale, se traduit en revanche à Berlin par un doublement de la population. Cette émigration se poursuivra tout au long du xviiie siècle, vers l’Allemagne, mais aussi vers le Nouveau Monde.

Sur le plan politique, la ville devient le siège d’un parlement en 1633, puis d’un bailliage en 1634. Les “Treize” sont supprimés peu après en 1640. Metz ne passe juridiquement sous souveraineté française, en tant que capitale de la province des Trois-Évêchés, qu’en 1648. Le 10 mai 1636, le parlement est transféré à Toul, avant d’être réinstallé à Metz le 1er décembre 1658. Le parlement des Trois-Évêchés sera provisoirement supprimé le 10 octobre 1771, pour être remplacé par la Cour souveraine de Nancy, avant d’être réinstallé le 26 septembre 1775 à Metz, jusqu’à ce que l’Assemblée Nationale décide de sa suppression définitive le 3 novembre 1789.

Sur le plan militaire, la ville conserve un rôle stratégique important tout au long du xviie siècle. Si le Pays messin n’échappe pas aux misères de la guerre de Trente Ans décrites par Jacques Callot, la ville de Metz est préservée derrière ses remparts. Sous le règne de Louis XIV, le rôle de place forte de la cité messine est encore renforcé. Vauban s’en exprime au roi sur le rôle qu’il lui attribue en ces termes : « Les places fortes du royaume défendent leurs provinces, Metz défend l’État. ». En 1678, ce dernier conçoit un premier « Projet général de fortifications » pour la ville de Metz. À peine vingt ans plus tard, en 1698, un second « Projet général de fortifications » est conçu pour renforcer les défenses de la ville. Les travaux de fortifications se poursuivront tout au long du XVIIIe siècle.

La ville s’embellit au XVIIIe siècle. Le maréchal Charles Louis Auguste Fouquet de Belle-Isle, acquis aux idées des Lumières, décide de repenser l’urbanisme de Metz dès 1728. Après avoir doté la ville d’un nouveau théâtre sur l’Île du petit Saulcy, il souhaite aérer le quartier de la cathédrale, en y créant une place royale centrale, entourée de plusieurs bâtiments publics. Après vingt ans de négociations avec le clergé et les bourgeois messins, il fait finalement appel à l’architecte Jacques-François Blondel pour mener à terme le projet de l’Hôtel de ville de Metz. Ce projet ambitieux est suivi, en 1764, par la construction d’un nouveau portail néoclassique pour la cathédrale. Charles-Louis Clérisseau se charge en 1777 des plans de l’hôtel du Gouvernement, actuel Palais de justice de Metz, dans un style des plus classiques. La construction d’un nouveau palais épiscopal, le marché couvert actuel, est entreprise. Le Parlement de Metz est supprimé en 177588. Le souffle des Lumières se fait sentir dans la cité, où plus de sept loges maçonniques fleurissent, et jusque dans les abbayes messines, où les bibliothèques s’enrichissent de nombreux ouvrages encyclopédiques. Après l’élection de Pierre-Louis Roederer en octobre 1789, Metz devient le chef-lieu du nouveau département de la Moselle en 1790.

En 1802, l’école royale d’artillerie de Metz fusionne avec l’école du génie de Mézières, donnant naissance à l’École d’application de l’artillerie et du génie. En 1808, l’Académie de Metz est créée avec un lycée et une faculté des Sciences. Au cours des dernières campagnes de Napoléon Ier, à deux reprises en 1814 et 1815, la ville est assiégée par les forces coalisées. Elle ne se rend qu’à partir du moment où Napoléon signe la capitulation, lorsque la nouvelle atteint Metz. Pour ne pas avoir capitulé, la ville est surnommée la « forteresse de l’Est ».

En 1830, Metz approuve la révolution parisienne. En 1852, le chemin de fer arrive à Metz, ce qui entraîne de profonds changements territoriaux, après la création de la voie ferrée reliant Devant-les-Ponts au Sablon, et l’édification d’une nouvelle gare en dehors des remparts, en plus de celle de Metz-Nord. La ville est désormais reliée à Réding, Lérouville, Zoufftgene. En 1861, une Exposition universelle ayant trait à l’agriculture, l’industrie, l’horticulture et les beaux-arts se tient sur l’esplanade.

En 1866, après la bataille de Sadowa, l’état-major français se rend compte que les murailles de défense de la ville ne pourraient résister à une invasion de l’armée prussienne. Ces murailles n’avaient été modernisées qu’à l’époque de Vauban et, bien qu’elles aient été rénovées depuis, elles n’apparaissent pas en mesure de résister à une attaque de l’artillerie moderne des prussiens. L’état major français décide alors de renfoncer les défenses de Metz par l’implantation de quatre forts détachés en des points stratégiques : Plappeville, Saint-Julien-lès-Metz, Queuleu et Saint-Privat. La construction de ces forts n’est pas totalement achevée lorsqu’éclate la guerre en 1870.

L’année 1870 est une année douloureuse pour les habitants de Metz. Pendant la guerre franco-prussienne de 1870, l’armée impériale du maréchal français Bazaine s’est réfugiée à Metz. Après la bataille de Borny-Colombey le 14 août à l’est de la ville, puis celle de Saint-Privat–Gravelotte à l’ouest le 18 août, Metz est assiégée le 20 août et capitule le 28 octobre. Les troupes allemandes pénètrent dans la ville le lendemain. Abandonnée par la majorité des députés français, y compris les députés lorrains de la Meurthe, qui ont voté à la quasi-unanimité sa cession, « la plus forte citadelle de la France »99 est rattachée au nouvel Empire allemand le 10 mai 1871, conformément au traité de Francfort. Metz devient le chef-lieu du Bezirk Lothringen ou « District de Lorraine », intégré au nouveau Reichsland Elsaß-Lothringen et le reste jusqu’en 1918.

Malgré le départ d’une importante portion de ses élites et de dix à quinze-mille qui optent pour la France, la ville continue de s’agrandir et de se transformer, dominée par la personnalité de son évêque français Paul Dupont des Loges qui est élu député au Reichstag et dont il va devenir l’un des « députés protestataires ». L’émigration de Mosellans vers la France, en particulier vers Nancy et Paris, commence dès l’armistice et se poursuit pendant une vingtaine d’années. La germanisation de la ville et de ses habitants, inexorable du fait du renouvellement des générations et de l’installation d’immigrés allemands, se fait progressivement. Ces derniers deviennent majoritaires à Metz, dès les années 1890.

Comme dans le reste de la Moselle, l’enseignement du français est supprimé dans les écoles primaires, où les instituteurs allemands donnent l’enseignement en allemand. Le français est toutefois toléré, comme « langue étrangère », dans les établissements secondaires et dans quelques établissements bilingues. Mais les Messins de souche continuent logiquement à parler français en privé, par tradition ou par attachement à la culture française. Sous Guillaume Ier (1871–1888), on continue d’imprimer et d’importer des livres en français. Trois quotidiens francophones sont également tolérés face aux quotidiens germanophones Metzer Zeitung et Lothringer Zeitung. Le Lothringer Zeitung s’adresse principalement aux immigrés allemands, commerçants, fonctionnaires ou militaires et fait systématiquement la promotion du Deutschtumf. Le Metzer Zeitung (1871–1918), journal indépendant, est en revanche plus critique à l’égard des pouvoirs publics, preuve d’une relative tolérance du pouvoir impérial. Remplaçant les sociétés musicales créées avant 1870, une trentaine de sociétés musicales et chorales voit le jour à Metz sous l’Annexion, de la Dilettanten Verein et le Metzer Liedertafel, au Kirchenchor Saint-Simon, en passant par le Metzer Liederkranz et le Gesangverein «Cecilia».

Metz se transforme sous l’action des autorités allemandes qui décident de faire de son urbanisme une vitrine de l’empire wilhelmien. Une école de guerre est ouverte en 1872. De nombreuses casernes voient le jour après 1875. En 1898, le baron von Kramer, maire de Metz, demande à l’empereur Guillaume II la permission d’étendre la ville, au détriment des terrains militaires. L’empereur décide alors de détruire les fortifications de Cormontaigne en conservant la tour Camoufle, la porte Serpenoise et la porte des Allemands. En 1902-1903, l’architecte Conrad Wahn conçoit un plan d’urbanisme pour la Neue Stadt, l’empereur imposant ses conceptions architecturales pour les bâtiments publics. L’éclectisme architectural se traduit par l’apparition de nombreux édifices de style néo-roman tels la poste centrale, le temple protestant ou la nouvelle gare ferroviaire ; de style néogothique tels le portail de la cathédrale et le temple de garnison ; de style néo-baroque tels la chapelle Saint-Charles-Borromée et le palais de l’intendance, ou encore de style néo-Renaissance tel le palais du Gouverneur ou l’Hôtel des Arts et Métiers de Metz de l’architecte Gustave Oberthür. Des statues érigées à l’occasion de ces aménagements d’édilité glorifient l’empire. Une statue équestre monumentale de l’empereur Guillaume Ier est dressée sur l’Esplanade, une seconde statue, tout aussi imposante, du prince Frédéric-Charles, est élevée dans le jardin de Boufflers, tandis qu’une troisième statue de Frédéric III prend place non loin de la tour Camoufle. Comme dans d’autres cités du Reich, une tour Bismarck, est élevée à la mémoire du chancelier Otto von Bismarck (1871–1890) sur le mont Saint-Quentin.

Après la construction de la nouvelle gare en 1907, le réseau ferroviaire messin est modifiég. Deux gares supplémentaires sont mises en service sur l’agglomération pour desservir les quartiers Est et Nord: la gare de Metz-Abattoirs, rebaptisée plus tard « Metz-Chambière », avenue de Blida, et celle de Metz-Nordh. De nouvelles lignes sont mises en place en 1908. En 1910, le maire Paul Böhmer peut écrire : « Une promenade à travers la ville convaincra chacun, qu’à côté du vieux Metz pittoresque de l’époque française, un Metz moderne est en train d’être érigé, qui doit sa création à l’initiative et la force de travail allemandes. »

Pour ce point stratégique majeur de la défense de l’empire — il s’agit d’un carrefour routier et ferroviairei de premier ordre — l’état-major allemand poursuit les travaux de fortification entamés par Napoléon III sous le Second Empire. Dès 1871, le système défensif de la ville avait profondément été corrigé, avec la construction d’une ceinture de forts éloignés de type « von Biehler » autour de l’agglomération, conformément au développement des techniques d’assaut. Lorsque le comte Gottlieb von Haeseler prend le commandement du 16e corps d’armée en 1890, Metz est devenue une place forte inexpugnable. Elle se présente sous l’aspect d’une ville de garnison allemande animée où se côtoient des Bavarois aux casques à chenille, des Prussiens et des Saxons aux casques à pointe et aux uniformes vert sombre, ou encore des Hessois aux uniformes vert clair. Cette garnison allemande oscille entre 15 000 et 20 000 hommes au début de la période, et dépasse 25 000 hommes avant la Première Guerre mondiale. Au hasard des mutations, les plus grands noms de l’armée allemande comme Göring, von Ribbentrop ou Guderian sont passés par Metz, acquérant la conviction que la ville était définitivement allemande.

Aux postes de commandement, beaucoup d’officiers allemands appartenant à l’aristocratie militaire prussienne sont affectés à la place forte de Metz, en particulier dans le XVIe corps d’armée. Ces officiers de carrière, avides de fêtes et de spectacles de qualité, s’installent avec leur famille à Metzj. Ils participent ainsi à la vie culturelle locale et animent la vie mondaine de la cité : dans les salons ou à l’Opéra-théâtre de Metz, où l’on joue évidemment les œuvres de Wagner, on rencontre alors les Richtoffen, les Salmuth, les Gemmingen-Hornberg, les Zeppelin-Aschhausen, les Winterfeld ou les Bernuth. Les civils ne sont pas oubliés. Les 1er et 2 septembre 1906, Metz reçoit ainsi le spectacle Wild West de Buffalo Bill, pour quatre représentations.

Chaque année, l’empereur Guillaume II vient dans la cité lorraine, pour inspecter les travaux d’urbanisme et ceux des fortifications de Metz. Ses visites sont, pour la ville de Metz, l’occasion d’organiser des parades et des fêtes dignes d’un hôte impérial. Au cours d’une de ses visites, il déclare ainsi : « Metz et son corps d’armée constituent une pierre angulaire dans la puissance militaire de l’Allemagne, destinée à protéger la paix de l’Allemagne, voire de toute l’Europe, paix que j’ai la ferme volonté de sauvegarder. » En 1914, Metz, que survolent quotidiennement les zeppelins de Frescaty, est devenue la première place forte de l’Empire allemand. La ville, bien défendue, ne sera pourtant pas épargnée par les combats de la Première Guerre mondiale.

Lorsque la Première Guerre mondiale éclate, les Mosellans se battent loyalement pour l’Empire allemand. Très rares sont les appelés qui désertent et, parmi eux, beaucoup tomberont au champ d’honneur sous l’uniforme allemand, sur le Front de l’Est, mais aussi à l’Ouest. Dès le début des hostilités, 15 000 civils sont évacués de Metz vers la Hesse. Les blessés étant nombreux, Metz est bientôt transformée en ville-hôpital, comptant jusqu’à 32 hôpitaux. Leur nombre sera ramené à 12 à la fin de la guerre. Rapidement, les camps se radicalisent, les autorités militaires interdisent les quotidiens francophones, censurent la presse et incarcèrent une poignée de sympathisants de la France à la forteresse d’Ehrenbreitstein. À Metz, Adrienne Thomas voit passer les soldats montant au front, les nombreux blessés qui en reviennent, mais aussi l’impressionnant matériel des armées allemande et austro-hongroise, destiné notamment au champ de bataille de Verdun.

Dans l’Empire allemand, les matières premières, mais aussi les produits de première nécessité, manquent cruellement. Malgré la protection de sa ceinture fortifiée, l’agglomération messine est touchée par les combats. Au fil du conflit, les bombardements de l’armée française se font en effet de plus en plus intenses, passant de 6 en 1914, à 79 en 1915, 140 en 1916, 171 en 1917 et 308 en 1918. Les Messins accueillent donc avec joie la fin des hostilités et la paix retrouvée. La révolution bolchevique, propagée à Metz par cinq marins de Kiel, dont les Messins Becker et Voortmann, n’a pas le temps de s’enraciner. Dès le 16 novembre 1918, les mutins quittent le Bezirk Lothringen, laissant place à l’armée d’occupation françaisek, qui entre le 17 novembre au soir, dans une ville désertée. Ainsi s’achève le rêve impérial des Hohenzollern.

Après l’armistice de 1918 et le retour à la France, la Moselle reste traumatisée par les déchirures de la guerre et les dommages collatéraux des nationalismes. Les intellectuels mosellans et messins réagiront diversement au rattachement de la Moselle à la France. Certains s’engagent sur la voie d’un nationalisme pro-français, revanchard et cocardier. D’autres s’engagent sur la voie antagoniste d’un nationalisme pro-allemand, tout aussi vindicatif et belliqueux. D’autres encore, comme Adrienne Thomas, Polly Maria Höfler (1907-1952), Ernst Mungenast ou Alfred Pellon, hésiteront entre un pacifisme sincère, mais naïf, et un régionalisme culturel identitaire. Ces mouvements, plus ou moins autonomistes, seront ensuite largement exploités par les nazis. Ce combat identitaire, souvent mené par des intellectuels idéalistes, qui s’inscrit parmi des courants de sensibilité à l’œuvre dans l’Europe entière, traduit aussi une crise d’identité propre à l’ensemble des Alsaciens-Lorrains.

Après l’expulsion massive de citoyens allemands, en 1918 et 1919, touchant toutes les classes de la société, Metz est économiquement très affectée. Sur l’intervention des États-Unis, de nombreux expulsés allemands peuvent cependant revenir à partir de 1920. Mais les classes supérieures, détentrices des capitaux, ne reviennent pas en Moselle. La population germanophone (Lorrains germanophones + immigrés allemands), qui ne représente plus, dans les années 1920, que 30 % de la population messine, se compose maintenant essentiellement d’ouvriers et de petits commerçants. Dans cette population laborieuse, largement ouverte aux idées communistes, est entretenu un sentiment hostile à l’égard de la France. La « Volkstribune » et « L’Humanité d’Alsace et de Lorraine » entretiennent ce sentiment anti-français en dénonçant implicitement l’impérialisme de la France. Les catholiques et protestants germanophones partagent ces préjugés à l’encontre d’une France à leurs yeux trop laïque. Cette situation perdurera pendant plus d’une génération.

Le rôle militaire de Metz est confirmé avec le siège du commandement de l’état-major de la région Est. De nombreux commerces rouvrent leurs portes. Plus de trois cents cafés que fréquentent assidûment les militaires, valent à la ville le surnom de « petit Paris de l’Est ». La population est devenue bilingue après 48 années d’annexion, et la culture allemande imprègne le mode de vie des Messins. Ainsi, paradoxalement, l’âge d’or de la presse allemande coïncide à Metz avec la période de l’entre-deux-guerres. Plusieurs générations d’enfants ont été contraints, non seulement d’apprendre, mais aussi de parler en allemand à l’école, sous peine de sanctionsl. Enfin, beaucoup de notables messins nés pendant l’Annexion, comme Gabriel Hocquard ou Robert Schuman, ont suivi une scolarité allemande complète, de l’école primaire à l’université. La majorité des Messins possédaient, par conséquent, une double culture franco-allemande solide à la veille de la Seconde Guerre mondiale.

De la déclaration de guerre de la France à l’Allemagne le 3 septembre 1939, à juin 1940, la « drôle de guerre » donne l’illusion à la France qu’elle tiendra ses positions grâce à la ligne Maginot et qu’elle obtiendra la victoire, comme en 1918. Le sort en décide autrement. Le 14 juin 1940, Metz est déclarée « ville ouverte ». Trois jours plus tard, le 17 juin 1940 à 17 h précisément, une patrouille motorisée du 379e Infanterie-Regiment, ouvrant la voie à la 169e Infanterie-Division, entre dans la ville désertée. Une heure plus tard, le drapeau à croix gammée flotte déjà sur l’Hôtel de ville.

De nouveau annexée dans les faits, Metz devient le poste avancé du Gau Westmark, la « Marche de l’Ouest » du Troisième Reich, dont le siège est à Sarrebruck. À l’encontre des accords signés entre les deux États, le régime nazi applique en effet de facto une politique d’annexion à Metz, comme dans le reste de la Moselle, qui forme le nouveau CdZ-Gebiet Lothringen. Le régime de Vichy se limite alors à des protestations si discrètes, qu’elles alimentent dans la population l’idée d’un pacte secret. L’administration municipale est reprise en main par les nazis, qui remplacent la plupart des cadres français. Les rues sont débaptisées, les enseignes des magasins enlevées pour être remplacées par des enseignes allemandes et la plupart des statues sont déboulonnées. Enfin, un Oberbürgermeister, cumulant les fonctions administratives de maire et politiques de Kreisleiter, est placé à la tête de l’administration de la cité.

L’un des premiers mouvements de résistance en France, l’« Espoir français », naît à Metz en juillet 1940. L’organisation, chargée du renseignement, travaillant avec le 2e bureau français, sera malheureusement démantelée quelques mois plus tard. Le 8 août 1940, les autorités allemandes suppriment les poilus encadrant le monument aux morts de Niclause, et remplacent l’inscription « Aux enfants de Metz morts victimes de la guerre » par « Sie starben für das Reich » pour rendre hommage aux soldats de 14-18129. Des défilés militaires, ou para-militaires des jeunesses hitlériennes, sont dès lors régulièrement organisés à Metz, en particulier sur la place d’arme, rebaptisée Paradeplatz pour la circonstance. Le 21 septembre 1940, le Gauleiter Bürckel y passe ainsi ses troupes en revue124. Le 1er octobre 1940, Metz intègre les communes voisines de Montigny, Longeville, Le Ban-Saint-Martin, Saint-Julien et Vallières, Borny, La Maxe, Magny, Moulins, Plappeville, Scy-Chazelles, Sainte-Ruffine et Woippy, créant ainsi la Großstadt Metz.

Après la visite du chef de la police allemande, Heinrich Himmler, au début du mois de septembre 1940131, le chancelier Adolf Hitler se déplace en personne à Metz, pour Noël, le 25 décembre 1940. Mais conscient du ressentiment des Messins, le Führer décide de ne pas faire de discours à la population civile. Hitler se contente de rendre visite à la 1re division SS, sa division d’élite, stationnée dans le secteur de Metz depuis août 1940. Il passe ainsi la nuit du 25 au 26 décembre 1940 avenue Foch, rebaptisée Hermann-Göring-Strasse, à l’ancien Bergamt, l’hôtel des mines, en compagnie de Sepp Dietrich et des cadres de cette unité. Le lendemain, 26 décembre 1940, Hitler passe en revue ses troupes d’élite, avant de les haranguer, avec sa verve accoutumée. Il se rendra ensuite, dans l’après-midi du 26 décembre, à Sarrebourg.

Du fait de l’Annexion de la Moselle, la population messine appartenant à la Deutsche Volksgemeinschaft, ou « communauté du peuple allemand », est sous une surveillance policière étroite. Des Blockleiter, ou « chefs de quartier », souvent désignés d’office, sont chargés d’informer les Zellenleiter, ou « chefs de cellule » du NSDAP, en relation avec la Gestapo installée 14 rue de Verdun et 12 rue aux Ours. Les prisons de la rue Barrès et de la Chandellerue ne suffisant plus, le grand séminaire est bientôt transformé en prison. Le ministre de l’Éducation et de la Propagande du Reich, Joseph Goebbels, se déplace en personne à Metz en 1941, pour visiter les locaux du Metzer Zeitung, un journal de propagande incitant les Mosellans à adhérer aux organisations nazies. Partout, la propagande fait rage, relayée par de nombreuses organisations allemandes, comme les Hitlerjugend et les Bund Deutscher Mädel, qui recrutent, avec beaucoup de mal, des Messins profondément attachés à la France. Le Gauleiter Bürkel sera finalement obligé de reconnaître que ces adhésions forcées étaient dépourvues de toute valeur. Le 1er avril 1941, l’arrondissement allemand de Metz-Ville continue de s’étendre, intégrant les communes de Borny, Magny, La Maxe, Moulins, Plappeville, Sainte-Ruffine, Scy-Chazelles et Woippy. Le Service du travail obligatoire pour les jeunes gens est imposé le 1er mai 1941. Certains Messins rejoignent aussitôt le maquis. À partir du 29 août 1942, les jeunes hommes sont enrôlés de force dans la Wehrmacht, la Kriegsmarine ou la Waffen-SS, et souvent envoyés sur le Front de l’Est, pour limiter les désertions. Ce sont les malgré-nous.

Au cours du printemps et de l’automne 1944, Metz est bombardée par l’aviation alliée à plusieurs reprises, faisant de nombreuses victimes civiles. Ainsi, le 1er mai 1944, un bombardement visant les lignes de chemin de fer touche durement le quartier du Sablon. Les voies ferrées de Woippy sont à leur tour bombardées le 25 mai 1944. Le 12 août, la gare de triage du Sablon est de nouveau bombardée par le Tactical Air Command. Le 14 août, le bombardement vise la base de Frescaty. Le 18 août, c’est l’usine aéronautique Hobus-Werke de Woippy qui est visée, et de nouveau le terrain de Metz-Frescaty. La gare aux marchandises de Metz est une nouvelle fois bombardée par les Américains le 20 octobre. Le 7 novembre, pas moins de 1 299 bombardiers lourds américains déversent des centaines de tonnes d’explosifs et de napalm sur les forts de Metz et divers points stratégiques situés dans la zone de combat de la IIIe armée. À chaque fois, la précision des bombardements étant assez aléatoire, la population messine est durement touchée. Les Messins se terrent autant pour échapper aux bombardements américains, qu’aux réquisitions, toujours plus coercitives, de l’armée allemande.

Jusqu’en juillet 1944, la Wehrmacht ne considère pas la ville de Metz comme un site stratégique et n’hésite pas à réduire son dispositif défensif, en désarmant la plupart des forts de Metz. Toutefois, lorsque les forces alliées commencent à progresser en France, après le débarquement de Normandie, Metz redevient un site stratégique important pour la défense du Troisième Reich. Le commandement allemand se met alors à organiser la défense de la ville, pour tenter de contrôler l’avance alliée. La ceinture de forts et de bastions qui entouraient la ville en faisait une des plus puissantes forteresses du monde. Les Allemands s’y retranchèrent, au début de septembre 1944, la truffant de mines, de pièges et d’obstacles.

C’est dans ces conditions, que se déroule la bataille de Metz, du 4 septembre 1944 au 13 décembre 1944 opposant la IIIe Armée américaine, commandée par le général Patton, à la 1re armée du général von Knobelsdorff. Chars et bombardiers américains se heurtent pendant deux mois à une ceinture de béton, de fer et de feu.

Le 4 septembre 1944, le 20e corps d’armée américain du général Walker arrive au contact des premières défenses extérieures. La bataille s’engage, elle va durer deux mois et demi, avec des phases très dures. Les forts de Metz, relativement épargnés pendant la Première Guerre mondiale, prouvent leurs valeurs défensives en bloquant l’armée américaine devant Metz.

Du 2 au 12 octobre, une attaque lancée contre le fort Driant, clé du système défensif échoue.

Les 10 et 12 novembre, la Moselle est traversée, au Nord et au Sud de l’agglomération messine, par deux divisions d’infanterie, qui effectuent leur jonction à l’Est de la cité, le 18 novembre. La pression s’accentue à l’Ouest, l’artillerie américaine se déchaîne sur les forts, mais épargne la ville.

Le 19 novembre, jour anniversaire de l’entrée des Français à Metz en 1918, les Américains pénètrent dans la ville, prenant position le long du boulevard Paixhans, et sur les places de Chambre et Mazelle. La bataille de Metz se termine enfin le 22 novembre 1944, par la reddition du général Kittel. Il faudra toutefois encore plusieurs jours de combats pour réduire les derniers forts aux mains des Allemands. Le fort Jeanne d’Arc, tenu par la 462e Volks-Grenadier-Division, résistera ainsi jusqu’au 13 décembre 1944.

La bataille se solde par de lourdes pertes pour les deux armées. Dans ces combats, la population civile n’est pas épargnée.

Revenu à la mairie dès la libération de Metz, Gabriel Hocquard eut la lourde tâche de sortir la ville du marasme où les événements l’avaient plongée. Les bombardements américains n’ayant pas épargné la ville, les logements manquaient cruellement. En outre, les caisses municipales étaient vides. Avec sagesse, Gabriel Hocquard essaya d’aplanir les dissensions entre les expulsés et ceux qui étaient restés sur place. Il restera préoccupé par le sort des réfugiés et s’attachera à aider les plus démunis. Son successeur, Raymond Mondon, allait changer le visage urbain de Metz, en l’inscrivant délibérément dans la modernité. Ce choix urbanistique, privilégiant la reconstruction à neuf, à la rénovation de l’immobilier ancien, conduira à certains excès. Les opérations d’urbanisme de Saint-Ferroy, du quartier Coislin, du Haut-de-Queuleu, du secteur de Bellecroix, du secteur de Plantières-Queuleu, de Magny-village laissent aujourd’hui leur empreinte sur la cité messine.

Metz connaît alors une période de croissance, tant démographique, qu’économique et urbaine. Sur le plan démographique, Metz passe de 89 863 habitants en 1954 à 117 199 habitants en 1975, après avoir absorbé les communes de Borny, Magny et Vallières. Sur le plan économique, Metz se développe grâce à la création d’un aérodrome civil à Metz-Frescaty (1950), la canalisation de la Moselle de Metz à Coblence (1963), la création d’un port fluvial, la construction des autoroutes Nancy-Metz-Luxembourg et Paris-Metz-Sarrebruck et enfin la création de zones industrielles périphériques à Borny (1962), à Devant-les-Ponts (1965) à Metz-nord (1971), et plus tard à Queuleu (1985). Après la crise du charbon, celle de la sidérurgie et celle du textile, la ville a diversifié ses activités. Depuis 1945, le rôle militaire de Metz n’a cessé de décroître et la démilitarisation de l’espace urbain se poursuit encore de nos jours.

Dans les années 1970, deux événements notables peuvent être mentionnés. Le 17 juillet 1975, les vaisseaux Apollo-Soyouz se rejoignirent pour la première fois en orbite au-dessus de la cité messine. Aboutissement d’un programme né des accords politiques conclus entre le président Nixon et les autorités soviétiques en 1972, les poignées de mains échangées par les deux cosmonautes soviétiques et les trois astronautes américains sont les premières à avoir eu lieu dans l’espace. Du 6 au 8 avril 1979, se déroula le congrès de Metz du Parti socialiste où s’affrontèrent François Mitterrand et Michel Rocard.

Les « Rencontres internationales de musique contemporaine », organisées tous les ans à Metz de 1972 à 1992, et confrontant les plus grands noms de la scène musicale internationale à de jeunes compositeurs méconnus, mais talentueux, ont apporté à la ville un souffle nouveau. Ce dynamisme culturel, impulsé par son nouveau maire Jean-Marie Rausch, s’est concrétisé dans les infrastructures musicales de la cité messine par la création de l’Arsenal en 1989.

Désormais à 1 h 20 de Paris grâce au TGV, Metz développe aujourd’hui une offre universitaire répartie sur trois campus (Bridoux, île du Saulcy, Technopôle) et qui compte plus de 20 000 étudiants. La cité, l’une des villes les plus fleuries d’Europe, développe les technologies de l’information et de la communication à travers le Technopôle de Metz. Ouverte sur l’Europe, la ville de Metz mène une politique de coopération active avec le Luxembourg et le Land de Sarre, que l’histoire a également assujettis à l’antagonisme franco-allemand.

Le 9 janvier 2003155 est annoncée conjointement par le centre national d’art et de culture Georges-Pompidou et la ville de Metz la première décentralisation d’une institution culturelle nationale en France. Le 7 novembre 2006 est posée la première pierre du centre Pompidou-Metz, inauguré le 12 mai 2010.

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Sources : Wikipédia, YouTube.

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