Michel Rocard, fonctionnaire et homme politique.

Michel Rocard, né le 23 août 1930 à Courbevoie et mort le 2 juillet 2016 à Paris, est un haut fonctionnaire et homme d’État français.

Militant socialiste à partir de 1949, il est le candidat du Parti socialiste unifié (PSU) à l’élection présidentielle de 1969 où il recueille 3,6 % des voix, puis est élu député des Yvelines. Il rejoint le Parti socialiste (PS) en 1974 et fait figure de rival de François Mitterrand en se voulant le dirigeant d’une « deuxième gauche », réformiste et anticommuniste.

Il exerce la fonction de Premier ministre de 1988 à 1991, à la tête d’un gouvernement d’ouverture sous la présidence de François Mitterrand. Par la suite, il est premier secrétaire du Parti socialiste (1993-1994), député européen (1994-2009) et sénateur des Yvelines (1995-1997). Il est ambassadeur chargé de la négociation internationale pour les pôles arctique et antarctique de 2009 à sa mort.


Alors que se déclare la guerre d’Algérie, il rejoint les socialistes en rupture avec Guy Mollet à propos de la politique algérienne. C’est par refus des guerres coloniales qu’il décide d’entrer en politique. Il qualifie d’« assassin » le ministre de la Justice d’alors, François Mitterrand, qui refuse 80 % des demandes de grâce de condamnés à mort algériens.

Il adhère au Parti socialiste autonome (PSA) dès sa création par Édouard Depreux et Alain Savary. Il écrit : « Pendant plus d’un siècle, la France a prétendu mener en Algérie la politique dite de l’assimilation, qui seule justifiait l’intégration de l’Algérie dans le territoire de la République. En fait, cette politique fut proclamée et jamais appliquée […] L’égalité des devoirs existait, et notamment l’impôt du sang, mais point d’égalité des droits ». Il relève « une mentalité proche de la ségrégation raciale qui interdisait aux musulmans, sauf exception, l’accès aux fonctions de responsabilités, même mineures, dans leur propre pays ».

Il rédige pour la SFIO un rapport dénonçant les camps de regroupement dans lesquels seraient « parqués » deux millions de paysans, soit la moitié de la population algérienne rurale. Envoyé sur place en 1958 comme inspecteur des finances, il aurait découvert que des milliers de personnes étaient menacées de famine dans l’ignorance de la population et l’indifférence apparente des autorités civiles et militaires. Accueilli à Alger par son ami le sous-lieutenant Jacques Bugnicourt, il le met au courant que l’armée française procéderait, dans le plus grand secret, à des déplacements massifs de population, afin d’empêcher le FLN de s’enraciner sur place, de le priver de son ravitaillement et permettre à l’aviation le bombardement au napalm.

Michel Rocard se voit confier officieusement une enquête sur les camps de regroupement jusque-là passés sous silence. Cette enquête a lieu de septembre à novembre 1958. Il sillonne l’Algérie dans un rayon de 500 km autour d’Alger et visite notamment des douars et mechtas. Il estime à 200 000 les morts de faim. Le 17 février 1959, Michel Rocard rend son rapport à Paul Delouvrier, qui le fait taper en neuf exemplaires. Il lui en confie deux en lui demandant de le transmettre par ses propres moyens au plus proche entourage du général de Gaulle au cas où il ne parviendrait pas lui-même à entrer en contact avec le chef de l’État. Le rapport est publié le 17 avril 1959 dans France Observateur, puis le lendemain dans Le Monde. Le Premier ministre, Michel Debré, aurait alors en vain tenté de le révoquer.

En 1960, Michel Rocard participe à la fondation du Parti socialiste  unifié (PSU) — fusion du PSA et de l’Union de la gauche socialiste (UGS, chrétiens de gauche) auxquels s’ajoutent d’anciens communistes dissidents —, rejoint en 1961 par Pierre Mendès France.

Michel Rocard est nommé inspecteur des Finances en 1958, puis secrétaire général de la Commission des comptes et des budgets économiques de la nation en 1965. Remarqué lors des Rencontres de Grenoble en 1966, il devient secrétaire général du PSU en 1967. Michel Rocard prend, à partir de 1953, le pseudonyme de « Georges Servet » (du nom d’un hérétique protestant, Michel Servet) ; c’est sous ce nom qu’il est connu au PSU avant 1967. Il partage également le nom de plume « Jacques Malterre » avec Hubert Prévot28. En Mai 68, il joue un certain rôle car l’UNEF, le principal syndicat étudiant, est contrôlée par les étudiants du PSU dont fait notamment partie Jacques Sauvageot, alors vice-président de l’UNEF. Il accompagne Pierre Mendès France au meeting de Charlety.

Après la défaite du général de Gaulle lors du référendum du 27 avril 1969, Michel Rocard en appelle à « un pouvoir de transition vers le socialisme ». Il se présente à l’élection présidentielle de 1969, où il recueille de 3,61 % des suffrages exprimés ; ce score est inférieur aux 4,94 % obtenus par le PSU au premier tour des élections législatives de 1968. De son côté, le candidat socialiste Gaston Defferre, allié à Pierre Mendès France, n’obtient que 5 %.

Michel Rocard se présente à l’élection législative partielle d’octobre 1969 dans la 4e circonscription des Yvelines, et bat le Premier  ministre sortant Maurice Couve de Murville0. Il perd ce siège en 1973. Il critique le Programme commun adopté par le PS et le PCF, estimant que ces partis « ont choisi de ne pas […] proposer un programme socialiste ».

D’un point de vue économique, Michel Rocard vante alors les vertus de l’autogestion yougoslave : « La performance économique de la Yougoslavie autogestionnaire est en termes globaux une des plus remarquables du monde entier ». Il soutient encore cette idée en 2009 en prenant ses distances vis-à-vis du modèle historique de l’État yougoslave.

Lors de la campagne présidentielle de 1974, il soutient François Mitterrand. Mais en octobre, lorsqu’il propose au PSU de rejoindre le PS, il est mis en minorité (40 %). Il quitte alors le PSU et participe aux Assises pour le Socialisme (12-13 octobre 1974) qui préparent l’entrée au PS des  minoritaires du PSU et de certains militants proches de la CFDT comme Jacques Chérèque. Son entrée au Parti socialiste date de décembre 1974. Il devient membre du bureau exécutif en février 1975 et secrétaire national chargé du secteur public. Il est élu maire de Conflans-Sainte-Honorine en 1977, à la tête d’une liste d’Union de la gauche ; il conserve ce mandat jusqu’en 1994. Il reconquiert le siège de député de la circonscription de Conflans aux législatives de 1978. Le 19 octobre 1980, il annonce sa candidature à la candidature du PS pour la présidentielle de 1981, mais la retire le 8 novembre suivant, lorsque François Mitterrand annonce la sienne. L’antagonisme qui couvait entre les deux hommes depuis au moins 1977 dure jusqu’à la mort de Mitterrand, en 1996.

l devient ministre d’État, ministre du Plan et de l’Aménagement du  territoire dans les deux premiers gouvernements Pierre Mauroy, du 22 mai 1981 au 23 mars 1983. Il a également la tutelle du Conseil supérieur de la coopération. Mais il vit cette nomination à un ministère technique comme une humiliation du chef de l’État, qui ne lui aurait pas pardonné d’avoir voulu le supplanter dans la course présidentielle.

Il confie par la suite qu’il était le seul à craindre les dérives économiques pouvant résulter des nationalisations promises. Il déclare que bien qu’il fût ministre d’État, il n’avait pas plus de prérogatives que les autres, et que Mitterrand n’avait pas vraiment l’intention de suivre le Plan. Il demanda à Mauroy l’aménagement du territoire, qu’il obtint, et l’ajout de l’économie sociale, sans succès. Malgré tout, il déclare avoir créé le concept, ses outils, son conseil supérieur, sa banque et son groupement financier associé.

Son action pendant ces années est notamment marquée par la loi du 29 juillet 1982, dont il est à l’origine et qui établit les contrats de plan État-Région.

Il est ensuite nommé ministre de l’Agriculture dans le gouvernement Pierre Mauroy III, fonction qu’il conserve dans le gouvernement Laurent Fabius. Il démissionne de son poste le 4 avril 1985, affirmant qu’il est opposé à l’instauration du mode de scrutin proportionnel pour les élections législatives de 1986, ce mode favorisant les députés du Front national et affaiblissant la droite parlementaire, grande favorite du scrutin. En réalité, il se serait senti spolié par Laurent Fabius, qui met en avant la « modernisation » de la France, une thématique chère à Michel Rocard.

Michel Rocard est nommé Premier ministre, le 10 mai 1988, au début du second septennat de François Mitterrand. La principale raison de ce choix pragmatique réside dans la volonté d’ouverture vers le centre de  Mitterrand, et que Michel Rocard, par ailleurs très populaire, aurait été le mieux à même de réaliser. Peu avant sa nomination à Matignon, ce dernier avait déclaré à Ambroise Roux en 1987 : « Je vais le nommer puisque les Français semblent en vouloir […] Mais vous verrez, au bout de dix-huit mois, on verra au travers ». On référence également une citation antipathique et cinglante, où Mitterrand, interrogé sur ses successeurs potentiels à la présidence, déclare en off « par ordre de préférence : Jacques Delors, François Léotard, Raymond Barre, Giscard d’Estaing, mon chien, Michel Rocard ». Les analystes font remarquer que Mitterrand ne facilite pas la tâche de son Premier ministre durant son mandat, Rocard déclara que la cohabitation Mitterrand-Chirac était plus heureuse. Des journalistes interprétèrent même la fameuse randonnée du 19 avril 1988 au pic Saint-Loup comme une manœuvre pour humilier et railler Rocard, sa tenue vestimentaire étant inadaptée.

Les résultats des élections législatives de juin 1988 entraînent la formation d’un second gouvernement Michel Rocard. N’ayant pas la majorité à l’Assemblée nationale, pendant ses trois années à Matignon, Michel Rocard recourt 28 fois à l’article 49 alinéa 3 de la Constitution, pour 13 textes, ce qui fait de lui le chef de gouvernement ayant le plus souvent utilisé cette procédure facilitant l’adoption d’un texte par l’Assemblée nationale, plus souvent que tous les autres Premiers ministres de gauche de la Cinquième République réunis. Furent votés par cette procédure la création du CSA, des lois de finances ou encore la loi de programmation militaire. Dans le même registre, le recours au vote bloqué devient régulier, alors que le PS s’est engagé dans ses propositions de 1981 à le limiter. Il détient aussi le record du plus grand nombre de ministres dans son gouvernement sous la Ve République avec 49 membres. Pierre-Emmanuel Guigo relève que Michel Rocard, ayant pris ses distances avec les « ressources « modernes » de la communication à partir du début des années 1980 et devenant ainsi « plus réticent à intervenir à la télévision, et hostile aux journalistes », « ne participera qu’à trois grandes émissions politiques » comme Premier ministre, « établissant ainsi un record de silence pour cette fonction ».

Le 15 mai 1991, François Mitterrand, avec qui sa mésentente est alors de notoriété publique, lui demande de démissionner de sa fonction de Premier ministre et le remplace à ce poste par Édith Cresson.

En février 1993, alors que le Parti socialiste est promis par les sondages à une déroute électorale aux élections législatives de mars, Michel Rocard plaide pour une rénovation du PS, en affirmant que la gauche française a besoin d’un « big bang » : l’expression attire l’attention des médias qui voient là l’émergence d’une possible alternance de gauche au mitterrandisme. Lors du scrutin législatif au cours duquel les socialistes sont lourdement défaits, Michel Rocard est lui-même battu dans sa circonscription des Yvelines par Pierre Cardo, maire UDF de Chanteloup-les-Vignes ; malgré cet échec personnel, il devient en octobre de la même année premier secrétaire du PS, le premier à être élu par les délégués au congrès national. Il remanie profondément les institutions dirigeantes du parti donnant notamment son autonomie au MJS.

Il choisit d’être tête de liste aux élections européennes de juin 1994, lors desquelles il doit subir la concurrence de la liste radicale de Bernard Tapie, soutenue discrètement par François Mitterrand. À la suite du mauvais score de sa liste (14,5 %), une coalition Emmanuelli-Fabius le met en minorité au conseil national du PS et il doit démissionner de son poste de premier secrétaire le 19 juin 1994, remplacé par Henri Emmanuelli, qui convoque dans l’urgence un congrès à Liévin.

Revenant sur cet épisode, il déclare qu’avoir accepté le poste de premier secrétaire est « la faute de [sa] carrière ». Michel Rocard doit alors abandonner l’idée d’une deuxième candidature présidentielle que les médias lui prêtent depuis 1981. Il est élu sénateur des Yvelines le 24 septembre 1995.

Michel Rocard est victime d’une hémorragie cérébrale en juin 2007 en Inde, où il est opéré. Il est hospitalisé en soins intensifs en Suède en mars 2012 à la suite d’un malaise cardiaque.

Grand fumeur de Gauloises sans filtre, il se déclare guéri d’un cancer en 2015, mais meurt finalement des suites de cette maladie le 2 juillet 2016, à l’hôpital de la Salpêtrière, à l’âge de 85 ans. Ayant laissé un testament précis sur le triple hommage qu’il souhaitait à sa mort, il reçoit une cérémonie au temple protestant de l’Étoile le 7 juillet. Le même jour, un hommage national présidé par le président de la République, François Hollande, lui est rendu dans la cour d’honneur des Invalides, à Paris. Enfin, un ultime hommage lui est rendu au siège du Parti socialiste, rue de Solférino, avec une intervention du Premier ministre Manuel Valls. Il est incinéré à Paris et ses cendres sont inhumées à Monticello, en Haute-Corse.

Source : Wikipédia.

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