L’attaque de Pearl Harbour, le 7/12/1941.

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L’attaque de Pearl Harbor est une attaque surprise menée par les forces aéronavales japonaises le 7 décembre 1941 contre la base navale américaine de Pearl Harbor située sur l’île d’Oahu, dans le territoire américain d’Hawaï. Autorisée par l’empereur du Japon Hirohito, elle vise à détruire la flotte du Pacifique de l’United States Navy. Cette attaque provoque l’entrée des États-Unis dans le conflit mondial.

L’anéantissement de la principale flotte américaine doit permettre à l’empire du Japon de continuer à établir sa « sphère de coprospérité de la Grande Asie orientale » en privant les Américains des moyens de s’y opposer militairement ; c’est aussi une réponse aux sanctions économiques prises par Washington en juillet 1941, contre sa politique impérialiste, après l’invasion de la Chine et de l’Indochine française dans le cadre de l’expansionnisme du Japon Shōwa.

L’attaque, dirigée par le général Hideki Tōjō, est lancée le dimanche 7 décembre à 7 h 48 par le Service aérien de la Marine impériale japonaise contre la flotte américaine du Pacifique et les forces stationnées sur place. Elle est conduite en deux vagues aériennes parties de six porte-avions impliquant plus de 400 avions. En moins de vingt-quatre heures, l’empire du Japon attaque également les États-Unis aux Philippines et engage les hostilités avec le Royaume-Uni, en envahissant Hong Kong et en débarquant en Malaisie.

Les pertes américaines sont importantes : 2 403 morts et 1 178 blessés. Mais seulement deux cuirassés sont détruits (le troisième n’étant qu’un bateau cible) ainsi que 188 avions. Les seize autres navires endommagés sont remis en état dans les mois qui suivent (dont onze avant la fin de 1942). Parmi les navires endommagés figurent six cuirassés, trois croiseurs, quatre destroyers. Les trois porte-avions du Pacifique, alors absents de Pearl Harbor, demeurent intacts. Les Japonais perdent 64 hommes, 29 avions et cinq sous-marins de poche ; un marin est capturé.

Aux États-Unis, cette attaque reste un des événements les plus marquants de l’histoire du pays et est synonyme de désastre national — chaque année le drapeau est mis en berne le 7 décembre. Les historiens ont mis en évidence l’audace du plan de l’amiral Isoroku Yamamoto, le manque de préparation et les négligences américaines. Le rôle  du président Roosevelt reste un sujet de polémique.


Les conquêtes nipponnes en Asie orientale menaçaient les intérêts  américains et Washington intervint contre le Japon, sans aller jusqu’à la confrontation armée. Ainsi, le traité de Washington de 1922 limita le tonnage de la flotte de guerre japonaise au troisième rang mondial. En réponse aux pressions diplomatiques internationales à la suite de l’invasion de la Mandchourie, Tokyo décida de quitter la Société des Nations en 1933. Entre 1935 et 1937, les États-Unis choisirent la non-intervention en promulguant une série de lois sur la neutralité.

Le Japon signa le pacte anti-Komintern en 1936. En 1937, le président des États-Unis Franklin Roosevelt prononça à Chicago le Discours de la quarantaine dans lequel il condamnait les dictatures, y compris celle du Japon. L’année suivante, son discours sur l’état de l’Union propose d’augmenter les dépenses militaires. En décembre 1937, au moment du massacre de Nankin, les avions japonais coulèrent la canonnière américaine Panay sur le Yang-tse-Kiang. Washington obtint des excuses mais la tension monta rapidement entre les deux pays. En 1939, le gouvernement américain mit fin au traité de commerce signé en 1911, prélude à l’embargo commercial.

En 1940, l’Empire rejoignit les forces de l’Axe en signant le Pacte tripartite. La même année, le quartier-général impérial, profitant de la défaite de la France et de l’affaiblissement du Royaume-Uni, autorisa l’implantation de bases militaires en Indochine française. Immédiatement après un accord conclu le 22 septembre avec le gouverneur-général de l’Indochine française, le Japon déclencha une offensive sur Lang Son et bombarda Haiphong.

1941 fut l’année de l’escalade entre les deux pays : en mai, Washington accorda son soutien à la Chine par l’octroi d’un prêt-bail. À la suite du refus du Japon de se retirer de l’Indochine et de la Chine, à l’exclusion du Mandchoukouo, les États-Unis, le Royaume-Uni et les Pays-Bas décrétèrent à partir du 26 juillet 1941 l’embargo complet sur le pétrole et l’acier ainsi que le gel des avoirs japonais sur le sol américain. Cinq mois plus tard, les approvisionnements de pétrole du Japon étaient réduits de 90 %. Le gouvernement japonais, angoissé à l’idée que, tôt ou tard, le pays se retrouverait totalement privé de ces ressources précieuses, réalisa qu’il devait vite trouver une solution pour se sortir de l’impasse.

La conférence impériale tenue le 6 septembre 1941 décida qu’une guerre serait entreprise contre les États-Unis et le Royaume-Uni, à moins qu’un accord ne soit trouvé à bref délai avec Washington. Ce compromis reflète les deux courants qui s’opposaient au sein du gouvernement japonais. Fumimaro Konoe, alors Premier ministre du Japon, prit position du côté des négociations avec les États-Unis et, du moins il l’espérait, de la paix. Soutenu entre autres par l’empereur, il chercha à rencontrer le président Roosevelt début août, dans l’optique de prouver la bonne foi japonaise, même si la guerre venait à éclater. De l’autre côté, les chefs militaires, comme Osami Nagano, s’opposaient farouchement à tout ce qui pouvait retarder l’entrée en guerre immédiate du Japon. D’après leurs estimations, plus la guerre commencerait tôt et finirait rapidement, plus les chances de victoire du Japon augmentaient. Ainsi, c’est l’opposition de ces deux points de vue qui fit que, au terme de la conférence impériale du 6 septembre, le plan choisi fut le suivant : les défenseurs de la diplomatie avaient quelques semaines pour tenter des négociations pendant que l’on poursuivait les préparatifs pour la guerre, après quoi celle-ci serait déclarée, ce qui déjà à ce stade semblait être l’issue la plus probable. Ainsi, la guerre était probable, mais pas nécessairement inévitable, et à ce stade le renoncement des Japonais à leur politique expansionniste aurait pu l’éviter.

L’attaque de Pearl Harbor n’est pas un plan préparé conjointement par l’Allemagne et par le Japon mais une initiative japonaise, les Allemands y ayant vu leur intérêt. Le 16 octobre, le Premier ministre du Japon Fumimaro Konoe démissionna de son poste après avoir pris conscience qu’« un accord avec les États-Unis sur le problème des troupes en Chine était l’unique chose qui pût maintenant arrêter [les préparatifs militaires]. La logique était évidente. Seul un nouveau gouvernement, qui ne serait pas lié par la décision du 6 septembre, pouvait enrayer l’élan vers la guerre. » Il comprit aussi que ses idées ne plaisaient pas, et préférait céder sa place à un militaire. Il manifesta son accord avec le général Tōjō, qui proposa alors le prince Naruhiko Higashikuni, un oncle de l’empereur, pour le remplacer. Hirohito refusa cette candidature, proposée également par les militaires, et choisit plutôt le général Tōjō, un ferme partisan de la guerre mais également un homme renommé pour sa fidélité envers l’institution impériale. Ainsi, malgré sa conviction personnelle, la nomination de Tōjō pouvait au contraire s’avérer être une dernière chance pour la paix : « Homme borné, il était lié à l’empereur par un sens de l’obéissance et du devoir à toute épreuve. « Nous ne sommes encore que des humains ; l’empereur, lui, est divin, observa-t-il. Je m’inclinerai toujours devant la divinité et la grandeur de Son Excellence. » » Après une discussion avec l’empereur, que l’idée de partir en guerre inquiétait, Tōjō accepta de promouvoir autant que possible les négociations, dans un dernier effort pour éviter la guerre et pour satisfaire son souverain.

Toutefois, l’arrivée d’un nouveau Premier ministre ne changea rien au dilemme qui secouait le gouvernement. Lors de la conférence de liaison qui dura du 23 octobre au 1er novembre 1941, les options étaient claires. Le Japon pouvait renoncer à la guerre, acceptant ainsi de devenir une puissance de troisième ordre, ou renoncer à la paix, et se lancer dans une guerre dont l’issue était plus qu’incertaine, sachant qu’après deux ans la victoire devenait impossible, par manque de pétrole et d’acier. Ainsi, comme l’explique l’historien Ian Kershaw, « [l]’alternative était entre la paix dans l’austérité au sein d’un monde dominé par l’Amérique ou la guerre assortie d’une défaite probable mais en défendant l’honneur national ». Malgré le compromis auquel parvint le gouvernement, c’est-à-dire préparer la guerre tout en continuant les négociations, la guerre était quasiment assurée. À ce moment, Tōgō, le ministre des Affaires étrangères, proposa deux plans de négociations, le plan A et le plan B. Le premier, à l’image du comportement du Japon depuis le début de l’affaire, était dénué de toute vraie concession. Tōgō lui-même était conscient que le plan A avait peu de chance de convaincre les Américains et n’en attendait donc pas grand-chose. Le plan B, plus engageant, pourrait quant à lui offrir un terrain pour les négociations, quoiqu’une bonne partie du gouvernement japonais était réticente aux compromis qu’il proposait. En effet, il comportait quelques concessions, entre autres concernant la Chine, qui était au cœur des tensions entre Japon et États-Unis, cependant il garantissait la paix, bien qu’elle ne soit peut-être pas durable. Ainsi, le gouvernement de Tōjō fut contraint d’accepter le plan B.

De son côté, Hull, le secrétaire d’État américain, après avoir intercepté des informations sur la volonté des Japonais d’attaquer les États-Unis, ne souhaita plus trouver un terrain d’entente avec ces derniers. Il repoussa le plan B, qui ne faisait pas assez de concessions selon lui. Roosevelt, quant à lui, cherchait toujours à gagner du temps et ne fermait pas la porte à la négociation. Mais malgré une certaine bonne volonté du président, le gouvernement américain, convaincu de la mauvaise foi des Japonais, renonça finalement aux propositions d’accord, qui pourtant auraient pu fonctionner.

Parallèlement à l’échec des négociations avec les États-Unis, les Japonais commencèrent à préparer l’attaque. Le 3 novembre, l’amiral Osami Nagano expliqua en détail à Hirohito la version finale du plan d’attaque contre Pearl Harbor. Le 5 novembre 1941, l’empereur approuva en conférence impériale le plan d’opération pour une guerre contre les États-Unis, le Royaume-Uni et les Pays-Bas prévu pour le début décembre. Le jour même, le quartier-général impérial mit en application la décision adoptée à la conférence et ordonna au commandant en chef de la flotte combinée, l’amiral Isoroku Yamamoto, de mettre en branle la mission sur Pearl Harbor. Les négociations avec les États-Unis demeurant dans l’impasse, Hirohito approuva finalement le 1er décembre en conférence impériale la guerre de la Grande Asie orientale, après que Nagano et le ministre de la Marine Shigetaro Shimada, l’eurent rassuré la veille sur les chances de succès de l’entreprise en réfutant l’argument du prince Nobuhito Takamatsu qui jugeait que la Marine impériale ne pourrait tenir plus de deux ans contre les États-Unis.

À partir du XIXe siècle, la puissance militaire japonaise se renforça et se modernisa grandement. Pour pallier la hausse du chômage provoquée par la Grande Dépression, le gouvernement multiplia les commandes d’armement. Les dépenses militaires augmentèrent fortement. Au total, le Japon possédait en 1941 une quinzaine de cuirassés, une dizaine de porte-avions, 50 croiseurs, 110 destroyers, 80 sous-marins et quelque 1 350 avions24. Surtout, le pays comptait 73 millions d’habitants animés d’une fierté patriotique et d’un esprit de sacrifice. Les militaires japonais étaient confiants dans la supériorité de leur armée ; en outre, Tokyo était assuré du soutien allemand en cas de contre-attaque des Américains.

En 1941, les États-Unis n’étaient pas prêts à entrer en guerre. Certes, le pays était une puissance démographique (132 millions d’habitants) et industrielle de premier ordre. En 1941, l’aviation américaine pouvait avancer plusieurs milliers d’avions, mais beaucoup étaient obsolètes. En 1940, face aux trois millions de soldats japonais, l’United States Army était en position d’infériorité numérique (250 000 hommes).

Surtout, l’opinion américaine n’était pas prête à entrer en guerre. Le souvenir de la Première Guerre mondiale et des soldats américains morts en Europe était encore très présent. Les emprunts contractés par les belligérants auprès des États-Unis n’avaient pas été remboursés et beaucoup d’Américains étaient isolationnistes. Le président Franklin Roosevelt (1933-1945) ne voulait pas s’aliéner les Américains d’origine allemande, italienne et japonaise. Le comité America First, une association pacifiste influente, faisait également pression pour maintenir les États-Unis hors de la guerre.

En janvier 1941, Roosevelt promit à Winston Churchill que son pays interviendrait d’abord contre l’Allemagne nazie et non contre le Japon. Pour soulager le Royaume-Uni dans la bataille de l’Atlantique, d’avril à juin 1941, trois cuirassés, un porte-avions, quatre croiseurs et deux flottilles de destroyers sont transférés du Pacifique à l’Atlantique (soit 20 % de la flotte du Pacifique) ce qui laisse la supériorité numérique dans la zone à la marine japonaise.

Pearl Harbor constituait la plus grande base navale américaine dans l’océan Pacifique. Elle se trouvait sur la côte sud de l’île d’Oahu, dans l’archipel d’Hawaï, 15 km à l’ouest d’Honolulu. Elle était relativement isolée dans l’océan Pacifique, à 3 500 km de Los Angeles et à 6 500 km de Tokyo. L’île d’Oahu était la plus peuplée de l’archipel hawaïen et se trouvait sur la route des bases américaines de Guam, Wake et Midway. Au début de la Seconde Guerre mondiale, 140 000 à 180 000 Japonais résidaient à Hawaï.

La base de Pearl Harbor s’étendait autour d’une rade peu profonde. L’entrée de cette rade se faisait par un chenal très étroit (400 mètres de large). La plupart des navires de guerre mouillaient à l’intérieur de la rade, à l’est et au nord de l’île de Ford. Trois se trouvaient à l’ouest (l’USS Utah, l’USS Raleigh et l’USS Curtiss). Les bâtiments de guerre étaient amarrés deux par deux, par souci d’économie et par manque de place.

La flotte de guerre américaine du Pacifique, composée alors de la Battle Force, la Scouting Force, la Base Force et de la Amphibious Force avaient, le dimanche 7 décembre, 86 unités dans la base : 28 destroyers, 9 croiseurs, 8 cuirassés, 4 sous-marins, un cuirassé-cible (l’USS Utah) et une trentaine de bâtiments auxiliaires38. On comptait enfin 25 000 hommes sur la base et environ 300 avions et hydravions de l’USAAF et de l’aéronavale dans l’île. Le général Walter Short était le commandant des forces terrestres tandis que la flotte du Pacifique était sous les ordres de l’amiral Husband Kimmel. La défense des installations et des ateliers de réparation était assurée par la DCA et les défenses littorales ainsi que 35 B-17.

L’objectif de l’attaque était d’anéantir la flotte américaine stationnée à Pearl Harbor afin de conquérir sans difficulté l’Asie du Sud-Est et les îles de l’océan Pacifique. Le but était de contraindre les forces américaines à quitter Hawaï pour se replier sur les bases de Californie. Il fallait par ailleurs réduire en cendres les docks, les ateliers de réparation et le champ de réservoirs contenant les approvisionnements en mazout pour la flotte du Pacifique, sans oublier les aérodromes de Wheeler Field et d’Hickham Field. Le Japon voulait aussi effacer l’humiliation des sanctions économiques prises par Washington. Les préparatifs de l’attaque furent confiés au commandant en chef de la flotte Isoroku Yamamoto.

Approuvé officiellement le 5 novembre 1941 par Hirohito, le plan d’attaque de Pearl Harbor avait quant à lui été élaboré dès le début de l’année 1941.

Ce plan devait surmonter deux difficultés. Premièrement, l’isolement relatif d’Hawaï rendait impossible le recours aux navires de guerre classiques. Deuxièmement, les eaux peu profondes de la rade de Pearl Harbor empêchaient l’utilisation de torpilles conventionnelles qui auraient explosé sur le fond marin avant d’atteindre leur cible.

La stratégie japonaise reprenait les éléments décisifs de deux batailles sur mer : le premier était l’effet de surprise de l’attaque japonaise menée par l’amiral Heihachirō Tōgō contre la flotte russe à Port-Arthur en février 1904 ; le second était le lancement de plusieurs bombardiers-torpilleurs Fairey Swordfish depuis un porte-avions de l’escadre menée par l’amiral britannique Andrew Cunningham contre la flotte italienne à la bataille de Tarente en novembre 1940. La bataille devait ainsi être décisive, selon le principe du kantai kessen en vigueur dans la marine japonaise depuis le début du siècle.

En 1941, l’amiral Isoroku Yamamoto envoya des experts japonais en Italie pour recueillir des informations qui permettraient de transposer cette stratégie dans le Pacifique. La délégation revint avec des renseignements sur les torpilles que les ingénieurs de Cunningham avaient imaginées. Les plans japonais ont sans doute été aussi influencés par ceux de l’amiral américain Harry Yarnell qui anticipait une invasion d’Hawaï. Au cours d’un exercice militaire du 7 février 1932, ce dernier avait mis en évidence la vulnérabilité d’Oahu en cas d’attaque aérienne par le nord-ouest. La simulation avait montré que des avions ennemis pourraient infliger de sérieux dommages et que la flotte ennemie, restée à l’écart des côtes, serait indétectable pendant 24 heures. À l’académie navale de Tokyo, les jeunes officiers savaient qu’« au cas où le gros de la flotte de l’ennemi serait stationné à Pearl Harbor, l’idée devrait être d’ouvrir les hostilités par une attaque aérienne surprise. »

Yamamoto eut du mal à faire accepter son plan d’attaque : par exemple, l’amiral Nagano jugeait l’entreprise particulièrement risquée. Yamamoto s’appuya sur Kameto Kuroshima pour obtenir l’approbation du chef d’état-major de la Marine Sadatoshi Tomioka, un adversaire de Yamamoto et subordonné de Nagano. L’empereur ne souhaitait pas une attaque surprise sans déclaration de guerre. Les réticences de Nagano venaient du fait que l’opération devait engager une grande partie de la marine de guerre, qui devrait parcourir une grande distance sans être repérée. Yamamoto menaça de démissionner pour que son plan soit finalement adopté, en octobre 1941. Cela laissa donc peu de temps à Minoru Genda pour préparer l’expédition, essayer les nouvelles torpilles et entraîner les hommes pour la mission.

Pour que l’attaque ait des chances de réussir, il fallait qu’elle soit précisément définie et menée dans le plus grand secret. Les ingénieurs militaires japonais créèrent des torpilles spéciales (Type 91) munies d’ailerons pour les stabiliser. Ils produisirent également des bombes capables de percer la coque des navires.

L’observation de la situation sur la base de Pearl Harbor, la configuration des installations et les activités des navires et avions furent confiées à un officier de la marine japonaise envoyé comme espion à Hawaii sous la couverture du consulat du Japon, Takeo Yoshikawa. Sa présence et ses activités ne furent pas détectées par les services de renseignement américain, sauf un message qu’il reçut de Tokyo via le consul du Japon le 24 novembre, dit ‘message 83’, qui lui demandait d’établir un plan du port et des bases avec les positions exactes des navires et avions, et de fournir un certain nombre d’informations sur leur exploitation. Ce message fut décodé et traduit en octobre par les services de renseignement américains, mais ne fut pas communiqué au commandement d’Hawaii. Si ce message avait été transmis à l’amiral Husband E. Kimmel et au général Walter Short, ceux-ci auraient pu être conduits à faire renforcer leurs dispositifs défensifs.

Le 3 novembre, l’amiral Nagano expliqua en détail le plan d’attaque à Hirohito. Le 5 novembre, l’empereur approuva en conférence impériale le plan d’attaque. Les renseignements fournis par des Japonais d’Hawaï furent déterminants dans la réussite de l’opération : il fallait attaquer un dimanche car la flotte américaine n’était pas en manœuvre le week-end et de nombreux équipages n’étaient pas complets. Il n’y avait aucune patrouille ce jour-là. Les espions japonais fournirent également des informations sur la situation de la flotte américaine.

Le 14 novembre 1941, la « flotte combinée » se concentra dans la baie d’Hito-Kappu, au sud des îles Kouriles. Elle se composait d’une force de choc avec sa force aéronavale, le Kidô Butai, qui comportait notamment six porte-avions (Akagi, Hiryū, Kaga, Shōkaku, Sōryū, Zuikaku) et plus de 400 avions : des avions de chasse Mitsubishi A6M (les Zéros), des bombardiers-torpilleurs Nakajima B5N (Les Kate) et des bombardiers en piqué Aichi D3A (les Val). Une flotte de reconnaissance comprenait 22 sous-marins, cinq sous-marins de poche Ko-hyoteki, emportant chacun deux hommes et deux torpilles de 450 mm et trois croiseurs légers48. Huit bateaux de ravitaillement en carburant accompagnaient l’expédition.

Le 26 novembre, alors que les deux gouvernements étaient encore en pourparlers, l’armada de la Marine impériale japonaise quitta secrètement le Japon. Elle se dirigea vers l’archipel d’Hawaï par le nord en empruntant une route peu fréquentée.

Le 1er décembre, Hirohito approuva en conférence impériale la guerre de la Grande Asie orientale et autorisa le bombardement de Pearl Harbor. Lorsque la flotte reçut l’ordre officiel d’attaquer le 2 décembre, les pourparlers se poursuivaient encore (voir ci-dessous). Le 6 décembre, la flotte qui se trouvait à 200 milles marins (370 km) au nord de Pearl Harbor, reçut le signal d’attaque : « Escaladez le mont Niitaka ».

l’arrêt du soutien américain aux Chinois. Le secrétaire d’État Cordell Hull réclamait quant à lui le retrait des troupes nipponnes de Chine. Le 6 décembre 1941, Roosevelt transmit un télégramme à l’empereur Hirohito afin de reprendre les négociations qui avaient lieu à Washington.

Le même jour, le ministère des Affaires étrangères japonais envoya à ses négociateurs et à l’ambassadeur Kichisaburo Nomura en place à Washington un document codé en 14 points, texte diplomatique signifiant la rupture des relations diplomatiques ; ils avaient pour consigne de le remettre au secrétaire d’État américain le lendemain à 13 h, soit 7 h 30, heure d’Hawaï. Mais le message ne fut pas remis à l’heure prévue en raison de retards dans le décryptage de ce texte long et complexe. Les services américains de renseignement réussirent à décoder le message bien avant l’ambassade japonaise : seul le dernier point du mémorandum, c’est-à-dire la déclaration de guerre, n’avait pu être déchiffré par les Américains. Le dimanche 7 décembre à 11 h 58, heure de Washington (6 h 28 à Hawaï), le général George Marshall lut le message ; inquiété par sa teneur, Marshall fut persuadé qu’une attaque se préparait. Il expédia un télégramme pour donner l’alerte aux bases américaines situées aux Philippines, à Panama, à San Diego et à Pearl Harbor. En raison de défaillances techniques, l’alerte arriva trop tard à Hawaï, plusieurs heures après les bombardements. Le message parvint à l’ambassadeur américain au Japon environ dix heures après la fin de l’attaque.

Isoroku Yamamoto et d’autres généraux avaient prévu une attaque en trois vagues, mais le vice-amiral Chuichi Nagumo décida de n’en retenir que deux. Le nombre total d’avions impliqués dans l’attaque était de 350. 91 avions furent engagés dans la protection des porte-avions et des navires.

Ce fut dans la nuit du 6 au 7 décembre que les opérations débutèrent massivement, l’aube permettant de réduire les précautions à prendre pour éviter d’être repéré et accélérer ainsi la vitesse de progression.

L’attaque sur la Malaisie, le 8 décembre, a lieu en fait au même moment, car de l’autre côté de la ligne de changement de date.

Vers minuit, les sous-marins de haute mer lancèrent cinq sous-marins de poche qui se dirigèrent vers l’île d’Oahu.

À 3 h 58, le dragueur de mines USS Condor signala la présence d’un sous-marin dans la rade de Pearl Harbor au destroyer USS Ward. Ce dernier se mit alors à sa recherche sans succès : l’intrus avait rapidement disparu. L’amirauté de Pearl Harbor ne donna pas l’alerte. À 6 h 37, le Ward repéra un autre sous-marin qui était chargé de renseigner la flotte japonaise et le détruisit.

C’est entre 6 h et 7 h 15 que la première vague de 183 avions, conduite par le capitaine de frégate Mitsuo Fuchida, s’envola vers Pearl Harbor.

Leur présence ne fut détectée que vers 7 h par deux soldats américains (George Elliot Jr. et Joseph Lockard) à la station d’Opana Point (un radar SCR-270 situé près de la pointe nord d’Oahu). Ces derniers ne sont pas pris au sérieux par un nouvel officier, le lieutenant Kermit A. Tyler, convaincu qu’il s’agissait de six bombardiers B-17 qui arrivaient de Californie et qui étaient attendus pour se ravitailler avant de rejoindre leur destination finale de Clark Field dans les îles Philippines.

Vers 7 h 30, le premier avion japonais fit une reconnaissance dans les alentours et donna le signal : « Pearl Harbor dort. »

Les premiers avions survolèrent la base américaine à 7 h 40note 2. Les avions torpilleurs volaient à basse altitude et provenaient de différentes directions. Les bombardiers volaient quant à eux à haute altitude.

À 7 h 53, les premières bombes nippones furent larguées et les avions se mirent en formation d’attaque. Le contre-amiral Patrick Bellinger donna l’alerte.

Cinq sous-marins Ko-hyoteki torpillèrent les bateaux américains après le début des bombardements. Sur les dix hommes qui se trouvaient à bord des sous-marins, neuf trouvèrent la mort ; le seul survivant, Kazuo Sakamaki, fut capturé et devint le premier prisonnier de guerre japonais fait par les Américains au cours de la Seconde Guerre mondiale. Une étude de l’Institut naval américain conduite en 1999 indique qu’une torpille toucha l’USS West Virginia qui devint la première cible de l’attaque japonaise.

Cette première attaque était menée par six unités dont une avait pour objectif le poste militaire de Wheeler Field (voir le plan). Les Japonais exploitèrent les premiers moments de surprise pour bombarder les navires les plus importants, surtout à l’est de la rade. Chacune des attaques aériennes commençait par les bombardiers et finissait par les unités de combat afin de contrer les poursuites éventuelles. La première attaque engagea le flanc droit de l’ennemi.

171 appareils devaient prendre part à la seconde attaque mais deux D3A1 restèrent sur le pont pour ennuis mécaniques et trois autres appareils (1 D3A1 et 2 Zéro) durent retourner apponter pour les mêmes raisons. Aucun avion torpilleur ne fut utilisé car jugé trop vulnérable face à la DCA désormais en alerte. À 8 h 30, la seconde force de frappe de 167 appareils visa le flanc gauche.

Elle fut menée par le lieutenant-commandant Shigekazu Shimazaki. Elle était divisée en quatre unités dont l’une fut lancée sur la base de Kānehohe, à l’est de Pearl Harbor. Les différentes formations arrivèrent presque en même temps sur le site depuis plusieurs directions.

Au cours de la deuxième vague, un sous-marin de poche venu en surface fut pris pour cible par le Curtiss et coulé par le destroyer USS Monaghan. La seconde vague s’acheva à 9 h 45. Après l’attaque, des avions survolèrent le site afin d’étudier les dommages et de faire un rapport. Le B5N2 de Fuchida fut probablement le dernier à quitter les lieux. Il prit de nombreuses photos et surveilla le retour des appareils aux porte-avions japonais.

Les hommes qui se trouvaient à bord des navires américains furent réveillés par les explosions. Le fameux message « Air raid Pearl Harbor. This is not a drill » (« Attaque aérienne sur Pearl Harbor. Ceci n’est pas un exercice ») fut prononcé par le commandant Logan Ramsey à 7 h 58, cinq minutes après les premières bombes. L’amiral Husband Kimmel alerta Washington quelque temps après.

En dépit du manque de préparation et des scènes de panique, plusieurs militaires se sont illustrés durant la bataille63. L’amiral Isaac C. Kidd et le captain Franklin Van Valkenburgh se ruèrent sur le pont de l’USS Arizona afin d’organiser la défense et furent tués par l’explosion d’un dépôt d’armes tout proche. Les deux hommes furent honorés de manière posthume par la médaille d’honneur. L’enseigne de vaisseau Joe Taussig, Jr. dirigea l’artillerie antiaérienne de l’USS Nevada, et fut sévèrement blessé, mais continua néanmoins à servir à son poste. En raison de l’absence du commandant de l’USS Nevada, le lieutenant commander F. J. Thomas en prit le commandement pendant l’attaque, en assura l’appareillage et le manœuvra jusqu’à ce que le bâtiment s’échoue, à 9 h 10. L’un des destroyers, l’USS Aylwin, fit de même avec seulement quatre officiers à son bord, uniquement des enseignes de vaisseau qui avaient peu d’expérience à la mer. Le captain Mervyn Bennion, commandant l’USS West Virginia, dirigea son équipage jusqu’à ce qu’il fut tué par des fragments de bombes. Les premières victimes de l’attaque aérienne se trouvaient sur le sous-marin USS Tautog qui abattit également le premier Japonais. L’Afro-Américain Doris « Dorie » Miller, qui servait comme cuisinier sur l’USS West Virginia, prit le contrôle d’une mitrailleuse de lutte anti-aérienne et s’en servit pour tirer sur des avions japonais : il en toucha au moins un alors que son navire était bombardé dans le même temps. Il reçut la croix de la marine (Navy Cross) après la bataille. Quatorze marins et officiers furent par ailleurs récompensés par la médaille d’honneur. Une distinction militaire spéciale, la Pearl Harbor Commemorative Medal, fut par la suite décernée à tous les vétérans de l’attaque. Dans le ciel, la seule opposition importante vint d’une poignée de Curtiss P-36 Hawk et de Curtiss P-40 Warhawk qui firent vingt-cinq sorties et par les défenses anti-aériennes. Des avions décollèrent pour tenter de repérer la flotte japonaise, en vain.

Certains officiers pressèrent l’amiral Nagumo de lancer une troisième attaque afin d’anéantir les dépôts de carburant et les infrastructures de Pearl Harbor. Certains historiens ont suggéré que la destruction des réserves de carburant et des équipements de réparation aurait fortement handicapé la flotte du Pacifique, bien plus que la perte des navires de ligne. Cependant, Nagumo décida de renoncer à une troisième attaque pour plusieurs raisons : en premier lieu, les défenses antiaériennes eurent plus de succès au cours de la seconde vague et occasionnèrent les 2/3 des dommages nippons. L’effet de surprise avait disparu et une troisième vague risquait d’accroître les pertes japonaises. Ensuite, la préparation d’une troisième attaque aurait pris beaucoup trop de temps, laissant aux  Américains la possibilité d’attaquer les forces de Nagumo situées à moins de 400 km au nord d’Oahu. L’armada pouvait rapidement être localisée et prise en chasse par les sous-marins ennemis. En outre, les Japonais ignoraient toujours la position des porte-avions américains et avaient atteint la limite de leurs capacités logistiques : rester plus longtemps augmentait le risque de manquer de carburant. La deuxième vague avait atteint l’objectif initial de la mission, à savoir neutraliser la flotte américaine du Pacifique. On se souvient que les autorités japonaises avaient été réticentes devant cette opération, c’est pourquoi l’expédition devait s’arrêter là. Il était donc temps de partir, d’autant que le Japon avait d’autres objectifs stratégiques dans le Sud-Est asiatique.

Le bilan humain de l’attaque fut lourd : 2 403 Américains sont morts et 1 178 ont été blessés.

Près de la moitié des pertes américaines, soit 1 177 hommes, fut provoquée par l’explosion et le naufrage de l’USS Arizona. Celui-ci explosa à cause d’un obus de marine de 406 mm modifié de façon telle qu’il puisse être utilisé comme une bombe de 800 kg, largué par Tadashi Kusumi. La bombe frappa le navire au niveau de la tourelle avant de 356 mm. Le blindage de pont, plus fin dans cette zone, fut traversé par la bombe qui s’arrêta dans la soute à munitions et y explosa. La coque de l’Arizona sert aujourd’hui de mémorial. Il continue d’ailleurs de perdre un peu de carburant, plus de 70 ans après l’attaque.

Du côté japonais, les pertes humaines furent beaucoup moins lourdes : 64 morts (aviateurs et neuf sous-mariniers) ; l’enseigne Kazuo Sakamaki fut capturé, premier prisonnier de guerre japonais du conflit. Le mitrailleur Onishi sauta de son B5N2 en flamme sans parachute ; il sera repêché vivant mais succombera à ses blessures peu de temps après. Fusata iida, commandant de la chasse du Soryu, précipita son Zéro touché par la DCA sur un hangar mais rata sa cible de peu. Le pilote Shigenori Nishikaïchi dont le Zéro était également trop endommagé pour rentrer, se posa sur l’île de Niihau mais fut tué le 13 décembre.

Le bilan matériel fut aussi limité : les cinq sous-marins de poche engagés furent coulés ou capturés et un sous-marin de croisière a été coulé le 10 décembre (le I-70 avec 121 membres d’équipage fut détruit par des avions de l’USS Enterprise). Sur les 441 avions japonais disponibles, 350 prirent part à l’attaque et 29 furent abattus durant la bataille, neuf au cours de la première vague, vingt dans la seconde. 74 autres furent touchés par les défenses antiaériennes et l’artillerie au sol. Peu après que l’escadre nippone eut fait demi tour, les Japonais perdirent également un 30e appareil quand le pilote de Zéro Nomura se tua en manquant son appontage sur le Soryu à la suite d’une mission de reconnaissance.

Le plan audacieux de Yamamoto et de Genda avait atteint ses objectifs.

Source : Wikipédia.

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