La sécurité sociale.

En France, la Sécurité sociale désigne un ensemble de dispositifs et d’institutions majoritairement privées qui ont pour fonction de protéger les individus des conséquences d’événements ou de situations diverses, généralement qualifiés de « risques sociaux ». La notion de Sécurité sociale revêt deux aspects :

  • sur le plan fonctionnel, la Sécurité sociale assiste des personnes lorsque celles-ci sont confrontées tout au long de leur vie à différents évènements ou situations dont l’incidence financière peut se révéler coûteuse. Ces événements sont appelés des risques : maladie, maternité/paternité, invalidité, décès, accident du travail, chômage, maladie professionnelle, vieillesse, famille ;
  • sur le plan institutionnel, les fonctions de la Sécurité sociale sont portées et assurées par divers organismes, pour la plupart relevant du droit privé2 mais assurant une mission de service public. Seules une demi-douzaine de structures nationales sont des établissements publics administratifs (essentiellement les caisses nationales). Les personnels de ces différents organismes ne sont donc, pour la plupart, pas fonctionnaires.

C’est le 19 octobre 1945 que le gouvernement de Gaulle institue la Sécurité Sociale par ordonnance. La Sécurité Sociale est un fondement de la société et de l’économie française contemporaine assis sur les cotisations sociales prélevées sur les salaires et non, comme le National Health Service britannique, sur l’impôt fiscal.

La Sécurité sociale a versé 470 milliards d’euros de prestations sociales en 2018, soit l’équivalent de 25 % du PIB français. Les principales dépenses de la Sécurité sociale sont les prestations pour la branche maladie du régime général (198,3 milliards d’euros) et les prestations pour la branche vieillesse du régime général (126,3 milliards). Le solde du régime général et du FSV est déficitaire depuis 2001. La Sécurité sociale est principalement financée par les cotisations sociales (54,2 %), prélevées sur les actifs et les entreprises, et la CSG (26,2 %). Les ménages (48,1%) et les entreprises (43,1 %) sont les principaux financeurs de la Sécurité sociale4. Environ 150 000 salariés travaillent au sein des différents organismes de la Sécurité sociale afin d’assurer son fonctionnement au près de ses 65 millions d’assurés.


À partir du Moyen Âge, certaines corporations organisent une assistance, limitée, entre les professionnels qui y adhèrent. L’abolition des corporations par le décret d’Allarde, en 1791, met fin à ce premier dispositif d’entraide, professionnel et privé. Il est néanmoins remplacé par des « sociétés de secours mutuel », qui sont reconnues et strictement règlementées par une loi Humann du 22 juin 1835. Elles sont par la suite libérées du contrôle de l’administration et encouragées par la loi du 1er avril 1898, également appelée Charte de la mutualité8. Cette loi fonde les principes du mutualisme, tels qu’on les retrouve aujourd’hui dans le code de la mutualité. Les mutuelles peuvent dès lors proposer des prestations à tous, bien qu’elles restent trop coûteuses pour la population.

En marge du mouvement mutuel, privé, volontaire et libre, le législateur crée également des dispositifs d’aide sociale, subjectifs et personnels, qui tendent à créer un principe de solidarité nationale. La loi du 25 juillet 1893 créé une assistance médicale gratuite pour tout citoyen malade et indigent.

La loi du 9 avril 1898 facilite considérablement l’indemnisation des victimes d’un accident du travail. Cette loi sera renforcée par celle du 25 octobre 1919 relatives aux maladies professionnelles. Entretemps, la loi du 27 juin 1904 crée le service départemental d’aide sociale à l’enfance, tandis que la loi du 14 juillet 1905 crée un dispositif d’assistance aux personnes âgées infirmes et incurables.

En parallèle, d’autres initiatives privées se mettent en place, comme la création en janvier 1918 d’une « caisse de compensation » par Émile Marcesche, embryon des futures caisses d’allocations familiales. Elles sont mises en place plus tard, par la loi du 11 mars 1932 qui prévoit des allocations couvrant les charges familiales, financées par des versements patronaux.

Le développement des assurances au début du XXe siècle est encouragé par le législateur. Organisations de droit privé comme les mutuelles, les assurances s’en distinguent cependant par leur but lucratif. La loi du 9 avril 1898 encourage l’employeur à s’assurer pour faire face aux demandes d’indemnisations de ses salariés accidentés. Un premier système d’assurance vieillesse devient obligatoire pour les salariés par la loi sur les retraites ouvrières et paysannes du 5 avril 1910, mais le montant des retraites demeure très bas et l’âge de la retraite, 65 ans, est très élevé par rapport à l’espérance de vie des ouvriers à cette époque.. La loi du 5 avril 1928 permet aux salariés, de droit privé, ayant un contrat de travail de bénéficier d’une assurance maladie, maternité, invalidité, vieillesse et décès. La loi du 30 avril 1930 permet aux agriculteurs de bénéficier d’un régime particulier. On parle même de rendre l’assurance obligatoire, et de donner à l’État le monopole de cette assurance.

Le dispositif existant en 1939 est bouleversé par la Seconde Guerre mondiale, et son cortège de problèmes financiers et d’exacerbation des tensions politiques, mais aussi d’occasions pour qui sait les exploiter. En 1940, Pierre Laroque et Alexandre Parodi poussent, au cabinet de René Belin, les projets de nationalisation générale (comme leur contemporain William Beveridge) qu’ils avaient déjà avant-guerre. De la loi du 16 août 1940 sur la réorganisation économique ne sort effectivement que l’allocation aux vieux travailleurs salariés, mais on y distingue déjà les bases de ce que sera la Sécurité sociale. P. Laroque (pour ses origines juives) et A. Parodi (pour son opposition au régime) sont évincés du régime de Vichy. Ils deviennent résistants et on les retrouve portant le même projet au Conseil national de la Résistance. Celui-ci intègre à son programme « un plan complet de sécurité sociale visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se le procurer par le travail, avec gestion appartenant aux représentants des intéressés et de l’État ». Le Conseil national de la Résistance est dissout, par définition, au retour du gouvernement d’Alger à Paris en Août 1944. Au Royaume-Uni, le rapport Beveridge jette les grands principes de l’unification de la Sécurité sociale dès 1942. Ambroise Croizat est ouvrier métallurgiste et cégétiste. Il explique que « la retraite ne doit plus être l’antichambre de la mort, mais une nouvelle étape de la vie ». Ambroise Croizat fut élu député communiste de Paris durant le Front populaire ; il y forgea les grands « conquis » de mai, comme les congés payés mais aussi la semaine de 40 heures et la loi sur les conventions collectives dont il est l’un des fondateurs. Arrêté en 1939, il se retrouve en Algérie en 1943 et y est libéré en février suite au débarquement allié en Afrique du nord. À la tête d’une commission réunissant des parlementaires et des médecins, Ambroise Croizat travaille dès l’été 1943 à ce qui va devenir la Sécurité sociale. Au titre de la CGT, à partir de novembre 1943, il siège à l’Assemblée consultative provisoire, et de 1945 à 1946 c’est en tant que ministre du travail qu’il met en place le projet, avec l’aide du ministre de la santé, François Billoux et de Pierre Laroque.

C’est par ce travail collectif qu’aboutissent les ordonnances des 4 et 19 octobre 1945 qui instituent la Sécurité sociale.

Le plan mis en œuvre ne généralise pas et n’uniformise pas les prestations, ne remet pas en cause les structures existantes, mais il impose un « régime général » à tous ceux n’étant pas inclus dans les « régimes spéciaux ».

La conception originelle de la Sécurité sociale française répond à un modèle bismarckien et paritaire :

  • Elle est financée par les cotisations des employeurs et des salariés, soit un financement reposant essentiellement sur un mécanisme d’assurance payée par les actifs (à la différence du modèle anglais ou « beveridgien », où le financement repose essentiellement sur l’impôt payé par tous les contribuables) ;
  • Elle est gérée paritairement par l’ensemble des partenaires sociaux représentés par les syndicats de travailleurs et les organismes patronaux.
    Peu de temps après, la Constitution de la IVe République, adoptée par référendum, crée dans son préambule une obligation constitutionnelle d’assistance financière de la collectivité envers les citoyens, et notamment les personnes exposées aux risques sociaux les plus importants (mères, enfants, vieux travailleurs).

Il n’y a pas d’unification de la Sécurité sociale. Même si Pierre Laroque ambitionne de créer un unique régime de Sécurité sociale, les salariés et leurs syndicats déjà couverts par des régimes particuliers pré-existants (mineurs, marins, fonctionnaires, agriculteurs, artisans, commerçants, cadres) y étaient attachés. Finalement, la loi du 22 mai 1946 limite le « régime général » aux salariés de l’industrie et du commerce.

Le régime des étudiants — pourtant créé postérieurement (23 septembre 1948) au régime général — ne lui est pas intégré et devient un régime spécifique dont la gestion est confiée à un opérateur privé, puis plus tard, à plusieurs opérateurs privés se trouvant en situation de concurrence.

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Sources : Wikipédia, YouTube.

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