Le Monastère d’Osios Loukas (Grèce).

Le monastère d’Ósios Loukás (en grec : Μονή Οσίου Λουκά / moní Osíou Louká, « monastère du bienheureux Lucas », ou simplement Ὅσιος  Λουκᾶς / Hósios Loukás) compte parmi les plus beaux monastères byzantins de Grèce. Situé près de Dístomo, entre la Béotie et la Phocide, il est classé au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1990 avec le monastère de Daphni et celui de Nea Moni de Chios. Il est réputé pour ses mosaïques à fond d’or du XIe siècle, ses fresques et le raffinement de sa décoration : pavements de marbre, jaspe et porphyre.


L’histoire du monastère commence avec celle de son fondateur, un saint anachorète local prénommé Luc de Steirion (ou Steiris), né en 896 dans l’ancien village de Delphes appelé Castri, en Phocide. Il s’installe en ermite sur les lieux de son futur monastère en 945, sur les flancs du mont Hélicon, sous l’acropole de l’antique cité de Steirion, à l’emplacement même du temple de Déméter. Avec le soutien et l’aide financière de riches fonctionnaires et du stratège du thème d’Hellade, le protospathaire byzantin Krénitès Arotras, saint Luc et les moines venus le rejoindre bâtissent une grande église dédiée à sainte Barbe, mais de nos jours consacrée à la Vierge, sous le nom de Panaghia. Il y demeure jusqu’à sa mort le 7 février 953 ; ses ossements sont recueillis dans un reliquaire que l’on peut voir dans la crypte. L’église est achevée en 955. Plusieurs blocs de calcaire portant des inscriptions antiques, et venus de Stiris, ont été utilisés en remploi dans les murs byzantins. En 961, la libération de la Crète du joug arabe, prophétisée par saint Luc quelques années auparavant, contribue à la renommée du monastère, qui reçoit de nombreux dons et bénéfices impériaux. En 1011, l’higoumène Philothéos et les moines élèvent une seconde église, le catholicon, dédiée à saint Luc. Le monastère est occupé par des moines latins pendant la période franque ; la région dépendait alors du duché d’Athènes. Les moines latins furent remplacés par des moines orthodoxes après la conquête turque, à la fin du XVe siècle.

En 1790, un tremblement de terre endommage sérieusement l’église de la Vierge, et des travaux de consolidation sont entrepris en 1846. Les surfaces intérieures de cette église ont été malheureusement recouvertes de crépi en 1870-71, et on y ajouta même des corniches et des ornements de plâtre. Ce n’est qu’en 1971 que ces ornements surajoutés qui déparaient le style de l’église ont été supprimés. À la suite des observations de Charles Diehl et d’archéologues anglais, des travaux de consolidation sont décidés en particulier sur la grande coupole dont la couverture est refaite en tuiles spéciales6. Le monastère a été pillé à de nombreuses reprises au cours de différents conflits depuis le Moyen Âge, et a servi parfois de base à certains chefs militaires : c’est ainsi qu’en 1821, l’évêque Salonon Isaias y déclara son soutien à la cause de l’indépendance nationale, en bénissant les armes des Grecs de Roumélie insurgés contre l’occupant turc. En 1943, le réfectoire des moines est détruit par un bombardement, mais a été restauré par la suite. Des travaux de conservation et de consolidation ont été effectués dans le catholicon du monastère dans les années 2000. De nos jours, le monastère est encore occupé par quelques moines orthodoxes.

Le monastère d’Osios Loukas, dont les premiers bâtiments datent du Xe siècle, est l’un des plus importants témoignages d’architecture médiévale byzantine en Grèce. Il fut construit en 1011 sur les fondations d’une église bâtie à partir de 946, sous le règne de Basile II. Le plan du monastère est documenté par la relation de voyage et les relevés que fit en 1743 le célèbre moine Basil Grigorovitch Barsky. Ses dessins montrent un mur d’enceinte, flanqué de trois hautes tours d’angle, et clôturant tout le monastère. De ces trois tours, ne subsiste plus que la tour carrée à quatre étages remaniée à une date postérieure. Autour d’un espace carré, le monastère rassemble tous les bâtiments conventuels comme les cellules à deux et trois étages, les bâtiments utilitaires, la tour du clocher à l’angle sud-ouest, et le réfectoire rectangulaire bâti au xie siècle sur le côté sud. La topographie accidentée du site a imposé un plan en forme de pentagone irrégulier ; au milieu de la cour centrale, à ciel ouvert, s’élèvent les deux églises du monastère, la petite église de la Vierge, et attenant, le catholicon dédié à saint Luc. Ces deux églises sont partiellement mitoyennes de façon très particulière : le mur du narthex et du porche de la première, et une partie du mur nord du  catholicon sont incorporés l’un dans l’autre.

Vue de l’extérieur, l’église de la Vierge peut être considérée comme un des meilleurs exemples que nous possédions de l’architecture décorative byzantine d’époque médiévale. Le chœur est formé de trois absidioles adoptant un tracé demi-hexagonal, en saillie sur la façade. Celle-ci présente un décor de moellons et de briques typiquement grec c’est-à-dire local. Il est disposé en tranches alternées soulignées visuellement par des « cordons de dents » intercalés entre les assises horizontales, ce qui produit un élégant contraste entre la couleur claire des pierres lisses et le rouge des briques ; les corniches dentelées en céramique et les frises de briques ornées de caractères coufiques apportent une note décorative soignée ; les fenêtres simples géminées ou trilobées sont situées à des niveaux différents ; le jeu des volumes résulte de la variété des toits, à un ou deux versants. La coupole à haut tambour octogonal en marbre orné de fenêtres bilobées, dont la partie supérieure a été reconstruite, s’élève avec élégance au-dessus de cet ensemble. Les parties sculptées sur le tympan de ces fenêtres étaient autrefois remplies de stuc, et le tympan lui-même était peint.

À l’intérieur, l’église adopte le plan en croix grecque avec une nef carrée dont le pavement de marbre offre un décor très intéressant ; elle est surmontée d’une coupole que soutiennent quatre colonnes. Deux chapiteaux de ces colonnes présentent une variante originale du style corinthien, avec leurs feuilles d’acanthe, leurs chérubins et des cabochons encastrés au milieu des entrelacs stylisés. L’iconostase en marbre blanc est d’une grande beauté, avec ses colonnettes octogonales, leurs chapiteaux et un entablement délicatement sculptés. Dans l’ensemble, au dire du professeur et archéologue Pavlos Lazaridès, « le décor sculpté de l’église de la Vierge est d’une finesse d’exécution remarquable qui rappelle les miniatures des manuscrits grecs du Xe siècle. » Le large narthex est surmonté de six basses voûtes en plein cintre soutenues par deux colonnes de granite. Devant ce narthex, le porche à travées avec voûte d’arêtes est un ajout tardif, l’une de ces travées voûtées ayant été incorporée à la nef de l’église saint Luc. Des peintures murales d’origine, ne subsistent plus que les fresques de quelques saints, dont celle de Saint Ignace d’Antioche. Une œuvre picturale d’un style exceptionnel a été découverte sur ce qui était jadis la façade occidentale de l’église, paroi libre donc autrefois visible de l’extérieur, mais aujourd’hui incluse dans une travée voûtée d’arêtes de l’église saint Luc : elle date par conséquent de la seconde moitié du Xe siècle. Il s’agit du général en chef de l’armée des Hébreux, Jésus de Navé, en tenue militaire ornée de perles, au moment où lui apparaît l’archange Michel, peu avant la prise de Jéricho. Armé d’une lance, portant une épée à la ceinture et un bouclier suspendu dans le dos, le personnage traduit l’esprit triomphal des campagnes militaires victorieuses. Son visage auréolé respire la force et la beauté de la jeunesse. La vigueur parfaite de l’exécution picturale exprime la sérénité, la grâce et l’harmonie qui caractérisent l’art byzantin du Xe siècle après la crise iconoclaste de 843. On y trouve aussi « l’écho de l’ambiance qui régnait à cette époque dans l’empire byzantin, déchiré par les luttes incessantes contre les incroyants. Jésus de Navé tenait lieu en quelque sorte de défense contre les peuples belliqueux des Arabes et des Bulgares. » Sa présence à l’entrée du monastère doit probablement être mis en relation avec la reconquête de la Crète en 961, qu’avait prophétisée saint Luc.

Source : Wikipédia.

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