L’éclairage public.

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L’éclairage public est l’ensemble des moyens d’éclairage mis en œuvre dans les espaces publics, à l’intérieur et à l’extérieur des villes, très généralement en bordures des voiries et places, nécessaires à la sécurité ou à l’agrément de l’homme.

Fondamentalement, la révolution industrielle, le développement des villes et des échanges créent les besoins d’une extension et d’une gestion édilitaire des éclairages. Ceux-ci répondent à plusieurs objectifs : sécuriser les espaces urbains, permettre l’accroissement de la circulation et décorer les espaces les plus prestigieux (avenues centrales, gares, parcs et espaces d’expositions…). La lumière dans l’espace collectif présente un faste certain et les modèles de lampadaires ou de suspensions s’inspirent des luminaires de théâtres, de vestibules et de salons ; simultanément, le gaz révolutionne (tel que le montrent les peintures de Turner) l’éclairage des salles de fêtes et des cafés et favorise certainement le travail de nuit : c’est toute la vie urbaine qui voit ses cycles modifiés, prolongés, intensifiés.

À partir de la fin du XIXe siècle, l’éclairage public – déjà banalisé avec le bec de gaz – évolue avec les premières sources électriques : la lampe à arc permet l’éclairage de grandes avenues ou ronds-points et des illuminations urbaines spectaculaires. Les sources électriques ne supplantent le gaz que progressivement, avec l’invention de lampe à filament et des sources à décharge. Simultanément, les architectes (Art déco et fonctionnalistes principalement) s’emparent des effets de la lumière artificielle, surtout pour l’expression de grandes verrières (grands magasins, cinémas, garages automobiles…), de la publicité (“néons”) ou des pavillons d’exposition.

1er éclairage public à Grenoble, carte maximum, 1882.

L’utilisation intensive de la voiture va dominer l’évolution de l’éclairage public à partir des années 1950 qui voient apparaître des normes photométriques, des systèmes d’éclairage hiérarchisés, une grande extension hors ville des voiries éclairées et des sources à décharge au sodium de plus en plus efficaces et puissantes.

L’éclairage urbain se renforce (en termes de niveaux et d’uniformité photométriques) dans ce créneau technologique ; le tourisme, le folklore, les traditions (feux d’artifices), les spectacles de rue entraînent en outre le développement d’illuminations permanentes (sites et bâtiments) ou occasionnelles (fêtes urbaines).

À partir des années 1980, l’éclairage public se voit intégré parmi les outils de mise en valeur des villes et du patrimoine, en particulier sous l’impulsion du Plan lumière de la Ville de Lyon (initié en 1989).

Simultanément, il intervient parmi les outils de revitalisation de territoires : noyaux commerciaux et touristiques, centres historiques, quartiers périurbains. Des thèmes nouveaux – sécurité des piétons, des cyclistes, agrément, intégration esthétique – complexifient le domaine et les normes, dont la circulation des voitures n’est plus le seul objet et suscitent de nouvelles typologies d’éclairages (par exemple : éclairage indirect, éclairage à deux nappes de hauteur…).

On note aussi, en marge des interventions publiques, des formes d’art public, les illuminations évoluant vers des interventions d’artistes (par exemple : « Land art » expérimenté dans l’espace nocturne ; l’œuvre de James Turrell, Yann Kersalé).


Sous la domination romaine, les villes les plus importantes sont correctement éclairées. Au IVe siècle, Ammien Marcellin décrit Antioche comme “une ville où l’éclairage de nuit rivalise avec la clarté du jour”.

Au Moyen Âge, les villes européennes baignent dans une quasi obscurité : flambeaux, lanternes ou “feux” sont utilisés pour se déplacer, pour éclairer des portes de ville, porches et cours, le sommet de tours…

Il n’y a donc pas d’éclairage public au sens administratif du terme (pas plus que d’espace public, et guère d’institutions publiques) mais dans de nombreuses villes, des ordonnances émanant de pouvoirs civils imposent une forme de balisage des rues, par exemple en imposant aux riverains de suspendre des « lanternes et chandelles ardentes » aux fenêtres ou l’emploi de porte-falot faisant le guet avec leurs lanternes emmanchées au bout d’un bâton ou portées à la main.

Un ensemble d’usages et de traditions – feux de joie, décors lumineux des “joyeuses entrées” de princes, pratiques religieuses… – animent les villes lors d’événements.

Aux alentours de l’an 1000, un premier éclairage public est mentionné à Cordoba, Al-Andalus.

Centenaire de l’éclairage public, épreuve d’artiste.

En 1414, à Londres, chaque citoyen est tenu de suspendre à sa croisée une lanterne afin d’éclairer la rue; et, suivant John Stow (en), sir Henry Barton (en), lord-maire en 1417, ordonna qu’on allume durant la nuit des lanternes avec bougies, de la Saint-Michel à la Chandeleur. À ce compte, Londres aurait été la première ville d’Europe régulièrement éclairée.

L’établissement fixe des premières lanternes se fait à Paris aux environs de 1667. Auparavant l’éclairage des rues ne reposait que sur quelques chandelles que l’on recommandait de placer au premier étage des maisons bourgeoises (quand des hardes de brigands exploitaient la ville, et par exemple en 1324, 1526 et 1553, lorsque Paris était mise à contribution par les Mauvais-garçons)

Les autorités, en 1667, seraient les premières à placer au milieu et aux deux extrémités de chaque rue des lanternes garnies de chandelles et cet usage se généralisa à toutes les villes de France. Pour perpétuer le souvenir, on frappa en 1669, une médaille avec cette légende: « Urbis securitas et nitor » (« la sûreté et la netteté de Paris »). L’allumage des lampes se fait alors par des habitants désignés annuellement par les autorités, chacun dans son quartier, aux heures réglées (et un commis surnuméraire dans chaque quartier pour avertir de l’heure). Une taxe est prélevée, impôt de boues et lanternes qui permettra la transformation de la ville sous l’impulsion de son lieutenant de police : Gabriel Nicolas de la Reynie.

En 1766, à Paris toujours, les lanternes cèdent la place aux réverbères ; l’huile succédant aux chandelles à double mèche.

Les lanternes à réverbère seraient inventées par un certain abbé Matherot de Preigney et un sieur Bourgeois de Châteaublanc, qui, par lettres-patentes, enregistrées le 28 décembre 1745, obtinrent le privilège de cette entreprise.

En 1810 Isaac-Ami Bordier-Marcet impose à Paris un type de candélabre à réflecteur de sa conception.

Dès 1785, les travaux des ingénieurs français Philippe Lebon et anglais William Murdoch contribuent à la découverte du gaz d’éclairage

En 1812, l’allemand Frédéric-Albert Winsor fonde en Angleterre la Gas Light and Coke Company (aussi connue sous le nom de “Westminster Gas Light and Coke Company”) qui produit du gaz et du coke. Elle était située sur la Horseferry Road dans le quartier londonien de Westminster, et de celle-ci descend l’actuelle British Gas. La société constituée par charte royale le 30 avril 1812, sous le sceau du roi George III du Royaume-Uni est la première à fournir Londres en gaz de charbon.

En 1816, La compagnie Winsor arrive à Paris.

Dès 1817, Bruxelles s’équipe en gaz d’éclairage et devient la première ville européenne dont les rues sont éclairées au gaz de houille.

En 1857, l’industrie pétrolière naît en Roumanie, avec la première raffinerie à Ploieşti, qui alimente les 1 000 lampes à huile de l’éclairage public de Bucarest.

Dès 1870, le pétrole lampant ne nécessitant aucuns frais, le premier établissement s’établit dans les régions à faible densité de population.

Les premières utilisations modernes du gaz naturel sont apparues aux États-Unis vers 1820 pour l’éclairage public. Depuis la fin de Seconde Guerre mondiale, l’usage du gaz naturel s’est largement répandu à travers le monde et a progressivement supplanté le gaz manufacturé (gaz de ville), ceci grâce à la découverte de multiples gisements et la mise au point de méthodes de transport longue distance.Toutefois il ne sera que très rarement utilisé à des fins d’éclairage, le gaz ayant été détrôné à partir de 1880 par l’électricité.

En 1878, lors de l’exposition universelle de Paris, plusieurs places et avenues furent dotées de “bougies Jablochkoff”, en fait des lampes à arc électrique. La même année, Joseph Swan brevette en Angleterre la lampe à incandescence.

Thomas Edison fonde la Edison Electric Light Company en 1879, après l’invention de Joseph Swan, dépose le brevet de la lampe électrique à base de filament en bambou du Japon sous faible voltage dans une ampoule de verre sous vide, après avoir testé 6 000 substances végétales envoyées chercher dans le monde entier, avec un budget de 40 000 dollars.

À partir de 1880, le gaz d’éclairage cède progressivement place à l’électricité.

En 1901, Peter Cooper Hewitt invente la lampe à vapeur de mercure mais ce n’est qu’en 1932 que l’ère des lampes à vapeur de mercure sous haute pression commence véritablement.

General Electric Company propose une lampe totalement scellée à vapeur sèche, de 400 watts, destinée à remplacer les sources à incandescence de 1 000 watts, très utilisées pour l’éclairage des rues et des industries. Le succès de ces lampes sera fulgurant et, dès 1935, tous les producteurs majeurs de lampes (Siemens, GE, Osram, Philips, etc.) les proposeront à la vente.

En 1931, près d’Eindhoven (Pays-Bas), la première voirie non urbaine est éclairée à l’électricité.

Depuis quelques années, le développement des énergies renouvelables a permis à l’éclairage public de s’auto-alimenter. Des lampadaires solaires intégrant des panneaux photovoltaïques et des lampadaires hybrides intégrant des panneaux solaires et une petite éolienne ont ainsi vu le jour. Les lampadaires produisent ainsi toute l’énergie nécessaire à leur fonctionnement et ne nécessitent plus de couteux raccordement au réseau d’électricité.

Eclairage distingué “Zeiss”, Suisse, 1926.

Des réseaux locaux sont également testés. Ainsi, la ville espagnole, résidentielle, de Sant Fost de Campsentelles a initié un partenariat public privé qui a permis la construction sur une ancienne friche industrielle d’une centrale photovoltaïque dédiée à l’éclairage public de la commune.

Certaines villes ont fait le pari de tester et développer des éclairages dits « intelligents ».

Ainsi, la ville d’Oslo qui a retenu une technologie interactive de détection des véhicules, permettant d’éclairer la rue selon l’affluence, la luminosité ou d’autres paramètres définis par la ville.
Selon la compagnie de distribution d’électricité Hafslund ASA, en 2 à 3 ans, ce système contribuerait à une réduction de la consommation électrique de près de 70 % avec seulement 10 000 “lampadaires intelligents” sur les 62 000 que compte Oslo L’investissement est estimé à 6 millions d’euros et l’amortissement varie entre 5 et8 ans. Le programme norvégien a séduit 11 autres pays européens, c’est la naissance du projet e-streetlight visant à déployer d’autres réseaux d’éclairage intelligents.

À Lyon dans le quartier Montchat, l’éclairage se déclenchera au passage d’un piéton ou d’un véhicule. 300 000 kWh seront économisés par an. Ce dispositif a déjà été experimenté dans d’autres arrondissement de la ville (5e, 6e et 9e).

Les designers de Philips ont par exemple proposé en 2008 le Light Blossom, un luminaire équipé de leds et de panneaux photovoltaïques capables de suivre le mouvement du soleil voire de se transformer en pale d’éoliennes en présence de vent, et des systèmes plus sophistiqués de détection de personnes et/ou d’évènements pourraient bientôt peut-être permettre un éclairage de précision (avec analyse logicielle et capteur optique tels que ceux qui dans les appareils de photo modernes détectent les visages et corrigent l’éclairage en ajustant l’intensité du flash). Ainsi, un parking pourrait guider la voiture qui y entre en n’éclairant que les places vacantes, puis en accompagnant les personnes qui sortent de la voiture ou qui entrent dans le parking.

Publicité pour les lampes Mazda au verso d’une lettre.

Le premier éclairage public urbain au gaz d’éclairage est réalisé à Paris en 1816 par l’anglais Frédéric-Albert Winsor. Les premières réalisations, le Passage des Panoramas, l’éclairage du Luxembourg et le pourtour de l’Odéon susciteront dans la population parisienne autant d’approbation que de désapprobation, d’enthousiasme que de peurs, notamment quant au risque d’explosion des gazomètres.

Winsor abandonne l’entreprise qui est reprise par un certain Pauwels: La Compagnie française, comme elle est nommée prend son siège, Faubourg Poissonnière et fonctionne jusqu’en 1833, époque où elle est supprimée.

Louis XVIII, désireux de rattacher à son règne quelques grandes innovations, et voyant en France la décadence d’une industrie qui fleurit en Angleterre, investit personnellement dans une autre entreprise qui prend le titre de “Compagnie royale d’Éclairage par le Gaz”. Par la suite, en 1822, Louis XVIII ordonne qu’on vende l’établissement, et les acquéreurs lui conservent son premier nom.

Dans la foulée une troisième société, la Société anglaise détenue par des anglais est autorisée. Trois sociétés sont en concurrence pour l’éclairage de Paris.

Après l’éclairage de l’Opéra, les événements se précipitent : premier éclairage public, place du Carrousel, en 1818, suivi en janvier 1819 par la rue de Rivoli. C’est à cette occasion qu’apparaissent les premiers candélabres, ou réverbères sur pied.

Peu de temps après, M.Pauwels, gérant de la Compagnie française d’éclairage par le gaz, qui avait participé à la construction de la première usine, fonde deux grandes usines à Paris. Manby et Wilson, directeurs de la Compagnie anglaise, en fondent une autre. Cinq autres établissements importants sont successivement formés par diverses compagnies. La fabrication et la consommation du gaz s’accroit ainsi rapidement et l’éclairage public est progressivement assuré par becs de gaz en remplacement des lanternes à huile. En même temps les particuliers, et surtout les propriétaires de magasins, recourent, en grand nombre, au nouveau système d’éclairage.

En 1849: La majeure partie de l’industrie du gaz est détenue par des actionnaires anglais.

En 1855, un traité est passé à Paris, entre le préfet de la Seine et les compagnies diverses du gaz, dont la fusion en une seule compagnie est exigée. Ce traité fixe le prix du gaz, et règle d’une manière plus précise les qualités que doivent présenter le gaz, eu égard au pouvoir éclairant et à l’épuration.

En 1860, ces usines sont au nombre de sept, lesquelles, avec des forces de production différentes, concourent toutes à l’éclairage de Paris. Il suffira, pour donner une idée de l’importance de la production du gaz de l’éclairage à Paris, de dire qu’à la fin de 1869 la consommation de cette seule année dépassait cent-vingt-six millions de mètres cubes. Sur ce chiffre, l’éclairage de la voie publique seulement figurait pour plus de 16 millions de mètres cubes, alimentant plus de 31 000 becs de gaz, d’une consommation moyenne de 110 litres à l’heure environ. La longueur totale du réseau de la canalisation du sous-sol du nouveau Paris, dépasse 1 000 kilomètres.

Un nouveau traité est passé en 1861, avec la Compagnie parisienne, à l’époque de l’extension de Paris jusqu’à la ligne d’enceinte continue des fortifications. Ainsi concentrée en une seule et puissante administration générale, la Compagnie parisienne pour l’éclairage et le chauffage par le gaz augmente rapidement, et dans une proportion considérable, la force de production de ses usines, qui toutes, à l’époque de la fusion des compagnies, sont portées en dehors de l’enceinte de l’ancien Paris.

Lors de l’Exposition universelle de 1878, à Paris, plusieurs places et avenues furent dotées de “bougies Jablochkoff”, en fait des lampes à arc électrique. Cette expérience prometteuse fit se réunir plus d’un comité d’administration des nombreuses compagnies gazières qui existaient alors en Europe et ailleurs.

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Sources : Wikipédia, YouTube.