Le thon rouge.

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L’expression « thon rouge » désigne la chair de plusieurs grosses espèces de thons, caractérisés par la couleur rouge de leurs muscles centraux. Il ne s’agit donc pas d’une espèce en particulier, mais d’une appellation culinaire de certaines parties de plusieurs animaux (appartenant tous au genre Thunnus). Deux des espèces concernées sont menacées d’extinction par la surpêche.


On distingue trois espèces principales de thons pouvant être appelés « thon rouge » dans le monde :

  • Le thon rouge du Nord1 : Thunnus thynnus (classé en danger d’extinction)
  • Le thon rouge du Sud : Thunnus maccoyii (classé en danger critique d’extinction)
  • Le thon rouge du Pacifique : Thunnus orientalis (classé vulnérable)

Chaque espèce forme un « stock halieutique » indépendant. En 2006, la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l’Atlantique (CICTA) a montré que la capacité de pêche de thons rouges en Méditerranée dépasse largement la capacité de production de la ressource.

Maturité sexuelle : 4 ans pour le thon de l’Atlantique Est, 8 ans pour celui de l’Atlantique Ouest. La femelle pond une fois tous les deux ou trois ans. Les grands thons rouges européens reviennent chaque année sur les mêmes zones de reproduction en mer Méditerranée autour des Baléares, au large de Majorque et du canal de Sicile. Après copulation, la femelle pond des millions d’œufs en juin alors que la température de l’eau varie entre 22 et 24 °C. Un jeune né en juin atteint 30 cm et pèse 1 kg en octobre.

La chair rouge est très prisée par le marché japonais, pour la confection de sushi et sashimi, notamment la partie ventrale, le thon gras. 80 à 90 % de la production est destinée au Japon. Les Japonais plébiscitent surtout le thon gras, à savoir le thon provenant des mers froides et non pas des mers du sud.

En raison de sa position dans le réseau trophique, le thon est une des espèces commercialisées qui accumule le plus de mercure, et de plus en plus (sous forme de méthylmercure essentiellement) et de composés organiques polluants solubles dans le gras ou la chair5. Selon les analyses de l’Ifremer, le mercure total varie de 0,84 à 1,45 mg/kg poids/poids (moyenne 1,17 mg/kg) chez le thon germon et de 0,16 à 2,59 mg/kg (moyenne 1,18 mg/kg) chez le thon rouge.

Dans 78,6 % des thons germon et dans 61,1 % des thons rouges, le mercure total excède la teneur maximale fixée par la Décision de la Commission européenne (1 mg/kg sur poids humide).
Chez ces deux espèces, le mercure est essentiellement sous la forme méthylée (la plus toxique, et présente dans la chair et non dans le gras), avec des pourcentages 77 à 100 % (moyenne 91,3 %) de mercure méthylé par rapport au mercure total chez le thon germon et de 75 à 100 % (moyenne 91 %) chez le thon rouge.
La quantité de mercure ingérée hebdomadairement pour un consommateur moyen dépasse largement le seuil d’Ingestion Hebdomadaire Tolérable Provisoire (IHTP) établie pour les deux espèces par l’OMS5. Ce mercure est particulièrement dangereux pour les femmes enceintes et, plus exactement, pour leur fœtus ou embryon qui y sont très sensibles.
De plus, la partie la plus prisée par les Japonais n’est pas la partie ventrale qui se sert en tranches de sashimi, mais la chair se trouvant directement au contact de l’arête centrale du poisson, une chair extrêmement grasse (la plus susceptible de contenir certains polluants solubles dans le gras tels que HAP, PCB, dioxines, furanes, etc.).

Les captures autorisées sont établies par des négociations entre les États parmi les commissions internationales chargées de la conservation des espèces de thons. Ces commissions sont des organisations intergouvernementales :

  • Commission for the conservation of the Southern Bluefin Tuna (CCSBT) :
  • Commission pour la conservation du Thon rouge du sud,
  • Commission des thons de l’océan Indien (CTOI),
  • Interamerican Tropical Tuna Commission (IATTC) : commission interaméricaine sur les thonidés tropicaux (Pacifique est),
  • Commission internationale pour la conservation des thonidés de l’Atlantique (ICCAT ou CICTA).

Malgré ces quotas, les stocks de thon rouge du Nord sont en fort déclin depuis 20 ans.

Captures de thons rouges du Sud depuis 1952 en tonnes. La tendance reflète la baisse des stocks.
L’espèce de thon rouge du Sud (Thunnus maccoyii) est pêchée dans les trois océans, dans l’hémisphère sud. Les prises autorisées s’élèvent à 11 810 tonnes par an. Cela concerne surtout les pêcheries japonaises et australiennes.

À la fin des années 1980, les stocks de Thon rouge du Sud, dans lesquels les Japonais puisaient, se sont effondrés. La pression de pêche a alors été reportée vers le thon rouge de l’Atlantique, surtout pêché en Méditerranée où il vient se reproduire7. Ces deux “stock” semblent mieux se porter (de 2009 à 2017) grâce à une politique de quota visant à ne pas le surexploiter, mais la mode du sushi-sashimi alimente une pression sur l’espèce (son prix moyen au milieu des années 2010 était de 20 à 40€/kg et il dépasse parfois les 100€/kg7). Une filière mixte nouvelle dite embouche consiste à le pêcher vivant à la senne (filet), puis à l’engraisser en cage flottante remorquée et ancrée près de la côte. Suite à ces améliorations les quotas ont été relevés pour cette espèce.

On estime que 80 % des ressources de thon rouge du Nord (Thunnus thynnus, aussi appelé thon rouge de l’Atlantique ou de Méditerranée) ont disparu des années 1950 à 2010.

Le maximum historique a été estimé entre un million et dix millions de tonnes, ce qui fixe le seuil des 15 % à 150 000 tonnes environ pour un classement en annexe I du CITES.

Le déclin du stock de l’atlantique ouest est de 80 % entre 1970 et 2007.

En 2006, les quotas de prises de l’Atlantique ouest, pêché dans le Golfe du Mexique, étaient d’environ 2 500 tonnes. Selon l’International Consortium for Investigative Journalists, le marché noir du thon rouge de l’Atlantique occidental pesait plus de quatre milliards de dollars entre 1998 et 2007.

En 2011 et 2012, le quota était de 1 750 tonnes, il est maintenu à ce niveau en 2013.

Le thon rouge de l’Atlantique et de Méditerranée sont les plus pêchés, selon la CICTA et les organisations écologiques, ses stocks sont menacés d’effondrement : 74 % de la biomasse a disparu entre 1955 et 2007.

Les captures autorisées sont :

  • en 2006 : 32 400 tonnes,
  • en 2007 : 29 500 tonnes,
  • en 2008 : 28 500 tonnes,
  • en 2009 : 22 000 tonnes,
  • en 2010 : 13 500 tonnes,
  • en 2011 : 12 900 tonnes,
  • en 2012 : 12 900 tonnes,
  • en 2013 : 13 500 tonnes,
  • en 2014 : 13 500 tonnes,
  • en 2015 : 15 821 tonnes.

Ces chiffres sont à mettre en perspective avec :

Les captures réalisées dans le passé : d’après la FAO elles n’ont jamais dépassé 50 000 tonnes par an.

Le potentiel naturel du thon rouge en Atlantique Est et Méditerranée est de 50 000 tonnes par an. Or, le très faible niveau de la biomasse de géniteur, qui ne dépasse pas 100 000 tonnes aujourd’hui contre le triple au début des années 1950, ne permet absolument pas de soutenir un tel effort de pêche : les quotas actuels, aussi limités soient-ils, ne garantissent pas une reconstitution rapide et certaine du stock. Les scientifiques de l’ICCAT estiment à seulement 60 % la probabilité de rétablir le rendement maximum de la pêcherie en 2022.

Les captures déclarées n’ont officiellement jamais dépassé le potentiel de rendement et les quotas n’ont pas permis de rétablir le stock. Plusieurs éléments expliquent cette situation :

La productivité naturelle n’est pas constante : elle peut baisser plusieurs années si les conditions de recrutement sont mauvaises; dans ce cas, elle peut passer sous les 29 000 tonnes : il est possible que les années de forte pression de pêche entre 1992 et 2002 aient eu lieu pendant des épisodes climatiques très défavorables au renouvellement de la population, réduisant graduellement le stock de géniteur et donc le potentiel de reproduction pour la saison suivante. Pour gérer efficacement une pêcherie, il est nécessaire d’ajuster en permanence les quotas, y compris accepter une forte baisse si la reproduction est faible. C’est le refus d’un ajustement de ce type qui est à l’origine de la crise de l’anchois dans le Golfe de Gascogne. Ces données de capture sont issues des déclarations des pêcheurs : une fraude massive pourrait avoir eu lieu, ce qu’affirment certaines sources, notamment l’institut PEW. Les captures auraient été sous évaluées de 98 000 tonnes entre 1998 et 2010, sans compter le marché noir de poissons vendus hors criées. D’après cet institut, la probabilité de constitution du stock en 2022 ne serait en réalité que de 24 %.

La pêche de poissons plus jeunes pour l’engraissement en cage, l’utilisation de senneur à la place des techniques traditionnelles comme la canne et la madrague ont réduit la sélectivité de la pêche : hors le MSY décroît quand la sélectivité baisse, son niveau théorique maximum nécessite une maîtrise parfaite de la sélectivité.

Selon le WWF, de 2000 à 2010, 14 300 tonnes de thon rouge en conserve, soit environ 18 000 tonnes de poisson vivant, ont été illégalement commercialisées via le Panama.

Le 9 septembre 2009, la Commission européenne propose aux pays de l’UE de soutenir une interdiction mondiale de son commerce, en demandant l’inscription du thon rouge de l’Atlantique sur l’annexe I de la CITES (à l’initiative de Monaco). La position de l’UE sera réexaminée avant la réunion de la CITES en mars 2010 pour tenir compte des données scientifiques les plus récentes ainsi que des décisions adoptées lors de la réunion annuelle de la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l’Atlantique (CICTA) qui s’est tenue en novembre 2009.

Début 2010, la France a pris officiellement position pour l’interdiction du commerce international du thon rouge de Méditerranée (Thunnus thynnus) (mise en annexe I de la CITES), mais en demandant un délai de dix-huit mois pour la mise en œuvre de cette mesure (maintien de la pêche « côtière » avec 10 % des quotas de pêche durant dix-huit mois). Greenpeace et d’autres ONG environnementale estiment de leur côté ce délai trop long, car selon les évaluations du comité scientifique de l’CICTA, il ne reste aujourd’hui que moins de 15 % de la population d’origine, ce qui met l’espèce en position très critique, ne serait-ce que du point de vue de l’effondrement de sa diversité génétique (facteur de résilience écologique si l’on souhaite une reconstitution rapide des populations). Selon le WWF, qui dénonce une surpêche massive aggravée par les activités illégales, le thon rouge pourrait disparaître de la Méditerranée d’ici 2012.

Malgré les pressions du Japon, à Genève, le 5 février 2010, la CITES (chargée pour l’ONU de la gestion de la commercialisation ou interdiction de commercialisation des espèces en danger), s’est finalement dite favorable à une interdiction générale du commerce de thon rouge ; cette proposition devant être étudiée lors de son Assemblée de mars 2010 et confirmée dès la réunion des 175 États membres de l’organisation du 13 au 25 mars 2010 à Doha. La proposition d’interdire le commerce international du thon rouge de l’Atlantique est rejetée jeudi 18 mars lors de la réunion de la Convention sur le commerce à Doha, par 68 voix, contre 20 favorables et 30 abstentions. La proposition européenne, qui prévoyait un délai d’inscription à l’Annexe I, est également rejetée par 72 voix contre 43 pour et 24 abstentions.

Après plusieurs années de stocks historiquement bas, la CICTA observe en 2015 une hausse de la biomasse du stock des poissons reproducteurs, qu’il estime à 585 000 tonnes, soit quatre fois plus qu’au milieu des années 200013. Ce rétablissement s’explique par l’efficacité des mesures de réduction des captures, la présence de reproducteurs âgés en masse et par des bonnes conditions de survie des juvéniles. Le rapport du CICTA souligne toutefois les grandes incertitudes de ces chiffres et l’importance de poursuivre les efforts, par le biais de programmes nationaux et du GBYP, en vue d’améliorer la qualité des indices d’abondance actuellement utilisés et d’obtenir des indicateurs solides indépendants des pêcheries.

La Commission des pêches du Pacifique occidental et central (WCPFC) est créée en 2004 en vertu d’un traité de l’ONU visant à préserver le thon et les autres espèces de poissons migrateurs dans l’ouest et le centre de l’océan Pacifique.

Neuf pays et territoires, dont le Japon, les États-Unis, la Chine, la Corée du Sud et Taïwan, concluent début septembre 2013 un accord au sein de la WCPFC pour réduire de 15 % en 2014 leurs prises de thons rouges âgés de trois ans et moins, par rapport à la moyenne des prises entre 2002 et 2004.

En plus de cette commission, un peu plus de 300 pêcheurs de l’Île d’Iki au Japon ont créé le collectif “Protégeons la ressource thonière de la mer d’Iki”. Ce collectif a pour principale mission d’alerter le gouvernement japonais et les grosses entreprises de pêche intensive sur le risque d’une pêche du thon rouge non durable dans l’océan Pacifique. Depuis 2013, date de création de ce collectif, le groupe de pêcheurs locaux réclame un moratoire sur la pêche au thon rouge pendant la période de ponte. La capture massive de thon rouge pendant la période de reproduction est très nocive pour la santé de l’espèce. La quantité de thon rouge a par exemple fortement baissée dans la mer du Japon, passant de 358 tonnes en 2005 à moins de 23 tonnes en 2014. Les pêcheurs locaux attribuent cette disparition du poisson à la pêche intensive pendant la période de ponte. Toutes ces actions ont permis au collectif “Protégeons la ressource thonière de la mer d’Iki” de faire partie des finalistes du prix Seafood Champions Awards.

Voir aussi cette vidéo :

https://www.youtube.com/watch?v=idm2noTrXwc

Sources : Wikipédia, YouTube.

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