La cathédrale Saint-Pierre de Beauvais

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La cathédrale Saint-Pierre de Beauvais, commencée en 1225, est connue comme ayant la hauteur sous voûte la plus élevée de l’âge gothique : 48 mètres. Si la cathédrale Notre-Dame d’Amiens est la plus vaste de France, Saint-Pierre de Beauvais demeure à jamais la plus haute d’Europe. Cette hauteur, voulue dès l’origine, a fragilisé tout l’édifice depuis le Moyen Âge. Au long des siècles, les financements qui auraient dû être consacrés à l’achèvement de l’édifice (nef, chœur et flèche) ont été affectés aux réparations. Après un premier éboulement des voûtes du chœur en 1284, c’est la flèche, achevée en 1566, qui s’est écroulée en 1573, le jour de l’Ascension. Celle-ci disparue, on n’eut jamais les moyens de construire une nef. Seule la première travée existe.

Aujourd’hui, la cathédrale de Beauvais reste un édifice fragile. Sa hauteur augmente sa prise au vent et sa vulnérabilité aux tempêtes. En visitant Saint-Pierre, vous verrez des étais soutenir les bras du transept ainsi qu’un puissant contrefort de bois renforcer l’entrée du déambulatoire nord. Les photos de cette page en donnent des illustrations.
Si l’attrait de la cathédrale réside dans son gigantisme, il repose aussi dans son horloge astronomique et dans les vitraux. Saint-Pierre de Beauvais invite le visiteur à une véritable histoire du vitrail du XIIIe siècle au XXe siècle. La plus ancienne verrière, dans la chapelle axiale Notre-Dame, date de 1240 (avec un arbre de Jessé et, comme à l’église Saint-Pierre de Saint-Julien-du-Sault, une histoire de la légende de Théophile). Les grandes verrières du chœur présentent de beaux vitraux à personnages des XIIIe et XIVe siècles. Les bras du transept, quant à eux, s’illuminent des magnifiques vitraux XVIe siècle des Le Prince (complétés par ceux de Max Ingrand au XXe). Les chapelles du déambulatoire offrent une variété, forte agréable à l’œil, de verrières médiévales et modernes. Cette page donne un très large aperçu de ces verrières.
Même si elle semble réduite parce qu’elle n’a pas de nef, la visite de la cathédrale de Beauvais suscite le même intérêt que pour les autres grandes cathédrales de France.

Epreuve de luxe de la cathédrale de Beauvais.

Commencée en 1225, la cathédrale de Beauvais fait partie de la seconde génération de l’âge d’or gothique. Chartres, Bourges, Reims sont déjà debout. Le chœur de Saint-Pierre fut achevé en 1272. En 1284, sans doute à cause de ses proportions colossales, une partie des voûtes s’effondra sur les travées droites. On rebâtit en consolidant : épaississement des murs et doublement des piliers au niveau des travées droites. La guerre de Cent Ans interrompit la suite de la construction.
En 1499, le maître maçon Martin Chambiges se vit confier l’élévation du transept. À la mort de ce brillant maître, son fils Pierre prit le relais et l’acheva.
L’édifice donne véritablement dans le gigantisme : 72,50 m de la chapelle axiale à la cloison qui ferme le transept, une largeur de transept de 58 m, une hauteur de voûte dans le chœur de 47 m.

En 1550, le chapitre de la cathédrale décide de faire construire la tour-lanterne et non pas la nef (peut-être pour que la cathédrale, comme ses voisines, se voie de loin…). Cette tour-lanterne, achevée en 1567, fait de Saint-Pierre de Beauvais l’édifice le plus haut de la Chrétienté (plus de 150m). Mais la fragilité de l’ensemble apparaît à tous. En 1572, on retire la croix de fer qui la surmonte : elle est jugée trop lourde. Enfin, le jour de l’Ascension 1573, la flèche s’écroule, entraînant avec elle toutes les parties voisines dans le transept et les voûtes. Heureusement sans faire de victimes. On reconstruisit l’ensemble, mais sans flèche. L’année 1604 vit les derniers travaux : le voûtement de la première travée de la nef et l’érection d’une palissade fermant l’église à l’ouest.

Saint-Pierre n’ira pas plus loin : par manque de finance et parce que, aux XVIIe et XVIIIe siècles, on préférait privilégier le décor intérieur.
A la Révolution, l’édifice perd une partie de son mobilier et l’orfèvrerie part à la fonte. Il devient simple église paroissiale. En 1822, Saint-Pierre redevient cathédrale et s’enrichit du patrimoine religieux dispersé dans le Beauvaisis. En 1842, l’architecte Ramée, des Monuments historiques, proposa de rallonger la cathédrale de deux travées à l’ouest pour contre-buter l’église. Son projet n’eut pas de suite. Au XIXe siècle, on n’entreprit que des travaux de restauration intérieurs et extérieurs, notamment sur les arcs-boutants. Si la première guerre mondiale passa sans heurts, le bombardement allemand de 1940 fit s’écrouler, ça et là, voûtes, toitures et vitraux restés en place. (En 1939, tous les vitraux représentant des scènes figurées avaient été mis à l’abri au château de Carrouges, dans l’Orne.)
En ce début de XXIe siècle, la cathédrale reste un édifice fragile face aux vents et aux tempêtes. En dehors des arcs-boutants du chevet qui sont cadenassés dans une véritable carapace de tirants de fer, des étais consolident, à l’intérieur, les bras du transept, et une vigoureuse armature de bois soutient les élévations au niveau de l’entrée du déambulatoire nord. Enfin, on envisage de rétablir les tirants métalliques intérieurs et extérieurs, mis en place par les architectes du Moyen Âge, et qui consolidaient l’édifice. Les romantiques du XIXe siècle, loin de s’imaginer que ces tirants participaient de l’ingéniosité médiévale, crurent intelligent et artistique d’en faire scier quelques-uns. On trouve un autre témoignage de cette incompréhension dans un ouvrage de l’abbé J.J. Bourassé, Les plus belles cathédrales de France, paru chez Alfred Mame et fils en 1880. À propos de la cathédrale, l’abbé écrit : «Malheureusement l’église de Beauvais porte toujours des traces des accidents qu’elle a soufferts. Des armatures en fer, visibles en beaucoup d’endroits, annoncent que la solidité n’est pas encore parfaite.» Visiblement, l’auteur ne se rend pas compte que l’armature en fer fait partie intégrante de cette solidité.

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Sources : La Cathédrale Saint-Pierre de Beauvais, Itinéraires du patrimoine, Patrimoine-histoire, Youtube.