Svante August Arrhenius, chimiste.

Svante August Arrhenius (né le 19 février 1859 au château de Vik, près d’Uppsala et mort le 2 octobre 1927 à Stockholm) est un chimiste suédois, pionnier dans de nombreux domaines. Il reçoit le prix Nobel de chimie en 1903.

Il est notamment connu pour avoir formulé en 1889 la loi d’Arrhenius qui décrit la variation de la vitesse d’une réaction chimique en fonction de la température, et pour être le pionnier de l’étude de l’effet de l’augmentation du dioxyde de carbone dans l’atmosphère sur le climat et sur l’effet de serre.

Son fils Olof Vilhelm Arrhenius est également un chimiste réputé en Suède. Son petit-fils Gustaf Olof Svante Arrhenius a également fait carrière dans les sciences (océanographe, biogéochimiste, exobiologiste). Tous deux ont étudié et fait progresser des sujets étudiés ou défrichés par leur père et grand-père.


Arrhenius naît en Suède à Vik (aussi orthographié Wik ou Wijk) près d’Uppsala, de Gustav Svante Arrhenius et Carolina Thunberg. Son père, après avoir été géomètre à l’université d’Uppsala, y a obtenu une place de superviseur.

À l’âge de trois ans, le petit Arrhenius apprend à lire tout seul, et en regardant son père additionner des nombres dans son livre de compte, il devient rapidement un prodige en arithmétique, compétence qu’il a très vite pu accroître, disposant de masses de données pour étudier les lois et relations mathématiques.

À l’âge de huit ans, il entre dans l’école locale « de la cathédrale » et s’y distingue dans le domaine de la physique et des mathématiques. Il est en 1876 l’étudiant le mieux noté et le plus jeune de son niveau.

Il a été marié deux fois, durant deux ans (de 1894 à 1896) à Sofia Rudbeck (une de ses anciennes élèves), qui lui donna un fils, puis en 1905 à Maria Johansson (qui lui donna deux filles et un garçon).

À l’université d’Uppsala, il est insatisfait de son professeur principal en physique, et le seul professeur semblant capable de le superviser est le chimiste Per Thodor Cleve.

Après cinq ans d’études en physique, mathématiques et chimie à l’université d’Uppsala, il entre en 1881 à l’Institut de physique de l’Académie royale des sciences de Suède, à Stockholm, où il prépare une thèse, sous la supervision du physicien Erik Edlund. Son sujet d’étude sera la conductivité des électrolytes.

En 1883, il publie un mémoire de 150 pages intitulé Recherches sur la conductibilité galvanique des électrolytes qui annonce sa théorie de la dissociation, laquelle lui permet d’obtenir son diplôme de doctorat en 1884. Sa soutenance de doctorat n’impressionne pas du tout ses professeurs (dont Per Teodor Cleve) qui lui accordent son doctorat, mais avec la note la plus basse possible. Ce même travail lui vaudra plus tard le prix Nobel de chimie de 1903 « en reconnaissance des services extraordinaires qu’il a rendus à l’avancement de la chimie par sa théorie sur la dissociation électrolytique ».

Arrhenius a envoyé des copies de sa thèse à divers scientifiques européens qui œuvraient à de nouvelles approches de la chimie physique, comme Rudolf Clausius, Wilhelm Ostwald, et J. H. van ‘t Hoff. Ces derniers ont été beaucoup plus impressionnés que les professeurs d’Arrhenius et W. Ostwald est même venu à Uppsala rencontrer Arrhenius pour le persuader de se joindre à son équipe de recherche, invitation qu’Arrhenius a déclinée, préférant rester en Suède, probablement parce qu’il avait un poste à Uppsala, et aussi pour s’occuper de son père qui était gravement malade (celui-ci meurt en 1885).

En 1886, E. Edlund obtient de l’Académie royale des sciences de Suède qu’elle lui finance un voyage d’étude en Europe, ce qui lui permet de passer quatre ans dans les laboratoires d’Ostwald à Riga, de Kohlrausch à Wurtzbourg, de Boltzmann à Graz et de van ‘t Hoff à Amsterdam.

Arrhénius, carnet de 20 timbres, Suède.

Il refuse un poste dans l’Empire allemand pour rester en Suède où il rentrera pour travailler à l’Institut royal de technologie de Stockholm, comme professeur, puis comme recteur. En 1891, il est nommé maître de conférences à la Stockholms Högskola (aujourd’hui université de Stockholm), étant promu professeur de physique (avec beaucoup d’opposition de ses pairs) en 1895, et recteur en 1896.

Arrhenius devient ensuite professeur de chimie à l’université de Stockholm en 1895. Il est accepté à l’Académie royale des sciences de Suède en 1901. Son prix Nobel de chimie, remis en 1903, accroît la reconnaissance de ses pairs, et en 1905, il est nommé à la direction de l’« Institut Nobel de chimie physique », spécialement créé pour lui.

Son nom reste attaché à la loi d’Arrhenius qui rend compte de la variation de vitesse des réactions chimiques avec la température et qu’il a formulée en 1889 dans son article intitulé « On the velocity of the inversion of cane sugar by acids ».

Ses travaux de recherche portèrent sur la conductivité des solutions d’électrolytes. Ils lui permirent de rédiger Recherches sur la conductibilité galvanique des électrolytes qui préfigure sa théorie de la dissociation. Celle-ci postule que les composés chimiques en solution dans une solution électrolytique (conductrice de charges électriques) sont dissociés en ions, et ce même en l’absence de courant électrique traversant la solution.

Cinquante-six hypothèses sont présentées et discutées dans sa thèse de 1884. La plupart sont encore acceptées aujourd’hui, telles quelles ou avec des modifications mineures. Le plus important dans sa thèse est l’idée que ni les sels purs ni l’eau pure ne sont conducteurs, mais qu’une solution de sels l’est. L’explication d’Arrhenius est que lors de sa dissolution, le sel se dissocie en particules chargées (que Michael Faraday avait nommé « ions » quelques années avant). Faraday avait la conviction que les ions étaient produits par le processus d’électrolyse. Arrhenius a posé l’hypothèse que même en l’absence de courant électrique, les solutions salines contenaient des ions, et que les réactions chimiques en solution étaient le fait de réactions entre ions. Pour les électrolytes forts, on pense toujours que c’est le cas, mais cette théorie a été modifiée (par Peter Debye et Erich Hückel) pour prendre en compte le comportement des électrolytes faibles.

En 1884, comme développement de sa théorie sur les ions, Arrhenius propose aussi une définition des acides et des bases, estimant que les substances acides produisent des ions d’hydrogène en solution, et que les bases produisent des ions hydroxyde en solution.

En 1889, Arrhenius postule également que le degré de dissociation augmente avec la dilution de la solution, après avoir observé que les réactions chimiques gagnent en vitesse en fonction de la température de la solution, et ceci, de façon proportionnelle à la concentration des molécules activées. Il en tire une loi de variation de la constante de vitesse d’une réaction chimique en fonction de la température.

Sa théorie est d’abord mal reçue par la communauté scientifique, qui la considère comme fausse. Elle sera cependant peu à peu acceptée pour finalement former l’une des pierres angulaires de la chimie physique et de l’électrochimie modernes.

Voulant comprendre et expliquer le cycle des glaciations, Svante Arrhenius a élaboré une théorie qui relie l’augmentation du CO2 atmosphérique à une augmentation sensible des températures terrestres en raison d’un « effet de serre » dû à la vapeur d’eau et à l’acide carbonique (CO2 qui se dissout dans les gouttelettes formées lorsque la vapeur d’eau se condense). Il a été influencé dans ce travail par d’autres chercheurs, dont Joseph Fourier.

Dans un article intitulé « De l’influence de l’acide carbonique dans l’air sur la température au sol », publié en 1896, il estime qu’un doublement du taux de CO2 causerait un réchauffement de ~5 °C (soit un peu plus que les prévisions de 2 à 4,5 °C faites par le GIEC plus de cent ans plus tard, en 2007). Une réduction de moitié du CO2 atmosphérique diminuerait quant à elle la température moyenne de la surface du globe de 4 à 5 °C. Arrhenius s’attendait à ce que le taux de CO2 double, mais au rythme de son temps, c’est-à-dire en environ 3 000 ans d’après ses calculs. Au rythme actuel, cela prendra un siècle seulement selon les calculs du GIEC.

Les laborieux calculs d’Arrhenius se sont plus tard montrés erronés, mais s’appuyant sur la « loi de Stefan-Boltzmann », il a formulé une première loi sur l’effet de serre, dont la forme originale est : « Si la quantité d’acide carbonique augmente en progression géométrique, l’augmentation de la température suivra, presque avec une progression arithmétique. » (« If the quantity of carbonic acid increases in geometric progression, the augmentation of the temperature will increase nearly in arithmetic progression »), loi qui n’a pas été depuis invalidée, mais qui a été simplifiée dans son expression par G. Myhre et ses collègues en 1998 avec la formule suivante :

ΔF = α ln(C/C0)

En 1900, Knut Ångström, qui a publié le premier spectre moderne infrarouge du CO2 (avec deux bandes d’absorption), critique les valeurs élevées d’absorption calculées par Arrhenius pour le CO2. Arrhenius lui répond vivement en 1901, rejetant la critique. Deux ans après, il aborde brièvement le sujet dans un ouvrage technique (Lehrbuch der kosmischen Physik, 1903). Trois ans plus tard, il publie un long texte de vulgarisation, formulation cosmogonique présentant sa vision de l’apparition de la terre et de la vie sur terre « Världarnas utveckling » (1906) qui sera traduit l’année suivante en allemand sous le titre Das Werden der Welten, 1907), puis en anglais (Worlds in the Making, the Evolution of the Universe, New York, London, Harper, 1908). Dans ce texte, il suggère que les émissions humaines de CO2 devraient être suffisantes pour prémunir le monde d’une nouvelle ère glaciaire. Il y estime qu’une terre plus chaude serait nécessaire pour nourrir la population humaine qui augmente rapidement. Il présente très clairement un monde plus chaud comme un changement positif. À partir de ce moment, sa théorie sur l’effet de serre gagne de l’attention.

Néanmoins, jusqu’aux années 1960, la plupart des scientifiques vont considérer cet effet de serre comme ne pouvant plausiblement influencer les cycles glaciaires que Milutin Milankovitch a modélisés d’une manière très satisfaisante sur la base des changements d’orbite de la Terre. La théorie de Milankovitch s’est en effet avérée être puissamment prédictive à rebours, pour expliquer les glaciations qui ont touché la terre depuis plusieurs millions d’années. Ce forçage orbital est admis de nos jours comme premier facteur climatique, le CO2 étant néanmoins reconnu comme élément amplificateur (boucle de rétroaction positive).

Au printemps 1922, il déclare : « Nous avons consommé autant de charbon fossile en dix ans que l’homme en a brûlé durant tout le temps passé. […] Il devient nécessaire de trouver d’autres sources d’énergie, afin que la civilisation du monde ne s’effondre pas lorsque les combustibles fossiles seront sur le point d’être épuisés ».

Arrhenius fut un scientifique très éclectique. Très jeune, il s’est notamment intéressé aux facteurs qui contraignent ou favorisent la diversité des espèces.

Ces formules ont d’abord été très critiquées par Beumée et Reitz parce qu’apparemment trop simplificatrices, notamment parce qu’elles ne tiennent pas compte de la longueur ou de la nature de l’écotone, ou du facteur d’altitude ou d’autres facteurs liés aux milieux extrêmes supposés très impactants pour la diversité biologique ; mais testées sur des espèces végétales, elles se sont montrées prédictives – dans certaines limites – par exemple en Suède, Suisse et Finlande, y compris pour des associations en mosaïque. Plus récemment, elles se sont montrées prédictives du taux d’endémisme des îles malaisiennes (Java, Sulawesi, Sumatra, Bornéo, et Nouvelle-Guinée) ; plus ces îles ont une grande superficie, plus le taux d’endémisme y est élevé et plus les taxons (espèces et familles) y sont nombreux, à surface et conditions biogéographiques équivalentes. Dans ce cas, l’addition de données sur la pluviométrie dans les modèles n’a pas modifié cette relation9. Sachant qu’à surface cartographiée équivalente, une île – ou une aire donnée – à fort relief équivaut à une surface bioproductive réelle bien plus grande qu’une île ou zone qui serait plate, des calculs plus complexes peuvent être faits sur les écotones (fractales) et la surface développée de milieux par exemple sous-marins (un récif corallien, le plateau continental rocheux ou sableux), mais on admet aujourd’hui qu’il existe une relation entre surface réelle d’un milieu et diversité des espèces qui l’habitent.

Cette relation entre aire et diversité biologique prend une importance nouvelle depuis le xixe siècle, époque où la fragmentation écologique est devenue importante, croissant de manière exponentielle au XXe siècle en raison du développement des réseaux fortement maillés de villes et de transports, et avec l’utilisation massive de biocides (pesticides) en agriculture.

On ne parlait pas au XIXe siècle de biodiversité, mais les écologues parlent encore aujourd’hui de modèle d’Arrhenius, ou d’équation d’Arrhenius (qui a par exemple servi à faire un calcul estimant que pour être efficace, une réserve naturelle devrait en Nouvelle-Zélande couvrir une surface minimale de 10 km × 10 km.

Alors que ses théories commencent à être acceptées, Arrhenius, très éclectique, s’intéresse à d’autres champs de savoir. En physiologie, il constate que nombre de réactions observées au sein d’organismes vivants (in vivo) suivent les mêmes lois que dans les éprouvettes (in vitro).

En géophysique, il soutient en 1900 l’hypothèse de Ritter qui en 1878 estime que la Terre est constituée d’un noyau gazeux entouré d’une croûte dure (hypothèse reprise par Gunther en 1884 avant d’être contredite par les progrès de la sismologie).

L’immunochimie l’intéresse aussi, en 1904 il se rend aux États-Unis et prononce à l’université de Californie un cycle de conférences décrivant l’application des méthodes de chimie physique à l’étude des toxines et antitoxines, ensuite publiées en 1907 sous le titre Immunochemistry.

Il se passionne pour la géologie et le paléoclimat, et en particulier l’origine des périodes glaciaires.

Il se forge une cosmogonie, en étudiant notamment l’astronomie et l’astrophysique, le décompte temporel de l’évolution du système solaire, et s’intéresse aux collisions interstellaires. Il cherche à estimer la pression du rayonnement sur les comètes, la couronne solaire, les aurores boréales, et la lumière zodiacale.

Il soutient que la vie pourrait avoir été transportée de planète à planète via le transport dans l’espace interplanétaire de spores poussées par les radiations, théorie aujourd’hui connue sous le nom de panspermie, qui a connu d’autres développements avec l’exobiologie.

Membre du conseil d’administration de la Société suédoise d’hygiène raciale fondée en 1909, il est l’un des scientifiques suédois qui fut engagé activement dans le processus qui mènera à la création, en 1922, d’un Institut d’État pour la biologie raciale à Uppsala. Arrhenius a été membre du conseil d’administration de cet institut qui conduira à la stérilisation forcée de près de 63 000 personnes handicapées dans ce pays entre 1930 et 1970.

Il songe enfin à un langage universel et pour le créer propose une modification de la langue anglaise.

À la fin de sa vie, il écrit des manuels scolaires et des livres de vulgarisation, en tentant de mettre l’accent sur la nécessité de poursuivre les travaux sur les sujets auxquels il a travaillé.

En septembre 1927, il tombe malade (une attaque de catarrhe intestinal aigu) et meurt le 2 octobre. Il est enterré à Uppsala.

Voir aussi cette vidéo :

Sources : Wikipédia, YouTube.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.