Mimar Sinan, architecte.

Mimar Koca Sinan ibn Abd al-Mannan (turc ottoman قوجه معمار سنان آغا ) dit Sinan, ou encore Mimar Sinan (l’« architecte Sinan »), né vers 1488/1491 à Kayseri, en Anatolie (Turquie), et mort en 1588 à Constantinople, est un architecte ottoman d’origine chrétienne, ingénieur, créateur de l’architecture classique ottomane, qui intégra les traditions proche-orientales et byzantines.

D’origine arménienne, grecque de Cappadoce, albanaise ou turque, héritier à la fois des grands bâtisseurs que furent les Turcs seldjoukides aux XIe – XIIe siècles, de l’école de Bursa (XIVe – XVe siècles) – période de formation des mosquées ottomanes – et des Byzantins et Arméniens, sous l’influence de la découverte de Sainte-Sophie, cherchera à dépasser ces modèles. On assiste avec lui à l’instauration de nouvelles règles architecturales qui se traduiront par la transformation progressive du volume cubique en volume hémisphérique taillé en facettes. Au fur et à mesure, dans les nombreuses mosquées qu’il a construites, grâce à un jeu de contre-coupoles de plus en plus sophistiquées, Sinan réussit l’exploit d’obtenir un espace intérieur très lumineux en faisant de plus en plus reculer les colonnes vers la périphérie. L’école d’Istanbul ou sinanienne marque l’apogée de l’architecture ottomane. L’extérieur devient un savant étagement de volumes destinés à créer un effet de silhouette, comme on le voit avec la Süleymanie à Istanbul. À l’intérieur les décors de céramique, géométriques ou floraux deviennent de plus en plus élaborés.

L’importance de Mimar Sinan, architecte impérial qui eut le bonheur de disposer de ressources pratiquement illimitées pour exprimer son talent, provient en premier lieu des essais qu’il a tentés tout au long de sa vie pour s’approcher de la perfection et des nombreuses innovations qu’il a  apportées aux méthodes de construction et tient, d’autre part, au fait qu’il a, par son génie, porté l’architecture ottomane « classique » à son apogée et considérablement et durablement influencé les architectes qui lui ont succédé ; comme Sedefhar Mehmet Ağa, qui fut son élève, et construisit, à la demande du sultan Ahmet Ier, la Mosquée bleue (Sultan Ahmet Camii) en face de Sainte-Sophie entre 1609 et 1616.

Sinan a su allier à la noblesse sereine du classicisme ottoman une  imagination créatrice d’une richesse inégalée qui lui permit de produire, au cours d’une vie presque centenaire se déroulant sous plusieurs sultans, un grand nombre de chefs-d’œuvre. Ses travaux sont remarquables et constituent une synthèse de ce qui répond aux besoins de l’époque, tout en s’appuyant sur son héritage chrétien millénaire. Les Ottomans vont reprendre la totalité de l’idéal impérial et universaliste des Byzantins, réalisant en cela la transmutation des valeurs arméno-byzantines chrétiennes en notions ottomanes et musulmanes5, voyant s’achever avec lui ce processus de synthèse, est passée ainsi de la phase de recherche à la période classique. L’utilisation simple et claire du dôme, élément le plus important de son architecture monumentale, et du système porteur lié à ce dernier, la transformation du dôme en noyau de l’architecture monumentale est une contribution majeure de l’architecture ottomane à l’architecture mondiale.

Les trois œuvres majeures de Mimar Sinan sont la mosquée Şehzade Mehmet à Istanbul qu’il considérait comme un travail d’apprenti, la mosquée Süleymaniye également à Istanbul qu’il considérait comme un travail de maçon, et la mosquée Selimiye à Edirne qu’il considérait comme un travail de maître-maçon.

Le père de la Turquie moderne, Atatürk, a demandé d’entreprendre des études scientifiques concernant l’œuvre de Mimar Sinan, et de lui élever une statue. Son nom a été donné à l’Académie des beaux-arts d’État en 1982 et à l’Université contenant cette académie récemment fondée.


Ce n’est donc qu’au fil des ans, et en forgeant son expérience sur le terrain, que Sinan est devenu architecte. Ses premiers édifices sont militaires (ponts et fortifications), mais ensuite il dirige la construction de nombreuses mosquées et de divers bâtiments publics.

Parmi les premiers ouvrages civils qu’il a construits, on citera en 1528-1529, le pont Coban Mustafa Pacha, à Svilengrad en Bulgarie, ou encore la mosquée de Hüsrev Pacha (Hüsrev Paşa Camii) d’Alep en Syrie, en 1536-1537.

Pour ses mosquées, Sinan s’inspire souvent de l’architecture de la basilique Saint-Sophie, pour créer des édifices dans lesquels le dôme central semblerait léger et dont les espaces intérieurs seraient baignés de lumière. Il a utilisé des systèmes permettant d’étayer les bâtiments à l’extérieur, afin de garder l’intérieur ouvert. Il a souvent construit ses mosquées comme une partie d’un complexe comprenant des écoles, des bains, une maison d’accueil et un hôpital.

En 1539, après la mort de l’architecte Acem Ali (tr), auteur de la mosquée Yavuz Selim (Yavuz Selim Camii) d’Istanbul (mosquée que Soliman fit construire, sur la cinquième colline et sur les ruines du palais byzantin Bonos, en l’honneur de son père Sélim Ier en 1520-1522) ; Mimar Koca Sinan est nommé « Mimarbasi », chef des architectes impériaux, un poste qu’il conservera sous trois sultans : Soliman le Magnifique, Sélim II et Murad III. Lors de cette nomination, il n’était déjà plus tout jeune (cinquante ans), mais il lui restera encore une cinquantaine d’années d’aventures créatrices qui conduiront l’architecture ottomane vers de nouveaux sommets.

La première mosquée construite après sa nomination – la mosquée Haseki Sultán (Haseki Sultán Camii), édifiée pour la favorite de Soliman, la sultane Roxelane – conserve une organisation de l’espace très traditionnelle, ne révélant aucune innovation particulière. Par contre, le projet suivant – la mosquée Mihrimah (Mihrimah Camii) (1540-1548) à Usküdar -, sur lequel il a commencé à travailler immédiatement après Haseki, représente un premier pas en avant puisque, entre autres innovations, il a construit trois demi-dômes entourant le dôme principal.

C’est entre 1572 et 1577 que l’architecte Sinan édifia, sur la pente raide d’un terrain accidenté situé près de la Mosquée bleue (Sultanahmet Camii), la mosquée de Sokollu Mehmet Pacha (Sokollu Mehmet Paşa Camii) pour le compte du grand vizir Sokollu Mehmet Pacha. Elle est considérée comme un des plus beaux exemples de l’architecture ottomane du xvie siècle et un chef-d’œuvre de Sinan.

Elle a été édifiée sur le site d’une église byzantine en ruines, Haghia Anastasia, dont certains éléments ont été récupérés. Elle est célèbre pour sa décoration intérieure, avec de belles faïences à dominante bleue qui couvrent les piliers autour de la voûte, les contours des fenêtres et le mihrab (niche indiquant la direction de La Mecque), mais n’étouffent pas la beauté architecturale de l’édifice. À l’intérieur, le visiteur ne peut qu’être saisi d’admiration devant les bleus, verts, pourpres et rouges des élégants dessins des carreaux en faïence d’Iznik.

La coupole centrale de la mosquée est supportée par des demi-coupoles, selon le schéma classique des mosquées de Sinan, dont Sainte-Sophie avait été le modèle d’inspiration.

Le complexe est composé, outre la mosquée, d’une école, d’un couvent de derviches (à l’arrière, un peu détaché) et d’une fontaine aux ablutions. La cour, dont l’accès se fait par un petit tunnel, est entourée de portiques à trente dômes. La plupart des colonnes supportant les dômes sont  byzantines. Au centre, la fontaine en marbre est somptueuse. L’intérieur de la mosquée est décoré de faïences d’Iznik (Nicée) et de peintures représentant des œillets et des chrysanthèmes. Les remarquables vitraux polychromes donnent une ambiance colorée à l’intérieur. Le mihrab est absolument exceptionnel avec ses nombreux carreaux d’Iznik.

Sinan ne s’est pas contenté de construire des mosquées. En 1553, il a été chargé de résoudre le problème de l’eau à Constantinople. Il examina les aqueducs construits à l’époque romaine, ceux des Byzantins ainsi que ceux construits après la conquête et se mit à la recherche de nouvelles sources d’eau. Les travaux de construction des nouvelles installations furent entamés en 1554 et terminés en 1560. Pour cela, il a réalisé un réseau de quarante fontaines, qu’on a appelé « Kırkçeşme », d’une longueur de plus de cinquante kilomètres, pour l’alimentation duquel il a dû construire des digues fluviales, des tunnels, des canaux et deux aqueducs : les aqueducs d’Uzunkemer et Egrikemer, près d’Istanbul. Ce projet, pour la maîtrise de l’eau, était si important aux yeux de Soliman qu’il y a affecté un budget de quarante-trois millions en monnaie d’argent, presque équivalent à ce qui avait été dépensé (cinquante-trois millions) pour le complexe de  Süleymaniye.

Mimar Sinan a accordé autant d’importance à ses ponts qu’à ses autres travaux. Il était fier du pont de « Büyükçekmece » (en), d’une longueur de 635,50 mètres et qui est aussi parfait que solide. C’est également lui qui, entre autres, jeta sur le Cekmeçe, les vingt-huit arches du pont de la voie impériale reliant Edirne à Istanbul, ou encore construisit, entre 1577 et 1578, le pont de Višegrad sur la Drina (en actuelle Bosnie-Herzégovine).

En 1580, il édifie la mosquée Chemsi Pacha (Şemsi Paşa Camii) d’Üsküdar, sur la rive asiatique du Bosphore.

En 1584, la sultane Nur-u Banu, épouse du sultan Selim II et mère du Sultan Murad III fait construire à Constantinople, suivant un plan conçu par Mimar Sinan, le hammam de Çemberlitaş, considéré comme l’un des plus importants ouvrages de l’architecture ottomane du XVIe siècle.

En 1586, à l’âge respectable de quatre-vingt-dix-sept ans, il entreprend la construction de ses deux dernières mosquées : la mosquée Mesih Mehmet Pacha (Mesih Mehmet Paşa Camii) et la mosquée Molla Tchelebi (Molla Çelebi Camii) de Findikli qu’il ne pourra voir achevées.

Au total, au cours de sa longue carrière, Sinan et son équipe ont réalisé plus de 350 constructions.

Source : Wikipédia.

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