Louis-Adolphe Thiers, homme d’état.

Louis Adolphe Thiers naît à Marseille le 15 avril 1797, dans les derniers temps de la Révolution.

Étudiant brillant, il quitte Aix-en-Provence pour Paris avec une formation d’avocat mais, désireux d’accéder au plus vite aux plus hautes marches du pouvoir, il s’engage dans le journalisme et publie pige sur pige. Son objectif est de se faire connaître ainsi que de s’enrichir ! Cela lui est indispensable sous la Restauration, ne serait-ce que pour accéder au statut d’électeur, réservé aux citoyens les plus aisés.

 

Toujours dans le but de s’enrichir, Thiers publie en 1824 la première Histoire de la Révolution française. Il a pressenti le goût naissant des Français pour l’Histoire et s’empresse d’exploiter le filon encore vierge de la Révolution. Cette oeuvre colossale mais sans grand intérêt historique aujourd’hui le sort de l’anonymat et lui rapporte de confortables revenus.

En 1830, Thiers rédige une protestation des journalistes contre les Ordonnances du roi Charles X et contribue à la chute de ce dernier.

À l’issue de la révolution des Trois Glorieuses, en juillet, il fait partie de ceux qui portent Louis-Philippe 1er sur le trône. Son rêve est celui d’une monarchie parlementaire (« Le roi règne et ne gouverne pas », écrit-il). Député des Bouches-du-Rhône en octobre 1830, il accède aussitôt au gouvernement. Il a 33 ans et ne quittera plus guère les allées du pouvoir jusqu’à sa mort, en 1877.

Thiers s’impose malgré une petite taille (1,55m), une houppe ridicule et un physique sans grâce qui lui valent le surnom de « Foutriquet ». Il manipule les hommes avec subtilité en usant de son art oratoire. Mais son extrême vanité et son envie de se comparer à Napoléon l’entraînent aussi dans des actions périlleuses.

Adolphe Thiers, épreuve d’artiste.

Après le portefeuille des Finances, il obtient celui de l’Intérieur et montre à cette occasion une rare énergie. En avril 1834, il réprime au prix de 600 morts et 10.000 arrestations la seconde révolte des canuts, les travailleurs lyonnais de la soie (on peut y voir un prélude à la répression de la Commune de Paris). Président du Conseil en 1836, il envisage le risque d’une guerre contre l’Angleterre à propos de l’Espagne mais le roi, avec sagesse, lui impose de démissionner.

De retour à la Présidence du Conseil en 1840, il fait voter la « loi des Bastilles » qui va enfermer Paris dans un corset de fortifications en prévision de futures guerres. Ces « fortifs » retarderont seulement de quelques semaines l’entrée des Prussiens à Paris en 1870-1871.

Thiers tente de redresser la popularité du roi en négociant avec Londres le « Retour des cendres » de l’ex-empereur Napoléon 1er. Du coup, le parti bonapartiste reprend vie et dix ans plus tard, l’Empire sera restauré.

Le grand homme ne renonce pas au plaisir d’une bonne guerre. Il menace cette fois de s’opposer au reste de l’Europe dans le conflit qui oppose le sultan ottoman à son vassal égyptien. Il a le soutien du petit peuple des villes, républicain et belliciste, mais encore une fois, le roi a la sagesse de le chasser et appelle le prudent Guizot au gouvernement.

Thiers n’aura dès lors de cesse de combattre le gouvernement Guizot, provoquant la chute de celui-ci en 1848 et la chute de la royauté par la même occasion. Il revient au pouvoir sous la Deuxième République qui remplace la monarchie, en 1848.

Aldolphe Thiers, carte maximum, Paris, 18/10/1952.

L’habile manoeuvrier encourage le prince Louis-Napoléon Bonaparte à se présenter à la présidence de la République mais rompt avec lui lorsque se profile le coup d’État du 2 décembre 1851 qui instaurera le Second Empire.

Expulsé de France pendant quelques mois, Adolphe Thiers ne revient dans la politique qu’en 1863 en se faisant élire député de Paris. Il dénonce la diplomatie aventureuse de l’empereur et se signale après la bataille de Sadowa par une singulière prescience du danger prussien et des drames à venir. Il s’oppose à l’entrée en guerre de la France contre la Prusse en juillet 1870, ce qui lui vaut d’être porté au gouvernement après la défaite et la chute de l’empereur.

Thiers a 73 ans quand s’effondre le Second Empire mais, pour lui, le meilleur reste à venir. Ce sera la négociation du traité de Francfort avec Bismarck et la sauvage répression de la Commune, selon les plans qu’il avait envisagés à plusieurs reprises, sans succès, au cours de sa vie passée.

Thiers devient le deuxième président de la République française (après Louis-Napoléon Bonaparte en 1848). Bourgeois et conservateur, il a la faveur de la majorité monarchiste de l’Assemblée nationale.

Mais celle-ci est divisée entre orléanistes et légitimistes et l’opinion publique, d’autre part, s’accoutume aux institutions républicaines. Thiers lui-même se rallie peu à peu à la République. Peu lui importe la nature du régime pourvu qu’il respecte les intérêts des possédants. Il déclare le 13 novembre 1872 devant les députés : « La République sera conservatrice ou ne sera pas ».

Mais les députés monarchistes ne partagent pas son pragmatisme. Le 24 mai 1873, l’Assemblée, constatant son manque d’empressement à restaurer la monarchie, lui retire sa confiance et porte à la présidence le maréchal Mac Mahon, un royaliste sincère.

Le héros s’éteint le 3 septembre 1877 à 80 ans. Cinq jours plus tard, oublieux de son passé monarchiste et de son attitude à l’égard des Communards, le peuple français unanime lui offre des obsèques grandioses.

Source : Herodote.net