La cité antique de Troie (Turquie).

Troie (en grec ancien Τροία / Troía et en turc Truva), Ilios (en grec ancien Ἴλιος, Ílios) ou Ilion (en grec ancien Ἴλιον, Ílion), ou encore Ilium en latin, est une cité antique d’Asie Mineure.

Elle est le lieu principal des événements mythiques de la guerre de Troie dans les poèmes épiques homériques l’Iliade et l’Odyssée. Elle est au centre des légendes du cycle troyen (mythologie grecque) et notamment de la guerre de Troie.

Refondée par les éoliens quelques siècles après son abandon, sur l’emplacement de la cité-palais de l’âge du bronze, Ilion poursuit sa vie de polis grecque au cours des siècles de l’Antiquité. Elle devient un lieu de passage prestigieux où l’on honore Athéna Ilias et les héros de la guerre de Troie tombés au combat et réputés être enterrés dans les environs de la ville. La cité fut choyée et courtisée par de nombreux souverains hellénistiques ainsi que par Rome qui y situait les origines de son peuple, issu du prince troyen légendaire Énée.

Troie, selon la plupart des spécialistes du monde hittite et anatolien de l’âge du Bronze, est rapprochée de la cité de 𒌷𒃾𒇻𒊭 Wilusa mentionnée dans les tablettes hittites et dont le roi contrôlait un territoire à l’ouest de ces derniers, près de Lesbos et du fleuve Caïque, la Troade. La région est aussi mentionnée dans ces documents diplomatiques, sous le nom de 𒋫𒊒𒄿𒊭 Truwisa.

Son emplacement a été recherché depuis le xixe siècle. Située à l’entrée de l’Hellespont, non loin de la mer Égée, au nord-ouest de la péninsule anatolienne dans la région appelée Troade, la ville de Troie est aujourd’hui localisée sur le site archéologique de Troie (Hisarlik, en turc Hisarlık). Le lieu, occupé depuis le IVe millénaire av. J.-C., partiellement abandonné à la fin de l’âge du bronze, fut par la suite l’emplacement d’une cité grecque de l’époque classique, puis hellénistique et romaine.


Si le site de Troie – Ilion – est resté fréquenté et identifié comme tel durant toute l’Antiquité et si la Troade est une région bien identifiée par les voyageurs de l’époque moderne, la localisation exacte du site de Troie s’est perdue à la fin de l’Antiquité et au début du Moyen Âge : la communauté civique grecque puis romaine abandonne le site au vie siècle av. J.-C. Un évêché y subsiste jusqu’au IXe siècle, mais l’appellation d’Ilion se perd progressivement. L’identification du site devient l’objet d’une enquête historique et archéologique au cours du XVIIIe siècle.

Les premiers siècles de l’époque moderne apportent leur lot de voyageurs à la recherche de l’antique cité de Troie. Aux XVIe et XVIIe siècles, Pierre Belon et Pietro Della Valle situent Troie à l’emplacement d’Alexandrie de Troade, qui se situe à 20 km au sud d’Hissarlik.

Au milieu du XVIIIe siècle, un regain d’intérêt pour la culture classique se manifeste. L’exploration archéologique fait ses premiers pas dans le cadre de la redécouverte de grandes villes de l’Antiquité comme Pompéi et Herculanum, respectivement découvertes en 1748 et 1738. Les récits d’Homère et de Virgile amènent quelques voyageurs à rechercher les ruines de Troie. En 1776, l’aristocrate français Choiseul-Gouffier, analysant l’Iliade, suggère que les ruines de Troie pourraient être enterrées sous un monticule proche d’un petit hameau turc, Bunarbashi, situé à 5 km d’Hissarlik, à dix kilomètres de la mer Égée et à treize kilomètres du détroit des Dardanelles. Plus tard, cette théorie est popularisée par son collaborateur Jean-Baptiste Le Chevalier et trouve crédit parmi les hellénistes du xixe siècle. Il publie son hypothèse dans Voyage de la Troade et la localisation qu’il proposa resta majoritairement admise pendant près d’un siècle.

En 1801, les savants britanniques Edward Daniel Clarke et John Martin Cripps avancent l’hypothèse que la cité doit se trouver sous une autre colline, plus proche de la côte, que les Turcs appellent Hissarlik. D’autres travaux, notamment ceux du journaliste écossais Charles Maclaren (1822) et de Gustav von Eckenbrecher (1842), vont dans le même sens.

Au fil des ans, plusieurs explorateurs passionnés se rendent sur place pour rechercher des traces attestant l’existence de la guerre de Troie. En 1810, Lord Byron donne une lecture publique de l’Iliade sur les lieux supposés des événements. En 1847, Thomas Burgon publie un rapport sur des fragments de céramiques trouvés dans la zone d’Hissarlik. Grâce à ses recherches, des universitaires se montrent moins sceptiques, et c’est ainsi que Charles Thomas Newton, par la suite conservateur des antiquités grecques et romaines du British Museum, compare les découvertes de Burgon avec les céramiques trouvées en Égypte et arrive à la conclusion qu’elles datent du XIVe siècle av. J.-C.

En 1863-1865, le Britannique Frank Calvert, dont la famille était propriétaire de la moitié de la colline d’Hissarlik, vérifie que celle-ci est une élévation artificielle formée principalement par les décombres et les ruines enterrés qu’il localise en partie au cours de quatre fouilles sommaires. La contribution de Calvert dans la découverte archéologique de Troie a été longtemps éclipsée par le succès médiatique et l’aura de Schliemann ; son apport décisif a cependant été réévalué depuis la fin du xxe siècle. Autodidacte, Calvert mène de nombreuses fouilles en Troade, notamment à Hissarlik où il organise des prospections avec son frère, agent consulaire pour les États-Unis dans la région. C’est son travail et ses nombreuses explorations à Hissarlik qui achèvent de convaincre Schliemann qu’il s’agit bien du site de Troie.

En 1868, l’armateur, marchand et archéologue amateur Heinrich Schliemann rend visite à Calvert pour lui demander l’autorisation de faires des fouilles à Hissarlik. Il est alors convaincu que les événements décrits dans l’Iliade et l’Odyssée peuvent être vérifiés archéologiquement. Sa propre fortune finance les fouilles. Il divorce puis se remarie avec la jeune Sophia qui l’accompagne dans les nombreuses campagnes de fouilles du site.

En 1871-1873 et 1878-1879, Schliemann fait creuser de grandes tranchées. Il met alors au jour une série de villes empilées et enchevêtrées les unes dans les autres au sein d’une colline artificielle de vestiges archéologiques accumulés au cours des millénaires. Il dévoile de nombreux édifices, allant de l’âge du Bronze à l’époque romaine tardive, ainsi que de nombreuses inscriptions en grec et en latin. Il est le premier à séquencer le site en neuf phases, de Troie I à Troie IX. Cette stratigraphie est toujours utilisée, bien que révisée et ayant fait l’objet de subdivisions plus précises.

Dans les ruines de la Troie II, il découvre notamment de nombreux objets précieux en or, argent, bronze, que Schliemann baptise « trésor de Priam ». Cet ensemble considérable de pièces d’orfèvrerie et de bijouterie l’amène à penser que le niveau de Troie II est le niveau de la Troie homérique. Cependant, les niveaux de Troie II sont bien plus anciens que les datations généralement retenues pour les événements décrits par Homère qui correspondent en réalité à la période d’occupation Troie VII.

L’identification du site d’Hissarlik à la cité légendaire de Troie est alors largement diffusée et reçoit l’assentiment et l’approbation d’une grande partie de la communauté scientifique, notamment du fait des inscriptions en grec et en latin qui mentionnent toutes le nom de la cité à l’époque classique, hellénistique et romaine : Ilion / Ilium, le nom antique le plus répandu de Troie.

Le « Trésor de Priam » découvert par Schliemann dans les ruines de Troie II.
À l’invitation de Schliemann, Wilhelm Dörpfeld rejoint les fouilles en 1893. Il hérite de la direction de celles-ci et mène des fouilles pendant plusieurs décennies, concentrant ses travaux sur Troie VI.

Dans les années 1930, les fouilles sont encadrées par l’Université de Cincinnati, sous la direction de Carl Blegen. Ils appliquent aux fouilles de Troie un cadre méthodologique moderne, scientifiquement plus poussé que la méthode Schliemann. Blegen publie un phasage étendu de l’acropole d’Hissarlik : il divise les 9 villes de Troie de Schliemann en 46 subdivisions plus fines des vestiges.

Les fouilles de Troie sont dirigées ensuite, de 1988 au début des années 2000, par Manfred Korfmann, à la tête d’une équipe binationale mêlant des membres de l’Université de Cincinnati et de l’Université de Tübingen. Korfmann confie à Charles Brian Rose les fouilles des niveaux postérieurs à l’âge du Bronze. Les travaux de Korfmann et de Rose permettent progressivement d’affiner le faciès archéologique et la datation des vestiges de chaque phase, et permettent de mettre au jour de nouveaux édifices. Le site est classé au patrimoine mondial de l’Unesco en 1988 car il constitue une trace historique majeure des contacts entre Anatolie et monde méditerranéen antiques, de par ses échos dans la littérature au cours des millénaires, et par la formidable architecture qui s’y trouve toujours, visitable par le public.

Si le nom actuel de Troie est unanimement utilisé, comme tel et dans ses variantes, dans la plupart des langues modernes, le nom antique de Troie est multiple, selon la langue, le type de documents historique (tablette, poésie, inscription, monnaies, etc.) dans lequel la cité est nommée, ou l’époque de l’Antiquité à laquelle on s’intéresse (âge du bronze, époque archaïque, époque romaine).

Dans les années 1920, le suisse Emil Forrer propose d’identifier les toponymes hittites Wilusa et Taruisa, deux noms attestés dans la documentation en langue hittite sur tablette d’argile, avec les noms de Ilion et de Troia respectivement. C’est lui le premier à proposer la transcription du nom de souverain anatolien Alaksandu en Alexandros (par ailleurs autre nom de Pâris dans l’Iliade). Ce nom est en effet mentionné dans un traité en langue hittite.

En 1999, après plusieurs décennies de débats sur ces identifications, Trevor Bryce, un hittitologue australien, propose dans son ouvrage The Kingdom of The Hittites, de localiser le royaume de Wilusa dans la région désignée dans la lettre écrite par un roi client des Hittites, un certain Manapa-Tarhunda, au souverain hittite, vers 1295 av. J.-C., et faisant allusion à « une terre au-delà de la rivière Caïque et près de l’île de Lesbos ». La lettre mentionne par ailleurs un autre souverain de Wilusa, Piyama-Radu, selon une autre lettre écrite par un certain Tawagalawa. Le nom Piyama pourrait avoir donné le nom de Priam dans les épopées homériques.

La « lettre de Tawagalawa » (CTH 181) contient la correspondance entre un roi hittite, Hattusili III (règne : 1265–1240 av. J.-C.) ou Muwatalli (règne : vers 1296–1272) et un « roi des Ahhiyawa » au sujet d’un épisode militaire conflictuel avec Wilusa. L’identification des Ahhiyawa avec les Achéens d’Homère demeure controversée. Le roi de Milet, autrement appelée Milawata dans la correspondance diplomatique hittite est, selon cette lettre, l’auteur d’une campagne militaire contre Wilusa, alliée historique du royaume des Hittites. Tawagalawa est par ailleurs la transcription, en hittite, du nom grec Étéocles, Etewoklewes dans les sources grecques mycéniennes.

Si cette identification Ilios – Wilusa / Troia – Taruisa est toujours pour l’heure source de débats historiographiques et linguistiques dans la communauté des linguistes et des historiens, elle demeure très majoritairement admise, et fournit ainsi un arrière-plan géopolitique et diplomatique de premier intérêt pour la compréhension des relations entre états vassaux anatoliens, grands royaumes orientaux, et monde mycénien au cours du IIe millénaire, censément l’époque à laquelle se serait déroulée la légendaire guerre de Troie.

Les inscriptions égyptiennes du Nouvel Empire évoquent quant à elles un peuple appelé les Tursha / Teresh (T-R-S), issu des Peuples de la Mer et ayant attaqué l’Égypte pendant les XIXe et XXe dynasties. C’est la proximité phonétique entre la région de la Taruisa hittite et les Tursha / Teresh en égyptien qui incite les historiens à penser qu’il s’agirait peut-être d’un seul et même peuple, venu de l’Anatolie occidentale et ayant mené des expéditions maritimes. Une inscription de Deir el-Medina évoque ainsi la victoire de Ramsès III sur les peuples de la mer, dont ces Tursha ([twrš3] en égyptien). Une stèle de Merenptah commémore elle une victoire sur les Teresh ([trš.w] en égyptien) vers 1220 av. J.-C.

L’histoire de Troie est l’objet de plusieurs traditions. La cité, au centre du cycle troyen, est très largement mentionnée dans le cadre de légendes, mythes et guerres dont l’historicité est discutable, mais dont le contenu raccroche la ville à la très grande majorité des héros grecs et à de nombreux dieux. Sur la fondation, l’histoire et la destruction de la Troie légendaire, les auteurs antiques ont abondamment écrit, non seulement Homère, mais aussi de nombreux auteurs de la tradition post-homérique, jusqu’à la fin de l’époque romaine et même au cours de l’époque byzantine.

Commentaires sur les personnages, interprétations concurrentes, généalogies modifiées, ordre chronologique des événements sont autant de points sur lesquels les auteurs se livrent à de nombreux commentaires érudits. Ces légendes font l’objet de nombreuses études d’analyse du mythe, selon un angle comparatiste, structuraliste, fonctionnel, politique, faisant de l’histoire de Troie un réceptacle fécond pour l’étude des catégories mentales grecques antiques.

Dans la mythologie grecque, Ilos (en grec ancien Ἶλος / Îlos), parfois nommé Ilion, fils de Tros et de Callirrhoé, est le fondateur mythique de Troie (ou Ilion). Il est marié à Eurydice, fille d’Adraste, de qui il a un fils, Laomédon et une fille, Thémisté.

Son père, Tros (en grec ancien Τρώς / Trốs) est le héros éponyme de la Troade et de Troie. Tros était le fils d’Érichthonios et d’Astyoché, et donc le petit-fils de Dardanos, héros éponyme de la Dardanie, fils de Zeus et de la pléiade Électre38. Dardanos avait fui le déluge et trouvé asile auprès du roi Teucros de Phrygie. Après la mort de Teucros, il devient le seul héritier, en se mariant avec Batia, la fille du roi Teucros.

Selon le pseudo-Apollodore, Ilos prit part à des jeux organisés par le roi de Phrygie où il remporta le concours de lutte. Il reçut en récompense cinquante jeunes hommes et cinquante jeunes filles. Le roi, faisant suite à un oracle, lui donna également une vache en lui disant de fonder une ville là où l’animal se coucherait ; cela se produisit finalement sur une colline nommée Até (« Folie », d’après la déesse éponyme). Se conformant à l’oracle, Ilos entreprit de dessiner les fondations d’une ville, et pria Zeus de lui envoyer un signe afin de témoigner de sa faveur. Tombant du ciel, la statue du Palladium (représentant Pallas Athéné en armes) apparut devant sa tente. Il décida de consacrer un temple à la déesse afin de l’honorer (la statue conférait l’inexpugnabilité à Troie).

Selon une autre légende, rapportée par Plutarque, il devint aveugle en sauvant le Palladium d’un incendie (il était interdit aux hommes de le regarder). Il retrouva par la suite la vue par l’entremise de sacrifices expiatoires.

Dans l’Iliade, il est fait référence, à de nombreuses reprises, au tombeau d’Ilos situé dans la plaine de Troie à proximité d’un gué pour traverser le Scamandre. Au ive siècle av. J.-C., le philosophe Théophraste mentionne des arbres vieux et vénérables existant sur la tombe d’Ilos à Ilion.

La cité est parfois nommée Pergame, du nom de sa citadelle (Πέργαμος / PérgamosPi 1,Ap 1,39). Pergame est le surnom de Troie et il ne faut pas le confondre avec le nom d’une autre forteresse, Pergame plus au sud.

Laomédon, le fils d’Ilos, lui succède sur le trône comme second roi mythique de Troie (daté par certains des XIVe et XIIIe siècles) (voir paragraphe Situation historique). Il est le père de Priam, roi de Troie au cours de la guerre contre les Grecs, et d’Hésione qu’il fait enchaîner à un rocher, la sacrifiant au monstre marin Céto envoyé par Poséidon en colère. Elle est sauvée grâce à l’intervention d’Héraclès. Cependant, l’attitude de Laomédon fut à l’origine de bien des troubles pour Troie : son histoire met souvent en avant sa mauvaise foi et ses parjures à l’encontre des dieux et d’Héraclès, du fait des promesses non tenues par le roi envers les dieux.

Poséidon et Apollon bâtissent les remparts de Troie. Pompéi, Maison du Poète Tragique, exèdre 10, panneau central du mur ouest. Laomédon fait rapidement construire le mur de Troie qui encercle sa ville et doit la rendre inviolable.

Ces remparts suscitèrent l’admiration par leur hauteur et leur réputation d’inviolabilité. On attribua leur construction aux dieux Apollon – le dieu tutélaire de la région – et Poséidon – le dieu de la mer.

Homère nous apprend qu’ils avaient été, l’un et l’autre, exilés par Zeus de l’Olympe, pour une année entière. Ils furent contraints par Zeus de se faire serviteurs chez les hommes et de travailler contre un salaire. Ils arrivent chez Laomédon et doivent alors obéir à ses ordres. Refusant cependant de les rétribuer, Laomédon attire leur courroux sur lui et ses sujets.

Toujours selon Homère, c’est seulement Poséidon qui érige les murailles troyennes alors qu’Apollon fait plutôt paître ses troupeaux près du mont Ida de Troade. Ainsi Troie est-elle parfois surnommée la Citadelle de Poséidon. La tradition fait tantôt des deux dieux les constructeurs du mur, tantôt d’Apollon un simple berger et Poséidon le bâtisseur comme si le premier était honoré et soustrait du servage, l’autre devant travailler à la construction du mur. Laomédon fait appel à un troisième constructeur selon le poète Pindare : alors que les dieux s’apprêtent à achever la ceinture murée de la ville telle une couronne, le roi d’Égine, Éaque, dont le royaume insulaire se trouve au sud d’Athènes en Grèce, se voit appelé — voire sommé — et associé au travail divin.

L’épisode de la construction des murailles de Troie a fait l’objet de nombreux commentaires : Pierre Commelin suggère que c’est Apollon qui érige les murailles tandis que les grandes digues que Laomédon fait aussi bâtir contre les vagues, passent pour l’ouvrage de Poséidon.

Selon Eustathe de Thessalonique, érudit et ecclésiastique byzantin qui commente les récits d’Homère au XIIe siècle, deux ouvriers auraient œuvré à construire le mur sans en attendre de salaire et auraient voué leur travail aux deux dieux Poséidon et Apollon, c’est à partir de cela que le mythe se serait développé. Cette lecture s’inscrit dans une perspective évhémériste. Eustathe de Thessalonique démythifie plus avant l’épisode de la construction des murailles en suggérant que Laomédon aurait pris les richesses des temples d’Apollon et de Poséidon pour financer son mur et le développement de sa ville, d’où la colère des dieux dans les légendes ; une scholie commente le mythe en affirmant que les poètes antiques ont simplement personnifié les dieux alors que Laomédon aurait simplement vendu sur la place publique les richesses des fêtes sacrificielles dédiées et amassées dans les temples consacrés à ces dieux dans la ville haute (l’acropole) ; Laomédon se serait ainsi rendu coupable de prédation sur les biens des temples et aurait détourné leurs richesses : Laomédon aurait promis de grandes constructions aux dieux et en aurait utilisé le bénéfice pour le dépenser afin de terminer son mur.

Paléphatos cité par Eustathe de Thessalonique, partisan d’une lecture evhémériste du mythe de la construction des remparts de Troie, ne croit pas non plus à la participation des dieux à la construction de l’édifice. Il considère lui que c’est parce que Laomédon a fait usage de la richesse du temple de ces divinités, afin de construire les fondations de ses murs, que ces ouvrages auraient donné une apparence concrète et matérielle aux dieux. Selon lui, si Poséidon est associé à la construction du rempart, c’est en raison de l’eau utilisée pour faire de l’argile ou du gypse un liant pour les pierres (par le biais d’un enduit argileux ou d’un mortier de chaux). De cette même façon, selon lui, la chaleur ambiante dispensée par le Soleil fait consolider l’ensemble en le desséchant donc et ainsi Apollon devient acteur de la construction du mur par son pouvoir solaire.

L’introduction du personnage d’Éaque participant aux côtés des dieux Apollon et Poséidon à la construction des murs est, pour certains (peut-être le grammairien Didymus Chalcenterus), un ajout de Pindare pour justifier un point faible dans la muraille — et par la même occasion magnifier les portions divines — et par lequel cette partie du mur, et seulement elle, permettra de justifier l’entrée des Grecs dans la cité plus tard. Le poète thébain a voulu éviter ce qui lui semblait un manque de respect ou un affaiblissement de l’image grandiose des dieux. On retrouve plus tard également l’évocation du personnage d’Éaque chez Euphorion de Chalcis.

La guerre de Troie est l’épisode le plus célèbre de la mythologie antique. Elle fait l’objet de représentations constantes dans les arts, de références systématiques dans la poésie, l’épopée, la littérature, l’écriture historique et la géographie. Tous les personnages ayant participé à cet épisode sont reliés par un dense réseau de relations familiales, divines et politiques, à l’ensemble du monde Méditerranéen. De nombreuses cités grecques s’enorgueillissent d’avoir eu des combattants sur les plages de Troie. Il s’agit d’un mythe structurant et fondateur pour les identités politiques et pour l’identité culturelle grecque.

Le règne de Priam est marqué par l’épisode légendaire le plus fameux de la mythologie grecque : la guerre de Troie. Elle fait suite à l’enlèvement d’Hélène par Alexandre-Pâris, fils de Priam. Le conflit commence par le voyage de Ménélas et de Nestor, qui parcourent la Grèce pour rappeler les anciens prétendants à leur promesse.

Accompagné d’Agamemnon et de Palamède, Ménélas va trouver à Ithaque Ulysse, qui tente de se défiler avant de se rallier à l’expédition. Selon les auteurs tardifs, le devin Calchas avait prédit que Troie ne pourrait être prise sans Achille, fils de Thétis. Sa mère, pour le protéger de la guerre, le cacha, déguisé en fille, chez Lycomède, roi de Skyros. Il est reconnu grâce à une ruse Ulysse, qui excita son instinct de guerrier et le poussa à se révéler en faisant sonner la trompette aux portes de la cité. Homère raconte simplement que Nestor et Ulysse, étant venus à Phithie pour recruter des troupes, se virent confier Achille par son père.

D’autres rois et héros, tels que les deux Ajax, Diomède et Tlépolémos les rejoignirent encore. Idoménée, roi de Crète, lui aussi ancien prétendant d’Hélène, qui avait amené un nombre considérable de navires, obtint le commandement des gardes. Toutes les troupes se rassemblèrent à Aulis avant de partir pour l’Asie.

La flotte achéenne accoste en Mysie, non loin d’Élée. Ils affrontent d’abord Télèphe, roi de Mysie et fils d’Héraclès. Après des combats acharnés, Télèphe apprend qui sont les chefs de l’armée ennemie et le combat cesse alors. La flotte grecque repart chez elle après cette première expédition, et se repose pendant huit ans. Cette première expédition était relatée dans les Chants cypriens, première épopée du Cycle troyen, attribués à Stasinos et composés au VIe siècle av. J.-C. ; cette épopée est presque entièrement perdue, mais on en connaît un résumé transmis beaucoup plus tard dans la Chrestomathie de Proclos au Ve siècle.

Selon Eschyle (Agamemnon) et Euripide (Iphigénie à Aulis), c’est là qu’Agamemnon, à l’initiative de Calchas, le meilleur des devins, sacrifie sa fille Iphigénie pour obtenir des vents favorables. La fille d’Agamemnon est attirée par un piège à Aulis : on lui promet alors un mariage avec Achille. En souvenir de cette légende, le roi de Sparte Agésilas II sacrifia une biche à Aulis avant d’entreprendre son expédition d’Ionie en 397 av. J.-C.

La flotte grecque s’embarque après la mort d’Iphigénie et arrive devant Troie. Les combats débutent immédiatement, Protésilas meurt d’ailleurs le premier parmi les grecs sous les coups d’Hector. Les achéens organisent alors la cérémonie funèbre en l’honneur de celui-ci. Ils sont attaqués par surprise par Cycnos, fils de Poséidon; il est tué par Achille, qui l’étrangle avec la jugulaire de son casque.

Les Grecs installent leur camp sur la plage qui s’étend devant Troie ; une ambassade achéenne pour réclamer Hélène échoue.

Une fois les Troyens retranchés derrière leurs murailles, Achille s’emploie à leur couper les vivres et à rompre le lien de ravitaillement entre Troie et les communautés sujettes des environs. Il attaque et réduit ainsi onze cités d’Anatolie, tributaires de Troie. C’est dans Lyrnessos50, l’une de ces villes, lors de la dixième année de siège, qu’il reçoit pour part d’honneur Briséis, tandis qu’Agamemnon reçoit Chryséis lors du sac de Thèbe sous le Placos.

C’est à ce moment que commence le récit de l’Iliade. Au chant I, la peste envoyée par Apollon frappe le camp grec et le devin Calchas, encouragé par Achille, révèle qu’Apollon a puni Agamemnon car celui-ci avait refusé de rendre la captive Chryséis à son père Chrysès, prêtre d’Apollon dans une ville de Troade. Contraint de céder, Agamemnon furieux réclame pour son compte une autre récompense. Agamemnon décide de prendre Briséis, le butin d’Achille. En colère, Achille se retire et jure sur le sceptre d’Agamemnon de ne pas retourner au combat. Zeus, sur sa demande, donne l’avantage aux Troyens tant qu’il sera absent du champ de bataille.

Privés de son appui, les Grecs essuient défaites sur défaites. Nestor, Phénix et Ulysse viennent implorer Achille qui reste ferme. Patrocle, ému par les malheurs de ses compatriotes, obtient l’autorisation d’Achille de sauver les Grecs en portant ses armes. La manœuvre réussit mais Patrocle, malgré sa promesse à Achille, se livre à une poursuite et est tué par Hector, frère de Pâris, qui prend les armes d’Achille comme butin. Furieux contre lui-même et humilié, Achille décide de se venger. Héphaïstos lui forge de nouvelles armes, avec lesquelles il sort à la recherche d’Hector.

Revêtu de son armure divine, Achille reprend le combat et tue un grand nombre de Troyens sur son passage, à tel point que les eaux du fleuve voisin, le Scamandre, sont souillées de cadavres. Achille rencontre enfin Hector, le défie et le tue avec l’aide d’Athéna. Il traîne sa dépouille autour de la ville avec son char avant de la ramener dans le camp achéen.

Achille fait preuve d’humanité et laisse alors le roi Priam emporter le corps de son fils afin qu’il lui accorde des funérailles honorables. Il obéit ainsi à sa mère, envoyée par les dieux qui étaient mécontents du traitement infligé à la dépouille du prince troyen.

Selon Virgile, Penthésilée, reine des Amazones, et Memnon, qui est selon certains roi d’Éthiopie, font ensuite leur arrivée sur le champ de bataille. Penthésilée est tuée par Achille, mais il tombe instantanément amoureux du cadavre, ce qui lui vaut la moquerie de Thersite qu’il tue sur le champ, s’attirant la vengeance d’Antiloque. Antiloque affronte Memnon et se fait tuer par lui. Achille le venge en tuant Memnon.

Sur une idée d’Épéios ou d’Ulysse, les Grecs construisent un énorme cheval en bois, dans lequel ils cachent des guerriers, au nombre desquels se trouvent notamment Ulysse, Ménélas et Néoptolème. Les Grecs brûlent ensuite leur camp et feignent de s’embarquer sur leurs navires pour la Grèce mais se dissimulent en réalité à quelques encablures, derrière l’île de Ténédos.

Les Troyens se disputent sur le sort à faire du cheval de bois : vrai cadeau ou piège, les uns veulent le faire entrer, d’autres s’en débarrasser et le brûler, notamment Laocoon. Il est tué avec ses fils par deux serpents qui se réfugient ensuite dans le temple d’Athéna. L’incident est perçu comme un présage de la colère de la déesse, qui doit être apaisée. Ils décident alors d’ouvrir les murs de la cité pour faire entrer l’offrande. Malgré les prédictions de Cassandre, les bruits d’armes à l’intérieur du cheval, et les avertissements de Laocoon, le piège est alors prêt à se refermer sur les Troyens. Une fois la nuit venue, l’attaque commence et Troie est ravagée, incendiée, la famille royale massacrée.

La tradition historiographique grecque antique, qui considère que la Guerre est un événement historique dont la réalité est indiscutable, propose les dates suivantes pour les événements de la guerre de Troie. L’intervalle le plus populaire parmi ces auteurs est situé entre 1194 et 1184 av. J.-C. D’après les calculs d’Ératosthène, la prise de Troie par les Achéens a lieu dans la nuit du 11 au 12 juin 1184 av. J.-C. lors d’une éclipse solaire.

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Sources : Wikipédia, YouTube.

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