Ville de Haguenau (Bas-Rhin).

Haguenau, prononcé Hawenau en dialecte alsacien (peut changer selon le dialecte utilisé ; des Strasbourg et plus au sud on prononce Höjönöj), est une commune française du département du Bas-Rhin. Sous-préfecture de département, elle fait partie de la région administrative Grand Est.

Cette commune se trouve dans la région historique et culturelle d’Alsace.

C’est la deuxième ville du Bas-Rhin et la quatrième d’Alsace avec une population d’environ 35 000 habitants tandis que son unité urbaine en compte 120 000. La commune de Haguenau a la particularité d’avoir une très vaste superficie (18 259 hectares, soit la plus vaste d’Alsace). Ce territoire comprend notamment une importante forêt, qui marque une réelle coupure au sein de la plaine d’Alsace. La ville est située dans une vaste clairière au sud de ce massif forestier.

Le nom d’origine « Hagenau » est la description du paysage qu’on trouve encore entre Soufflenheim et Haguenau : en effet, un ‘Haag’ en allemand est un petit bois ; une ‘Aue’ est un paysage de prés proche d’une rivière.


Il n’y a pas eu de présence romaine sur le site de Haguenau qui était à l’époque une vaste forêt. Une ville, chef-lieu des Celtes de la tribu des Triboques. était installée à Brumath appelé Brocomagus. Des camps romains sont installés en – 15 pour sécuriser le Rhin en Alsace du Nord à Strasbourg appelé Argentoratum, Drusenheim (Castellum Drusi), Seltz ou Saletio, voir l’Histoire de Seltz, et Lauterbourg (Concordia). Au IIe siècle après J.-C., le panthéon traditionnel romain est remis en cause par les cultes à mystères séduisant légionnaires, artisans et esclaves. C’est à ce contexte que renvoie la découverte d’une sculpture bas relief du dieu Mithra a été retrouvée dans la forêt près de Haguenau, avec l’inscription suivante : “Deo Medru Matutina Cobnerta que l’on peut traduire par : “au dieu Mithra Matutina Cobnerta”. (La lettre R du mot Medru est renfermée dans le D). Le dieu coiffé d’un bonnet de forme particulière, tient dans la main gauche une pique, sa main droite repose entre les cornes d’un taureau qui se trouve à côté de lui alors que d’habitude Mithra est représenté au moment où il tire le taureau. S’agit-il de Mars, dieu romain de la guerre, qu’on voit rarement avec un taureau, de Mithra, culte oriental ou Medru, un dieu celte local ou tout simplement d’un syncrétisme religieux mélangeant les trois, les spécialistes sont divisés sur la question.

Le château fut fondé vers 1115 par Frédéric II de Souabe, dit Frédéric le Borgne sur une île de la Moder pour protéger les possessions de son suzerain, l’empereur Henri V du Saint-Empire. Selon la légende, il aurait découvert le lieu au milieu de la forêt en chassant. Il autorise alors son vassal à fonder une ville sur la rive droite de la Moder qui porte le nom de “Hagenau”. Une église est construite à partir de 1143, l’église Saint-Georges de Haguenau.

En 1164, son fils Frédéric Ier de Hohenstaufen, dit Frédéric Barberousse, empereur du Saint-Empire romain germanique, rédigea la charte de la ville de « Hagenau », qui octroyait à la cité qui s’était développée autour du château des droits et des privilèges18, et fit du château une des résidences impériales de la dynastie des Hohenstaufen (il existe aujourd’hui encore une place portant son nom et une stèle marque l’emplacement de la résidence).

En 1189, il part de Haguenau pour la Troisième croisade non sans avoir auparavant fondé un hospice confié à l’ordre des prémontrés pour accueillir les pèlerins à l’église Saint-Nicolas de Haguenau. Il se noie en passant à gué une rivière d’Asie Mineure. Ses successeurs Henri VI du Saint-Empire et Frédéric II (empereur des Romains) firent de nombreux séjours dans le château. Selon l’historien allemand Ernst Kantorowicz, « Frédéric II aimait à séjourner en Alsace et sur le Rhin, à Worms et à Spire […] Mais de tous les palais allemands, Frédéric II préféra celui de Haguenau, où les vastes forêts convenaient sans doute à sa passion de la chasse et la riche collection d’écrits d’antiques à sa soif de savoir. ». Ville d’Empire, elle profite du grand interrègne (1250-1273) pour obtenir de l’empereur de plus en plus de droits. Elle devient, en 1354, la capitale d’une ligue urbaine réunissant les dix villes impériales d’Alsace : la Décapole.

En 1193, Richard Cœur-de-Lion fut jugé devant le tribunal impérial présidé par Henri VI du Saint-Empire (qui fait 13 séjours à Haguenau) pour avoir abandonné le combat de la Troisième croisade. Le roi anglais fut libéré contre une rançon de 24 millions de deniers d’argent (l’équivalent d’un 36 tonnes rempli d’argent). Après la disparition de la dynastie des Hohenstaufen, la résidence fut délaissée.

Durant le grand interrègne (1250-1273), les bourgeois de la ville obtiennent de nombreux droits. Petit à petit, ils se gouvernent eux-mêmes et obtiennent la moitié de la propriété de la forêt. C’est l’origine du statut juridique de la forêt actuelle : l’indivision.

En 1268, deux cloches sont installées à l’église Saint-Georges de Haguenau, il s’agit des deux plus anciennes cloches “datées et signées” d’Europe qui sont toujours en activité.

Haguenau, carte maximum, 3/07/2015.

Rodolphe Ier de Habsbourg à partir de 1273 veut récupérer les biens impériaux de l’ancienne famille des Hohenstaufen qui suscitent la convoitises des seigneurs et de l’évêque de Strasbourg. L’empereur Rodolphe fait de la ville la capitale du grand-bailliage regroupant 45 villages et 10 villes impériales. Il fait plusieurs séjours à Haguenau de 1273 à 1283.

Le grand-bailli (Landvogt) est le représentant de l’empereur : il perçoit l’impôt et lève l’armée tout en assurant la protection des territoires. L’administration se loge dans un ensemble de bâtiments à côté de l’ancienne résidence impériale. Seule subsiste la chapelle impériale où les Staufen mettaient en sûreté les insignes impériaux et les grandes reliques lorsqu’ils résidaient au château.

En 1354, son rang de chef-lieu fait d’elle la capitale d’une ligue urbaine appelée la Décapole (Saint-Empire) qui réunit les dix villes impériales d’Alsace. Cette association avait pour but de défendre les droits des villes face aux grands seigneurs à qui l’empereur, toujours en manque d’argent, était obligé de mettre les villes en gage.

Haguenau est une ville de 5 000 habitants et fait 81 ha. En 1328, le prévôt impérial Ottelin Truttmann donne à la ville une maison sur la place d’Armes pour y soigner les malades ; ce sera le lieu du futur hôpital de la ville. La ville construit une deuxième muraille achevée en 1330. C’est une ville importante comme le montrent l’organisation des deux foires annuelles, l’une au printemps, l’autre à l’automne d’une durée de quinze jours et le fait que depuis le XIIIe siècle, elle bat sa propre monnaie. La ville est gouvernée par douze échevins issus des familles de marchands et de nobles qui se cooptent. Une bourgeoisie des métiers émerge et demande de pouvoir participer à la gestion de la ville. Louis de Bavière accorde, en 1332, la mise en place officielle de 24 représentants élus par les corps de métiers de la ville sont mis en place. L’empereur Wenceslas décide, en 1379, que les échevins seront élus par l’ensemble du Conseil. Haguenau est dirigé par un conseil composé de 36 membres, 12 échevins et 24 bourgeois qui élisent chaque année 4 stettmeister qui dirigent la ville pendant un trimestre.

La cité-État est prospère : elle perçoit les taxes des paysans dont les terres appartiennent aux propriétaires, aux bourgeois, à l’église Saint-Georges, à l’hôpital bourgeois ou aux monastères des environs. De vastes greniers sont construits pour entreposer les récoltes, comme le grenier de l’Hôpital, rue de la Filature ou celle de la paroisse Saint-Georges.La gestion de la forêt est une source importante de revenus. C’est un moyen d’engraisser les 2 000 à 8 000 porcs achetés à bas-prix et revendus le double du prix. En 1350, une douane est construite pour percevoir les taxes sur les marchandises vendues ou transitant par la ville.

Il y a la première mention, en 1420, dans les archives municipales d’une crèche sur les murs extérieurs de l’église Saint-Georges de Haguenau.

En 1518, une salle de la Douane est construite à côté de la Moder au rez-de-chaussée on entrepose le vin et au premier étage les tissus. Elle prélève les taxes des produits de passage et sert de lieu d’application des règlements des corporations de métiers et de bourse des produits de l’Alsace du Nord.

Haguenau avait un atelier de copie de manuscrit au fonctionnement très efficace. Diebold Lauber développe cet atelier à Haguenau de 1420 à 1467. Il s’appuie sur un atelier comprenant 4 copistes et 5 illustrateurs. C’est un des copistes les plus diffusés au XVe siècle : on conserve 56 manuscrits de lui dans les bibliothèques européennes 36. Il diffuse des récits de chevalerie, comme le « Tristan » de Gottfried von Straßburg et le « Parzival » de Wolfram von Eschenbach, des romans, comme La Guerre de Troie de Konrad von Würzburg, des œuvres religieuses, comme la Bible en langue allemande en cinq tomes (1441-1449), des vies de saints et des encyclopédies. Depuis 2013, l’université de Leipzig, avec le soutien de l’Union européenne, a lancé un projet de numérisation des ouvrages de Diebold Lauber, le « Diebold Lauber digital », détenus dans les bibliothèques européennes. À l’entrée du Musée historique de Haguenau, une céramique murale extérieure de Charles Bastian, créée à partir du carton de Leo Schnug, rappelle le souvenir de l’imprimeur Diebold Lauber. Une rue porte le nom de Diebold Lauber dans le quartier du Château Fiat.

Diebold Lauber n’a pas vu émerger l’imprimerie qui rend obsolète la copie de manuscrits, son atelier disparaît avec cette invention qui se diffuse dans toute la vallée du Rhin. Deux imprimeurs s’imposent à Haguenau. Heinrich Gran (1489-1527) et Thomas Anshelm (1470-1523).

Heinrich Gran, bourgeois de Haguenau en 1489, est actif de 1489 à 1527. Il introduit l’imprimerie à Haguenau et travaille pour les imprimeurs-libraires de Strasbourg (Johann I Knobloch), de Cologne (Franz Birckmann), d’Augsbourg (John Rynmann) et de Spire (Konrad Hist). Wilhelm Seltz dirige par la suite son imprimerie38. On lui doit l’impression de 213 ouvrages de 1501 à 1527, des ouvrages surtout théologiques.

Thomas Ansehlm, imprimeur à Pforzheim et Tübingen, était l’imprimeur du réformateur protestant Philippe Mélanchthon. Il s’installe en 1516 à Haguenau et travaille avec l’imprimeur Hans Albrecht et des graveurs comme Hans Baldung Grien et J.F. Schaeufelin. II imprime 114 ouvrages dans son atelier d’imprimerie de Haguenau de 1516 à 1522.

Johann Setzer prend la succession de l’atelier (216 ouvrages de 1523 à 1534) et imprime des ouvrages des réformateurs protestants que sont Luther, Johan Brentius (connu également sous les noms de Jean Brentz ou Johannes Brenz) et Philippe Mélanchthon.

Entre 1550 et 1560, l’imprimerie disparaît à Haguenau, probablement en raison de la concurrence de Strasbourg ou de la fin des contrats d’édition avec les imprimeurs libraires d’autres villes.

Pendant une quarantaine d’années (1490 à 1529), Haguenau connaît une période artistique flamboyante avec des artistes qui vont faire de nombreuses réalisations, encore visibles à l’église Saint-Georges de Haguenau ou au Musée historique de Haguenau. Ces artistes haguenoviens vont avoir une influence jusqu’à Strasbourg et Colmar.

L’Œuvre Saint-Georges est riche en raison des donations des Hohenstaufen, des testaments de personnes sans descendance, des rentes des immeubles, des redevances des terres et de la dîme. La gestion des biens est confiée pendant deux cents ans (1354 à 1535) à l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem relevant de la commanderie de Dorlisheim, d’où le nom de la rue des Johannites.

L’Œuvre Saint-Georges est chargée d’assurer le financement et l’agrandissement de l’église Saint-Georges de Haguenau. À partir de 1490, elle commande pour l’église des sculptures et des meubles liturgiques aux artisans de la ville pour les chapelles Saint-Jacques (1496) et Saint-Jean-Baptiste (1517-1519). Elle fait appel au sculpteur Lux Kotter pour ériger le calvaire du cimetière Saint-Georges (1477 détruit à la Révolution) et à Veit Wagner (1420-1517) pour réaliser le buffet d’orgue en 1492, la chaire de l’église (un saint Georges tuant un dragon) et le retable du Jugement dernier (les peintures sont de Diebold Martin, auteur des fresques de la chapelle des Annonciades). Ces deux artistes travailleront ensuite pour la Fondation de l’Œuvre Notre-Dame de Strasbourg Veit Wagner sculpte Le Mont des Oliviers (cathédrale de Strasbourg) du transept Nord (1498) et réalise la chaire avec Hans Hammer et Nicolas de Haguenau de la cathédrale de Strasbourg (1485). À Colmar, Nicolas de Haguenau réalise la partie centrale des sculptures du retable d’Issenheim (en 1500-1505), dont les peintures des volets et des panneaux centraux sont de Matthias Grünewald.

L’architecte Fritz Hammer construit la sacristie de l’église, la custode du chœur (1523) et le grenier de la paroisse Saint-Georges, visible au 10, rue du Grenier (1527-1529, restauré en 1683, à la suite d’un incendie).

À la même période, entre 1513 et 1520, Le peintre Hans Baldung Grien réalise, à Strasbourg ou à Fribourg, un retable pour l’église du couvent de franciscains à Haguenau ou à l’église du prieuré de guillelmites à Marienthal. Ce retable est au Musée historique de Francfort.

De 1530 à 1550, la communauté protestante gagne en importance à Haguenau. Soutenu par le chef de l’Église protestante strasbourgeoise Martin Bucer, le prédicateur Wolfgang Capiton ou Capito (une rue et le foyer protestant portent son nom), originaire de Haguenau, introduit la Réforme protestante à Haguenau en 1525 où il prêche à l’église Saint-Georges à la demande de quelques bourgeois. Jean Calvin et Michel Servet séjournent à Haguenau en 1530-1532, Servet y fait imprimer son traité de la Trinité qui lui vaudra une condamnation à mort à Genève à la demande Calvin. En juin 1540, en raison de la peste qui sévit à Spire, la ville de Haguenau est choisie pour un Colloque religieux d’Haguenau destiné à mettre en place un dialogue entre les catholiques et les protestants qui échoue sur les questions de dogme lié à l’eucharistie et à la confession. Parmi les participants, on trouve Pierre de Ronsard, âgé de 16 ans, qui aurait appris l’allemand à l’occasion de son séjour dans la ville.

En 1565, un prédicateur Jacques Andréa prêche au couvent des Franciscains vide47, une paroisse protestante est officiellement créée. Les magistrats de la ville protestants favorisent la diffusion de la réforme luthérienne à Haguenau de 1566 à 1585.

Le musicien Joachim Böddecker, originaire de Goslar, s’occupe de la musique liturgique à Haguenau. Son fils Philipp Friedrich Böddecker, futur maître de chapelle de la cathédrale de Strasbourg (1648-1652) de culte luthérien et rival de Samuel Capricornus, naît en 1607 et vit dans la ville jusqu’en 1618 où sa famille s’installe à Stuttgart.

Pendant la Guerre de Trente Ans (1618-1648), la ville subit le siège et les pillages des troupes protestantes de Ernst von Mansfeld de 1621 à 1622 qui mettent un coup d’arrêt à l’influence protestante à Haguenau. La ville est aussi assiégée par les troupes catholiques du chef militaire et évêque de Strasbourg, l’archiduc Léopold V de Habsbourg. En 1624, les pasteurs et les maîtres d’école protestants ne sont plus payés.

Le Musée historique de Haguenau a inauguré, en juin 2018, une salle sur le XVIIe siècle où trône le trésor de Preuschdorf découvert en janvier 2005. Ce trésor enterré dans un pot de terre cuite en 1610 est composé de 7 270 monnaies d’alliage d’argent et de cuivre. 80 % des monnaies ont été identifiées, elle proviennent de 64 autorités monétaires situées dans la région de Haguenau, c’est-à-dire de Strasbourg, le Palatinat du Rhin et du Hanau, ainsi que Saint-Empire, la plus éloignée provient de Wschowa en Pologne. Le plus grand nombre de pièces datables provient des années 1560-1589. La plus ancienne serait de 1610, date de l’enfouissement du trésor. L’Alsace, région commerçante n’avait donc pas assez de monnaie et recourait aux monnaies d’autres villes. Haguenau frappait sa propre monnaie sous la forme d’une rose entourée d’un cercle de points. Le cœur de la rose est quadrillé. On trouve également une monnaie de Haguenau avec une rose dans un écusson. 36 fausses monnaies ont été identifiées composées de cuivre ou du laiton recouvert d’argent. Le trésor révèle le mauvais état de l’économie alsacienne marqué par la faillite de nombreuses banques. Les monnaies étrangères de mauvaise qualité ou de monnaies refondues avec un poids moins important que la valeur signalée envahissent les campagnes et les villes.

Depuis 1567, les jésuites de Molsheim viennent prêcher régulièrement à Haguenau. En 1604, ils administrent l’église Saint-Georges de Haguenau. Ils réinstaurent les processions de la Fête-Dieu en 1606 et le pèlerinage à la basilique Notre-Dame de Marienthal à 5 km de la ville. Ils prennent en charge l’instruction des enfants de la bourgeoisie et fondent un collège Jésuite à l’emplacement de la Burg (actuelle maison de retraite du centre-ville) en 1730. Par leurs méthodes, ils arrêtent la progression du luthéranisme à Haguenau. Sous Louis XV, les jésuites sont suspectés de n’être fidèle qu’au pape, à la suite de la suppression de la Compagnie de Jésus en 1763, les biens des jésuites sont inventoriés et en 1766, le collège jésuite de Haguenau est dissous et les bâtiments servent de caserne de cavalerie.

Assiégée par les troupes impériales en 1636, la ville est ravitaillée par le régiment de Rambures et les troupes du cardinal de La Valette et le siège fut levé. Haguenau perd, selon l’interprétation qui est faite par les Français du très ambigu Traité de Münster, son statut de ville impériale en 1648. Or, avec les villes de la Décapole, Haguenau ne l’entend pas de cette oreille, dans la mesure où ce traité garantit également aux villes leur immédiateté d’Empire. Haguenau veut résister et rester une ville impériale indépendante. Dans le contexte de la Guerre de Hollande (1672-1678), un nouveau traité en 1676 donne définitivement la souveraineté au roi de France.

Pour empêcher les Impériaux de prendre l’Alsace, les troupes françaises mènent une politique de la terre brûlée appliquée dans toute la vallée du Rhin, comme le montre le ravage du Palatinat avec l’incendie de nombreuses villes, comme Heidelberg ou Landau. Louis XIV donne l’ordre de brûler Haguenau en 1677. La ville est brûlée une première fois, le 10 février 1677, par les soldats du maréchal de François de Créquy, puis une deux fois, le 16 septembre 1677, par les troupes du général Montclar, il ne reste qu’une trentaine de maisons et quelques églises. La population réduite à quelques centaines de personnes est chassée avec interdiction de revenir. La population n’est autorisée à revenir dans la ville qu’en juillet 1678.

Sébastien Le Prestre de Vauban (1633-1707), architecte militaire de Louis XIV, décide de faire protéger l’Alsace du Nord des Impériaux en construisant deux forts, Landau et Fort-Louis. En 1687, la Burg (le château impérial) de Haguenau est détruite et les pierres servent à construire Fort-Louis54. Des places secondaires complètent le dispositif de Vauban comme le château de Lichtenberg (Alsace) et Haguenau55. Les murailles de la ville sont donc réparées et des demi-lunes sont construites. Un chemin couvert est aménagé. Pourtant, malgré les fortifications, les Impériaux s’emparent de la ville en 1705, mais un an après les Français reprennent la ville56. Jusqu’en 1715, Haguenau ne connaît que la guerre.

Charles-François Hannong, un Hollandais installé à Strasbourg, obtient l’autorisation d’ouvrir une manufacture de faïence à Haguenau en 1724 en raison de la présence d’argile et de forêt, exploités depuis le Moyen Âge par le village de Soufflenheim. Dix-huit personnes travaillent dans la manufacture spécialisée dans l’exportation de faïences blanches à décor bleu. En 1732, son fils cadet Balthazar dirige la manufacture de Haguenau avant de la revendre quelques années plus tard à son frère aîné Paul-Antoine Hannong en 1737. Il introduit la polychromie sur les faïences. Il trouve le secret de la fabrication de la porcelaine de Saxe, mais la Manufacture nationale de Sèvres ayant obtenu le monopole, il “délocalise” la production à Frankenthal en Rhénanie-Palatinat. Il laisse la direction de la manufacture de Haguenau à son peintre Adam-Frédéric de Loewenfinck (1714-1754) qui multiplie les décors floraux sur les faïences de Haguenau. La troisième génération, Joseph-Adam Hannong prend la direction de la manufacture de Haguenau en 1762. Il se place sous la protection du cardinal archevêque de Strasbourg, le prince Louis-Constantin de Rohan (1697-1779) et se fait prêter de l’argent pour trouver de nouveaux modèles qui sont coûteux à la fabrication. En 1775, les décors perdent en qualité. À la mort de son protecteur, il doit rembourser ses dettes, ce qui le conduit à la faillite en 1782.

L’hôpital bourgeois de Haguenau ou Hôpital civil de Haguenau, actuelle résidence Saint-Martin, qui existe depuis 1328, est reconstruit en 1757 par l’architecte municipal Georges Joseph Barth (dont l’hôtel particulier est situé au no 59, Grand’rue) s’inspirant des plans de Joseph Massol, architecte de l’Hôtel de Klinglin, actuelle préfecture de Strasbourg. Une chapelle, la chapelle Saint-Martin, est intégrée au centre de l’édifice en 1759 par l’architecte Jean-Baptiste Chassain.

L’Hôpital militaire et bourgeois de Haguenau, actuelle médiathèque, est construit entre 1783 et 1788 à la demande d’Antoine-Martin Chaumont de La Galaizière, l’intendant d’Alsace. Ce bâtiment de style de Louis XVI a été réalisé par l’architecte Charpentier, directeur adjoint des Ponts et Chaussées d’Alsace et Jean-Baptiste Pertois, maître d’œuvre70 ; la ville a financé sa construction. Il comporte des motifs néo-classiques composés de triglyphes (frises), de guirlandes et de pommes de pin sur le portail central. Les bâtiments de trois étages sont construits en grès, briques, pierres avec des briques de remplissage, avec un toit à longs pans, et croupe, recouvert d’ardoise et de tuile.

La culture de la garance pour réaliser la couleur rouge est pratiquée depuis le XVe siècle, mais elle connaît une expansion importante au XVIIIe siècle. Les Hoffmann développe la culture et l’industrie de la garance, ce qui leur permet de s’enrichir. Le bailli François Joseph Ignace Hoffmann (1730-1793) introduit les fours hollandais pour la transformation de la garance et construit 120 fours dans la région, à Brumath, Geiselbronn, Molsheim, Reichshoffen, Schweighouse-sur-Moder, Wasselonne, produisant 6 000 quintaux de teinture rouge par an. En 1770, le bailli Hoffmann se fait construire un hôtel particulier, l’Hôtel du bailli Hoffmann, aux no 55-57, Grand’rue. En 1779, la société Hoffmann est en déclin71 en raison de la multiplication des investissements, du nombre d’emprunts et d’un mode de vie trop luxueux.

En 1789, Haguenau compte environ 4 600 habitants. L’Armée de Condé, constituant une Armée des émigrés contre-révolutionnaires, commandée par Louis V Joseph de Bourbon-Condé occupe la ville en octobre 1793. Après la Bataille de Berstheim du 2 décembre 1793 et la Bataille de Wœrth-Frœschwiller (1793), Haguenau est reprise le 22 décembre 1793 par les troupes françaises. Lors de la première bataille, 250 militaires de l’armée de Condé décédés du choléra sont enterrés dans cinq fosses communes au cimetière juif de Haguenau.

L’aumônier ayant accompagné les troupes émigrées est exécuté à Strasbourg et un habitant ayant mis la cocarde blanche est dénoncé et est guillotiné à Strasbourg. Les biens de l’Église (églises, monastères, fermes, terres) sont vendus comme biens nationaux. Deux prisons sont créées dans les monastères des cordeliers et des augustins pour les suspects (familles des émigrés, soldats déserteurs, prêtres réfractaires, paysans refusant de livrer leurs récoltes à l’armée). Pendant la Terreur, les autels et la chaire de l’église Saint-Nicolas sont brûlés par les révolutionnaires. Les cloches, à l’exception de deux, ont été fondues. La fête de la déesse Raison est célébrée dans l’église Saint-Georges. Par la suite, les églises Saint-Georges et Saint-Nicolas sont transformées en temples de l’Être Suprême. En janvier 1795, les émigrés sont amnistiés. En 1801, grâce au Concordat, les églises sont rouvertes76. Un collège est installé dans les bâtiments du monastère des Annonciades (1804).

En 1810, le bâtiment principal de la sous-préfecture de Haguenau est construit. Il comporte toujours l’aigle impérial au-dessus de l’entrée. L’hôpital bourgeois, actuelle résidence Saint-Martin, sert d’hôpital militaire à partir de 1812 jusqu’en 1940.

Le 24 juin 1815 après l’abdication de Napoléon Ier, une délégation française est envoyée à Haguenau auprès des dirigeants de la coalition. Elle est composée de Gilbert du Motier de La Fayette, Laforest, ami de Talleyrand et ancien ambassadeur de Berlin, le comte Pontecoulant, membre de la chambre des Pairs, le général Sebastiani, Voyer d’Argenson, député de Colmar et Benjamin Constant, le secrétaire de la délégation. Ces négociations de paix sont appelées “les conférences de Haguenau”.

François Ier (empereur d’Autriche) est hébergé à la Maison Weinum (la sous-préfecture), Frédéric-Guillaume III, roi de Prusse habite à la maison de Xavier Hallez (Hôtel du commandant de la place), Alexandre Ier (empereur de Russie) loge à la maison Lauer (place du Manège), le roi de Saxe Frédéric-Auguste Ier de Saxe loge au presbytère Saint-Georges et Frédéric Ier de Wurtemberg (roi) dans la Grand’rue. la délégation française annonce l’abdication de l’empereur, la fin de la guerre et demande de négocier la paix. Le représentant anglais n’étant pas là, la délégation ne peut aboutir car les coalisés refusent de négocier séparément.

Libération de Haguenau le 11/12/1944.

Le Musée alsacien de Haguenau, créé en 1972, situé aux premier et deuxième étages de l’office du tourisme (l’ancienne chancellerie), au 1, place Joseph Thierry, retrace la vie quotidienne de Haguenau et de sa région aux xviiie siècle et xixe siècle. On peut y voir de l’artisanat métallurgique (plaques, poêles de cheminées et serrurerie), de la poterie de Soufflenheim et de Betschdorf, des peintures souvent religieuses sous verre, les costumes traditionnels des hommes ou des jeunes filles catholiques et protestantes (habits, coiffes, rubans), l’habitat et le mobilier alsacien.

Haguenau compte 7 000 personnes. La ville vit de la culture de la garance et du tabac, de la fabrication de l’amidon80. Mais en 1830-1840, la culture de la garance est en déclin, le houblon prend le relais. C’est le brasseur François-Ignace Derendinger (son nom est francisé en Rendinger) qui prend l’initiative de planter du houblon en 1802. À la suite d’une pénurie de houblon, il part en Bohême et achète 800 pousses de houblon qu’il plante autour de Haguenau. En 1837, 56 hectares sont plantés avec du houblon, on atteindra même 436 hectares. Cette culture devient emblématique de la culture de la région de Haguenau en 1860 jusqu’en 195082. Au xixe siècle, la région de Haguenau emploie massivement de la main-d’œuvre étrangère à la région pour aider les cultivateurs dans leur travail (plus de 7 000 saisonniers), notamment des Bavarois et des Lorrains germanophones.

En novembre 1820, on assiste à la création officielle des sapeurs-pompiers de Haguenau, la fonction était remplie du Moyen Âge jusqu’au XVIIIe siècle par des corporations. Cette tradition perdure puisque les sapeurs-pompiers volontaires se recrutent dans les métiers du bâtiment.

La synagogue de Haguenau est construite no 3, rue du Grand-Rabbin-Bloch par l’architecte Léopold entre 1819 et 1821, en effet la communauté juive est très nombreuse dans la ville (autour de 700 personnes) et les deux autres lieux (une synagogue et un logement loué) sont trop petits.

En 1825, la ville édifie la fontaine aux Dauphins sur la place d’Armes en l’honneur de Charles X : le buste du roi était en haut de la colonne cannelée en grès rose. Avec la Révolution des Trois Glorieuses, le buste est enlevé et est remplacé par un panier de fleurs et de fruits sculpté. Quatre dauphins ornent les différentes parties de la fontaine.

Le maire Henri Guntz améliore l’administration municipale en créant une caisse d’épargne, une compagnie de pompiers et une garde nationale. La municipalité tente, en 1836, de centraliser l’enseignement en créant une école de garçons et une école de filles au détriment d’une organisation par paroisses, c’est un échec.

Sur le plan culturel, une société philharmonique est subventionnée par la Ville (1827)90, puis une école de musique est créée en 1831 et en 1839 une bibliothèque voit le jour. Une salle de spectacles est envisagée : entre 1842 et 1846, l’architecte Charles Morin, architecte de la ville de Haguenau de 1838 à 1842, construit le Théâtre municipal de Haguenau. Il s’agit d’un théâtre à l’italienne de grès rose situé au no 2 de la place du maire Guntz. La structure métallique, témoin de la Révolution industrielle, est utilisée pour la première fois à Haguenau. Cet architecte va, par la suite, restaurer le Grand Séminaire de Strasbourg et édifier la basilique Notre-Dame de Marienthal de Haguenau. Haguenau compte alors 10 000 habitants.

Sous la direction du maire Dominique Maurice Chompré (1853-1866), ancien colonel, la ville connaît de nombreux aménagements. Les rues de Haguenau sont dotées d’égouts, recouvertes de pavées et disposent d’un éclairage au gaz (1865). Le maire favorise la mise en place d’une gare dès 1855. En 1860, une église protestante est construite pour la communauté luthérienne de 226 personnes.

Un magasin à tabac est construit en 1866, puis un an plus tard, en 1867, une halle aux houblons est construite sous la direction de l’architecte municipal Guntz. En effet, la ville cherche à devenir le marché international du houblon : la halle permet d’abriter la récolte des intempéries et sert de lieu de stockage pendant les trois mois d’automne. La halle et encadrée d’un bâtiment à droite servant de télégraphe et à gauche d’une aile servant au syndicat des planteurs.

Depuis 1837, la municipalité demandait le déclassement de l’enceinte pour donner plus d’espace à la ville et permettre une meilleure circulation. La demande est acceptée en 1867 : les murailles sont détruites (les rues du Marché-aux-Grains et du Maréchal-Foch).

La municipalité a le souci de l’instruction des jeunes filles. Entre 1865 et 1867, une école primaire de filles Saint-Nicolas et une école maternelle, rue des Roses, sont construites par l’architecte Eugène Petiti. Le maire demande aux sœurs de Ribeauvillé d’ouvrir un pensionnat de jeunes filles, c’est la naissance de l’école Sainte-Philomène.

Dans le domaine culturel et des loisirs, l’école de musique fermée en 1849 ouvre à nouveau en 1863. Le chant choral a beaucoup de succès à Haguenau : “Une enquête de 1868 révélait que 12 000 habitants de Haguenau animaient plusieurs chorales paroissiales (il doit s’agir de la paroisse protestante et des paroisses catholiques Saint-Georges et Saint-Nicolas), trois sociétés de musique, dont une société philharmonique et une société de chorale mixte”. Parmi ces sociétés de musique, il y a la fanfare des sapeurs-pompiers créée en 1830 et la société philharmonique (1827). Parmi ces chorales, on trouve la chorale de 1857 qui existe encore de nos jours.

À la suite de la bataille de Frœschwiller-Wœrth (1870), la ville sert d’hôpital pour les blessés allemands et français du champ de bataille, les habitants doivent aussi héberger les soldats de l’armée prussienne. La salle de la Douane sert d’hôpital pour les militaires blessés où officie le célèbre chirurgien Charles-Emmanuel Sédillot, inventeur de l’anesthésie au chloroforme au lieu de l’éther diéthylique. 301 militaires blessés originaires de métropole et de l’empire colonial (Algérie : Constantine, Mostaganem, Sétif) sont enterrés dans une fosse commune au cimetière Saint-Georges. Parmi les soldats tués lors de cette bataille, on trouve Antoine Heyer, originaire de Haguenau. 15 autres Haguenoviens seront tués lors de la guerre de 1870.

Le 7 août 1870, les troupes prussiennes entrent à Haguenau qui n’est pas défendue. La nouvelle administration allemande d’Alsace dirigée par le gouverneur militaire le comte Friedrich Alexander von Bismarck-Bohlen et le commissaire civil, Friedrich von Kühlwetter y installe son siège provisoire du 14 août 1870 jusqu’au 28 septembre 1870 pendant le siège de Strasbourg.

À la suite de la défaite de la guerre franco-allemande de 1870, l’Alsace a le statut de territoire impérial Alsace-Lorraine ou Reichsland Elsaß-Lothringen. Les Alsaciens doivent soit rester, soit opter pour la France et quitter l’Alsace ; à Haguenau, c’est le cas de l’architecte Georges Morin, constructeur du théâtre, qui opte pour la France et devient architecte diocésain de Fréjus et de Digne, puis architecte du département de la Gironde. Le maire Joseph Thierry (1866-1870), jugé trop francophile est expulsé. Un de ses fils Joseph Thierry deviendra plusieurs fois ministre entre 1913 et 1917. Certains juifs haguenoviens marchands de houblon et francophiles, décident de quitter l’Alsace, comme Eisenmann, Abraham Ephraïm, Isidore Gougenheim…

Entré au conseil municipal en septembre 1860 puis adjoint en 1865 sous le mandat du maire Joseph Thierry, Xavier Nessel est nommé premier magistrat par décret impérial, poste qu’il occupe de 1870 à 1902.

Cette période est également importante pour la Révolution industrielle. André Grusenmeyer, mécanicien, répare les machines agricoles : il invente la batteuse (éjecte la paille non broyée) qu’il perfectionne (séparation du grain, de la paille et des saletés) entre 1878 et 1889 donnant naissance à la moissonneuse batteuse. Il invente la charrue-buteur et des scies. N’arrivant pas à transformer ses inventions en entreprise viable, il s’endette et quitte Uhlwiller pour Haguenau. Il vend ses inventions à l’entreprise de machines agricoles Kuhn de Saverne. Son fils aîné, Joseph Grusenmeyer, invente une scie de deux mètres de haut dans son atelier du 22 boulevard De Lattre-de-Tassigny. Il achète la première voiture en 1900 à l’usine Benz à Mannheim qu’il revend au maire X. Nessel que l’on peut voir au Musée historique. Il perfectionne les machines agricoles en leur mettant des bandes de protection amovible leur permettant de rouler sur la route (1926).

Les Haguenoviens sont mobilisés dans l’armée allemande pendant la Première Guerre mondiale. On trouve parmi eux les quatre frères de la famille Aveline. Aloïs sert comme matelot dans la flotte de guerre de Wilhelmshaven, Joseph dans un régiment d’artillerie chargé de protéger le port militaire de la même ville. Louis est mobilisé dans l’artillerie de la 5e armée du Kronprinz. Il est gravement blessé d’une balle à proximité du cœur lors des combats de l’Argonne lors de la bataille de Champagne. Quant à Charles, il sert dans une unité allemande en Lorraine.

L’écrivain Alfred Döblin, auteur de Berlin Alexanderplatz (roman) (1929), est médecin militaire dans deux hôpitaux militaires de Haguenau de 1917 à 1918, ces hôpitaux militaires sont situés à côté de l’aérodrome au Lazaret militaire, actuelle résidence des Platanes en direction de Kaltenhouse et au lazaret de réserve installé dans la Maison des Sourdes et Muettes de Marienthal. Proche des fronts de Lorraine et de Haute-Alsace, la ville comptait huit hôpitaux militaires, dont le Carmel de Marienthal et un bâtiment des Missions africaines a ainsi servi d’hôpital militaire. C’est pendant la guerre qu’il termine d’écrire une partie de son roman Wallenstein, publié en 1920.

L’aérodrome de Haguenau, à vocation initialement militaire, est construit par des prisonniers de guerre russes, entre avril 1916 et juin 1917, sur une centaine d’hectares entre Haguenau, Kaltenhouse et Marienthal pour protéger les usines pétrolières de Merkwiller-Pechelbronn de raids de bombardements. L’aérodrome est composé de dix hangars et de deux pistes en herbe de 1 000 mètres. En 1918, une école de pilotage « Arthur-Sasse » destinée à une centaine d’élèves est créée sur le site. De juin à octobre 1918, l’aviation britannique bombarde l’aérodrome de Haguenau et la ville de Haguenau (le 22 août 1918) causant ainsi la mort de quatre enfants.

424 Haguenoviens sont morts pendant la Première Guerre mondiale. Neuf sont morts sous l’uniforme français. Pendant la guerre de 14-18, 92 soldats français (blessés et décédés dans les hôpitaux militaires allemands de Haguenau ou décédés de la grippe espagnole en 1918-1919), 595 militaires étrangers (472 Roumains, 122 Russes et 1 Britannique), 188 soldats allemands décédés, des suites de leurs blessures à l’hôpital, ont été enterrés dans la nécropole militaire de Haguenau.

Le 9 novembre 1918, un soviet de soldats mutins prend le pouvoir à Haguenau, comme dans d’autres villes alsaciennes. Alfred Döblin, médecin militaire à Haguenau, en fera le récit dans le premier livre Bourgeois et soldats de sa tétralogie novembre 1918. Ce mouvement éphémère né à la suite de la vacance du pouvoir entre la disparition de l’administration allemande et avant l’arrivée de l’administration française, disparaît le 13 novembre. Le maire Louis Müller organise une garde civique destinée à éviter le pillage des casernes allemandes. Le 26 novembre 1918, la ville accueille l’entrée des troupes françaises commandées par le général Augustin Gérard : celui-ci met en avant le général Duport, commandant du 6e corps, originaire de Haguenau. Une rue de Haguenau porte le nom du général Gérard en souvenir de cet événement.

Le 22 août 1919, Raymond Poincaré, président de la République, visite Haguenau à cette occasion un album de photos de la ville lui est offer. Le 23 août 1919, Georges Clemenceau, Président du Conseil (Premier ministre) et ministre de la Guerre de 1917 à 1920, visite Haguenau avant d’aller à Wœrth et à Wissembourg. Une rue porte le nom de G. Clemenceau en souvenir de son passage.

Le totalitarisme nazi s’applique à Haguenau. La Gestapo s’installe au 24 rue de l’Aqueduc pour pourchasser les résistants et francophiles. La politique antisémite nazie est mise en œuvre : sur les 564 juifs de Haguenau, 120 sont déportés. Les jeunes sont mobilisés de force, dès 1942, dans l’armée allemande ; on les appelle les Malgré-nous. 266 Haguenoviens ne reviendront pas des fronts russe et normand, et des camps de détention en URSS. Un monument dédié aux Malgré-Nous détenus et décédés au camp de prisonniers de Tambov en URSS, le Camp 188 a été inauguré au cimetière Saint-Nicolas. L’aérodrome de Haguenau est utilisé par la Luftwaffe pour protéger les villes allemandes des raids nocturnes de bombardement des Alliés.

Des actes de résistance sont organisés, comme la filière d’évasion de prisonniers de guerre évadés et de réfractaires. Cette filière connue sous le nom de « Tante Jeanne » était dirigée par le docteur Flesch et Caroline Muller. Les membres du réseau ont été arrêtés en mars 1942 et mis en détention au camp de Schirmeck.

En novembre 1944, les Allemands de la 256e division d’infanterie minent le parc près de la gare, détruisent la gare, l’usine à gaz, la station d’électricité, le château d’eau de la place Robert-Schuman, les ponts ferroviaires et routiers. Les soldats américains du 314e régiment d’infanterie de la 79e division de la 7e armée mènent l’offensive : quelques combats ont lieu au niveau du château Walk à l’entrée de Haguenau. La ville est évacuée sans résistance le 10 décembre 1944, le lendemain, les Américains s’emparent de Haguenau.

Une équipe cinématographique accompagne la VIIe armée américaine et filme la libération de Haguenau : on y voit le bombardement de la Porte de Wissembourg, des combats le long du canal de décharge de la Moder, des images de la destruction de la gare, fuite de la population et l’entrée des troupes d’infanterie accompagnées de jeeps et de chars.

Le 31 décembre 1944, Hitler lance l’opération Nordwind. Des combats ont lieu à Haguenau, du 22 au 24 janvier, 5 membres des Forces françaises de l’intérieur de Haguenau sont tués, un sixième sera tué le 8 février 1945 (la stèle commémorative est au cimetière Saint-Nicolas). Le 506e régiment d’infanterie parachutiste de la 101e division aéroportée défend la ville le 5 février en établissant une ligne de défense sur la Moder. Le 23 février 1945, l’unité est remplacée par la 16e division d’infanterie. De janvier à mars 1945, les Allemands bombardent Haguenau et les Américains ripostent. 7 000 civils se terrent dans la ville. Les clochers des églises Saint-Georges et Saint-Nicolas sont détruits. L’opération Undertone menée par la 1re armée française et la 7e armée américaine est une vaste offensive pour sécuriser la rive occidentale du Rhin. C’est dans ce contexte militaire que le 16 mars9, les Américains reprennent la totalité de la ville.

Un monument du sculpteur Albert Schultz rappelle l’endroit où les troupes américaines ont franchi le canal de décharge de la Moder. Pendant les combats, le sergent Morris E. Crain, sergent à la compagnie E du 141e régiment d’infanterie de la 36e division d’infanterie, est tué le 13 mars 1945 à Haguenau. Il recevra à titre posthume pour ses actions héroïques dans les combats de Haguenau la plus haute décoration de l’armée américaine, la Medal of Honor. L’épisode 8 de la série Band of Brothers de Tom Hanks et Steven Spielberg, sorti en 2002 en France, traite des combats à Haguenau.

Pour les 75 ans de la libération de Haguenau, la Haguenovienne Germaine Kandel raconte ses souvenirs des deux libérations de Haguenau. Son témoignage est illustré d’images d’archives de l’armée américaine. [vidéo] Ville de Haguenau, La Libération de Haguenau par celles et ceux qui l’ont vécue.

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Sources : Wikipédia, YouTube.

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