Verner von Heidenstam, écrivain et poète.

Carl Gustaf Verner von Heidenstam, né le 6 juillet 1859, mort le 20 mai 1940, est un écrivain et poète suédois. Il fut membre de l’Académie suédoise de 1912 à 1940 et lauréat du prix Nobel de littérature en 1916.

Heidenstam commence sa carrière d’écrivain en 1888 avec la publication d’un recueil de poèmes, Années de pèlerinage et de vagabondage (Vallfart och vandringsår). Cet ouvrage, qui fait la part belle au romantisme, à l’individualisme et au sensualisme, marque une rupture avec la tradition littéraire réaliste et naturaliste de l’époque. Il constitue une référence pour de nombreux écrivains suédois au cours des années 1890 et au début du XXe siècle. Heidenstam devient ainsi la figure de proue du courant fin-de-siècle en Suède. Son œuvre est traversée par des thématiques nationalistes et historiques.


Le 26 janvier 1888, l’éditeur Albert Bonniers reçoit la visite de Heidenstam, qui lui affirme que Topelius a lu plusieurs de ses poèmes, et qu’il en pense le plus grand bien. Heidenstam dit également connaître Strindberg. Il laisse un manuscrit, que Karl Otto Bonnier lit en compagnie de son épouse Lisen à son domicile : « Dès la première page, et jusqu’à la dernière, il ne faisait aucun doute que c’est à un poète de premier ordre que nous avions affaire. Cet après-midi fut l’un de ses moments qu’un éditeur n’oublie jamais, mais qui trop peu souvent le gratifie ! »

Le recueil Années de pèlerinage et de vagabondage (Vallfart och  vandringsår), publié en 1888, suscite un énorme intérêt. Il représente un véritable attentat contre le naturalisme, prévalent jusqu’alors. Plutôt que la misère sociale et la monotonie du travail industriel, Heidenstam évoque l’amour et l’appétit de jouissance. Les critiques ne tarissent pas d’éloges, Georg Nordensvan affirmant par exemple que « Heidenstam fait preuve avec ce premier recueil d’un art si remarquable, qu’il est d’ores et déjà assuré d’une place parmi les plus grands auteurs suédois. »

Von Heidenstam, carnet de 20 timbres, Suède.

Au printemps 1889, Heidenstam publie un roman, Endymion, qu’il décrit dans une lettre adressée à Strindberg comme « une tragédie sans coulisse ni rideau ». L’intrigue en est simple : un père et sa fille, originaires des États-Unis, voyagent au Moyen-Orient en compagnie d’un médecin, chacun des trois personnages incarnant un trait particulier : le père symbolise le réalisme, le docteur agit avec cynisme et juge l’Orient avec mépris, tandis que la fille fait preuve d’un esprit ouvert et romantique. Elle fait la rencontre d’un jeune homme, nationaliste et révolutionnaire, pour qui elle éprouve une attraction semblable à celle qu’elle ressent pour l’Orient tout entier. Pour Heidenstam, l’Orient est un lieu où on l’on vit au jour le jour, tandis que le futur appartient au réalisme occidental.

En 1889, Heidenstam publie un manifeste intitulé Renaissance (Renässans) dans lequel il affirme que le naturalisme (qu’il appelle « réalisme de cordonnier », skomakarrealism) a vécu. Pour l’écrivain, un auteur désireux d’innover doit s’affranchir des formes stylistiques surannées et n’a pas besoin de se répéter. En filigrane, Heidenstam se pose en porte-parole et leader d’un nouveau mouvement littéraire.

Pour Heidenstam, les années 1890 représentent une décennie de travail intense, consacrée tant à l’écriture de livres qu’à la rédaction d’articles dans les journaux. En juillet 1890, il écrit à son éditeur Karl Otto Bonnier, affirmant qu’étant pleinement occupé par l’écriture d’un nouveau livre, Hans Alienus, il a besoin d’une avance conséquente. Même si ses livres précédents ne se sont vendus qu’à quelques milliers d’exemplaires, Albert Bonniers consent à lui verser 5 000 couronnes. Écrit dans un mélange de poésie et de prose, Hans Alienus se refuse à toute classification dans un genre littéraire bien défini. De toute évidence, le livre est basé sur la propre vie de Heidenstam qui, menant un jour une vie paisible en Suisse avec son épouse, se voit propulsé le lendemain sur le devant de la scène littéraire et mondaine. Hans Alienus est un être à part, qui prend la route pour fuir un père trop rigide. Arrivé à Rome, il est chargé par le pape d’aller représenter le Saint-Siège au royaume souterrain du roi Sardanapale. Les siècles s’écoulent, et il devient empereur de Rome et seconde Dieu quand celui-ci est en congé. Mais le bonheur lui échappe : les biens matériels ne lui procurent aucune satisfaction, et l’épicurisme dont il se revendique se révèle vide de sens. Il retourne finalement au domicile familial, pour se réconcilier avec ce père qui l’a tant fait souffrir. La critique réserve un accueil plus que mitigé au livre, mais personne, en dehors de  l’académicien Carl David af Wirsén, ne veut affirmer qu’il est mauvais. Pour l’éditeur, ce n’est en tout cas pas une affaire glorieuse : le premier tirage de 2500 exemplaires mettra 18 ans à s’écouler.

Au printemps 1896, Heidenstam voyage sur les traces du roi Charles XII à Constantinople, Bendery, Poltava, Moscou et Saint-Pétersbourg, avant de s’attaquer à son nouveau projet, un livre en deux tomes consacré au monarque. À l’été 1896, il demande une avance de 16 000 couronnes à son éditeur Karl Otto Bonnier, qui qualifie ce montant de « fabuleux ». Le livre, intitulé Les Carolins (Karolinerna), est publié en 1897 et connait un grand succès, les différentes éditions se vendant à plus de 120 000 exemplaires. Heidenstam y décrit la campagne de Charles XII en Russie, la défaite à Poltava et l’exil à Constantinople. Il y décrit cette campagne au travers de ceux qui y ont participé, allant du roi jusqu’au simple soldat. En lieu et place du héros de légende créé par Esaias Tegnér, Heidenstam donne au roi Charles XII un visage humain. Le premier t. du livre est accueilli par des critiques essentiellement négatives, tandis que le deuxième reçoit un accueil plus positif. Avec les années, Les Carolins deviendront une lecture obligée pour les écoliers suédois. Avec ce livre, Heidenstam devient la figure de proue du mouvement fin-de-siècle en Suède.

Heidenstam enchaîne alors avec d’autres récits historiques. Sainte Brigitte, dont il a entendu conter les aventures dans son enfance à Olshammar, devient le personnage principal de son roman Le Pèlerinage de Sainte Brigitte (Heliga Birgittas pilgrimsfärd). Dans ce livre, il décrit la religieuse comme une femme sans scrupule qui trahit famille et amis pour atteindre ses buts. Heidenstam se reconnait sans doute dans cette description, car il accompagne l’exemplaire qu’il envoie à l’écrivain Axel Lundegård de l’annotation « portrait de l’auteur en bonne femme ». Lorsque le livre est publié en 1901, l’accueil est une fois de plus mitigé.

En novembre 1903, Heidenstam entame l’écriture d’un nouveau roman, Folke Filbyter. Dans cette biographie d’un personnage légendaire, fondateur d’une dynastie qui régna sur la Suède au XIIIe siècle et XIVe siècle, c’est encore sa propre vie que l’écrivain met en scène. Persuadé qu’il ne pourra jamais tomber amoureux, Folke Filbyter rencontre pourtant une princesse naine avec qui il se marie. Toujours d’humeur joyeuse, elle met la joie dans son foyer. Les années passent, et Folke devient un grand seigneur, ainsi que le père de trois enfants. Un jour, son petit-fils, dont il a la garde, est enlevé par un prêtre. Folke se lance à sa recherche, mais lorsqu’il parvient enfin à le retrouver des années plus tard, il a devant lui un adulte qui le traite avec mépris. Folke Filbyter meurt finalement, abandonné de tous, si ce n’est de ses serviteurs. En 1907, Heidenstam publie une suite, L’Héritage des Bjälbo (Bjälboarvet). Le livre se déroule au XIIIe siècle et décrit les conflits qui opposent Birger Jarl à ses fils Valdemar et Magnus. L’écrivain a en tête l’écriture d’un troisième roman, basé sur les événements du banquet de Nyköping, mais ce livre ne verra jamais le jour.

En 1906, la maison Bonnier commence la publication du roman de Selma Lagerlöf, Le Merveilleux Voyage de Nils Holgersson à travers la Suède. Ce livre, conçu à l’origine comme un manuel de géographie à l’usage des écoliers, est un grand succès de librairie. Fridtjuv Berg et Alfred Dalin, qui sont à l’origine du projet, souhaitent voir Bonnier publier un livre équivalent sur l’histoire de Suède. La tâche en incombe à Heidenstam, qui se lance dans la rédaction des Suédois et leurs chefs (Svenskarna och deras hövdingar) avec beaucoup de bonne volonté. Berg et Dalin lui interdisent toute velléité d’embellissement ou de dramatisation. À l’instar de Lagerlöf, Heidenstam estime qu’il est impossible d’intégrer l’ensemble du programme scolaire dans un texte littéraire. Gedin (2006) estime que « c’est un texte plat, d’où sont absents non seulement l’imagination, mais aussi la bonne humeur de Heidenstam, sa roublardise et son culot parfois déroutant ». Paru en 1908, ce livre sera le dernier roman de Heidenstam, et après Nouveaux poèmes (Nya dikter, 1915), sa carrière littéraire est de fait terminée.

Au début des années 1930, Heidenstam commence à montrer des signes de démence. Il se montre extrêmement méfiant, cède à de brusques accès de colère, et a des difficultés à trouver ses mots. Après son 75e anniversaire en 1934, son état se détériore encore : il souffre d’angoisse et d’hallucinations. Il a besoin d’assistance pour les tâches quotidiennes, ne peut plus écrire de lettres ou même dire l’heure qu’il est. Il décède à Övralid le 20 mai 1940 à 3 h 50.

Il est enterré à Övralid. C’est l’évêque Tor Andræ qui dirige les obsèques. Avant de sombrer dans la démence, Heidenstam a eu le temps de préparer ses obsèques. Il souhaite reposer sous un rocher situé près d’un bois au sud-ouest de la propriété. Mais son exécuteur testamentaire, l’archéologue Otto Frödin, décide d’un autre emplacement. Frödin fait également transférer à Övralid les cendres de la mère de Heidenstam, qui avait pourtant toujours souhaité être enterrée au cimetière du nord (Norra begravningsplatsen) de Stockholm. La première épouse de Heidenstam, Emilia Uggla, décédée en 1938, repose également à Övralid.

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Sources : Wikipédia, YouTube.

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