Pierre Brossolette, journaliste, homme politique et héros de la résistance.

Né le 25 juin 1903, fils de Léon Brossolette, inspecteur de l’enseignement primaire à Paris et ardent défenseur de l’enseignement laïque au début du XXe siècle, et de Jeanne Vial; neveu de Francisque Vial, directeur de l’enseignement secondaire.

Il a suivi ses études à Janson de Sailly, khâgne au lycée Louis-le-Grand et il entre premier à l’École normale supérieure en 1922. Ses deux sœurs aînées, Suzanne et Marianne, sont toutes deux agrégées, fait rare à l’époque. Cacique général de sa promotion, il est reçu seulement deuxième à l’agrégation d’histoire, derrière Georges Bidault, suite à un petit scandale concernant le sujet tiré au sort. Il déclare avec fracas que le sujet -« Les abbayes carolingiennes sous Louis le Pieux » – ne justifie pas plus de sept minutes, quand on attend une heure de discours charpenté. Le jury reconnaît son erreur, reçoit l’élève et bannit le professeur auteur du sujet.

Membre de la Ligue des droits de l’homme (LDH), de la Ligue internationale contre l’antisémitisme (LICA), initié à la maçonnerie à la Grande Loge de France, il adhère à la Section française de l’Internationale ouvrière (SFIO) en 1929.

D’abord fervent défenseur des idéaux pacifistes et européens d’Aristide Briand, ses conceptions évoluent lorsqu’il prend conscience de la réalité de la menace nazie et de l’inévitabilité de la guerre. La Radio Stuttgart dans ses émissions vers la France le dénonçait déjà comme un ennemi du Reich.

Il se présente à la députation de l’Aube sous l’étiquette du Front populaire en 1936 sans succès, et rentre au cabinet du Ministère des Colonies.

Journaliste au sein de plusieurs journaux — L’Europe nouvelle, Le Quotidien, Le Progrès civique, Les Primaires, Notre Temps, Excelsior, Marianne et Terre Libre — ainsi que celui de la SFIO, Le Populaire (où il est rédacteur de politique étrangère), il travaille également pour Radio-PTT dont il est licencié en janvier 1939 lorsqu’il s’oppose dans une émission aux accords de Munich.

Au début de la Seconde Guerre mondiale, il rejoint l’armée le 23 août 1939 au 5e Régiment d’Infanterie Navarre, 21e Bataillon, avec le grade de lieutenant, est promu capitaine avant la défaite de la France et a été décoré avec une première Croix de Guerre en 1940 en raison de son attitude au cours de la retraite de son unité, en ramenant tous ses hommes avec leurs armes à Limoges.

ostile au régime de Vichy, il rejoint le Groupe du musée de l’Homme présenté à Jean Cassou par Agnès Humbert, écrit le dernier numéro du journal Résistance et échappe de peu à son démantèlement. Puis, il participe à la formation des groupes de résistance Libération-Nord et Organisation Civile et Militaire (OCM) dans la zone occupée et devient, après sa rencontre avec le Colonel Rémy, chef de la section presse et propagande de la Confrérie Notre-Dame (CND).

Pierre Brossolette, carte maximum, Paris, 18/05/1957.

Quand le régime de Vichy lui interdit d’enseigner, Brossolette et son épouse rachètent une librairie russe à Paris, au 89 rue de la Pompe, qui sert de lieu de rencontre et de « boîte aux lettres » pour les résistants grâce notamment à la bibliothèque tournante disponible dans son sous-sol.

A la suite de deux perquisitions successives effectuées par les autorités françaises et allemandes à son domicile en mai 1942, il est parachuté en France en « blind », sans entraînement, sans comité d’accueil, sans pleine lune. Il vend la librairie et il fait franchir à sa famille, cachés dans une charrette à foin, la ligne de démarcation à Libourne en juillet 1942 et les fait embarquer aux calanques de Cassis vers Gibraltar sur la felouque « polonaise » Seawolf, puis vers Greenock (Glasgow) en convoi à bord du S.S. Llanstephan Castle le 29 août 1942. Il continue la résistance seul en France tandis que sa femme assure la liaison entre le Commissariat à l’Intérieur de la France libre et la BBC.

En avril 1942, Brossolette entreprend un voyage à Londres en tant que représentant de la Résistance pour rencontrer Charles de Gaulle. Il propose au général de Gaulle de repartir en France pour y rallier à la France Libre d’éminentes personnalités politiques parmi lesquelles Louis Vallon, André Philip et Charles Vallin. Il travaille dès lors, promu commandant, pour le B.C.R.A. (Bureau central de renseignements et d’action, les services secrets de la France Libre), en liaison avec la section RF du SOE (Special Operations Executive) britannique. Le 29 septembre 1942, il s’engage officiellement dans les « Forces Françaises Libres ».

Le 1er octobre 1942, prend la tête de la section opératoire, service chargé de faire le lien entre les résistances extérieure et intérieure.

Il est parachuté à trois reprises en France :

• la première fois pour organiser le mise en sécurité de sa famille menacée par les perquisitions et surtout pour mener à bien l’exfiltration de Charles Vallin, haut cadre du PSF, qui devrait à ses yeux permettre de jouer un coup dur au régime de Vichy.

Après avoir échappé plusieurs fois à des arrestations, Brossolette veut rentrer à Londres pour présenter le nouveau chef du CNR, Émile Bollaert, au Général de Gaulle. Plusieurs tentatives d’exfiltration par Lysander échouent. Brossolette décide de rentrer par bateau. Le 3 février 1944, partant de l’Île-Tudy, la pinasse le Jouet des Flots qui doit les conduire à une frégate britannique au large de l’île de Sein fait naufrage à cause du mauvais temps près de la pointe du Raz. Les deux chefs de la Résistance ainsi qu’une trentaine d’hommes, marins et aviateurs alliés échouent sur la côte, où ils sont accueillis par la résistance locale. Lors d’un barrage de routine, alors qu’ils arrivent à Audierne dans une voiture à gazogène, ils sont dénoncés par une collaboratrice, contrôlés par un poste volant de la Wehrmacht et emmenés en prison à Rennes, siège de la Kommandantur locale.

Plusieurs semaines passent sans qu’ils soient reconnus, une évasion est envisagée par Yeo-Thomas parachuté en urgence pour libérer son grand camarade, mais il est finalement identifié suite à une maladresse de la Délégation générale à Paris avec l’envoi d’un rapport semi-codé vers Londres intercepté à la frontière espagnole. Ernst Misselwitz, Hauptscharführer du Sicherheitsdienst (SiPo-SD Paris, dont le chef était Ernst Kalternbrunner du RSHA – Office central de la sécurité du Reich), se rend en personne pour identifier Brossolette sur place et le fait transférer, le 19 mars, au quartier général du SD à Paris, 84 avenue Foch.

Pour le faire parler, Pierre Brossolette est torturé pendant deux jours et demi. Le 22 mars, profitant d’un moment d’inattention du gardien, il se serait levé de sa chaise, menotté dans le dos, aurait ouvert la fenêtre de la chambre de bonne dans laquelle il était enfermé, et serait tombé d’abord sur le balcon du 4e étage et ensuite devant l’entrée de l’immeuble côté avenue. Gravement blessé, il succombe à ses blessures vers 22 heures à l’hôpital de la Salpêtrière, sans avoir parlé.

Source : Pierrebrossolette.com