Les glaciers.

Un glacier est une masse de glace plus ou moins étendue qui se forme par le tassement de couches de neige accumulées. Écrasée sous son propre poids, la neige expulse progressivement l’air qu’elle contient, se soude en une masse compacte et se transforme en glace.

Le domaine de plasticité de la glace étant particulièrement étendu, un glacier s’écoule lentement sous l’effet de la gravité le long d’une pente ou par fluage.

« Glacier » est un terme francoprovençal que l’on rencontre dès le xive siècle en Valais et qui dérive du latin populaire *glaciariu(m), du latin tardif glacia, du latin classique glacies (« glace », « glaçon »). À partir du milieu du xviiie siècle, en France, on le préfère au terme « glacière » qui était alors utilisé.

Les glaciers représentent 60 à 70 % des eaux douces de la planète, et constituent également une partie importante de la cryosphère terrestre.


Tout comme chaque rivière est unique par ses caractéristiques, aucun glacier ne ressemble à un autre. Il est cependant possible de distinguer certaines caractéristiques récurrentes et s’appliquant de manière générale.

On peut distinguer trois zones dans un glacier :

  • la zone d’accumulation : c’est la partie du glacier où les précipitations de neige se transforment en glace. Elle correspond à la zone des neiges éternelles et par conséquent la glace est rarement mise à nu. La zone d’accumulation correspond en général à 60 à 70 % de la superficie d’un glacier alpin ;
  • la zone de transport : c’est la partie du glacier où la fonte reste limitée et où le glacier est le plus épais. L’érosion glaciaire y est à son maximum ;
  • la zone d’ablation : c’est la partie du glacier où la fonte importante provoque la diminution de l’épaisseur du glacier jusqu’à sa totale disparition au niveau du front glaciaire qui peut prendre la forme d’une falaise, d’une colline, d’un amas désorganisé de glace, etc.

La ligne d’équilibre d’un glacier est la limite qui sépare la zone du glacier où le bilan en masse est excédentaire et la zone du glacier où le bilan en masse est déficitaire. Cette ligne d’équilibre est matérialisée durant les mois chauds par la limite entre neige persistante (les neiges éternelles) et glace apparente. La ligne d’équilibre est utilisée pour marquer la fin de la zone d’accumulation d’un glacier.

Ces trois secteurs d’un glacier sont très variables en taille, voire absents sur certains glaciers.

Les couches successives de neige qui forment le glacier emprisonnent durant leur passage dans l’atmosphère poussières, pollens, polluants et piègent des bulles d’air qui conservent la teneur des gaz composant l’atmosphère à l’époque de piégeage. Ces informations font d’un glacier un véritable livre relatant l’évolution de l’atmosphère durant des centaines de milliers d’années. Des forages (Vostok en Antarctique) permettent de remonter des carottes de glace et d’analyser la composition de l’atmosphère à l’époque de la formation des strates.

Un glacier possède d’autres caractéristiques qui sont révélatrices de la topographie, du climat, de son activité érosive, de son passé :
  • un verrou glaciaire ou une augmentation de la pente peut provoquer en surface la formation de crevasses et de séracs car la glace subit des contraintes supérieures à la limite de sa plasticité ;
  • une rimaye peut se former entre la zone d’accumulation et la zone de transport ;
  • une fonte de la surface ou un apport d’eau extérieur peut former mares de fonte, bédières et moulins ;
  • des apports extérieurs ou des remontées de débris rocheux peuvent recouvrir partiellement ou totalement un glacier. Ces débris protègent le glacier du rayonnement solaire et des températures atmosphériques ce qui permet parfois à un glacier dont la langue terminale est entièrement recouverte de débris de descendre plus bas en altitude que s’il en était dépourvu.

On peut définir un bilan hydrique (ou bilan de masse) saisonnier pour un glacier.

Ce bilan fait la différence entre perte et gain d’eau, qu’elle soit sous forme liquide, solide ou gazeuse. Durant les mois les plus chauds, les précipitations sous forme de neige sont au plus bas et la remontée des températures accélère la fonte du glacier en étendant sa zone d’ablation à plus haute altitude. Le bilan hydrique du glacier est alors négatif : sa masse diminue en perdant plus d’eau qu’il n’en reçoit. À l’inverse, les mois les plus froids voient les précipitations neigeuses augmenter et la fonte atteindre son minimum. Le bilan hydrique du glacier est positif : sa masse augmente en reconstituant ses stocks de glace qu’il a perdus l’été.

Le bilan hydrique saisonnier d’un glacier définit le débit du torrent émissaire dont le flot est composé des eaux de fonte. Le débit des eaux de fonte est à son maximum les mois les plus chauds et est à son minimum les mois les plus froids. Il faut préciser que ce débit des eaux de fonte, même s’il l’influence fortement, ne correspond pas au débit du torrent émissaire qui peut être grossi par les pluies ou atténué par l’évaporation, la recharge de la nappe phréatique, le prélèvement pour les activités humaines, etc. Le débit des eaux de fonte, s’il est directement lié aux précipitations neigeuses, est beaucoup plus affecté par d’autres facteurs météorologiques (l’intensité et la durée de l’ensoleillement, les températures qui sont des variables plus stables dans l’espace et dans le temps que les précipitations), cosmiques et anthropiques (telle la présence de cryoconite, poussière nivéo-éolienne qui fait passer l’albedo de la glace de glacier de 0,2 à 0,4, ce qui accélère la fonte). Ainsi, on peut observer des fluctuations journalières du débit des eaux de fonte : le maximum est atteint dans l’après-midi tandis que le minimum l’est en fin de nuit.

Le glacier, en jouant le rôle de réservoir d’eau douce, régularise le débit des cours d’eau en aval tout au long de l’année. Il permet ainsi à la végétation en aval du glacier de disposer de réserves d’eau constantes et d’éviter ou d’atténuer d’éventuelles périodes de sécheresse.

Un glacier avance, se déplace à cause de la gravité ou se déforme, flue à cause de son propre poids. La vitesse et la direction du déplacement sont fonction de la topographie, de la température du glacier, de sa teneur en air, de la quantité d’eau liquide qu’il contient, de la quantité et de la nature des matériaux rocheux qu’il transporte, de sa réaction face à la rencontre avec d’autres glaciers, etc.

En général, plus la pente est forte et régulière, le glacier lourd, ayant une température élevée et contenant de l’eau liquide, de l’air et peu de grosses roches, plus il ira vite et inversement.

Le fait qu’un glacier soit recouvert ou non d’une couche de débris rocheux peut influencer sa vitesse d’écoulement par le biais des eaux de fonte. Ces eaux de fonte, en s’écoulant entre le glacier et les parois rocheuses, lubrifient la glace qui glisse mieux contre la roche. En comportant des débris rocheux à sa surface, un glacier s’isole des rayonnements solaires et des températures atmosphériques, diminuant par là-même la fonte de la glace à sa surface. Disposant de moins d’eau liquide, le glacier avance moins vite que si sa glace était découverte.

Glacier de Vorarlberg, entier postal, Autriche.

La vitesse d’écoulement n’est pas la même en tout point d’un glacier. Elle varie selon la distance avec les parois et selon qu’on se trouve en zone d’accumulation, de transport ou d’ablation. Plus la glace est proche des parois latérales, plus sa vitesse est réduite. Dans la zone d’accumulation et de transport, la vitesse est généralement maximale dans les profondeurs du glacier, tandis qu’elle l’est à la surface du glacier dans la zone d’ablation. Cette vitesse différentielle fait que le litage des couches de neige est horizontal dans la zone d’accumulation, puis devient vertical dans la zone de transport pour redevenir horizontal dans la zone d’ablation.

Les vitesses d’écoulement d’un glacier sont très variables. La vitesse moyenne pour un glacier classique est de l’ordre de quelques centimètres à quelques dizaines de centimètres par jour. Certains glaciers (glaciers suspendus ou glaciers dits « morts ») ont une vitesse d’écoulement proche de zéro. D’autres glaciers comme les courants glaciaires peuvent avancer de plusieurs dizaines de mètres par jour. Ainsi, un glacier de Groenland, le Kangerdlugssuaq (ou Kangerlussuaq situé au sud de Nuuk) a multiplié sa vitesse par trois entre 1996 et 2005 et atteint à cette date de plus de quatorze kilomètres par an soit une moyenne de quarante mètres par jour3.

Il faut rappeler que quand on parle d’un recul glaciaire, ce n’est pas le glacier qui recule, la glace continuant d’avancer vers le bas de la vallée, c’est la position du front glaciaire qui se déplace vers le haut de la vallée. La « délaissée glaciaire » (espace abandonné à la suite du recul du glacier) se nomme aussi « glarier » ou « fond du glacier ».

Si l’apport de neige, et par conséquent de glace, est plus important que la fonte du front glaciaire, le glacier progressera dans la vallée. Ceci peut être provoqué par un refroidissement climatique et/ou une augmentation des précipitations. Les effets inverses seront à l’origine d’un retrait glaciaire. Entre 1850 et 1980, les glaciers des Alpes ont perdu presque le tiers de leur surface.

À noter que pour le cas de l’Antarctique : de pareils phénomènes existent, les élévations de la température dans ces secteurs très froids se révélant favorables à une augmentation des précipitations neigeuses donc à terme, à une augmentation des volumes de glace.

Les conséquences d’un retrait ou d’une avancée glaciaire dans la morphologie d’un glacier peuvent être spectaculaires et radicales :

  • dans le cas d’un retrait glaciaire, la surface du glacier devient concave (en creux) dans la largeur et dans la longueur, sa surface se couvre de bédières, de moulins et d’une moraine de surface qui peut le recouvrir entièrement sous plusieurs mètres de matériaux, les zones d’accumulation et de transport peuvent diminuer en taille au profit de la zone d’ablation, le front glaciaire peut se diviser en digitations dans le cas d’un glacier de piémont ;
  • dans le cas d’une avancée glaciaire, la surface devient convexe (en bosse) dans la longueur et la largeur, la glace en surface reste apparente car n’ayant pas le temps de se couvrir de débris, la zone d’ablation diminue au profit des zones d’accumulation et de transport, le front glaciaire se transforme en lobe glaciaire dans le cas d’un glacier de piémont.

Certaines progressions d’un glacier sont révélatrices d’une « mauvaise santé » du glacier et s’apparentent plus à un suicide qu’à une croissance. Il s’agit des surges glaciaires.

Attention aussi à ne pas confondre progression glaciaire et jökulhlaup qui sont des inondations provoquées par une vidange d’un lac subglaciaire formé au cours d’une éruption volcanique.

La plupart des glaciers alpins à travers le monde sont aujourd’hui dans une phase de retrait rapide6 tels :

  • les glaciers suisses qui ont perdu 40 % de leur longueur, plus de la moitié de leur masse et une centaine ont disparu entre 1850 et 1999 et continuent de perdre cinquante centimètres d’épaisseur chaque année ;
  • le glacier du Rhône en Suisse qui a perdu 2,3 kilomètres de longueur entre 1850 et 1999 ;
  • le glacier d’Aletsch en Suisse qui a perdu cent mètres d’épaisseur entre 1870 et 2001 ;
  • les glaciers de Valsorey et de Tseudet en Suisse qui ont perdu 1,4 kilomètre de longueur entre 1850 et 1999 ;
  • le glacier inférieur de Grindelwald en Suisse qui a perdu 1,6 kilomètre de longueur entre 1850 et 2000 ;
  • le glacier de Gébroulaz, en Vanoise a reculé de 1,63 km depuis le milieu du XIXe siècle ;
  • le glacier Furtwängler (calotte locale du Kilimandjaro) qui a perdu 80 % de son volume au cours de xxe siècle et disparaîtra entre 2015 et 2020.

Des ingénieurs tentent depuis quelques années de mettre au point des techniques pour ralentir ou stopper la fonte des glaciers, voire de leur faire regagner de la masse. Ainsi, une technique expérimentale consistait, à l’aide de nombreux forages dans la glace, à injecter de l’eau dans un glacier suisse qui était utilisé pour le ski d’été. Cette eau devait permettre au glacier de regagner de la masse en descendant moins vite dans la vallée. La technique, trop chère et pas assez efficace, a été abandonnée. En 2005, la station de ski d’Andermatt en Suisse a emballé une partie d’un glacier dans des bandes de mousse en PVC. Selon les résultats obtenus, la surface recouverte sera étendue par la suite. Bien qu’elles puissent produire des résultats encourageants, ces techniques ne résolvent pas la source du problème et ne font que retarder l’échéance d’une disparition de ces glaciers.

La fonte des glaciers représente de 25 à 30 % de l’augmentation du niveau de la mer à l’échelle mondiale.

Selon une étude de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) publiée en , près de la moitié des sites du Patrimoine mondial pourraient perdre leurs glaciers d’ici 2100 si les émissions de gaz à effet de serre se poursuivent au rythme actuel.

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Sources : Wikipédia, YouTube.

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