Le megalocéros.

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Le mégalocéros ou mégacéros (Megaloceros giganteus), appelé autrefois le « grand cerf des tourbières », a été un des plus grands cervidés de tous les temps. Il ressemblait à un daim de grande taille et ses bois mesuraient jusqu’à 3,50 m d’une extrémité à l’autre. Bien qu’il ait vécu dans toute l’Europe et dans une grande partie de l’Asie pendant un demi-million d’années avant son extinction récente, il est souvent appelé « élan irlandais » dans l’usage international à cause des nombreux spécimens découverts dans les tourbières d’Irlande du Quaternaire. Les derniers spécimens connus de cette espèce ont été datés par le carbone 14 de la base de l’Holocène, il y a environ onze mille ans.


Ce cerf géant atteignait une hauteur de 1,8 à 2 mètres au garrot dans le cas des mâles, soit presque autant que le plus grand des élans-cerfs. Il s’agissait d’une espèce avec un fort dimorphisme sexuel, car les femelles étaient bien plus petites et plus graciles que les mâles, outre qu’elles étaient dépourvues de leurs bois impressionnants. On peut trouver une importante collection de squelettes de M. giganteus au Musée d’histoire naturelle d’Irlande (en) à Dublin.

Megalocéros, carte maximum, Paris, 19/04/2008.

Traditionnellement, on a qualifié d’exagérée la taille des bois de l’élan irlandais, on y a vu le résultat d’une sélection sexuelle tellement poussée qu’elle a conduit l’espèce à sa disparition. Dans les ouvrages anciens, on voit souvent des illustrations montrant un cerf géant empêtré dans les broussailles et les arbres avec ses propres bois, devenant une proie facile pour un lion des cavernes ou un groupe d’hommes primitifs. En réalité, de telles représentations n’ont aucun sens : les cerfs géants ont survécu à trois glaciations et vivaient surtout dans les toundras et les steppes ouvertes ou dans les réseaux de prairies et clairières entretenues par les nombreux troupeaux de mammouths, bisons, élans, rennes et autres aurochs et cervidés, et non dans les forêts fermées comme les cerfs européens et les daims aujourd’hui. Le cerf géant ne s’est pas éteint par la faute de ses bois, que d’ailleurs il ne portait qu’en automne et en hiver, à l’époque du rut. Chez les cervidés, les bois du mâle croissent en proportion du reste du corps. Petits chez le chevreuil ou le poudou, ils sont moyens chez le cerf et le daim et grands chez l’élan ; une fois qu’on a pu déterminer la relation corps/ramure, on peut calculer si vraiment il y a disproportion par rapport à l’animal, et les études des paléontologues comme Stephen Jay Gould concluent que les bois du Megaloceros étaient, comme chez tous les cervidés, de dimension « allométrique », c’est-à-dire augmentaient en fonction de la taille du corps, déduite de celle de la tête : la longueur des bois, explique Gould, augmente 2,5 fois plus rapidement que celle du crâne ; si donc la dimension des ramures est bien fonction de la taille du corps, elle n’est cependant pas simplement proportionnelle à sa taille. Gould fait l’hypothèse que cet animal, ayant profité d’un niveau moins élevé de la mer à l’époque de la dernière glaciation, pour envahir les îles Britanniques, n’y a subsisté qu’autant que le paysage n’était pas couvert de forêts denses, ce qui se produira après la fin de la glaciation.

Des espèces insulaires naines comme Megaceros lgarensis de Sardaigne, Megaceros cretensis de Crète ou Megaloceros cazioti de Corse ont des bois beaucoup plus petits et de proportions, tant en taille brute qu’en relation avec le reste du corps, plus semblables à celles des cervidés de leur taille qu’à celles de leur gigantesque cousin.

Les représentations de l’art pariétal paléolithique permettent de constater des variations dans la coloration et la longueur des poils selon les époques de l’année. Il semble qu’en été, les poils étaient plus courts et de couleur brune, rougeâtre ou fauve ; en hiver, avec la ramure pleinement développée, ils devenaient brun foncé sur le cou, les pattes et l’échine, tandis que la tête, le poitrail et le ventre étaient blancs ou jaunâtres. Sur les épaules s’étendait une zone plus foncée qui dessinait deux lignes latérales vers le cou, lignes qui se croisaient en formant un « collier » foncé au milieu du cou, et deux autres vers les flancs.
On ignore dans quelle proportion la chasse a pu contribuer à sa disparition, mais cet animal a été consommé par les hommes préhistoriques.

Les cerfs géants se nourrissaient grâce à l’herbe et aux jeunes pousses d’arbre abondant dans les grandes plaines froides qui couvraient l’Eurasie pendant une grande partie du Pléistocène. Il est probable que dans les périodes les plus froides de l’hiver, ils se retiraient légèrement vers les zones les plus méridionales de leur habitat. Comme prédateurs habituels les individus adultes n’avaient à redouter que le lion des cavernes, l’homme de Néandertal et Homo sapiens. Les individus jeunes ou affaiblis pouvaient aussi être victimes des loups, des hyènes et des ours.

Comme le suggère leur fort dimorphisme sexuel, les cerfs géants étaient polygames. Tout comme d’autres cervidés, il est probable que les mâles se constituaient un harem de femelles à l’époque du rut après avoir combattu front contre front avec leurs rivaux masculins ; à la fin de l’hiver ces groupes se séparaient, la femelle restant seule à s’occuper de son unique petit.

De nombreux squelettes de jeunes mâles indiquent que les mâles cessaient de manger à l’époque du rut et se consacraient exclusivement à la lutte et à la reproduction, comme le font les cerfs européens actuels. Il en résultait de nombreuses morts parmi les mâles à cette époque, spécialement dans le cas des individus jeunes qui succombaient facilement devant la force plus grande des plus âgés et mouraient ensuite complètement épuisés sans avoir pu se reproduire. En outre, les besoins en calcium et en phosphate pour la formation des bois prédisposaient les mâles à l’ostéoporose ; ainsi la mortalité, déjà élevée, s’accroissait pendant les mauvaises années. Les changements de flore aux périodes chaudes privaient l’espèce des minéraux nécessaires dans plusieurs zones où la population se réduisait ou arrivait à disparaître.

Tout comme les autres mégacerinés, l’élan irlandais a ses origines dans les steppes asiatiques. On trouve l’espèce pour la première fois en Asie centrale et en Europe de l’Est il y a presque un demi-million d’années. Comme il était adapté à un climat froid et sec et à des espaces ouverts, le cerf géant étendait son domaine en Europe pendant les périodes froides ; quand la glaciation s’accentuait, il se réfugiait dans sa zone d’origine où il faisait plus chaud. À l’époque de leur plus grande extension, les cerfs géants sont arrivés jusqu’en Irlande et dans la Péninsule ibérique, mais jamais ils n’ont atteint l’Amérique, comme l’ont fait au contraire d’autres animaux comme le bison des steppes et le mammouth.

Avec la fin des glaciations, alors que les populations humaines s’étendaient vers le nord et l’ouest, l’espèce a rapidement diminué. En principe, on place son extinction à environ –10 600 ans, avec celle de la plus grande partie de la mégafaune mondiale ; mais en 2000 on a découvert dans l’Île de Man et dans le Sud de l’Écosse des restes qui dataient d’environ –7 500 avant notre ère. Apparemment, une petite population avait suivi les glaces dans leur retrait vers le Nord et s’était retrouvée isolée là, où elle s’est éteinte, probablement victime de l’arrivée par le sud des chasseurs humains. En 2004 a eu lieu une découverte encore plus sensationnelle : à des milliers de kilomètres de là, aux pieds des montagnes de l’Oural, en Russie, on a trouvé des restes plus récents qui montraient l’existence des cerfs géants en Sibérie occidentale jusqu’aux environs de –5 000 ans. Leur extinction coïncide avec une série de modifications dans leur environnement induite par des paysans du Néolithique en Russie, mais il est possible que ces géants aient également encore souffert de la chasse. Le cerf irlandais, après avoir survécu à trois ères glaciaires, s’est éteint.

Source : Wikipédia.

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