Pégase, le cheval ailé.

Pégase (en grec ancien Πήγασος / Pḗgasos, en latin Pegasus) est un cheval ailé divin, l’une des créatures fantastiques les plus célèbres de la mythologie grecque. Généralement blanc, ayant pour père Poséidon, Pégase naît avec son frère Chrysaor du sang de la Gorgone Méduse, lorsqu’elle est décapitée par le héros Persée. D’après les poètes gréco-romains, il monte au ciel après sa naissance et se met au service de Zeus, qui le charge d’apporter les éclairs et le tonnerre sur l’Olympe.

Ami des Muses, Pégase crée la source Hippocrène qu’il fait jaillir d’un coup de sabot. Capturé par Bellérophon près de la fontaine de Pirène, grâce à l’aide de la déesse Athéna et de Poséidon, Pégase permet à ce héros grec de le monter afin de vaincre la Chimère, et réalise avec son cavalier beaucoup d’autres exploits. Bellérophon tombe victime de son orgueil et chute en tentant d’atteindre le mont Olympe sur le dos du cheval ailé. Pégase  retrouve Zeus, qui finit par le transformer en constellation et le placer dans le ciel.

Peut-être issu d’un ancien dieu des orages de la mythologie hittite portant l’épithète de Pihassassa, Pégase voit une partie de son mythe passer des peuples louvitophones aux anciens Grecs. D’autres théories évoquent l’observation des forces naturelles, de l’eau, de la foudre ou des oiseaux, ou encore la domestication du cheval. Le mythe de Pégase connait une large diffusion dans le monde antique ; repris par les Romains, il est  partiellement christianisé et fait l’objet de nombreux commentaires, de théories et de reconstitutions depuis le Moyen Âge. Des hypothèses sont proposées quant à son lien avec les Muses, les dieux Athéna, Poséidon, Zeus et Apollon, ou encore le héros Persée.

La vaste symbolique de Pégase suit les époques et les courants de pensée. Symbole de sagesse et surtout de renommée du Moyen Âge aux Temps modernes, il devient celui de la poésie et le créateur des sources dans lesquelles les poètes viennent puiser l’inspiration, particulièrement au xixe siècle où de nombreux poèmes l’exaltent. Pégase est le sujet d’une iconographie très riche à toutes les époques, des poteries grecques antiques aux peintures et sculptures de la Renaissance, jusqu’aux dessins modernes. Personnification de l’eau, mythe solaire, monture chamanique ou alchimique, son lien avec l’imagination humaine est mis en valeur dans les travaux des psychanalystes continuateurs de Carl Gustav Jung. Une profonde symbolique ésotérique en relation avec l’énergie spirituelle qui permet d’accéder au domaine des dieux, le mont Olympe, lui est attachée.

Aux XXe et XXIe siècles, il fait son apparition au cinéma, dans les littératures de l’imaginaire telles que la fantasy, dans les jeux vidéo et les jeux de rôle, où le nom de « pégase » est souvent devenu un nom commun qui désigne tous les chevaux ailés du bestiaire fantastique.


Plusieurs auteurs et chercheurs se sont penchés sur l’origine du mythe de Pégase, divers courants de pensée s’affrontent. En 1955, Édouard Will penchait pour une origine purement européenne. La théorie la plus largement reconnue par les historiens au début du XXIe siècle laisse à penser qu’il est d’origine asiatique.

Le mythe de Pégase est vraisemblablement issu des dieux lyciens et assyriens. Comme le souligne l’historien du cheval Marc-André Wagner, les premières représentations de chevaux ailés datent du XIXe siècle av. J.-C., chez les proto-hittites. Il est possible que le mythe se soit répandu chez les Assyriens ensuite, puis ait gagné l’Asie mineure et la Grèce. Les animaux porteurs d’éclairs sont d’origine orientale, le cheval se substituant au taureau dans ce rôle. En se basant sur les travaux des philologues et des hittitologues, cette théorie laisse à penser que Pégase est issu d’une ancienne divinité de l’orage connue des peuples louvitophones.

Cette divinité de l’orage a pour épithète Piḫaššaš(š)i- (« éclair »), et c’est avant tout sur la similitude phonétique entre ce nom et le Pegasos grec qu’il a été proposé que le second dérive du premier, proposition qui est  généralement acceptée. Pour le reste il n’y a pas d’élément spécifique reliant ce dieu à un cheval ailé, le fait que des courses de chevaux aient lieu lors de la fête qui lui est consacrée et que le char du dieu soit tiré par des chevaux ne constituant pas de véritables parallèles.

Ce nom louvite aurait évolué vers le lycien et le grec ancien, la plupart des éléments originels se seraient perdus, le mythe grec de Pégase devenant « l’habillage d’une divinité indigène » liée aux orages. Les historiens supposent l’existence d’un culte à cette ancienne divinité grâce à une hypostase en louvite. Une grande partie du mythe de Pégase et de Bellérophon évoque des aventures en Lycie (Asie Mineure), illustrant les liens particuliers de cette région avec la cité de Corinthe, dont Pégase était l’un des emblèmes.

D’autres théories voient dans Pégase un être totalement imaginaire. Sa figure est peut-être issu de l’observation des forces naturelles (orages, cours d’eau rappelant la course du cheval, etc.), ou de celle des oiseaux dont les ailes seraient devenues une métaphore de rapidité, et auraient donné naissance à la figure du cheval ailé dans plusieurs régions du monde.

Si l’existence biologique de Pégase est très hautement improbable, une question soulevée par ce mythe est celle de la construction de la figure du cheval ailé. Pégase est, tout comme le sphinx, le centaure ou le griffon, composé d’éléments qui existent réellement, à savoir un cheval et les ailes d’un oiseau. Le processus d’invention combine des éléments existants, par l’imagination. Bien que Pégase n’existe pas dans le monde physique, il possède une forme de réalité dans le domaine du rêve, du surnaturel et de la mythologie : la réalité physique est constitutive de la réalité interne. Chaque personne qui imagine Pégase crée « son » Pégase, en lui attribuant une certaine couleur, une certaine manière de voler, ou d’autres particularités en fonction des éléments qu’elle connaît, qu’elle a lus ou qu’elle a vus.

D’anciennes théories associent Pégase au combat naval, ou voient en lui un simple navire. Plutarque livre dans ses Œuvres morales une version du mythe dépouillée de tout aspect fantastique : Bellérophon est un prince de Lycie, la Chimère n’est pas un monstre mais un capitaine pirate nommé Chimarros, qui cause de nombreux dommages aux Lyciens. Son bateau est orné d’un lion à la proue et d’un dragon à la poupe. Bellérophon le prend en chasse avec Pégase, et le tue. Le théologien Jacques-Paul Migne affirme en 1855 que Méduse est l’un des cinq navires de la flotte de Phorcis, prince phénicien et roi d’Ithaque. La tête de Méduse représenterait le commandant du vaisseau tué, Chrysaor et Pégase des personnes libérées du vaisseau.

La figure du cheval ailé est universellement présente en Eurasie. Les  chevaux ailés de Tarquinia chez les Étrusques, Chollima en Corée, Ponkhiraj au Bangladesh, Tarkshya en Inde, Tianma en Chine ou encore Tulpar chez les Tatars attestent de la popularité de cette créature. Le mythe de Pégase partage des traits communs avec d’autres histoires, sans que l’on puisse toujours savoir s’il y a inspirations ou influences communes. La mythologie comparée permet de mettre en relief ces points communs parmi les mythes et traditions des indo-européens.

L’idée d’une origine commune du mythe de Pégase et des traditions indiennes connait une grande popularité au XIXe siècle. Alfred  Maury et Charles-François Dupuis le rapprochent de la création des sources de l’Ashvamedha (sacrifice védique du cheval), et d’une tradition où un cheval fait jaillir de son sabot la boisson inspirée qui ouvre les yeux de l’esprit et procure la vue des cieux. La dernière incarnation de Vishnou, le cheval blanc Kalkî, est vue comme un cheval ailé qui détruira le monde d’un coup de sabot. Le héros Vêdu possède un magnifique cheval blanc tueur de serpents, qui incarnerait le soleil comme Pégase. La naissance de Pégase et Chrysaor se rapprocherait ainsi des croyances védiques personnifiant le principe de végétation né des eaux, la création des Ashvins par Vivasvat et Saranya est elle aussi évoquée en parallèle.

L’idée générale veut que ces chevaux indiens et grecs évoquent un dieu végétal primordial sorti de l’eau, origine de toute vie. Elle est remise en cause par la philosophe croate Marina Milićević-Bradač. Le thème du cheval franchissant l’eau avec son cavalier pour voyager sur de vastes distances se retrouve dans la mythologie celtique, dans le Rig-Véda, et dans des régions aussi variées que l’Irlande, la Grèce, l’Europe du Nord, la Perse et l’Inde. Ce thème se retrouve largement dans la monture chamanique du dieu suprême finno-ougrien, un cerf blanc ailé qui permet à son cavalier et maître de parcourir le monde à toute vitesse. Ces coursiers fabuleux ont souvent une particularité morphologique, telle que des ailes, un nombre anormal de membres, ou plusieurs têtes. Les proto-Indo-Européens sont restés en contact étroit durant la préhistoire, ce qui laisse entrevoir un mythe commun d’inspiration chamanique avant la dispersion, ou du moins, une influence commune : celle d’un cheval psychopompe passeur de frontières (symbolisée par l’eau) et voyageant entre les mondes.

Source : Wikipédia.

 

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