Les Beatles.

The Beatles est un quatuor musical originaire de Liverpool, en Angleterre. Le noyau du groupe se forme avec les Quarrymen fondés par John Lennon en 1957, il adopte son nouveau nom en 1960 et, à partir de 1962, prend sa configuration définitive, composé de John Lennon, Paul McCartney, George Harrison et, le dernier à se joindre, Ringo Starr. Il est considéré comme le groupe le plus populaire et influent de l’histoire du rock. En dix ans d’existence et seulement sept ans d’enregistrement (de 1962 à 1969), les Beatles ont enregistré douze albums originaux et composé près de 200 chansons majoritairement écrites par le tandem Lennon/McCartney, dont le succès dans l’histoire de l’industrie discographique reste inégalé.

Après avoir débuté sous le signe du skiffle des années 1950, les Beatles ont rapidement fait évoluer leur style, se nourrissant de nombreuses sources pour inventer leur propre langage musical. Leurs expérimentations techniques et musicales, leur popularité mondiale et leur conscience politique grandissante au fil de leur carrière, ont étendu l’influence des Beatles au-delà de la musique, jusqu’aux révolutions sociales et culturelles de leur époque.

Au tout début des années 1960, Lennon, McCartney et Harrison deviennent populaires dans les clubs de Liverpool et de Hambourg en reprenant des standards du rock’n’roll, mais Lennon et McCartney se sont également associés dès leur rencontre en 1957 pour écrire des chansons originales par dizaines, affinant progressivement leur technique. En 1961, Brian Epstein devient leur manager, et les présente à des maisons de disques, sans succès dans un premier temps. l’année suivante, ils recrutent le batteur Richard Starkey, dit Ringo Starr, après avoir signé un contrat avec le label Parlophone dont le patron est George Martin, qui produit leur premier succès, Love Me Do, et occupera une place prépondérante à leurs côtés jusqu’à la fin du groupe. Ce titre lance leur carrière au Royaume-Uni à la fin 1962.

Beatles, carte maximum, Belgique 4/12/1999.

Après l’essor de la Beatlemania au Royaume-Uni et ensuite en Europe, les Beatles connaissent le succès en Amérique du Nord à partir de 1964, puis rapidement dans le monde entier. À partir de l’album Rubber Soul, en 1965, le groupe expérimente davantage et produit des albums aujourd’hui classiques à commencer par Revolver (1966), puis après avoir définitivement arrêté tournées et concerts pour entrer dans leur période appelée « les années studio », Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band (1967), The Beatles (l’« Album blanc ») (1968) et Abbey Road (1969). Après leur séparation en 1970, les quatre membres poursuivent une carrière solo, et tous rencontrent le succès, particulièrement dans les années immédiates suivant la fin du groupe. Paul McCartney et Ringo Starr sont les deux Beatles encore en vie, après l’assassinat de John Lennon en décembre 1980 et la mort de George Harrison en novembre 2001.

Les Beatles demeurent les artistes ayant vendu le plus grand nombre de disques au monde. Ce chiffre était estimé par EMI dans les années 1980 à plus d’un milliard de CD et vinyles vendus à travers la planète, et il a continué à augmenter durant les décennies suivantes, atteignant un chiffre supérieur à deux milliards. Tenant une place de premier plan dans la « bande-son » des années 1960, les chansons des Beatles sont toujours jouées et reprises dans le monde entier, et leurs mélodies ont été adaptées à de nombreux genres musicaux, dont le jazz, la salsa, le reggae ou la musique classique.


John Lennon est un adolescent de Liverpool élevé par sa tante « Mimi » — Mary Elizabeth de son vrai nom6. Son père, Alfred Lennon (en) (dit « Alf »), marin, a rapidement délaissé sa mère Julia Stanley et son enfant. Julia, qui n’a pas les moyens d’élever John seule, le confie à sa sœur Mimi. Il joue de l’harmonica à partir de 1947 et dès qu’il découvre Elvis et le rock ‘n’ roll, John veut devenir musicien. Il apprend de sa mère les rudiments du banjo desquels il transpose les accords sur une guitare empruntée d’un copain. Il se voit offrir par sa mère sa première guitare en 1957.

Aussitôt, en mars 1957, alors âgé de seize ans, il forme un groupe de skiffle avec quelques amis de son lycée, le Quarry Bank High School. Initialement nommé The Blackjacks, le groupe change de nom après la découverte d’un autre groupe local se nommant déjà ainsi, et devient The Quarrymen. C’est le 6 juillet 1957 que John Lennon rencontre Paul McCartney. Lennon et les Quarrymen donnent un concert pour la fête paroissiale de l’église St. Peter. À la fin du concert, Ivan Vaughan, un ami commun, présente McCartney à Lennon. McCartney prend alors une guitare et joue Twenty Flight Rock d’Eddie Cochran devant Lennon, un peu éméché mais néanmoins très impressionné. Quelques jours plus tard, Pete Shotton, autre membre des Quarrymen, propose à Paul de se joindre au groupe. Celui-ci, qui n’a alors que quinze ans, accepte.

En février 1958, McCartney invite son ami George Harrison à un concert des Quarrymen. Celui-ci joue de la guitare et est déjà doté d’une solide expérience. Lennon lui fait passer une audition pour rejoindre le groupe et est impressionné par ses talents, mais estime qu’il est trop jeune ; il n’a alors que quatorze ans. Sur l’insistance de McCartney, George Harrison intègre le groupe comme guitariste soliste au mois de mars12. En janvier 1959, les amis de lycée de Lennon ont tous quitté le groupe pour se consacrer à leurs études au Liverpool College of Art.

À trois – guitaristes et chanteurs – au sein d’une formation à géométrie variable qui s’appelle tour à tour « The Rainbows » et « Johnny and the Moondogs », avec ou sans batteur, ils se produisent dans des clubs de Liverpool. Ils jouent notamment au Jaracanda, un coffee-shop dirigé par Allan Williams, qui sert d’agent au groupe débutant. Ils se produisent également au Casbah, dirigé par Mona Best, la mère de leur futur batteur Pete Best. D’autres portes s’ouvrent ensuite, dont le Cavern Jazz Club, alors que le rock ‘n’ roll et le Merseybeat, les styles des groupes de Liverpool, deviennent populaires dans la ville.

Autodidactes, influencés par le rock ‘n’ roll et le blues noir américain, ils jouent les morceaux de rock du moment « à l’oreille », sans partitions. Toutefois, John Lennon et Paul McCartney s’associent déjà pour écrire ensemble des chansons assis face à face avec leurs guitares dans une parfaite symétrie (McCartney étant gaucher), affinant peu à peu leur technique. Quelques-unes d’entre elles, comme One After 909, ressortiront sur les albums des Beatles des années plus tard11. Ils partagent également un drame qui les rapproche : Paul McCartney a perdu sa mère Mary, décédée des suites d’un cancer du sein en 1956, tandis que la mère de John, Julia, est tuée en étant happée par une voiture conduite par un policier possiblement ivre en juillet 1958.

Un ami peintre de John Lennon, Stuart Sutcliffe, rejoint le groupe en janvier 1960. Alors qu’il a vendu un de ses tableaux, Lennon l’encourage à s’acheter une guitare basse. Sutcliffe suggère d’adopter le nom de « Beatals », en hommage au groupe accompagnant le rocker Buddy Holly, The Crickets (« les criquets »), ainsi qu’au film l’Équipée sauvage avec Marlon Brando, où il est question d’un gang du nom de « Beetles ». Ils utilisent ce nom jusqu’en mai, où ils adoptent celui de « Silver Beatles »c et, du 20 au 28 mai, accompagnent le chanteur pop de Liverpool Johnny Gentle (en) pour une tournée en Écosse. Les membres du groupe se donnent pour l’occasion des noms de scène ː Paul Ramond, Carl Harrison (en honneur de Carl Perkins), Stuart de Staël (pour Nicolas de Staël) et Johnny Lennon. Tommy Moore est recruté pour jouer la batterie. En août 1960, ils adoptent définitivement le mot-valise « Beatles », formé à partir de beat (« rythme ») et beetle (« scarabées »), avant d’honorer leur premier contrat dans un club de Hambourg.

Le 5 octobre 1962, sort Love Me Do, qui n’atteint que le 17e rang au palmarès britannique. Ce n’est pas encore la « Beatlemania », mais il s’agit là d’une grande satisfaction pour le groupe, particulièrement au moment où le titre passe de plus en plus à la radio. Leur deuxième 45 tours, Please Please Me / Ask Me Why, est mis en boîte le 26 novembre 1962, cette fois avec Starr derrière sa batterie. Le groupe doit quitter pour un dernier séjour à Hambourg où un enregistrement bootleg sera effectué et publié en 1977 sous le titre Live! at the Star-Club in Hamburg, Germany; 1962. Leur second 45 tours est publié le 11 janvier 1963 et la face A, malgré un titre et des paroles osées pour l’époque (« You don’t need me to show the way, love », que l’on peut traduire par « tu n’as pas besoin que je te montre comment faire, chérie »), est propulsé au premier ou au second rang, dépendamment des listes consultées. Quoi qu’il en soit, le succès est indéniable, et les Beatles obtiennent ainsi l’occasion d’enregistrer un album complet. Ce disque inclura les quatre chansons publiées en single et dix autres qui seront enregistrées lors d’une seule séance de 585 minutes (9 heures et 45 minutes), le 11 février 1963. Reprenant le titre du dernier single, l’album Please Please Me sort le 22 mars 1963 et atteint la première place du hit-parade, qu’il conserve durant 30 semaines (ou sept mois).

Partie de Liverpool — où ils continuent jusqu’en août 1963 à enflammer le Cavern Club —, la popularité des Beatles se répand dans tout le Royaume-Uni, qu’ils sillonnent inlassablement, y effectuant quatre tournées cette année-là. Les succès se suivent : From Me to You en avril, puis She Loves You en août, sont classés no 1 des ventes de singles. She Loves You et son fameux « Yeah Yeah Yeah! » rend les Beatles célèbres dans toute l’Europe. Leur passage, le 13 octobre 1963, dans le très populaire show télévisé londonien Sunday Night at the Palladium marque le début du phénomène que la presse britannique baptise la « Beatlemania11 ». Disquaires pris d’assaut, presse déchaînée, ferveur généralisée, jeunes filles en transe… Le groupe va aligner douze no 1 successifs dans les charts britanniques de 1963 à 1966, jusqu’à la publication en février 1967 du single « double face A » Strawberry Fields Forever / Penny Lane, qui se classe « seulement » no 2 (mais tout de même premier aux États-Unis).

Le 4 novembre 1963, les quatre musiciens de Liverpool se produisent devant la famille royale au Prince of Wales Theatre de Londres, pour le Royal Command Performance, où un John Lennon irrévérencieux, avant de se lancer dans l’interprétation de Twist and Shout, dit au public : « On the next number, would those in the cheaper seats clap your hands? All the rest of you, if you’ll just rattle your jewelry! » (« Pour notre prochain titre, est-ce que les gens installés aux places les moins chères peuvent frapper dans leurs mains ? Et tous les autres, veuillez agiter vos bijoux ! »).

En 1963, John Lennon et Paul McCartney écrivent tout le temps, en n’importe quel endroit, dans le bus qui les amène d’un lieu de concert à l’autre, dans leurs chambres d’hôtel, dans un coin des coulisses avant de monter sur scène, dans l’urgence avant d’enregistrer, quelquefois en une seule prise, autant de titres qui vont marquer leur histoire et celle de la musique rock.

En tête des ventes d’albums, Please Please Me n’est remplacé à la première place que par le deuxième album du groupe, With the Beatles, publié le 22 novembre 1963. Ces deux disques sont exportés aux États-Unis respectivement sous les noms de Introducing… The Beatles, paru sur l’étiquette Vee-Jay Records, et Meet The Beatles, publié par Capitol Records. Le label américain a tardé à publier les disques du groupe vedette de leur maison-mère et prendra l’habitude de raccourcir la liste des chansons, modifier l’ordre des pistes, utiliser de nouvelles pochettes, et jusqu’à modifier le son de certaines chansons (rajout de réverbération, ou de versions stéréo inédites). Dans un premier temps, la maison de disques américaine affiche un mépris pour ce qu’elle pense n’être qu’un phénomène passager. Le 45 tours, I Want to Hold Your Hand, est leur premier no 1 sur le marché américain et y reste du 1er février au 14 mars 1964. Il sera détrôné par She Loves You du 21 au 28 mars, suivi de Can’t Buy Me Love du 4 avril au 2 mai. Le classement du Billboard Hot 100 du 31 mars 1964 aux États-Unis fait apparaître cinq titres des Beatles aux cinq premières places : la « Beatlemania » qui avait débuté au Royaume-Uni se propage de l’autre côté de l’Atlantique, et dans le monde entier.

Jusqu’en 1966, les Beatles enchaînent, à un rythme très soutenu, les tournées, les apparitions médiatiques, l’écriture, les séances d’enregistrement de leurs singles et albums. Mais plus leur succès grandit, plus leurs prestations publiques se déroulent dans des conditions impossibles. Ne voulant ou ne pouvant pas contrôler des foules à l’extérieur pendant que le groupe joue dans une salle trop petite, les autorités, particulièrement américaines, insistent qu’ils se produisent dans des salles ou des espaces en plein air de plus en plus grands, réunissant des dizaines de milliers de spectateurs. Mais les moyens de sonorisation sont encore balbutiants, et surtout, les quatre musiciens se produisent sous les cris stridents de la gent féminine, qui couvrent complètement leur musique. Au point qu’ils ne s’entendent pas jouer et se rendent compte finalement que le public ne les entend pas non plus.

De plus, la différence entre leur production en studio, de plus en plus complexe, faisant appel à de plus en plus d’instruments divers et de nombreux overdubs, et ce qu’ils arrivent à délivrer sur scène dans leur configuration du départ (batterie, deux guitares, basse), devient flagrante. Leur répertoire scénique reste quasiment le même au fil des années — des standards du rock ‘n’ roll comme Rock ‘n’ Roll Music ou Long Tall Sally seront notamment joués jusqu’au bout —, et ils constatent les dégâts dès qu’ils s’attaquent à des titres plus récents, par exemple Nowhere Man ou Paperback Writer : au Budokan de Tokyo, fin juin, on voit George Harrison agiter la main en saluant le public pour le faire hurler, afin de couvrir le chœur a cappella de Paperback Writer qui sonne nettement faux… Ces concerts à Tokyo ayant déclenché une demande de 209 000 billets113 se passent d’ailleurs dans une ambiance étouffante, les Beatles restant cloîtrés dans leur hôtel et bénéficiant de la plus grande protection policière jamais vue au XXe siècle pour un groupe ou un artiste, avec un dispositif (35 000 fonctionnaires mobilisés) de même ampleur que celui mis en place deux ans plus tôt pour les Jeux olympiques.

Après cette série de concerts dans la capitale japonaise, les événements vont précipiter leur décision de mettre un terme définitif à ce que John Lennon considère comme « de foutus rites tribaux ». À Manille, aux Philippines, ils passent tout près d’un lynchage, pour avoir malencontreusement snobé, à leur arrivée, une réception donnée en leur honneur par Imelda Marcos, épouse du dictateur Ferdinand Marcos, la veille de leurs concerts du 4 juillet. Le groupe répondra qu’il n’avait reçu aucune invitation, ce qui n’empêchera pas la presse locale de se déchaîner ni les Philippins d’envoyer des menaces d’attentat et de mort. Toute protection policière leur est retirée lorsqu’ils repartent, une foule hostile les attend à l’aéroport, ils sont agressés, parviennent difficilement jusqu’à leur avion qui va rester bloqué sur la piste, le temps que leur manager Brian Epstein en soit débarqué pour aller se faire délester de la recette des quelque 100 000 billets vendus pour leurs deux concerts.

Cette énorme frayeur les décide déjà à tout arrêter, mais il leur reste des dates estivales à honorer aux États-Unis. Là-bas, ils subissent les conséquences de la tempête provoquée par les paroles de John Lennon à propos du christianisme. Ils reçoivent des menaces, notamment du Ku Klux Klan, et craignent réellement pour leur sécurité, alors qu’ils se produisent dans des stades dans des conditions qui restent détestables. Ils n’en peuvent plus. La dernière date de cette tournée, le lundi 29 août 1966, au Candlestick Park de San Francisco, onze titres interprétés en un peu moins de 35 minutes, sur une scène entourée de grillages, au milieu d’une pelouse où la chasse policière aux fans déchaînés bat son plein, devient leur dernier concert tout court. Seulement 25 000 billets ont été vendus pour 31 000 disponibles, ce qui a conduit la radio rock KYA, partenaire de l’opération, à organiser des jeux pour distribuer les billets restants.

Ringo Starr explique : « À Candlestick Park, on s’est sérieusement dit que tout ça devait s’arrêter. On pensait que ce concert à San Francisco pourrait bien être le dernier, mais je n’en ai été vraiment certain qu’après notre retour à Londres. John voulait laisser tomber plus que les autres. Il disait qu’il en avait assez. » John Lennon déclare quant à lui : « Je suis sûr qu’on pourrait envoyer quatre mannequins de cire à notre effigie, et que les foules seraient satisfaites. Les concerts des Beatles n’ont plus rien à voir avec la musique. Ce sont de foutus rites tribaux. » George Harrison se remémore : « C’était trop, toutes ces émeutes et ces ouragans. La « Beatlemania » avait prélevé sa dîme, la célébrité et le succès ne nous excitaient plus5. ». l’arrêt des tournées marque une première fissure dans la carrière des Beatles, partant du principe qu’un groupe de rock ‘n’ roll qui ne joue plus sur scène n’est plus vraiment un groupe. d’ailleurs, tandis que John s’exclame : « Mais qu’est-ce que je vais faire maintenant ? » — il partira tourner le film How I Won the War à Almería en Andalousie, avec Richard Lester —, George déclare tout de go : « Je ne suis plus un Beatle désormais ». Afin de donner un second souffle au groupe, après une pause de trois mois, Paul McCartney entraîne ses partenaires dans un nouveau projet, un nouveau départ, loin des foules hystériques. Un projet qui consiste à envoyer une autre formation, imaginaire, en tournée à leur place; celle du « Club des Cœurs Esseulés du Sergent Pepper ».

Le single Something / Come Together va occuper partout la tête des palmarès, tandis que le 33 tours Abbey Road restera, à partir du 4 octobre 1969, 17 semaines no 1 en Angleterre. Le 8 septembre, deux semaines avant la sortie de cet album et au moment où Ringo Starr est hospitalisé pour des examens pour des douleurs à l’intestin, John Lennon utilise un magnétophone pour lui enregistrer les discussions d’une réunion du groupe. Lors de celle-ci, Lennon propose que le prochain album des Beatles, à être publié vers la période des fêtes, soit composé de quatre de ses chansons, quatre de McCartney (toutes crédités individuellement), quatre de Harrison et deux de Starr (« s’il les veut »). Cette possibilité de retourner en studio meurt dans l’œuf quand, le 20 septembre, au retour d’un concert au Toronto Rock and Roll Revival Festival avec le Plastic Ono Band naissant, Lennon annonce aux autres Beatles qu’il quitte définitivement le groupe, lors d’une réunion mouvementée chez Apple, en réponse à Paul McCartney qui, dans une ultime tentative de relance, proposait à son tour de repartir en tournée dans des petites salles. Ils conviennent que cette nouvelle doit rester secrète, compte tenu des enjeux commerciaux de la renégociation des contrats de distribution avec EMI au Royaume-Uni et Capitol Records aux États-Unis.

Les Beatles se sont sévèrement disputés autour du nom de leur nouveau manager, entre Allen Klein, soutenu par Lennon, Harrison et Starr, et Lee Eastman, avocat, père de Linda, l’épouse de Paul. Klein, que Paul déteste et qui refuse de poser sa signature en bas du contrat qui le lie aux Beatles, sera leur dernier manager.

Pour couronner le tout, ils perdent également la propriété de tout leur catalogue de chansons. Northern Songs était en effet détenu à 51 %, soit la majorité des parts, par Brian Epstein à travers sa société NEMS. Une fois ce dernier disparu, sa famille, et Dick James, éditeur du groupe et administrateur de Northern Songs depuis les débuts en 1963, décident en 1969 de vendre le catalogue à l’empire ATV (Associated Television), sans que les Beatles ne puissent rien faire. Un déboire qui pèse aussi de tout son poids dans l’ambiance délétère menant à la dissolution du groupe. C’est ce catalogue détenu par ATV que Michael Jackson rachètera pour 47,5 millions de dollars en 1985.

La toute dernière séance d’enregistrement des Beatles se déroule en l’absence définitive de John Lennon. Elle a lieu les 3 et 4 janvier 1970 avec le titre de George Harrison I Me Mine11. En introduction de la version publiée sur le disque Anthology 3, on peut entendre ce dernier lâcher une plaisanterie à ce sujet : « You all will have read that Dave Dee is no longer with us, but Mickey and Tich and I, just like to carry on the good work that’s always gone down in number two », ce qui signifie : « Vous aurez tous lu que Dave Dee n’est plus avec nous, mais Mickey, Tich et moi-même apprécions de poursuivre le bon travail qu’on a toujours fait au [studio] numéro deux » ; ces noms faisant référence à un groupe britannique populaire du moment, Dave Dee, Dozy, Beaky, Mick and Tich. Quatre mois s’écouleront encore sans aucune activité musicale commune, avant que la séparation ne soit rendue publique.

En mars, à l’initiative d’Allen Klein, et avec les accords de John Lennon et George Harrison5, les bandes enregistrées en janvier 1969 sont confiées au producteur nord-américain Phil Spector, afin qu’il mixe et assemble ce qui deviendra l’album Let It Be. Spector, fidèle à son style de production sciemment surchargé et grandiloquent, ajoute chœurs féminins, arrangements de cordes et effets sonores divers à ces chansons qui devaient rester « brutes ». En entendant le résultat sur son titre The Long and Winding Road, Paul McCartney, qui n’a pas été consulté, pique une énorme colère. Il expédie une lettre adressée à Allen Klein chez Apple dont les derniers mots sont : « Ne refaites plus jamais ça ! » Toutefois, l’album est publié, avec ces nouveaux arrangements dus à Phil Spector, le 8 mai 1970, et cette polémique interne n’entame en rien son succès, ni celui des chansons Get Back, Let It Be et The Long and Winding Road, toutes no 1 des deux côtés de l’Atlantique.

Les Beatles n’ont plus aucune activité commune et Paul McCartney prépare son premier album solo, quand Ringo Starr débarque à la porte de son domicile, porteur d’une lettre commune aux trois autres membres lui demandant de retarder la sortie de son disque pour laisser la place à Let It Be dont la sortie est prévue pour le 8 mai. Furieux, McCartney l’envoie au diable et lui claque la porte au nez. Quelques jours plus tard, le 10 avril 1970, il sort donc son premier album solo, sobrement intitulé McCartney, et annonce, à travers un communiqué de presse (une « interview » dans The Daily Mirror où il fait les questions et les réponses) inséré dans les pressages « promotionnels » de son disque solo, qu’il ne fait plus partie du groupe à la suite de « désaccords sur les plans personnel, financier et artistique ». Il rompt donc lui-même le secret et s’attribue la pleine responsabilité de la séparation, ce qui aura le don d’outrer ses camarades, surtout John Lennon qui ne lui pardonnera jamais cette attitude (il l’interprète comme un simple coup publicitaire dans le but de faire vendre l’album McCartney).

« Je n’avais pas l’intention que ce communiqué signifie que je quittais le groupe. C’est un gros malentendu. Quand j’ai vu les unes des journaux, j’ai juste pensé : « Seigneur, qu’ai-je fait ? » Et maintenant, on y est. Je n’ai pas quitté les Beatles. Les Beatles ont quitté les Beatles, mais personne ne veut être celui qui dira que la fête est terminée », se justifie Paul à chaud5. Ringo Starr déclarera de son côté : « Oui, j’étais dans les Beatles. Oui, nous avons fait des grands disques ensemble. Oui, j’aime ces gars. Mais c’est la fin de l’histoire. » Quant à John Lennon il dira plus tard : « J’ai fondé les Beatles et je les ai dissous, c’est aussi simple que cela ».

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Sources : Wikipédia, YouTube.

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