Philippe IV le bel, roi de France.

Philippe IV, dit « le Bel » et « le Roi de fer » (né à Fontainebleau en avril/juin 1268 – mort à Fontainebleau le 29 novembre 1314), fils de Philippe III le Hardi et de sa première épouse Isabelle d’Aragon, est roi de France de 1285 à 1314, onzième roi de la dynastie des Capétiens directs.

Devenu roi à l’âge de dix-sept ans, à la mort de son père en octobre 1285, Philippe le Bel est considéré comme un roi important par les historiens.

Sous son règne, le royaume de France atteignit l’apogée de sa puissance médiévale. Avec entre seize et vingt millions d’habitants, c’était l’État le plus peuplé de la Chrétienté, il connaît une grande prospérité économique, le pouvoir royal accomplit de nombreux progrès, si bien qu’on voit dans Philippe IV, entouré de ses « légistes », le premier souverain « moderne » d’un État puissant et centralisé.

Philippe IV eut des difficultés à reprendre la maîtrise des finances de son royaume et à mettre fin aux mutations monétaires. Pour cela, il a cru bon d’abattre l’ordre du Temple qui était devenu une puissance financière internationale, d’expulser les Juifs, de procéder à une dévaluation en rétablissant une monnaie d’or qui restera ferme pendant plus d’un siècle. À la fin du règne, les foires champenoises sont concurrencées par le commerce maritime direct de l’Europe du Nord avec l’Italie.

Plusieurs affaires marquent le règne de Philippe IV. Le procès de l’évêque de Troyes, Guichard, accusé d’avoir tué la reine par sorcellerie, le procès de l’évêque de Pamiers, Bernard Saisset, qui ne fit qu’aggraver les démêlés du roi avec le Saint-Siège, l’affaire de la tour de Nesle (l’emprisonnement des brus du roi et l’exécution de leurs amants), mais surtout le célèbre procès des Templiers.

Philippe le Bel est souvent entrevu comme un roi qui n’est plus celui du Moyen Âge « classique ». Bien qu’il ait été reconnu comme un souverain pieux et que son gouvernement ait continué l’évolution vers la centralisation de l’État amorcée un siècle plus tôt, bien qu’il ait eu une vénération spéciale pour son grand-père Louis IX dont il obtint la canonisation en 1297, Philippe IV apparaît comme un roi symbole d’une rupture avec le passé, particulièrement sur les liens entretenus entre les rois de France et les papes. Ses contemporains déplorèrent les détériorations survenues depuis « le temps de monseigneur Saint-Louis », considéré comme le bon temps. On pressentit ainsi un roi d’un nouveau type, annonciateur d’une autre époque.

Philippe IV le bel, carte maximum, Paris, 16/11/1968.

Sous le règne de Philippe IV, les traditions féodales sont abandonnées pour mettre en place une administration moderne. Mais la centralisation monarchique mécontente les grands seigneurs et les nouveaux impôts dressent les bourgeois contre le pouvoir royal.

À l’aide de juristes, notamment de son fidèle collaborateur Guillaume de Nogaret, Philippe IV transforme un État encore féodal en une monarchie moderne où la volonté du roi s’impose à tous (où par exemple la justice royale prévaut), et un impôt national est prélevé sur tout le royaume de France.

Son règne est particulièrement agité sur le plan monétaire. Le roi et ses conseillers multiplient les émissions de nouvelles monnaies. Aux dévaluations succèdent les réévaluations, qui donnent un sentiment d’incohérence de la politique royale. Ces mutations monétaires aboutissent à un mécontentement général dans le Royaume. Entre 1306 et sa mort, le roi fait face à des émeutes populaires mais aussi à des ligues nobiliaires qui exigent, entre autres, le retour à la bonne monnaie.

Dans la pratique, le roi ne contrôle pas tous les paramètres de la politique monétaire. Les assemblées de prélats et de barons, convoquées périodiquement au début du XIVe siècle pour donner leur avis sur la question monétaire, réclament toutes le retour à la bonne monnaie de Saint Louis, quelque peu idéalisée. Il est vrai que la politique monétaire de Philippe le Bel est très instable. Le système monétaire a été bouleversé de fond en comble. Cette situation, qui n’avait pas de précédent historique, contraste fortement avec les pratiques monétaires de ses prédécesseurs, Saint Louis et Philippe le Hardi, dont les monnayages sont alors considérés comme des modèles de stabilité. Pour l’opinion publique, le résultat des mutations est facile à comprendre : bien que le roi agisse selon son bon droit, toute transformation de la monnaie est assimilée à un abus déloyal, voire à une falsification pure et simple.

Par ailleurs, le règne de Philippe le Bel se traduit par une période de changements majeurs. L’innovation la plus remarquable de cette période est sans doute l’apparition durable d’émissions de monnaies d’or. Le retour à un vrai bimétallisme s’est accompagné de sévères crises monétaires, attisées par la spéculation internationale, la concurrence des monnaies seigneuriales et les incohérences du système monétaire. La carence en métaux précieux provoque une forte dévaluation de la monnaie de compte, qui se traduit dans la pratique par de nombreuses émissions de nouvelles monnaies. L’inflation, provoquée par ces mutations, mécontente la noblesse, les bourgeois des bonnes villes et l’Église qui voient leurs revenus diminuer considérablement. Des réévaluations des pièces d’argent et de billon sont tentées mais leur résultat est plus que mitigé : des émeutes populaires éclatent, et surtout, l’argent finit par ne plus être monnayé, car son prix d’achat est fixé trop bas. Le roi, après avoir tenté en vain de stabiliser sa monnaie, se trouve dans une position politique difficile. À la fin de son règne, il doit affronter la fronde d’une partie de ses sujets.

Pour assainir les finances et acheter le Quercy aux Anglais contre une rente de 3 000 livres, il s’attaque à ceux qui ont de l’argent, y compris aux religieux de l’Église catholique, aux Lombards, aux Juifs (« Don de joyeux avènement » en 1285) et aux Templiers.

Philippe IV le bel, épreuve d’artiste.

Pour pallier ses difficultés financières, il établit des impôts réguliers, taxant lourdement les Juifs et les Lombards, confisquant parfois leurs biens, et pratique les dévaluations monétaires. Il conserve les richesses monétaires de l’ordre des Templiers après l’avoir dissout. Il centralise également le pouvoir royal. La dure crise économique que subit le royaume de France sous son règne provoque de vastes mouvements de révoltes de la part du peuple mais aussi des nobles et de l’aristocratie. Pour contrer ces graves difficultés économiques, il altère le cours de la monnaie.

Philippe IV s’entoure de légistes, des conseillers compétents qui jouent un rôle décisif dans sa politique. Les légistes appartiennent pour la plupart, au début, à la petite noblesse puis à la bourgeoisie ou à la noblesse de robe. Les légistes, apparus sous Philippe Auguste, sont formés au droit romain pour faire évoluer une monarchie féodale, où les pouvoirs du roi sont limités par ses vassaux, vers une monarchie absolue. Il termine cette centralisation commencée par son grand-père, Louis IX, mais ce système sera remis en cause par les Valois directs. Outre les légistes, le roi est entouré de ses héritiers et de sa famille.

L’administration du Royaume, limitée à la cour du roi chez ses prédécesseurs, se spécialise en trois sections sous le règne de Philippe le Bel :

  • Le Grand Conseil qui examine les dossiers politiques ;
  • Le Parlement, responsable de la justice ;
  • La Chambre des comptes, spécialisée dans les affaires financières, elle établit des taxes pour les exportations, soumet les terres de l’Église à une redevance (les décimes), introduit une taxe pour toute vente, et réalise des manipulations monétaires en changeant le poids ou le taux des métaux précieux des pièces sans en changer la valeur, ce qui fait donner à Philippe IV le surnom de « faux-monnayeur » par ses détracteurs.

Ces transformations rendirent Philippe le Bel très impopulaire dans tous les niveaux de la société.

Philippe IV a aussi créé l’embryon des états généraux, en ordonnant la tenue d’assemblées formées de représentants des trois ordres : le clergé, la noblesse et la bourgeoisie. Ces assemblées, très peu réunies, seulement lors de crises, n’avaient pas beaucoup de pouvoir, leur rôle n’étant que d’approuver les propositions du roi et de ses conseillers.

Sous le règne de Philippe IV, la France abandonna ses traditions féodales pour devenir un État avec une administration moderne. Mais la centralisation monarchique mécontenta les grands seigneurs, les nouveaux impôts dressèrent les bourgeois contre le pouvoir, et les paysans, accablés de taxes diverses, se révoltèrent.

Le 4 novembre 1314, Philippe le Bel rend visite à son oncle le comte Robert de Clermont et c’est lors d’une partie de chasse en forêt de Pont-Sainte-Maxence (forêt d’Halatte) qu’il fait une chute de cheval. Blessé à la jambe, il « éprouve un saisissement subit, avec impossibilité de prononcer une parole » (un probable accident cérébro-vasculaire, qui frappe également son frère Charles de Valois plus tard, est évoqué sans que l’on puisse dire si cette atteinte cérébrale est antérieure, contemporaine ou consécutive à la chute). Les chroniques du temps se partagent entre l’accident ou la maladie inexplicable. Transporté en bateau à Poissy, puis porté en litière à Fontainebleau, il meurt quelques semaines plus tard, à 46 ans, le 29 novembre 1314, après 29 années de règne. Il est le premier roi de France qui naît et meurt au château de Fontainebleau.

Son cœur et ses entrailles furent déposés séparément à l’église du prieuré de Poissy, le cœur dans une urne retrouvée le 28 juillet 1687 lors de travaux dans un des caveaux. Philippe reconnaissait ainsi l’importance du prieuré de cette ville, où il était déjà venu plusieurs fois. Il y avait par ailleurs fait bâtir, près de la collégiale, un couvent ouvert en 1304 pour honorer son grand-père Saint-Louis, qui y était né. Philippe offrit par la suite aux religieuses une relique (un bout de la mâchoire du saint), rattachant ainsi ce lieu à sa mémoire, et y fit enterrer son jeune fils Robert. L’endroit où est inhumé le cœur est surmonté d’un gisant réalisé en 1327 et détruit sous la Révolution : il représentait Philippe sur une lame de marbre noir. Couronné, la statue tenait le sceptre dans sa main droite et la main de justice dans sa main gauche, contrairement au gisant de Saint-Denis, où la main de justice n’apparaissait pas. Pour l’historien Alexandre Bande, cela sert à distinguer les deux sépultures : « [la main de justice] était alors assimilée à l’équité, forme la plus élevée de justice, et à la charité, une des valeurs essentielles du cœur du roi : les contemporains pouvaient ainsi déchiffrer aisément ces sépultures et leurs différences ».

Son corps sera inhumé dans la basilique de Saint-Denis. Sa sépulture, comme celles des autres princes et dignitaires reposant en ce lieu, sera profanée par les révolutionnaires en octobre 1793. Il s’agissait d’un gisant en marbre blanc, commandé par son fils Charles IV, également en 1327.

Il fut le premier roi de France à demander par testament une tripartition de son corps (dilaceratio corporis, « division du corps » en cœur, entrailles et ossements) avec des sépultures multiples. Cette pratique devint à partir du XIIIe siècle un privilège de la dynastie capétienne dans le royaume de France (majoritairement les rois, parfois les reines ou les proches, et ce malgré l’interdiction par une décrétale en 1299 du pape Boniface VIII qui voyait cette pratique se répandre chez certains membres de la Curie romaine qui permettait la multiplication des cérémonies (funérailles du corps, la plus importante, puis funérailles du cœur et funérailles des entrailles) et des lieux (avec un tombeau de corps, un tombeau de cœur et un tombeau d’entraille, comme les gisants royaux à entrailles de l’abbaye de Maubuisson) où honorer le roi défunt.

Les Grandes Chroniques de France signalent que Pierre de Latilly, évêque de Châlons, fut emprisonné un moment en 1315, soupçonné d’avoir empoisonné le roi défunt.

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Sources : Wikipédia, YouTube.