L’orient-express.

L’Orient-Express est un train de luxe créé par la Compagnie internationale des wagons-lits (CIWL) qui, depuis 1883, assure la liaison entre Paris, Vienne, ainsi que Venise, à partir de 1919, et Constantinople (puis Istanbul), desservant plusieurs capitales de nations européennes. Dans les années 1920, avec des artistes-décorateurs comme René Prou ou bien René Lalique, le style « Orient-Express » atteignit son apogée. C’est après plusieurs changements d’itinéraire, deux guerres et enfin par l’abaissement continu de son prestige pendant la Guerre froide, que le service quotidien Direct-Orient-Express vers Istanbul et Athènes cessa en 1977, vaincu par la faiblesse de sa vitesse commerciale (à peine 55 km/h vers la fin) due aux interminables arrêts douaniers dans les pays communistes traversés, ainsi qu’à l’état obsolète de leurs réseaux, et malmené par la concurrence grandissante de l’aviation de masse.

Depuis 1982, un nouveau train de luxe régulier, assuré par une compagnie privée, le Venise-Simplon-Orient-Express, a pris le relais sur le trajet Boulogne-sur-Mer (désormais Calais) – Paris – Venise, via Innsbruck ou Vienne, avec parfois un prolongement vers Istanbul. La marque Orient-Express est cependant restée propriété de la SNCF, toute compagnie privée devant utiliser une appellation à ajout (comme le Venise-Simplon-Orient-Express). Le Paris-Vienne a roulé sous l’appellation Orient-Express jusqu’en 2009, date depuis laquelle son exploitation par la SNCF est suspendue. La SNCF a racheté au groupe Accor les sept voitures du Pullman-Orient-Express, restaurées par la Compagnie des wagons-lits, afin de les incorporer dans les convois de la société Train-Expo ou de les proposer à la location par des entreprises ou des particuliers. Du fait de la crise économique, leur utilisation dans la circulation de dîners-voyages, assurée précédemment, n’est pas jugée viable pour le moment. C’est une partie de ces voitures d’époque qui est parquée en 2014 le long de l’Institut du monde arabe, dans le cadre de l’exposition Il était une fois l’Orient-Express.


Lors d’un voyage de plusieurs mois aux États-Unis en 1867, l’ingénieur belge Georges Nagelmackers découvre les sleeping-cars (wagons-lits) conçus par l’industriel américain George Pullman. Si ces trains sont bien plus avancés technologiquement que ceux européens, ils s’avèrent être plutôt inconfortables selon l’avis même de la clientèle. À l’opposé, Nagelmackers observe les luxueux aménagements des paquebots transatlantiques. Dès lors, il revient en Europe avec l’idée de créer des trains de nuit de luxe à destination d’une clientèle aisée et publie son projet quelques années plus tard dans le livre Projet d’installation de wagons-lits sur les chemins de fer du continent. Mais le franchissement des frontières pose à la fois des difficultés techniques — les normes ferroviaires varient selon les pays — et diplomatiques — des tensions existent entre les États. Le Belge entame de nombreuses négociations qui se trouvent interrompues par la guerre franco-allemande de 1870.

Georges Nagelmackers fonde en octobre 1872 la société « Georges Nagelmackers et Cie » avec le soutien du Roi des Belges Léopold II. Grâce à des conventions signées avec les compagnies ferroviaires nationales, il parvient à accrocher ses premiers wagons-lits aux trains circulant entre Paris (France) et Vienne (Autriche) puis entre Paris et Berlin (Allemagne). Mais l’entreprise connaît des difficultés financières et les banques se retirent. À la recherche de financement, Nagelmackers fait la rencontre à Londres (Royaume-Uni) du colonel américain William d’Alton Mann, riche inventeur dépositaire d’un brevet de wagon-lits doté de compartiments ouvrant sur un couloir latéral. Les deux hommes s’associent et fondent en janvier 1873 la « Mann’s Railway Sleeping Car Company ». En août 1875, Nagelmackers rachète les parts de son associé. Le 4 décembre 1876, il fonde à Bruxelles la « Compagnie internationale des wagons-lits » qui devient en 1884 la « Compagnie internationale des wagons-lits et des grands express européens » en accord avec le développement de son activité.

Le 10 octobre 1882, la Compagnie des wagons-lits lance un aller-retour Paris-Vienne exceptionnel dans un train de luxe baptisé « Train Éclair ». Composé de quatre voitures-lits, d’une voiture-restaurant et de deux fourgons, le train relie les deux capitales en 27 h 53 min. C’est la première fois que la Compagnie affrète son propre train.

Le Paris-Vienne ayant beaucoup de succès, Georges Nagelmackers a l’idée de le prolonger vers Constantinople, capitale de l’Empire ottoman. La vogue de l’orientalisme n’a pas reflué et cet empire ne cesse de fasciner. De plus, les deux grandes puissances européennes, la France et la Grande-Bretagne, veulent soutenir ce géant moribond pour empêcher la Russie et l’Autriche-Hongrie de se partager ouvertement le contrôle des dernières régions européennes de l’Empire6. Ainsi, les observateurs européens de l’époque voient dans cette nouvelle voie ferrée « l’annexion de Constantinople au monde occidental », tandis que pour les Ottomans, c’est en fait « l’Occident Express ».

Le 5 juin 1883 à 19 h 30, a lieu de la gare de Strasbourg (actuelle gare de l’Est) à Paris le premier départ de l’« Express d’Orient », déjà appelé aussi « Orient-Express » à destination de Constantinople (Turquie). Selon certaines sources, les passagers étaient tous des hommes, à qui il avait été recommandé de porter par précaution une arme à feu. Après cette mise en service, l’inauguration officielle a lieu le 4 octobre de la même année. Une foule composée notamment de journalistes, d’artistes et de personnalités des mondes politique et ferroviaire se presse sur les quais pour assister au départ de son voyage inaugural, auquel sont conviés vingt-quatre passagers, dont deux femmes. Parmi eux se trouvent des membres de la Compagnie des wagons-lits, dont le directeur et fondateur Georges Nagelmackers, des hommes politiques et hauts fonctionnaires français et belges, des représentants des grandes compagnies de chemin de fer français, des journalistes français et étrangers tels que Georges Boyer (Le Figaro)14 et Henri Opper de Blowitz (The Times), et le romancier Edmond About. Le prix des places, 700 francs-or, représente la moitié d’un salaire annuel d’un ouvrier qualifié.

L’Express d’Orient fait l’aller-retour Paris-Constantinople de 3 094 km en moins de deux semaines : parti le 4 octobre 1883 à 19 h 30, à l’arrêt pendant cinq jours, il est de retour le 16 octobre à 6 h. Ainsi, le trajet de Paris à Constantinople n’a pris que quatre jours là où, jusqu’alors, la liaison maritime Marseille-Constantinople en nécessitait une quinzaine. C’est une révolution rapportée par une presse enthousiaste. Cependant, le trajet n’est pas encore direct : le train traverse l’Europe de Paris (France) à Bucarest (Roumanie) via Strasbourg, Munich (Allemagne), Vienne (Autriche) et Budapest (Hongrie). N’ayant pas l’autorisation de traverser le Danube, les passagers doivent prendre un bac entre Giurgiu (Roumanie) et Roussé (Bulgarie) pour franchir le fleuve et la frontière. Ils prennent ensuite un autre train à destination de Varna, port bulgare sur la mer Noire, où ils embarquent à bord du navire à vapeur Espero qui les emmène en une quinzaine d’heures jusqu’à Constantinople par le Bosphore. De plus, au luxe du train s’ajoutent des animations comme un concert de musique tzigane et la visite du château de Peleș en Roumanie.

En 1885, le service devient quotidien entre Paris et Vienne. Cette même année, une nouvelle voie ferrée est ouverte de Budapest (Hongrie) à Constantinople (Turquie) via Belgrade (Serbie) et Sofia (Bulgarie), mais les passagers doivent encore prendre une diligence entre la ville serbe de Niš et la ville bulgare de Plovdiv. Le premier juin 1889, l’achèvement du dernier tronçon de la ligne permet à la liaison d’être intégralement effectuée en train.

En 1891, l’Express d’Orient est renommé « Orient-Express », mais continue à être désigné sous son appellation initiale dans la version française du nouveau traité conclu en 1899 entre les douze administrations nationales des chemins de fer concernées et la Compagnie internationale des wagons-lits18. À cette époque, les passagers sont libérés des contraintes administratives, la Compagnie s’occupant de présenter les passeports à chaque passage de frontière. Le train devient un axe de communication majeur vers l’Orient, attirant une clientèle fortunée mais variée comme des célébrités, des demi-mondaines, de riches marchands, et même des espions en mission. Ce microcosme va inspirer de nombreux artistes tel qu’Agatha Christie. L’Orient-Express est un chef-d’œuvre de l’Art nouveau et de l’Art déco à tous les niveaux (marqueterie, maroquinerie, tapisserie argenterie, vaisselle…), mais tout ce luxe va faire des envieux. Ainsi, en 1891, des bandits de grand chemin attaquent le train et repartent avec un butin de 120 000 livres sterling et cinq voyageurs en otage. L’année suivante, le train est mis en quarantaine en raison d’une épidémie de choléra survenue à bord.

En 1894, une liaison appelée « Ostende-Vienne-Orient-Express » relie Ostende et Bruxelles (Belgique) à Vienne (Autriche) où les wagons se raccrochent à l’Orient-Express venant de Paris. De la même manière, une autre liaison de prestige appelée « Berlin-Budapest-Orient-Express », composée de matériel luxueux, relie Berlin (Allemagne) à Budapest (Hongrie) à partir du 1er mai 1900, quotidienne, d’abord, puis bi-hebdomadaire, puis hebdomadaire, jusqu’à sa disparition le 1er octobre 1902, faute d’une fréquentation suffisante.

Grâce au succès de l’Orient-Express, la Compagnie des wagons-lits se développe : elle lance d’autres trains de luxe vers de nouvelles destinations (le Sud-Express entre Paris et Madrid/Lisbonne, le Rome Express entre Calais et Rome, le Riviera Express entre Amsterdam/Berlin et Nice), fonde en 1894 la Compagnie internationale des Grands Hôtels qui ouvre des hôtels de luxe dans les principales étapes des lignes pour ses voyageurs (Pera Palace à Constantinople, Élysée Palace à Paris, Riviera Palace à Beausoleil).

Déjà affecté par les guerres balkaniques en 1912 et 1913, l’Orient-Express est limité au trajet entre Vienne et Budapest en août 1914 à la suite du déclenchement de la Première Guerre mondiale. Mais rapidement, l’Empire allemand et l’Autriche-Hongrie réquisitionnent les voitures de chemin de fer situées sur leur territoire pour créer fin 1916 leur propre compagnie des wagons lits, la Mitteleuropäische Schlafwagen und Speisewagen Gesellschaft abrégée en Mitropa. Dès janvier 1916, un train militaire, le Balkanzug (Train des Balkans), symbole pour la construction de la Mitteleuropa, reliait Strasbourg — alors allemande —, Berlin et Constantinople. À l’Ouest, les wagons-lits sont également réquisitionnés pour être transformés en ambulances de campagne. À la fin de la guerre, toutes les voitures étant éparpillées ou détruites, la Compagnie des wagons-lits doit vendre ses hôtels pour reconstruire son parc de voitures. Le sort des trains internationaux comme l’Orient-Express est débattu lors du Traité de Versailles de 1919.

Le wagon-restaurant no 2904 de l’orient-Express (Compagnie des Wagons Lits) construit en 1913 rentre dans l’Histoire comme le wagon de l’Armistice. Transformé en bureau/salon pour le général Foch, commandant en chef des armées alliées, il est positionné dans la clairière de Rethondes en forêt de Compiègne. L’Armistice du 11 novembre 1918 entre l’Allemagne et les Alliés y est alors signé. La Compagnie des wagons-lits fait don de ce wagon à l’État français en 1921.

Après la guerre, la situation géopolitique ne permet pas de rétablir l’Orient-Express dans son trajet initial passant par l’Allemagne. En avril 1919, un second parcours est mis en place grâce au nouveau tunnel du Simplon percé sous les Alpes entre la Suisse et l’Italie. Le « Simplon-Orient-Express » relie Calais — voire Londres grâce à une correspondance en bateau par Douvres — à Constantinople en moins de deux jours et demi via Lausanne (Suisse), Milan, Venise (Italie), Belgrade (Yougoslavie) et Sofia (Bulgarie). Ce trajet plus court par l’Europe du Sud devient rapidement plus populaire que son aîné du Nord l’Orient-Express rétabli quelques années plus tard. De plus, ce dernier s’arrête désormais à Bucarest (Roumanie) et ne dessert plus Constantinople.

En 1922, toutes les voitures en teck sont remplacées par des voitures métalliques plus confortables. Ces dernières sont peintes d’une couleur bleu nuit avec des liserés de couleur or. Ces couleurs auraient été choisies par le directeur M. Noblemaire en souvenir de sa tenue de chasseurs alpins. La décoration intérieure d’inspiration Art déco est confiée à de grands artistes tels qu’Albert Dunn et René Prou pour la marqueterie, et René Lalique pour la verrerie.

À la suite de l’occupation de la Ruhr par les Français, les Allemands interrompent en représailles le passage de l’Orient-Express sur leur territoire de janvier 1923 à novembre 1924.

En 1924, un troisième parcours appelé « Suisse-Arlberg-Vienne-Express » relie Paris à Vienne via Zurich (Suisse) et Innsbruck (Autriche) et dessert les stations de ski en vogue des Alpes. Il est étendu jusqu’à Budapest (Hongrie) et Bucarest (Roumanie) quelques années plus tard, et jusqu’à Athènes (Grèce) en 1932. Il est alors renommé « Arlberg-Orient-Express ». Cette même année, l’Orient-Express va de nouveau jusqu’à Istanbul (ex-Constantinople). Il faut cependant noter qu’à la suite des rectifications de frontières provoquées par les nouveaux rapports de forces, et notamment la création de la République Turque, après la chute de l’Empire Ottoman, le Traité de Lausanne de 1923 a provoqué une complication du statut international du train. Il quittait en effet la Bulgarie à Svilengrad, pour entrer en Grèce, puis faire une brève incursion en Turquie près d’Edirne, avant de repasser sur une centaine de kilomètres en Grèce, pour finalement la quitter définitivement à Pythion en regagnant la Turquie à Uzunköprü. Le détail du fonctionnement de ce transit était prévu par un règlement de la Société des Nations du 25 novembre 1937, resté en vigueur jusqu’en 1971, année où a été mise en service une ligne directe Svilengrad  – Kapikule  – Edirne  – Pehlivanköy, supprimant les détours en territoire grec et réduisant le trajet vers Istanbul à 463 km. En 1926, un service de première classe combinant train et bateau, « La Flèche d’or / The Golden Arrow », est mis en service entre Londres et Paris avec des voitures Pullman. En 1930, l’Orient-Express se voit prolongé par le « Taurus Express » qui conduit les passagers plus à l’Est vers Damas (Syrie) ou Bagdad (Irak) voire jusqu’au Caire (Égypte).

Dans sa longue histoire, l’Orient-Express a connu plusieurs accidents parfois rocambolesques. Le 30 juin 1919, l’Orient-Express arrivant de Bucarest est bloqué plusieurs jours à la frontière yougoslave, faute de combustible. Excédés par l’attente, les voyageurs finissent par se cotiser pour acheter un wagon de bois et repartir. Durant l’hiver 1929, l’Orient-Express se retrouve bloqué par la neige pendant cinq jours près de Tcherkesskeuy en Thrace orientale à 130 km d’Istanbul (Turquie). La température dans les wagons atteint les −10 °C, poussant un Maharaja à acheter à prix d’or les manteaux des autres voyageurs pour couvrir ses sept femmes. Affamés, certains passagers s’aventurent dehors pour échanger des œufs contre leur bijoux au village le plus proche et finissent par chasser le loup. Cette aventure inspira à Agatha Christie la toile de fond de son roman Le Crime de l’Orient-Express. Le 12 septembre 1931, des terroristes font sauter le viaduc de Biatorbágy (Hongrie) au moment du passage de l’Orient-Express. La locomotive et plusieurs wagons tombent dans le vide, faisant une vingtaine de morts et une centaine de blessés. L’artiste Joséphine Baker qui se trouvait à bord en sort indemne et se met à chanter pour réconforter les survivants.

Dans les années 1930, l’Orient-Express consiste en une famille de trains de luxe reliant l’Europe de l’Ouest à l’Europe de l’Est et du Sud. Il y a trois trajets reliant Paris et Calais (France) à Istanbul (Turquie), Athènes (Grèce) et Constanța (Roumanie) : l’Orient-Express, le Simplon-Orient-Express et l’Arlberg-Orient-Express ; auxquels s’ajoutent des liaisons vers Amsterdam (Pays-Bas) et Bruxelles (Belgique) avec l’Ostende-Vienne-Orient-Express, vers Berlin (Allemagne) et Prague (République tchèque) avec le Berlin-Budapest-Orient-Express et vers Londres (Royaume-Uni) avec La Flèche d’or. Les wagons sont échangés entre les différents trains et parcours aux points d’intersection tels que Vienne (Autriche), Budapest (Hongrie) et Belgrade (Yougoslavie).

En 1936, la Compagnie des wagons-lits lance le « Night Ferry », le premier train de nuit direct entre Londres et Paris. Il traverse la Manche grâce à un ferry ferroviaire dans lequel sont embarqués les wagons-lits.

Le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale en 1939 marque un nouvel arrêt pour l’Orient-Express. La société allemande Mitropa lance de nouveau sa version du train de luxe à l’attention des dignitaires nazis en s’appropriant les wagons de la Compagnie internationale des wagons-lits. Mais l’entreprise n’est pas un succès à cause des résistants qui sabotent régulièrement les lignes de chemin de fer.

À la fin de la guerre, de nombreuses gares, voies et ponts sont inutilisables à cause des bombardements et beaucoup de voitures ont été détruites. Au total, 189 voitures ont été perdues et plus de 300 ne sont plus en état de rouler.

Après la guerre, les trois lignes de l’Orient-Express sont remises en service les unes après les autres. À l’automne 1945, l’Arlberg-Orient-Express relie de nouveau Paris et Innsbruck (Autriche) tandis que la ligne du Simplon-Orient-Express est rouverte jusqu’à Venise (Italie). À l’été 1946, l’Orient-Express relie Paris et Vienne. En 1947, le Simplon-Orient-Express se rend de nouveau jusqu’à Istanbul (Turquie), mais Athènes (Grèce) n’est toujours pas desservie à cause de la fermeture de la frontière entre la Grèce et la Yougoslavie. Lorsqu’elle rouvre en 1951, c’est au tour de la Bulgarie d’interdire le franchissement de sa frontière, rendant Istanbul inaccessible jusqu’en 1952. L’Orient-Express et l’Arlberg-Orient-Express sont progressivement étendus jusqu’à Budapest (Hongrie) et Bucarest (Roumanie).

Mais avec la Guerre froide, les « démocraties populaires » d’Europe de l’Est acceptent mal ce « cordon occidental » traversant leurs frontières. Les contrôles aux frontières s’intensifient causant un fort ralentissement de la vitesse moyenne du train. Ce dernier est pris à la fois par les diplomates, les espions et les trafiquants en tout genre, tandis que les réfugiés politiques s’y cachent pour franchir le rideau de fer. Les confortables voitures-lits de la Compagnie des wagons-lits sont progressivement remplacées par des voitures-couchettes ordinaires des pays communistes qui lancent leurs propres services : le Balte-Orient-Express en 1948, le Tauern-Express en 1951 et le Balkan-Express en 1955. Ainsi l’Orient-Express perd son appellation de train de luxe à partir de 1948.

Les tranches multiples du Direct-Orient-Marmara-Express entre Pehlivanköy et Istanbul en mars 1970. Le wagon-lits (rutilant) et la voiture (places assises), en provenance de Paris, sont au milieu du train, entre le creux du talus et les premiers arbres.

L’année 1962 marque un véritable tournant dans l’histoire de l’Orient-Express. À compter du 27 mai, date d’entrée en vigueur du service d’été, faute d’une fréquentation suffisante, l’Arlberg-Orient-Express avec voitures directes pour Bucarest disparaît et est remplacé par l’Arlberg-Express, limité au parcours Paris-Vienne. L’Orient-Express fait le même parcours, mais comprend quelques voitures pour Budapest et une voiture-lits française, quatre fois par semaine vers Bucarest, jusqu’en 1986.

Le Simplon-Orient-Express quant à lui est remplacé par deux trains. D’une part, le « Simplon-Express », un rapide quotidien, d’abord limité aux parcours Paris-Trieste du 1er novembre au 15 mars et Paris-Zagreb le reste de l’année, devenant régulier vers Belgrade en 1979 et composé de matériel moderne panaché français et yougoslave, plus une tranche française limitée à Venise avec wagon-restaurant entre Paris et Dole. D’autre part, le « Direct-Orient» pour Belgrade, également quotidien, qui, au-delà de cette ville, se sépare à Niš en deux tranches, l’une vers Athènes et l’autre vers Istanbul. Ce train aux très nombreux arrêts comporte depuis Paris un wagon-lits deux fois par semaine jusqu’à Istanbul, trois fois par semaine vers Athènes, les autres jours limité à Belgrade (ce dernier, sous-utilisé, est rapidement supprimé). En 1967, d’autres ajustements ont lieu à la suite de l’augmentation progressive des voitures directes en provenance d’Allemagne et d’Autriche. La branche Paris-Belgrade conserve l’appellation « Direct-Orient », et deux trains distincts à tranches multiples sont formés depuis Belgrade, l’un vers Athènes dénommé « Athènes-Express », l’autre vers Istanbul dénommé « Marmara-Express », comprenant chaque jour une voiture DEV mixte 1re et 2e classe et quatre fois par semaine un wagon-lits en provenance de Paris. Faute d’une fréquentation suffisante, un an plus tard, la fréquence hebdomadaire de circulation du wagon-lits est réduite à deux (mardi et samedi au départ de Paris).

En 1971, la Compagnie des wagons-lits décide de ne plus assurer la maintenance de son matériel et de le louer ou de le céder aux compagnies ferroviaires nationales, en continuant d’assurer le service à bord, par la constitution, pour les voitures-lits, du pool européen Trans-Euro-Nuit (TEN), pendant nocturne des Trans-Europ-Express. Cette même année, le Direct-Orient-Express est mis en correspondance, entre Istanbul et Téhéran (Iran) avec le « Vangolü-Express » — actuel « Trans-Asia-Express » — sous l’impulsion du Chah d’Iran Mohammad Reza Pahlavi. L’année suivante, le Taurus-Express entre Istanbul et Bagdad est accéléré et une correspondance est établie jusqu’à Beyrouth (Liban).

En 1976, la SNCF tente de relancer l’Orient-Express sur les lignes Paris-Istanbul (3 050 km) et Paris-Athènes (3 242 km) en le rénovant et en l’accélérant. Les voitures doivent être plus spacieuses et plus confortables et la durée du trajet doit passer de trois à deux nuits. Mais face aux conflits et aux oppositions politiques, le projet est abandonné. Face à cet échec et à la baisse de fréquentation, la SNCF décide d’arrêter le Direct-Orient-Express. Le dernier train quitte la voie J de la gare de Lyon à Paris le 20 mai 1977 sous les éclairs des appareils-photos de la presse mondiale, après des années d’indifférence générale à son endroit. Quelques mois plus tard, cinq voitures de l’Orient-Express, astiquées pour l’occasion mais à rénover complètement, sont vendues aux enchères à Monaco, dont deux sont acquises par le prince de Monaco pour sa collection privée et deux par James Sherwood, fondateur du groupe britannique Sea Containers.

Si le train de luxe desservant Istanbul et Athènes a disparu, il existe toujours l’Orient-Express originel circulant entre Paris et Bucarest avec du matériel ordinaire. De plus, plusieurs entrepreneurs décident de créer un train touristique avec du matériel d’époque restauré permettant aux passagers de revivre l’expérience de l’Orient-Express à son âge d’or. Le « Nostalgie-Istanbul-Orient-Express » est lancé par le suisse Albert Glatt en 1976 et le « Venise-Simplon-Orient-Express » par Sherwood en 1982.

En 1991, la liaison tri-hebdomadaire de l’Orient-Express vers Bucarest est supprimée. Le train de nuit se limite désormais au trajet entre Paris et Budapest via Vienne. Étonnamment, en 1998, l’Orient-Express regagne une voiture-lits (roumaine, désormais) qui circule deux fois par semaine jusqu’à Bucarest. Mais en juin 2001, les voitures vers Budapest et Bucarest sont supprimées. L’Orient-Express se limite alors à un train de nuit EuroNight faisant l’aller-retour entre Paris et Vienne.

À la suite de l’ouverture de la LGV Est européenne entre Paris et Strasbourg en juin 2007, l’Orient-Express ne se résume plus qu’à un service associant le TGV Paris – Strasbourg, en correspondance avec un train de nuit EuroNight circulant entre Strasbourg et Vienne, exploité avec du matériel moderne des chemins de fer fédéraux autrichiens. Finalement, pénalisé par le changement à Strasbourg, qui lui fait perdre ses derniers clients, attirés de plus en plus, par l’attractivité tarifaire des compagnies aériennes à bas prix, l’Orient-Express s’arrête et le train no 469 quitte pour la dernière fois la gare de Strasbourg le 12 décembre 2009.

En juin 2011, la SNCF rachète aux enchères sept anciennes voitures de l’Orient-Express dénommés Taurus, Anatolie, Flèche d’Or, Riviera, Train bleu, Étoile du nord et Côte d’azur, du nom des différents trains de luxe de la Compagnie des wagons-lits. Elle crée par la même occasion la société Orient-Express dans le but de faire revivre un jour le train de luxe. La SNCF veut relancer dans les cinq à dix ans un nouvel Orient-Express du XXIe siècle avec de nouvelles voitures, en associant l’artisanat d’art de l’époque Art déco au confort et à la technologie contemporaine. En avril 2014, elle présente un concept d’aménagement intérieur. Du 4 avril au 31 août 2014, le train est exposé sur le parvis de l’Institut du monde arabe à l’occasion d’une grande exposition consacrée à l’Orient-Express. L’exposition est un succès avec plus de 250 000 visiteurs.

Le 4 octobre 2017, 134 ans jour pour jour après le lancement de l’Orient-Express, le groupe AccorHotels prend une participation de 50 % dans la société Orient-Express au côté de la SNCF. Il va ainsi pouvoir développer une nouvelle collection d’hôtels prestigieux sous l’enseigne Orient-Express et se renforcer dans le domaine de l’hôtellerie de luxe.

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Sources : Wikipédia, YouTube.

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