Opération Chariot, le débarquement britannique à Saint-Nazaire, 1942.

L’opération Chariot fut une attaque britannique pendant la Seconde Guerre mondiale sur le port de Saint-Nazaire. Elle fut menée par les Combined Operations de Lord Mountbatten, afin de rendre inutilisables certains équipements du port et en particulier la forme Joubert, faisant de Saint-Nazaire le seul port de France à pouvoir accueillir le Tirpitz, plus gros cuirassé de la Marine allemande encore en service à ce moment-là.

Depuis 1939, la bataille de l’Atlantique mobilise de nombreuses unités navales dans l’Atlantique Nord.

En 1941 le cuirassé Bismarck lors de sa première sortie avait semé la terreur, coulant le HMS Hood, les Alliés étaient parvenus à couler le cuirassé allemand avant qu’il ne rejoigne le port de Brest mais au prix d’une forte mobilisation des forces maritimes.

Le sister-ship du Bismarck, le cuirassé allemand Tirpitz, est stationné en Norvège, au Faettenfjord. Les Alliés craignent qu’il ne soit envoyé dans l’Atlantique, et ne contribue ainsi à réduire les lignes d’approvisionnement britanniques.

Dans cette situation, le port de Saint-Nazaire revêt une importance toute particulière. En effet, la forme Joubert est le seul bassin (sur toute la façade Atlantique) dans lequel le Tirpitz peut venir réparer. La doctrine maritime de l’époque voulant qu’on n’engage pas un navire sans pouvoir effectuer des réparations à proximité, la destruction de la forme Joubert protégerait l’approvisionnement anglais du Tirpitz.

Ainsi, Winston Churchill imagine qu’en neutralisant la forme Joubert, la Kriegsmarine ne se risquera pas à envoyer le Tirpitz en Atlantique.

Début 1942, il décide donc de confier une mission aux commandos britanniques des Opérations combinées de Lord Mountbatten, avec pour objectif principal la neutralisation de la forme Joubert.

Le réseau de résistance Notre-Dame, instigué par Gilbert Renault, alias Colonel Rémy, qui dispose d’importants contacts sur la côte Atlantique, notamment au sein même des forces armées françaises sous contrôle allemand, pourvoit au renseignement des forces britanniques engagées.

Monument de Saint-Nazaire, carte maximum du 17/01/1948.

Le plan des Combined Operations repose sur l’effet de surprise. Le port de Saint-Nazaire est en effet l’endroit de l’ouest de la France le mieux fortifié par les Allemands après Brest. Une flottille de vedettes à faible tirant d’eau doit franchir de nuit et à vive allure l’estuaire de la Loire pendant que les défenses allemandes seront distraites par un raid aérien mené par la Royal Air Force. Un bateau chargé d’explosif sera amené jusqu’à l’écluse-caisson de la forme Joubert et des équipes de commandos débarqueront de ce navire ainsi que des vedettes pour attaquer et détruire 24 cibles différentes. Les forces seront ensuite évacuées par la mer à partir du vieux môle à l’extrémité du port, et quelques heures plus tard, le vieux destroyer amené contre l’écluse explosera. Les forces initiales devaient comprendre un destroyer comme navire-explosif et 8 vedettes rapides. Finalement, la flotte comprit un destroyer, 16 vedettes, 1 canonnière et une vedette lance-torpilles. Cette flotte est escortée par deux destroyers, le HMS Tynedale et le HMS Atherstone, jusqu’au large de Saint-Nazaire, mais ces deux navires ne participent pas à l’attaque.

Le destroyer était le HMS Campbeltown, un navire, anciennement l’USS Buchanan de l’US Navy, donné aux Britanniques au début de la guerre dans le cadre de l’accord d’utilisation des bases britanniques par les Américains. On lui apporta quelques modifications pour qu’il ressemble à un destroyer allemand de la classe Möwe et on lui enleva ses principaux canons et d’autres équipements superflus pour minimiser son tirant d’eau. Par contre, un blindage supplémentaire est installé afin d’en protéger la passerelle. L’armement fut réduit à un simple QF 12 pounder (canon de 76 mm) et 8 canons Oerlikon de 20 mm. L’explosif était placé juste derrière la position du canon, se composant de 24 grenades sous-marines de type mark VII placées dans des réservoirs d’acier et de béton. Le bateau devait enfoncer le caisson et puis être sabordé afin d’empêcher son déplacement avant qu’il n’explose. Le Campbeltown était commandé par le Lieutenant-commander S. H. Beattie (en) et son équipage, réduit à 75 hommes.

Courrier de la poche de l’Atlantique, 28/02/1945.

La nuit même de l’opération, les services de propagande allemands font parvenir aux journaux français des informations contrôlées et modifiées dans le but de contenir l’étendue de la défaite. Il s’agit en effet du second lourd échec défensif qu’ont à subir les troupes côtières, après le retentissant raid de Bruneval, qui porte, dès 1942, un coup dur à la réputation du mur de l’Atlantique, présumé infranchissable. La presse écrite et radiophonique fait donc état, en premier lieu, d’un débarquement allié repoussé par les forces allemandes, et déclare que tous les éléments ennemis débarqués ont pu être éliminés.

Le lendemain, toutefois, la presse revient sur ses déclarations et affirme cette fois que l’élimination des troupes britanniques est toujours en cours. On dénote ainsi la précipitation des services de propagande, qui découle directement de l’effet de surprise de cette opération et du coup qui est ainsi porté au moral de l’occupant. Le Colonel Rémy affirmera d’ailleurs que la réussite de l’opération Chariot aura, en plus de son importance stratégique, permis un certain rehaussement du moral des Français, qui verront là le premier signe du déclin allemand2.

Le succès de l’opération Chariot est d’ailleurs étroitement lié à l’activité importante de l’organisation clandestine qu’a installée, sous le commandement direct du BCRA, le résistant Gilbert Renault, alias Colonel Rémy, dans tout l’ouest de la France.

La Confrérie Notre-Dame, créée en 1940 sous l’impulsion du Colonel Passy, s’est en effet majoritairement développée sur les côtes Atlantiques, recueillant de nombreuses informations militaires et civiles à destination des Britanniques. Avec le raid de Bruneval, l’opération Chariot est l’un des exemples les plus concrets de l’efficacité de cette organisation, qui communiquait à Londres, par ondes radiophoniques, divers rapports et plans permettant une reconnaissance minutieuse du terrain et des forces en présence. Aujourd’hui, cette opération est encore considérée comme la plus audacieuse de la Seconde Guerre mondiale, et met bien en avant la nécessité de conserver une force d’opérations spéciales pour des missions particulières.

Source : Wikipédia