Le palais de justice de Rouen (Seine-maritime).

Le palais de justice de Rouen, ancien Échiquier de Normandie, est un édifice de la ville de Rouen, situé dans le département français de la Seine Maritime, en région Normandie. Il s’agit de l’un des monuments les plus emblématiques de la capitale normande.

Réalisé en grande partie de 1499 à 1507 pour abriter le Parloir aux Bourgeois3 et l’ancien Échiquier de Normandie, il devient Parlement de Normandie sous le règne de François Ier, en 1515, avant de faire fonction de palais de justice à partir de la Révolution française. Le bâtiment sera agrandi au XIXe siècle vers les rues Jeanne d’Arc et Socrate.

Par l’ampleur et la richesse de sa conception, il témoigne d’abord de la prospérité retrouvée de la ville de Rouen à la fin du XVe siècle, renouvelant alors un patrimoine municipal auparavant négligé.

En tant qu’exemple de l’architecture civile de style Louis XII des premières décennies du XVIe siècle, le monument fait l’objet d’un classement au titre des monuments historiques par la liste de 1840. Son architecture est à rapprocher de celle de l’hôtel de Bourgtheroulde et du bureau des Finances contemporains.

Palais de justice de Rouen, essais de couleurs.

Une première fois ravagé le 19 avril 1944 lors d’un bombardement de grande ampleur sur Rouen et son agglomération, c’est cependant le bombardement du 26 août, précédant la libération de la ville qui provoqua le plus de dégâts, anéantissant presque radicalement le corps de logis central de style Louis XII. L’édifice doit alors être partiellement reconstruit. L’achèvement quasi complet de cette restitution minutieuse confirmera le classement de l’édifice au titre des monuments historiques en 1977 suivie par son inscription définitive en 1979.


Le 3 mars 1494, les conseillers de la ville adoptent une résolution en vue de construire au Neuf Marché une grande salle, dénommée aujourd’hui Salle des Procureurs, où les marchands de la ville pourront se réunir. Première étape de la construction de l’actuel palais de justice, cet édifice, correspondant actuellement au corps de bâtiment ouest, est construit entre 1499 et 1508 par les architectes Roger Ango et Roulland Le Roux.

Au XVe siècle la justice normande est rendue par un tribunal itinérant. En 1499, le roi Louis XII, sous l’insistance notamment du cardinal Georges d’Amboise réforme l’Échiquier et en fait une cour permanente.

Alors qu’en 1508, Louis XII fixe sa résidence à Rouen, s’élève en retour d’équerre, à l’extrémité nord de ce premier édifice, le Palais royal ainsi que l’échiquier de Normandie, devenu rapidement parlement de Normandie à l’avènement de François Ier. Correspondant à l’actuel corps de bâtiment nord, sa façade, exposée au midi, s’étend sur une largeur de plus de 65m. Il est probablement commencé en 1509 tandis que le gros œuvre est terminé en 1517. Marquant une évolution stylistique, cette partie de l’édifice est marquée par le style Louis XII, transition entre l’art gothique et la Première Renaissance.

Entre 1525 et 1528 environ, le bâtiment est rallongé d’une travée vers l’est. La toiture est alors modifiée par la réalisation de deux grandes lucarnes, complétée par des ouvertures percées à l’étage. Cette extension serait partiellement l’œuvre de Roulland Le Roux, architecte du bureau des Finances (actuel office de tourisme de Rouen). Tandis qu’un nouvel escalier sur la travée sud de la salle des procureurs est réalisé par Jean Delarue et Étienne Guiffart en 1531, la moitié orientale du corps de bâtiment nord est achevée vers 1550.

Palais de justice de Rouen, carte maximum, Rouen, 25/01/1975.

L’édifice jugé trop étroit au XVIIIe siècle, amène la création dès 1700, d’une nouvelle aile en regard de la salle des Procureurs. Réalisée par Jacques II Millets-Désruisseaux, elle se développe en retour d’équerre sur la rue Saint-Lo. Afin de compléter ce nouvel ensemble, un corps de logis situé sur la place du Neuf Marché est commencé en 1739 par Pierre Jarry avant d’être achevée en 1759 par Alexandre Dubois. Au XIXe siècle, ce groupe de bâtiments est en si mauvais état que le fronton principal finit par s’écrouler le 1er avril 1812, à dix heures du soir, déterminant, par là-même, la chute du plafond où Jean Jouvenet, paralysé de la main droite, avait peint de la main gauche, le Triomphe de la Justice.

Formant une disparate désagréable avec l’ensemble du monument, ces édifices de style moderne, sont finalement remplacés de 1833 à 1836 par des constructions spacieuses, tout à fait en rapport avec le style des deux autres ailes médiévales. Complétant ces travaux, le pavillon situé dans l’angle nord-ouest de la cour et la porte aux cerfs (sur la rue aux Juifs) est démoli en 1834.

Alors que le mur crénelé sur la rue aux Juifs, accusé de trop obscurcir la cour d’honneur, fait place à une grille achevée en 1836, une restauration générale de la façade est confiée en 1844, malgré quelques réserves, à Henri Charles Grégoire (1791-1854), architecte des bâtiments civils du département de la Seine-Inférieure. Contre toute attente, l’habileté dont il fit preuve pour mener à bien cette entreprise, lui vaudra d’être rappelé par la commission des monuments historiques afin d’achever la façade de l’abbaye Saint-Ouen. Parallèlement, l’escalier de la salle des procureurs, menaçant ruine, Henri Charles Grégoire se voit confier le soin de le remplacer par un nouvel escalier de style néogothique qu’il déplaça au milieu de l’aile médiévale afin de ne pas cacher la riche ordonnance des façades du palais.

Afin de remplacer la statuaire du Palais de Justice, en grande partie disparue à la Révolution, on confia dès 1836, à Joseph Brun (1792-1855), premier Prix de Rome en 1817, de représenter dans le costume de leur temps, les différentes classes sociales et personnalités qui concoururent à l’érection de l’édifice. On retrouve ainsi sculptés Louis XII, Anne de Bretagne, le cardinal d’Amboise, François Ier, une allégorie de la Justice, un laboureur, une villageoise, une damoiselle, un seigneur, un moine ainsi qu’un artiste.

Participant de l’historicisme ambiant, Louis Desmarest s’essaie entre 1857 et 1885 à la restitution des décors de la Grande chambre et de la Salle des procureurs tandis que Lucien Lefort, apôtre de l’historicisme à Rouen, reconstruit et agrandit à partir de 1880 le corps de bâtiment ouest réalisé au XVIIIe siècle par l’architecte Pierre Jarry.

L’escalier flanquant l’aile médiévale sur gauche de la cour d’honneur a été reconstruit en 1904 par Paul Selmersheim. Cette création de style néo-gothique champenois fait suite à l’« affaire de l’escalier » qui vit le démontage de l’œuvre réalisée en 1903 par l’architecte Lucien Lefort.

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, l’ensemble de l’édifice est une première fois ravagé le 19 avril 1944 lors du bombardement dit de la « semaine rouge », provoquant la destruction quasi totale des intérieurs de l’aile ouest de style gothique flamboyant. Pour autant, à la suite d’une erreur de marqueur, c’est le bombardement du 26 août, précédant la libération de la ville, qui provoqua le plus de dégâts en anéantissant presque radicalement le corps de logis central de style Louis XII. Seuls les murs de pierre restent debout tandis que pinacles, charpentes et magnifiques vaisseaux de bois de chêne en forme de carène renversée, sont détruits. Tous les intérieurs dont la magnifique salle des assises sont ravagés. Cette dernière a été restitué depuis avec son plafond à caissons de style Renaissance tandis que les charpentes ont été remplacées par des carènes de béton.

Si les parties néogothiques échappent à la destruction, elles restent encore marquées par les impacts des bombes, maintenus volontairement en l’état, afin de rendre hommage et de perpétuer le souvenir des milliers de victimes de ces jours décisifs, rappelant par là même quel a été le prix payé par la ville de Rouen pour la Libération de la France.

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Sources : Wikipédia, YouTube.